L'avis à 17 ans

Alison Pernet

Anaëlle à 17 ans, elle est lycéenne, ses parents sont gays, ses camarades idiots et insultants. Elle résiste, elle survit, mais la vie à 17 ans n'est pas facile quand on est anormale à leurs yeux.

PREMIÈRE PAGE...

Je m'appelle Anaëlle, j'ai 17 ans, je suis une adolescente normale, pas toujours très agréable à vivre, pas vraiment en bonne entente avec tous le monde, en manque de repères. De repères, oui, mais certainement pas de pères. Je ne sais pas si c'est une chance, une malchance, une aventure, une étrangeté ou toute autre chose que ce soit du nom commun féminin ou masculin mais, une chose est sûre, mes deux parents sont des hommes. Je l'avoue, parfois, ça me manque un peu, une mère. Je vois mes amis, ils en ont, eux, ils ont l'amour de la mère, le soutient du père, ça a l'air bien mais moi j'ai juste le soutient intégral de mes deux parents qui s'inquiètent pour moi.

Je me dis souvent qu'il vaut mieux deux pères que pas du tout parce que je vois dans mon groupe d'amis des parents divorcés, des couples brisés, des pères décédés. Mieux vaux en avoir trop que pas assez.


Ce matin, au lycée, pendant que j'étais en cours de littérature, j'ai entendu deux garçons de la classe parlés de moi alors que j'étais à la table juste derrière la leur... Je suis discrète, on ne fait pas trop attention à ma présence. Ils disaient que, « d'après une rumeur », mes parents sont « des pédés », qu'ils ont le sida « comme tous les pédés » et que c'était sûrement « parce qu'ils sont polygames ». Après, ils ont rit. Je ne comprend pas, pourquoi tous les parents gays devraient être polygames et avoir le sida ? Ils ont aussi dit que, à la base, mes parents voulaient adopté un garçon pour abusé de lui mais que, pas de chance, ils n'avaient pu avoir que moi. J'ai fait comme si de rien était, je ne réagis jamais à ça, mais j'ai eu vraiment mal. Pas parce que je pensais que tout ça était vrai mais parce que systématiquement, c'est la raison pour laquelle on me rejette tous le temps.


Ce midi, à la cantine, j'ai encore mangé seule. Pour une fois, je n'ai pas essayé d'aller me joindre aux autres, j'en ai assez que l'on se moque de moi. J'ai eu beau m'éloigner d'instinct, des filles de terminale S sont venues me voir, elles se sont mises autour de moi et on pris mon assiette pour la renversée sur mon plateau. Je n'ai rien dit mais elles ont lancé que je pouvais toujours leurs envoyé mes parents quand « ils auront fini de se faire les ongles » et que « leurs permanente ne risquera pas de se raidir ». Je me suis contenté de me lever et j'ai débarrassé mon plateau avant de partir. J'ai eu faim tous le reste de la journée.


Cette après-midi, en cours de sport, mon ventre n'arrêtait pas de gargouiller pendant que je faisais des tours de terrain. Les autres se tiennent loin de moi alors ils n'ont pas entendu, heureusement. J'avais peur qu'ils se moquent encore. Je suis toujours à la traîne, je suis asthmatique mais je n'aime pas le certifier et être dispenser de sport parce que j'aime beaucoup me défouler sur un terrain. C'est le seul cours où je m'en sors, d'ailleurs... Quand je suis revenus sur la pelouse après les cinq tours obligatoires, le professeur à lancé que « les enfants de gays étaient toujours dernier en tout ». Je n'ai rien dit, là encore, mais les autres ont bien rit.


Ce soir, en sortant du lycée, papa Rick m'attendait. Il s'appelle Éric, mais j'aime bien l'appeler Rick. Il est tout le temps inquiet pour moi parce qu'il sait que je ne m'entends pas bien avec les autres mais il ne sait pas pourquoi. Tous le monde l'a regardé. Ils ne le disent pas, mais je sais qu'ils le trouvent beau, mon papa Rick. Parce qu'il est vraiment bel homme, surtout quand il vient me chercher en costume. Il porte des cravates vraiment bizarres mais, à lui, ça lui va bien. À peine rentrée, j'ai été dans ma chambre pour faire mes devoirs, il y avait un mot dans mon sac, un mot d'insulte encore, avec des mots crus sur les homosexuels. On me traite souvent de lesbienne, ils pensent qu'un enfant d'homo est homo. Moi, j'aime beaucoup les hommes. J'espère qu'un homme m'aimera, un jour.


