Sur voie publique, tas de caisses HS
Jean Claude Blanc
Sur voie publique tas de caisses HS
L'entrée de mon village, véritable champ de bataille
Abondent négligemment tas de ferrailles rouillées
Bagnoles accidentées, camionnettes cabossées
Le garagiste du coin, dans son gourbi d'enfer
Juste la place pour bosser, sur des carcasses misères
Pas très écologique, cette foutue pagaille
Malgré nombres de plaintes, ne va pas se gêner
D'autant que les flics blasés, ne lui collent plus de PV
Longent salement la route ses pièces de musée
Pas assez de place chez lui, se taille plus d'espace
S'ingéniant à faire chier, les péquins du quartier
Jusqu'à devant leur porte, y étale ses déchets
Les mêmes qui le surnomment, « culotté dégueulasse »
Dans son antre crasseux, pour trouver un boulon
C'est presque pas possible, foutoir sur les rayons
Risque de glisser dans l'huile, s'étaler sur le sol
Et pour s'y repérer, se munir d'une boussole
Histoire d'en rire on conte ce vieux dicton d'ici
« Qu'une truie n'y retrouverait même pas ses petits »
Tandis que lui dégote dans son fatras infect
Le moindre tournevis et la clé à molette
Désordre organisé s'en vante, « tout dans la tête »
Maculé de cambouis, fume sa cigarette
Malgré bidons d'essence, tout près à sa portée
Mais ne craignant plus rien, à l'aise en salopette
Se lave même pas les mains, avant d'aller pisser
Le client étant roi, il pare au plus pressé
Ravaude vite fait bien fait, le moteur et les bielles
Pour que ça coûte moins cher à ses amis fidèles
Use de fils de fer et autres bouts de ficelle
Plus bordélique que lui, ardu le dénicher
En ce site touristique qui se veut à la page
L'apprenti bricolo amoche le paysage
Confierais pas ma chienne à ce triste personnage
Risquerait me l'euthanasier, même si elle n'a pas la rage
Collectionne les amendes ainsi que les pétitions
Mais de déménager, il n'en est pas question
Au contraire accumule avec précaution
Des batteries hors d'usage et des pneus usés
Pouvant toujours servir, les empile sur le pré
On vante avec fierté l'image de ce pays
Pour sa campagne fleurie, qui respire le bon air
Voilà qu'un amateur mécano, le ternit
N'en faisant qu'à sa loi, au diable les commentaires
Si bien « qu'il est charmant pas neige et beau temps »
Qu'une chanson débile, pour crédules estivants
Car à l'orée du bourg, pas la même musique
Le carrossier pollue, se moquant des critiques
Rajoute mon paraphe pour tous ces préjudices
Même si c'est pas demain, qu'enfin il déguerpisse
Parait qu'a des appuis à la Sous-Préfecture
A oublié d'être con, étant pétri de vices
Si bien que le déloger, pas sûr et pas mûr
Par contre ce sont nos gosses, qu'en paieront la facture
Souhaitons que tout s'enflamme soudain en feu de joie
Certain que les pompiers ne se déplaceront pas…
De la graine de bohême ira planter ailleurs
Sa petite entreprise sans autorisation
Ça nous arrange pas, n'étant pas bricoleurs
Malheur en cas de panne direction une station
Avec des chevronnés concessionnaires frimeurs
Accueil de jolis cœurs, mais qui coûte bonbon
Bien loin de ce magouilleur payé argent comptant
Pas déclaré au fisc, où l'on en sort gagnant
Alors on le supporte, en n'ayant pas le choix
Sans prendre rendez-vous, sur l'heure nous reçoit
Même que l'addition, n'est pas vraiment salée
Et pour nous l'envoyer franchement pas pressé
A croire qu'il vit de ses rentes, trafique pour s'amuser
Car pour nous l'essentiel, c'est que tourne le moulin
N'étant pas du métier, on a recours qu'à lui
Même tant pis pour la forme, quand on est dans le besoin
En désespoir de cause, l'auto on lui confie
Nécessaire pour chaque jour s'en aller au turbin
Alors bon copain, je dois me montrer brave
Estimant qu'aujourd'hui il y a bien plus grave
Lui conseille gentiment plus fouir en ses épaves
Où il demeure toujours, une larme de gazoil
Faisant péter sa turne, se trouverait à poil
Cette fois grand danger, s'en séparer d'urgence
Ce que je peux être ingrat, moquer sa nonchalance
Qui pour pet de travers fait toujours diligence
Ras le bol de ces os qui jonchent les trottoirs
Défigurent la campagne, ses riches territoires
Bientôt faudra un masque pour traverser le village
Et des lunettes noires pour pas voir ces ravages
On a crié victoire, vive la COP 21
« Protéger la nature » plus que du baratin
Promesses non tenues s'en dédouanent les ricains
On a beau les prévenir que le monde court à sa fin
Pourquoi s'en soucier, ne crevant pas la faim
Alors qu'on nous ordonne, de faire sagement le tri
De tous nos détritus qu'encombrent nos galetas
Certains moins scrupuleux balancent dans les bois
Discrètement, tranquilles, des masses d'objets pourris
Où sont les écolos, ces verts politicards
Se targuant défenseurs de ces essences rares
Sûr qu'on ne les voit guère sur nos montagnes pelées
La bruyère détruite par ces 4x4 de pionniers
Jouant les héroïques, comme au Paris-Dakar
Faisant que son boulot, notre mécanicien
N'est qu'un nul à côté de ces sombres crétins
Qui creusent des ornières, éventrant nos chemins
Cessons de l'éreinter, souhaite que gagner son pain
Sur la voie de garage, cimetière de caisses HS
On découvre au hasard, des Citroën DS
Mais va ma préférence, pour illustres tractions
Jadis rapide, maniables, moteur furibond
Pas mises au rebut, valent encore du pognon
La nostalgie tenant, ma mémoire têtue
Je songe à ces carrosses, tombés en désuétude
En est ainsi des Hommes, jeunes frais émoulus
Au début gros costauds, alertes, vifs, rudes
Hélas le temps passant, tendance à hoqueter
Et terminant leur course, dans un champ désolé
Notre artiste du pays, connait tous les secrets
De ces mastardes carrioles, adulées dans le passé
Miraculeux bonhomme, sait les faire démarrer
Aussi on ne boude pas, ce service qu'il nous rend
Ne payant pas de mine, ce pouilleux commerçant
Qu'il soit sale comme un peigne, cela nous est égal
Car pourvu que ça marche, c'est bien le principal JC Blanc juin 2022 (pollueur)