Sismographe

Christian Lemoine

Toujours des plis sur la surface, des remuements figés qui racontent de vieilles secousses, les tapis froissés, les moquettes râpées à la structure fragile, trame des passages et des errements. La sérénité trompeuse du paysage masque des troubles intestins, des météores malins menaçant les ondes immobiles. Qui croirait que pourtant rien ne dort rien n'est en paix ? Il n'y a que le semblant de rigidité pour faire croire au sommeil des choses. Au-dessous, ça gronde, ça remugle, ça brasse ça brouille ça brandille. Tu la connais, cette surface placide finalement jamais comme un miroir, jamais comme la vitre claire, jamais jamais la moindre ride en frisson avant-coureur, mais la fuite du courant sous la couche de glace, fraude d'un socle inaltérable et pourtant prêt à se fendre, à s'effondrer sous tes pas. Tu la connais, cette trompeuse tranquillité, alors qu'en infinitésimale reptation, les couches se rejoignent et s'entremêlent, s'épaulent et se mesurent en énergie accumulée, jusqu'à parfois la fracture redoutable, la cassure brutale des roches inflexibles. L'angoisse permanente des courants telluriques, tu la connais, pour toujours accrochée à la fibre de tes nerfs, tandis qu'à la fleur de ton visage on ne voit que stoïque quiétude.

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