Cette nuit, j'ai encore pleuré. Déjà, ce soir, je pleurais sous la douche. Je me suis encore mutilé, j'avais promis d'arrêter, mais ça me détend vraiment. Le sang qui coule tout doucement, imperturbable... C'est beau, le sang qui coule. J'ai mal à la tête et je ne vois plus rien, mes yeux sont trop brouillés. J'ai du mal à écrire. Il faut que je dorme.

DEUXIÈME PAGE...

Je n'ai pas beaucoup dormi, papa Rick a un peu crié, il était très énervé, je crois qu'il a pleuré. Je n'ai pas beaucoup entendu papa Alex, il s'appelle Alexandro mais c'est trop long... Je penses qu'il n'osait pas trop interféré dans le monologue de papa Rick, il avait l'air vraiment mal, papa Rick. Il n'arrêtait pas de répéter que rien n'allait plus, qu'il fallait agir. Ils ont peut-être des dettes... Je ferais tout pour les aider. Je n'aime pas trop, quand ils se disputent, parce que après ils ne se parlent presque plus.


Ce matin, en me levant, je suis descendue à la cuisine et je les ai vu qui s'embrassaient, ça m'a rassuré. Ils ont arrêtés quand je suis entrée et m'ont dit bonjour en s'excusant, ils étaient gênés, je trouve ça mignon. Ils s'aiment encore beaucoup, pourtant ils sont ensemble depuis 28 ans. C'est vraiment beau, les longues relations. Quand ils m'ont adoptés, ils étaient encore jeune, enfin à peu près. Rick avait 24 ans et Alex en avait 26 pourtant ils ont accepté de gâcher leur jeunesse pour vivre leur rêve d'enfant. Ça me fait toujours sourire, quand j'y pense.

C'est papa Alex qui m'accompagne le matin, en voiture, quand il va au travail. Il arrête toujours une rue avant le lycée, il sait que c'est gênant à mon âge d'être accompagnée par ses parents. J'embrasse toujours sa joue avant de descendre, il m'interpelle parce que j'oublie mon sac, comme tous les matins, alors je vais le prendre dans le coffre puis je travers et je vais en cours. Ce matin, on ne m'a pas fait trop de remarque mais quand je suis arrivée au troisième étage, à bout de souffle, on m'a fait un croche-pied, je suis tombé de tout mon poids et j'ai faillit m'évanouir. J'ai eu du mal à me relever, je voyais tout noir, j'avais peur, je suis partie avant de pleurer, je me suis cogner contre des murs en fouillant dans mon sac pour trouver mon inhalateur. Je n'ai pu reprendre mon calme que 10 minutes plus tard.

Pendant la pose, à 10h55, je suis restée assise devant la salle, j'avais encore mal à la poitrine, je ne voulais pas monter les étages encore une fois. Mon cœur me tiraillait, j'avais l'impression que mes poumons devait ressemblé à des raisins secs.


Ce midi, je suis descendue mais j'ai préféré ne pas manger, je n'aime pas la cantine, ce n'est pas bon et, de toute façon, je n'ai personne avec qui y aller. Je suis restée dans les couloirs je marchais pour éviter de croiser des gens, j'ai monté les escaliers à mon rythme jusqu'au deuxième étage. Il faisait froid, il fallait que j'attende sur la passerelle du bâtiment de science. Le vent glacé risquait d'arracher mes poumons alors je suis retournée dans le bâtiment voisin et j'ai attendu, contre le chauffage.


Cette après-midi, on a du faire des groupes pour des exposés qui compte pour le bac, personne ne voulait se mettre avec moi et, franchement, j'aurais préféré être seule mais on a pas le droit, il faut être par trois ou par quatre. Comme personne ne se décidait, les professeurs m'ont mit de force dans un groupe. Je les ai laissé choisir le sujet, ils ne faisaient pas attention à moi de toute façon et je n'avais aucune envie qu'ils le fassent.

Pendant la pose, à 14h55, un des garçons qui est dans mon groupe est venu s'asseoir devant la salle, à côté de moi. Je n'ai rien dit, j'ai cru qu'il allait de moquer si je parlais. Il a été gentil. Quelqu'un a donné un coup dans mon sac en passant, mon agenda en a glissé. Il l'a ramassé et la photo de mes papas est tombée. J'ai vraiment eu peur, j'ai eu peur qu'il me rejette et j'ai eu peur de pleurer. Il m'a demandé si c'était mes parents, j'ai dit que oui et il a sourit, il m'a dit que lui, il avait deux mamans.


