Si les larmes irriguaient les déserts
Juliet
Le monde change de couleur à travers un prisme
comme une peau de lait teintée d'un noir hématome.
Les ondes émises par les anciens traumatismes
font se prostrer de terreur chacun de mes atomes.
Tu volais si haut au-dessus des humains
que tu n'entendais jamais leurs voix ;
et les Anges pour nous restent si lointains
qu'ils ne nous voient pas porter la Croix.
J'ai cherché à rééquilibrer la balance
et perché au bout d'une corde mon silence,
pour que ce teint pâle et ce moral de pendu
nous soient les vestiges d'un monde défendu.
Ceux qui peuvent rire de mon errance
veulent que je tire ma révérence,
comme ils se repaissent d'une flamme lugubre
de laquelle se délecte une âme insalubre.
Le silence est d'argent lorsque la parole est d'or
pensait l'ingénu qui dans le ciel voulait planer.
« L'innocence est agent de gloire lorsqu'elle dort »
entend l'Ange nu qui dans leur fiel devait flâner.
Ils ont volé les joyaux de la Reine
pour les ensevelir sous des cendres anonymes,
ont avalé les boyaux de ma peine
et ont prétendu que Dieu était leur homonyme.
Je ne suis pas assez fort pour aller jusqu'à la mort
mais beaucoup trop mort pour faire croire être fort.
Et dans cet entre-deux mondes dantesque,
toute l'Histoire tient sur une fresque.
Tu pataugeais si bas sous les êtres humains
que tu ne connaissais pas le son de leurs voix,
et le jour où j'ai cessé de tendre la main
est celui où j'ai cessé de faire des choix.
(écrit le 6 juillet 2017)
Admirable tant sur la forme que sur le fond. Les rimes brisées en plus de celles en fin de vers produisent un effet hypnotique... C'est un pêché mignon que je connais ! Vous vous permettez quelques libertés avec la métrique des alexandrins et des hémistiches mais ce n'est pas bien grave.
· Il y a plus de 6 ans ·Bien à vous, Julien.
Julien Darowski