Représenter Muhammad : un blasphème ?

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Ça n'aura probablement échappé à personne, mais les Français se sont réveillés le samedi 17 octobre en devant accuser une nouvelle attaque dirigée directement contre la liberté d'expression. La France s'est réveillée horrifiée devant un énième acte de barbarie commis au nom de l'islam, cette fois à l'encontre d'un simple professeur de géographie qui a eu le malheur de montrer la mauvaise image à la mauvaise personne. La France s'est réveillée horrifiée certes, mais probablement pas étonnée tant ces événements à caractères si violents et incompréhensibles sont devenus monnaie courante non seulement dans l'hexagone mais également dans tout l'Occident.

Comme à chaque fois, deux types de réactions se dégagent face à de telles monstruosités : la première consistant à remettre en question nos relations avec les musulmans, souvent en faisant porter le blâme à des individus qui n'ont jamais imaginé qu'il était possible d'en arriver là au nom de leur religion. De l'autre côté, nous sommes exhortés à ne pas faire d'amalgames et à bien comprendre que les islamistes n'ont apparemment rien à voir avec de vrais musulmans et avec l'islam.

Je me propose ici de rebondir sur ces éléments et de tenter de vous apporter une perspective historique notamment sur le sujet de la représentation de Muhammad. Nous savons que Samuel Paty (la victime de l'attentat de Conflans-Sainte-Honorine) a été sauvagement assassiné pour avoir montré une caricature représentant le prophète de l'islam. D'où vient cette interdiction de représenter Muhammad ? Et surtout, cette interdiction a-t-elle toujours existée ou s'agit-il d'une création plus tardive ?

Ça n'aura probablement échappé à personne, mais les Français se sont réveillés le samedi 17 octobre en devant accuser une nouvelle attaque dirigée directement contre la liberté d'expression. La France s'est réveillée horrifiée devant un énième acte de barbarie commis au nom de l'islam, cette fois à l'encontre d'un simple professeur de géographie qui a eu le malheur de montrer la mauvaise image à la mauvaise personne. La France s'est réveillée horrifiée certes, mais probablement pas étonnée tant ces événements à caractères si violents et incompréhensibles sont devenus monnaie courante non seulement dans l'hexagone mais également dans tout l'Occident.

Comme à chaque fois, deux types de réactions se dégagent face à de telles monstruosités : la première consistant à remettre en question nos relations avec les musulmans, souvent en faisant porter le blâme à des individus qui n'ont jamais imaginé qu'il était possible d'en arriver là au nom de leur religion. De l'autre côté, nous sommes exhortés à ne pas faire d'amalgames et à bien comprendre que les islamistes n'ont apparemment rien à voir avec de vrais musulmans et avec l'islam.

Je me propose ici de rebondir sur ces éléments et de tenter de vous apporter une perspective historique notamment sur le sujet de la représentation de Muhammad. Nous savons que Samuel Paty (la victime de l'attentat de Conflans-Sainte-Honorine) a été sauvagement assassiné pour avoir montré une caricature représentant le prophète de l'islam. D'où vient cette interdiction de représenter Muhammad ? Et surtout, cette interdiction a-t-elle toujours existée ou s'agit-il d'une création plus tardive ?

L'origine de la doctrine de l'irreprésentabilité du prophète vient d'une peur de l'idolâtrie. En effet, il y a cette idée que les images pourraient distraire les fidèles lors de la prière, les emmener vers le chemin du polythéisme puisqu'ils seraient encouragés à vénérer plusieurs personnalités et pas seulement le dieu unique. En plus de cela, il y aurait quelque chose d'indécent à avoir une représentation humaine dans un lieu de culte. Indécent car ce type de représentations sont perçues comme une tentative de mettre l'humain sur un pied d'égalité avec Allah, ce qui est tout bonnement impensable pour les musulmans. C'est, entre autres, pour ces raisons que les mosquées sont restées, de manière assez régulière dans l'histoire, des lieux aniconiques. Cependant, l'histoire musulmane n'est clairement pas dépourvue de représentations de leur prophète. En effet, nous pouvons dire, sans trop grossir le trait, que durant le premier millénaire d'existence de l'islam, il n'y a pas de véritables consensus quant au droit ou non de représenter Muhammad. Ainsi, nous retrouvons énormément de livres, de manuscrits où l'on peut observer le portrait du prophète de l'islam. Il est également intéressant de constater que ces occurrences ne sont clairement pas produites en marges de la société, elles ne viennent pas d'un courant minoritaire que l'on chercherait à éliminer. Beaucoup de ces représentations sont commandées directement par les sultans des plus grands empires de la terre d'islam, notamment de l'Empire Ottoman. C'est le cas par exemple de l'illustration que vous retrouvez ci-dessus, Muhammad est le personnage dont le visage est effacé. Il est important de préciser qu'il ne s'agit pas de la condition originelle de cette œuvre. En effet, le visage de Muhammad n'a été retiré que postérieurement puisque les Ottomans du XVIe siècle ne voyaient rien de choquant à représenter le prophète hors du contexte d'un lieu de culte. Dès lors, il semble évident que cette doctrine de l'irreprésentabilité, bien qu'elle ai peut-être pu exister durant les premiers temps de l'islam (qui sont sensés servir d'exemples et d'aspiration pour tous les musulmans), n'ai été adoptée de manière rigoureuse que bien plus tard. Il s'agit d'un long processus d'évolution des eusses et coutumes du monde musulmans qui aboutit parfois bien malheureusement à des scènes d'extrémisme barbare comme exposé au début du présent article.

Pour conclure, je souhaiterais vous laissez sur une note plus positive en vous racontant la matinée après laquelle j'écris ces quelques lignes. Comme chaque dimanche, je me suis rendu à la messe dominicale donnée par ma paroisse. Durant cette célébration, mon prêtre a fait référence à la dernière encyclique du pape François dont le titre est extrêmement parlant. En effet, bien que je ne sois pas en accord avec certains points abordés dans cette encyclique (que je vous conseillerais tout de même de lire), j'aimerais au moins que l'on puisse retenir le titre choisi par François Ier et souligné par le Grand imam d'Al-Azhar : Fratelli tutti, « Tous frères », et qu'on puisse le garder en mémoire dans les moments difficiles que nous traversons.


Texte écrit par Alexandre, initialement publié ici : https://pluripol.ch/article-representer-muhammad-un-blaspheme/

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