Ce soir, j'étais vraiment contente. Rick est venu me chercher et j'étais toute excitée en lui racontant ma journée. Je lui ai parlé de Thomas, le garçon qui a deux mamans, et il n'a pas arrêté de sourire et de rire aussi. Je crois que je l'attendrissais avec mes histoires, il a du être sacrément rassuré que je trouve enfin quelqu'un avec qui parlé. Je crois que, en même temps, il a compris pourquoi on me rejetait au lycée. J'ai peur que ça lui fasse du mal. Moi je l'aime, j'aime mes deux papas, mais j'ai peur quand même qu'ils soient vexés.

TROISIÈME PAGE...

Ils ont encore criés cette nuit, tous les deux cette fois. Alex a dit qu'il en avait assez des « réflexions débiles » que lui impose Rick, il n'a pas du tout aimé et a commencé à dire que s'il n'était pas content, il n'avait qu'à trouver une solution aux problèmes au lieu de toujours les contourner. Je n'ai pas tout compris mais je suis presque sûre maintenant que ce n'est pas un problème d'argent parce qu'ils n'en parlent pas.


Ce matin, en arrivant au lycée, j'ai essayé de trouver Thomas mais je ne connais pas sa classe alors j'ai été incapable de le localiser. Je suis montée mais il a fallut que je m'arrêtes au premier étage, j'avais mal à la poitrine, mon cœur n'arrêtait pas de palpiter. J'ai eu peur, encore une fois, j'ai cru que j'allais m'évanouir, ma tête tournait et je voyais flou. J'ai pris mon inhalateur et j'ai aspiré de grandes bouffées du médicament. Il parait que l'asthme part avec l'âge, j'espère que ça ira vite mieux. Le troisième trimestre est bientôt fini, j'ai peur de la réactions de mes parents quand ils verront que j'ai une note en sport alors que j'aurais dû donner ma dispense au début de l'année. J'aimerais dire au professeur de ne pas me mettre de note, mais si je lui explique il m'empêchera de participer au cours.

Je suis arrivée en retard à mon cours d'anglais, à cause de ma crise, j'avais les yeux rouges et gonflés, tous le monde a cru que j'avais pleuré. Quand j'ai été m'asseoir, je les ai entendu dire que j'avais du réaliser que c'était pas normal, ma famille. Ils ont même dit que si je me suicidais, mes papas pourraient tenter leur chance pour avoir un garçon. Ça m'a vraiment énervée, je bouillonnais de l'intérieur et j'avais vraiment mal mais je n'ai pas osé leur crier la vérité.


Ce midi, papa Rick m'a appelé pendant que j'étais à la cantine, j'ai attendu d'en être sortie pour le rappeler, j'avais peur qu'il entende ce qu'il y avait autour. Il venait de décrocher quand on m'a poussé, je suis tombée, j'ai lâché mon portable et il a glissé un peu plus loin, j'ai voulu me relever pour aller le récupérer mais on m'a refait tombé, j'étais sur le ventre, un garçon appuyait son pied dans mon dos et j'ai sentit des talons heurter mes côtes, je me suis empêché de crier. Je ne voulais pas que Rick m'entende. Ça a duré vraiment longtemps. Ils arrêtaient pas de m'insulter, heureusement ils ne disaient pas mon nom, comme ça Rick ne pouvait pas savoir que j'étais la cible. Ils n'ont pas arrêté de me cogner dans les côtes et dans le ventre, j'étais à bout de souffle quand on m'a donné un coup de pied dans la cage-thoracique, j'ai écarquillé les yeux, mes poumons ne prenaient plus d'air. Mon sac avait glissé un peu plus loin, il fallait que j'aille récupérer mon inhalateur dedans, sinon, ça allait mal finir. Je ne voyais plus rien mais j'ai entendu Thomas, il les a fait arrêté et puis il m'a redressé un peu et j'ai sentit l'inhalateur sur mes lèvres, j'ai encore aspiré le médicament et j'ai fini par me reprendre même si je respirais mal.


Cette après-midi, j'ai rappelé papa à 14h55, il s'inquiétait, je l'ai rassuré en disant que je n'avais pas verrouillé mon portable dans la poche et qu'il avait du sonner tout seul. Je lui ai dit que des gens avaient frappé un garçon mais que les surveillants étaient intervenus et que tout allait bien. Thomas était à côté de moi, je voyais bien qu'il ne cautionnait pas du tout mes mensonges mais je ne voulais pas qu'ils se sentent coupable, mes papas.


Ce soir, je me suis surprise à remercier mes assaillants du midi, ils n'avaient pas cogné là où c'était visible alors Rick a cru à mon histoire. J'étais vraiment très contente. Je suis inquiète quand même, ils vont mal dans leur couple. Je les écouterais cette nuit, je veux savoir ce qui ne va pas et je le saurais si je fais un effort.

