Poème à Mia (28)

                      La poésie, est-ce ceci ?

Ce chuintement sous la mousse,

le chant clair de milliers d'oiseaux,

une senteur de jeune pousse

embaume le lit du ruisseau.

Il court, il saute vers la plaine

de talus en talus fleuris

sûr de son but, comme la Seine,

comme la Seine de Paris.

                     on peut préférer

Seigneur, quand froide est la prairie,

Quand, dans les hameaux abattus,

Les longs angélus se sont tus...

Sur la nature défleurie

Faites s'abattre des grands cieux

Les chers corbeaux délicieux.

                      ou

- Midi, ses forges, son grand ordre... Les promontoires ailés

 s'ouvrent au loin leur voie d'écume bleuissante.

Les temples brillent de tout leur sel. Les dieux s'éveillent dans

  le quartz.

Et l'homme de vigie, là-haut, parmi ses ocres, ses craies fauves,

  sonne midi le rouge dans sa corne de fer.

Midi, sa foudre, ses présages ;  Midi, ses fauves au forum, et son

  cri de pygargue sur les rades désertes !...

 Il peut exister une poésie sans rime ni régularité. Encore qu'il eût parfois utilisé, avec discrétion, ces deux outils, Saint-John Perse reste le seul à en avoir apporté la preuve.

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