Un conte de Noël - II

Olivier Verdy

Maggy tient la main de son papa. Comme c'est bon de sentir sa grande main tout chaude serrer ses petits doigts. Passer l'après-midi à se promener en ville, regarder les vitrines décorées, les pères noël qui arpentent les rues. Il y en a t ellement, lequel est le vrai ? Il est là au moins le vrai ? Les rues brillent, les guirlandes sont allumées, les boules scintillent. L'ambiance est festive et merveilleuse. Quel bonheur ! Papa est si fier de marcher à côté de son petit bijou. Ils se sont arrêtés à un stand et Maggy a eu droit à sa crêpe Nutella chantilly, Papa en a pris une au sucre. Ils ont accompagné ces délices d'un jus d'orange et d'un vin chaud. Tout le monde semble heureux. Ou presque. Maggy voit bien que certaines personnes, assises parterre, ou tendant la main n'auront pas un noël aussi joyeux. Mais, à six ans, son bonheur est le plus important. Depuis que Maman est partie avec un autre chéri, dans une plus grande maison, avec des vacances au soleil ou à la neige, Maggy voit moins son papa. Alors les instants passés avec lui sont si précieux. Elle l'aime, lui. Pas comme l'autre qui lui offre pourtant plein de cadeaux. Son papa, quand il la regarde, elle sait qu'il l'aime pour de vrai. Ça ne s'achète pas. Ça se voit.

- On va dans les manèges papa ?

- Ça te ferait plaisir ma puce ?

- Oh oui, on fera des tours et j'aurai le pompon

- Alors d'accord, allons-y, on a juste à traverser le jardin et on y est. Ça va tu n'as pas froid ?

- Non, je suis grande maintenant. Et puis ta main, ça me donne chaud

- Je t'aime ma chérie

- Je t'aime aussi mon papa d'amour

Maggy et son papa traversent une rue superbement éclairée par des guirlandes représentant des rennes, des étoiles. Tête levée pour elle, coup d'œil aux voitures pour lui, ils se faufilent sur un passage piéton et rejoignent le square Coluche – héros malgré lui des hivers rigoureux ou on se rappelle que des gens, des plus en plus nombreux ne mangent pas à leur faim dans un pays champion du gaspillage alimentaire. « wonderfull world » diffusé dans toute la rue contribue à l'ambiance féerique de cet après-midi.

- Papa, puisque tu as été sage, tu as droit à un bonbon spécial Noël.

Maggy s'arrête et commence à fouiller dans son sac à la recherche de papillotes. Tête baissée, concentrée, elle se tourne en face d'un réverbère afin de s'éclairer davantage.

- Ça y est. Je les ai trouvés, tu préfères les dorés ou les marrons ? Papa ? Papa ? papaaaaaaa ?

Maggy regarde à droite à gauche en criant « papa ». Nulle part. Ou est-il ? Caché ? Maggy commence à pleurer. Ou est parti papa ? « papaaa ? » rien. Aucune réponse. Elle est à l'entrée du square. Devant la statue de l'homme à la salopette. Toujours rien. Ni en direction de la rue. Ni vers la sortie du square. Maggy regarde dans les fourrés. « Papa ou tu es ? » « Papa réponds moi j'ai peur ». Elle a soudainement froid. Les lumières de noël se transforment petits à petit en monstres terrifiants. Maggy se sent seule et abandonnée. « papaaaaaaa ». Il ne peut pas être parti comme ça, sans rien lui dire. Il l'aurait prévenu. Non, il l'aurait emmené. Jamais il ne l'aurait laissée seule dans le parc. En plus, il allait avoir un bonbon parce qu'il avait été très sage. Et ils devaient aller à la fête faire du manège. La petite fille voit les passants défiler sur le trottoir, profitant de la beauté des illuminations ou se hâtant de rentrer retrouver la chaleur de leur foyer. « Papaaa c'est moi Maggy, pourquoi tu réponds pas ? ».

A force de tourner sur elle-même, de chercher dans les buissons, de faire le tour de la statue, Maggy doit se rendre à l'évidence. Papa est parti. Il l'a laissée seule. Seule dans une grande ville. A un endroit qu'elle ne connait pas. Sans savoir quoi faire ni où aller. Sans téléphone portable ni carte d'identité. Sans adresse ni argent de poche. Seule. Elle va demander au monsieur de l'aider. Il doit savoir ou est papa. « Papaaaaa ». En larmes, apeurée, Maggy se dirige vers l'adulte le plus proche qu'elle puisse trouver.

- Il est où mon papa ?

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