J'ai eu du mal à me déshabiller pour aller prendre ma douche, j'ai des bleus partout et j'ai peur d'avoir une côte fêlée, elle me fait vraiment mal. J'ai réussis à m'empêcher de pleurer jusqu'au moment où j'ai enlevé mes mitaines et vu les cicatrices sur mes bras, j'en ai aussi sur les cuisses. J'ai allumé l'eau pour cacher mes sanglots et je me suis recroquevillée dans la baignoire, même si ça me faisait atrocement mal.

Je me demande ce qu'ils feraient, tous, s'ils savaient que je souffres comme ça.

QUATRIÈME PAGE...

J'ai écouté Éric et Alexandro, hier soir. Ils ont commencé à se disputer dans le salon, j'ai été en haut des escaliers pour mieux les entendre. Ce que j'avais entendu les autres nuits m'a paru beaucoup plus logique, à ce moment là, Éric avait parlé avec mon professeur principal, il savait que j'étais mise à l'écart et Alexandro disait que c'était normal parce que à cet âge, tous le monde juge et personne n'est clément. Éric ne semblait pas aimé cette façon de penser et quand il lui a raconté que j'avais peut-être été maltraité physiquement, il a semblé capté son attention. Alexandro n'a rien dit d'abord puis il est sorti de ses gonds, il disait « je vais tuer ces bâtards ! », « ils vont regretter ça ! », il a lancé des choses qui se sont cassé contre un obstacle. Éric essayait de le calmer mais il n'y arrivait pas, il le suppliait, disait qu'il lui faisait peur. Il disait que si ça continuait j'allais me réveillé. Je ne sais pas s'il se doutait que c'était déjà le cas mais il l'a vite su. Je suis descendue et je me suis arrêtée à la porte du salon, il y avait des verres cassés, et la lampe qui était habituellement à côté du canapé, par terre, en mille morceaux. Ils m'ont regardé, se sont excusés de m'avoir réveiller.


Ce matin, je me suis réveillée dans leur lit, j'avais mal à la tête, vraiment très mal. Ils étaient tous les deux debout alors je me suis levée aussi : il était déjà 10h, j'étais en retard en cours, je me suis précipitée hors de la chambre mais papa Alex m'a interceptée en me prenant dans ses bras. Il m'a dit que je n'irais pas en cours, aujourd'hui, ils avaient pris un jour de congé et ils voulaient l'utiliser pour me bercer de tendresse.


Ce midi, on a été au cinéma, il y avait trois garçons de la classe dans la queue, ils séchaient les cours comme assez souvent. Ils n'ont pas arrêté de me regarder, de parler puis de rire. Je me suis un peu mise en retrait et quand papa Rick l'a remarqué, ça a eu vite fait de l'agacer, il a dit à Alex quelque chose comme « tu trouves pas que ça frise le ridicule, le comportement de ses gosses ? » et papa Alex lui a répondu « à ce stade ça frise plus, ça lisse. ». Moi, ça m'a fait un peu rire, mais les garçons ils n'ont pas apprécié. Ils ont pris leur places et ils sont entrés dans la salle. J'étais vraiment contente, que mes parents soient restés calme, j'avais peur qu'ils réagissent plus mal.

Pendant le film, je me suis assise entre eux, ils ont chacun pris une de mes mains, ça m'a fait plaisir de pouvoir penser un peu à autre chose mais au final, je pensais tous le temps à Thomas. Je me suis demandé si je lui manquais et si il avait remarqué mon absence. J'espère que oui, parce que moi il me manque quand même un peu.


Cette après-midi, on a été dans un parc d'attraction, on a pas fait grand chose, on a surtout marché. Il n'y avait pas beaucoup de monde mais pas beaucoup d'attractions et au final on a fait presque que du carrousel. Comme on était tout seul, ils en ont profité pour s'amuser, on courait entre les chevaux de bois pendant que le pauvre homme qui s'occupait de le faire fonctionner nous demandait poliment puis de plus en plus bruyamment de nous arrêter. Il a fini par arrêter de le faire tourner et comme on courait dans le sens inverse de la rotation on est tous les trois tombés d'un coup. On a beaucoup rit mais j'avais mal vraiment partout, ma côté m'élançait énormément et j'avais du mal à respirer, j'ai pris l'inhalateur dans ma poche et encore une fois j'ai aspiré de ce médicament donc dépend ma survie.

J'ai eu beau protesté, Alex a décidé de me porter sur son dos pendant tous le reste de la sortie, il ne m'a posé que sur un banc où on a manger des glaces.


