Stratégie d’Amour

Hervé Lénervé

L’Amour de votre vie, vous boude, disparaissez un certain temps, elle vous accueillera, comme si vous étiez le messie, à votre retour.

-         Je suis revenu, ma tendre amie, car tu me manquais trop.

-         Ah ! T'étais parti ?

-         Oui ! Depuis six mois.

-         Comme le temps passe vite, je croyais que c'était d'hier et où étais-tu pendant tout ce temps.

-         Je m'étais isolé pour faire le point sur ma vie.

-         Cela fait du bien de prendre du recul, de prendre un peu de temps pour soi. Tu étais à l'étranger, au Tibet, surement.

-         Non je suis resté à Paris.

-         C'est moins loin !

-         Pour un parisien, oui, mais pour un Tibétain, c'est la même distance.

-         Comment peut-on s'isoler en restant à Paris.

-         Il y a des endroits pour cela.

-         Des asiles pour la méditation ?

-         Non des asiles psychiatriques.

-         Quel drôle de choix ?

-         Je n'avais pas le choix !

-         On t'a interné d'office ?

-         Oui ! Après ma troisième tentative de suicide.

-         Comme on dit, « jamais deux sans trois ».

Pour moi, les psychiatres craignaient surtout une quatrième.

-         Ah ! Ces psy, tous les mêmes ! Un mec qui s'est raté trois fois, à bien le droit à un dernier essai, non ? On peut dire que tu n'as vraiment pas de chance ou que tu es très maladroit. A se demander si toutes ces tentatives ne seraient pas une sorte d'appel au secours ? Qu'en penses-tu ?

-         Oh, tu sais, j'essaie de penser le moins possible.

-         T'as raison, c'est pas ton truc ! je veux dire de penser, c'est pas ton truc, toi, tu serais plutôt un impulsif.

-         Si tu le dis.

-         Je ne sais pas, mais je te trouve un peu mélancolique.

-         C'est ça, la maladie qu'ils m'ont trouvé, une psychose mélancolique.

-         Ça s'attrape comment ça ? T'as dormi la fenêtre ouverte, pour sûr !

-         Non ! J'ai eu un chagrin d'amour, une peine de cœur, un mal à l'âme. Une blessure de…

-         Oh, là, là ! Faut pas s'embarrasser avec ça ! Moi, si je ne vais pas bien, je vais faire les soldes et ça va beaucoup mieux, après.

-         Les soldes ne pouvaient rien pour mon cas.

-         Papoter avec les copines, alors ! On dit du mal des mecs et après on se sent ragaillardie.

-         Je n'ai pas des copines, je n'en ai qu'une.

-         Et alors, ça peut être suffisant, non ?

-         Peut-être, si elle veut m'entendre.

-         Et pourquoi ne t'entendrait-elle pas ?

-         Parce qu'elle n'est pas comme ça, c'est tout.

-         Quelle garce ta copine ! Franchement, elle ne te mérite pas. Mais on papote, on papote et je n'ai pas que cela à faire, moi ! Je cours chez le coiffeur ! Comment tu trouves mes nouvelles chaussures ? Elles sont belles, non ? Moi, je les adore ! Allez bye Hervé, je me sauve ou je vais être en retard, car après le coiffeur, j'enchaîne sur un cours de méditation transcendantale pour être au plus proche de la compréhension intuitive des gens, trouver l'harmonie dans l'empathie. Tu devrais essayer pout t'ouvrir aux autres, cela ne pourrait pas te faire de mal. Bisous, bisous, je m'envole !

-         Oui… Au revoir… à bientôt, peut-être ? Ma ché… 

-         C'est ça ! A plus !

Elle est partie.

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