Sentimentalité

peterpanpan

Il y a cette fille qui est trop bête de vie. Elle ne s'arrête sur rien, elle survole tout du haut de ses 19 ans, connaît encore la gène quand elle se cogne à mes audaces de saint : par exemple quand on s'arrête dans une fromagerie, et que j'ose demander si on peut goûter quelque chose de spécial qui ne serait pas dans les petits bacs ingrats. 

Moi je me vautre devant ses façons de petite conne, n'y réagit pas alors que tout appelle à la violence d'une soumission, et pourtant que ça me fait du mal de l'admettre, parce qu'elle s'appelle Mélody, comme Mélody Nelson.Quand elle m'a dit comment elle s'appelait, ma mélancolie s'est injectée en elle comme le ciment des fantômes de Pompéi, et au lieu de la petite conne trop jeune pour vivre la souffrance, j'ai vu la danse envoûtante et absurde d'une figure impossible. Ses cheveux sont teints en rouge, parce que ce ne sont pas leur couleur naturel.

Elle aime les sushis, les cupcakes, elle a un hamster noir et presque obèse. Sa soeur est biologiste. Son père aime Gainsbourg. Elle ne pourra jamais aimer Gainsbourg. Elle m'a l'air d'être tout ce qu'il y a de plus médiocre, et ça me touche. Chez les femmes, je n'ai jamais aimé que les faiblesses imaginaires.

 Son appartement est grand, décoré et propre. Je ne l'inviterai jamais chez moi. Je ne sais même pas si je me suis débarrassé des cafards. Le mien plane au dessus de mon crâne, quand je pense à Mélody et tout ce qu'elle n'est pas. Ce que j'aime chez elle c'est sa médiocrité, et sa médiocrité ne pourra jamais me voir, ni m'aimer.

Mélody, arrache-moi à moi-même. Laisse-moi une place, entre ton hamster et le mannequin, sur le canapé. 

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