Ce soir, j'ai eu du mal à me faire à l'idée que la journée était fini, on a dîner en parlant et en riant beaucoup mais demain il faudra que je retourne au lycée et je n'ai vraiment pas envie. J'en ai assez d'être la victime de tout ces idiots, j'ai envie de leur dire leur quatre vérités mais je n'oserais jamais... J'ai peur qu'ils me fassent plus mal que je ne leur fait acquérir une conscience. Ils vont sûrement se moquer et moi, j'irais encore mal.

Je ne me suis pas mutiler, je m'en suis empêcher. Je n'ai pas pleuré non plus, la journée a été si belle que je ne voulais surtout pas la gâcher avec ce genre de choses qui sont devenus si banale à mes yeux.

CINQUIÈME PAGE...

Je viens d'arriver au lycée, je pénètres dans la cours et je les vois tous, le sourire carnassier, le regard moqueur, le corps près à s'élancer sur la proie déjà agonisante. J'ai encore plus mal qu'hier, mes jambes ne me tiennent pas vraiment, je chancelles par moment. Malgré les remarques, je m'avance dans la cours, l'estrade installé pour le discours de début d'année est encore là, pour une fois je bénis le manque d'organisation de ce lycée. Je croise Thomas, je lui souris, je monte les cinq marches qui me mènent sur le plateau de bois et je me met devant le pupitre improvisé. Thomas commence à me filmer comme s'il avait compris que j'avais un message important à faire passer. Ma confiance s'envole un instant mais elle revient vite.


« Je suis Anaëlle. Vous me connaissez déjà tous, j'espère en tout cas, ce ne serait pas très glorieux pour vous d'avoir insulté et frappé une inconnue. Mes parents s'appellent Alexandro et Éric, ils sont homosexuels. Oh, je sais, ça vous fait rire. Je peux savoir pourquoi ? Parce que je ne comprend pas ce que l'amour à de drôle. Vous m'avez martyrisé pendant une année entière sans que je ne dises rien mais cette année encore, vous avez persisté et j'en ai assez. Je ne vais pas me taire pour que vous puissiez jubilez dans votre coin, je ne vais pas me taire pour que vous puissiez jouir de votre position, je ne vais pas me taire parce que je refuse que vous sortiez indemne de cette histoire. Je ne veux pas que vous en sortiez aussi stupide qu'en y entrant. Aucun de vous n'a réfléchis, pas vrai ? Vous vous êtes contenté, tous, de vous moquez de moi parce que mes pères s'aiment. Les vôtres sont soit divorcés, soit absent, soit mort... Alors, c'est quoi, le mieux ? Un père violent, un père absent, un père gay, un père fuyant ou, tout simplement, deux pères ? »


Je ne sais pas quoi rajouter à ça, j'ai l'impression de me répéter mais au moins, cette fois, ils m'écoutent tous. Les professeurs sont là aussi, ils allaient m'arrêter mais finalement, ils se sont eux-même stoppé et m'ont écouté. Pourtant, je sais que je vais avoir des ennuies. Je sais que mon discours ne les aura pas changé mais ils m'ont au moins écouté et ça, c'est déjà énorme pour moi.


Vers 17h, en sortant de la salle, j'ai entendu des messes-basses, les élèves sont plongés sur leur portable et ne font pas attention à moi, ce n'est pas habituel mais je ne vais pas me plaindre. J'ai descendue les escaliers en silence jusqu'à ce que je vois Thomas, en bas des marches, il m'a fait un signe de la main avant de me dire de le suivre, il avait l'air très enjoué. J'ai regardé Éric qui attendait devant la porte, il a froncé les sourcils en voyant mon ami me tiré à l'opposé. J'ai été traîné ainsi jusqu'au CDI où trône les seuls ordinateurs en état de marche, il m'a amené vers l'un deux puis m'a montré la page internet qu'il avait déjà ouvert. Une vidéo, mise en ligne sur sa chaîne visiblement, intitulée « L'avis à 17 ans ». Il l'a mise en marche et je me suis vue sans me reconnaître : une jeune fille sûre d'elle, planté là, devant un pupitre en carton, sur une estrade bancale. En dessous il était écrit « plus de 301 vues » et sous la petite barre verte « 78 653 aiment ça, 0 n'aime pas. ». Je suis restée interdite un bon bout de temps.


Une fois à la maison, j'ai été fière et anxieuse à l'idée de montré la vidéo, je ne savais pas à quelle réaction m'attendre de la part de mes parents mais une fois arrivé à la fin de mes paroles, j'ai vu qu'ils avaient laissé leurs larmes coulées, j'étais infiniment heureuse et, par dessus tout, j'étais infiniment soulagée.

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