Poison

Oui.

L'entends-tu cette rage silencieuse? La vois-tu cette invisible colère?

Tu la devines à peine, mais plus le temps passera, plus elle sera oppressante. À l'image d'un poison qui aurait été injecté dans tes veines, chaque fois que ma présence te sera proche, tu ressentiras vivement ce malaise. Je serai ton rappel. Tu as tout fait pour que ma colère soit tenace, tu seras servie.

Lentement cultivée, elle a germé délicatement. Je ne l'ai moi-même pas senti poindre, ou peut-être n'en ai-je simplement pas eu conscience. Je l'ai laissé faire, pensant ne pas me laisser envahir, puis petit à petit, tu as arrosé cette plante néfaste, avec abondance. La plante a poussé jusqu'au moment où elle a littéralement fleuri et montré l'étendue de ce que tu avais fait. Pour la plupart des gens, cette émotion là ne fleurit pas. Tu as trouvé comment faire, je ne t'en félicite pas. J'ai compris aujourd'hui pourquoi, et je ne t'en ferai pas part comme tu me l'avais demandé. C'est à toi de le comprendre. 

J'ai pris une autre route. Tu insistes visiblement pour que la tienne croise de nouveau la mienne. Chaque fois ça te fait plus mal. Tu as cultivé ton propre poison, chez quelqu'un dont tu pensais qu'il pourrait tout faire pour toi. Tu te trompais. Tu avais cette illusion que je pourrai continuer de le faire en ne recevant que de mauvaises choses en retour. 

Tu t'es offert le poison qui n'a pas réellement d'antidote. Tu as choisi de te faire souffrir. J'ai eu, un temps, de la patience. Je n'en ai plus à te consacrer. Tu l'as détruite. Je ne m'excuserai pas. Tu mérites ce qu'il t'arrive.

Tu aurais sans doute préféré une explosion de rage et de cris. Seulement où j'en étais arrivé, il n'était plus question d'user de force. Je t'ai saisi la main, amené dehors, et ai tourné le dos, t'entendant pleurer, sans comprendre. J'ai trop souffert. Je te dis adieu. Je suis le poison que tu as toi-même créé, je suis celui que tu t'es injecté. Sur ce point je n'ai pas le moindre remords, ni le moindre regret. Je continue ma route, ignorant tes appels, ignorant les signes que tu places devant moi. 

Malheureusement, j'ai tenté d'annihiler ce poison en moi, tu n'as rien fait pour que j'y parvienne. Au revoir, ou mieux, adieu.