Un conte de Noël - X

Olivier Verdy

Pff. La perspective d'une soirée whisky tranquille s'éloigne. Et dire que Dan devrait, à l'heure qu'il est, être installé chez lui dans son salon, un verre à la main, de la musique en fond sonore mais certainement pas au milieu d'une fête foraine remplie d'enfants, de lumières et de bruits. A se demander ce qu'il lui a pris ; Le bon samaritain ou peut-être est-ce le sourire de Maggy ? Il a tellement oublié de vivre depuis la mort de sa femme que ce sourire et cette petite main lovée dans la sienne le fait fondre comme neige au soleil.

Et puis Dan commence à voir le bon côté des choses ; D'accord, il y a du bruit. Mais ce sont des chants de noël, des musiques entrainantes. D'accord, il y a de la lumière mais ce sont des néons festifs, des lampions, des guirlandes qui clignotent. D'accord, il y des enfants mais ce sont des enfants heureux, des enfants qui crient leur joie. Comme avant. Quand Dan était heureux lui aussi ; Quand il aimait Noël. Quand il aimait les enfants. Et pourquoi pas, pourquoi pas ; Dan se sent glisser sur la douce pente de la joie retrouvée.

« Allez viens Maggy on va faire un tour de train fantôme tous les deux ? Et après on ira pêcher des canards si tu veux. »

N'empêche que derrière cette façade joyeuse, Dan se pose tout de même des questions : Où est le père de Maggy ? Que veut le flic ? C'est quoi cette histoire de sac ? Et pourquoi ils mettent autant de temps à le ramener ? Et où est la mère ? Parce que Dan le sait, même s'il commence à profiter égoïstement des instants partagés avec Maggy, le mieux pour la petite serait qu'elle retrouve ses parents. Alors s'il veut vraiment la rendre heureuse, ils doivent revenir le plus vite possible.


- Oui ?

- Morgan. Pouvez-vous fouiller discrètement la fillette s'il vous plait?

- Euh, et vous allez me dire ce que je dois chercher ou pas?

- Une bombe ou un truc qui y ressemble ?

- Ahahahahahahah.

- Je ne plaisante pas. Cherchez sur elle. Ce doit être assez gros. Assez dur. Une ceinture peut être ? Et on arrive.

- Hein ? attendez là vous me dites que Maggy aurait une bombe sur elle? Expliquez-moi tout ça.

- Je vous dirai ça tout à l'heure. Pour l'instant contentez-vous de l'amener un peu à l'écart. On sera là dans dix minutes.


Une bombe ? Quoi hein ? C'est du grand n'importe quoi comment une jolie petite fille avec un tel sourire pourrait avoir une bombe sur elle ? Son père l'aurait mis ? Sa mère ? Quelqu'un d'autre ? Non Dan ne peut pas y croire. C'est juste impossible. Et puis il se rappelle des émissions de télévision visionnées tard dans la nuit dans lesquelles des pseudo-religieux équipaient femmes et enfants pour se faire sauter au nom d'un dieu complice. Mais de là à tenir la main d'une petite fille impliquée, il y a un monde. Ou alors, C'est pour ça que le père a été arrêté, que la brigade anti-terrorisme le retient. La mère est peut être aussi en garde à vue et comme ils n'arrivent pas à trouver la bombe, ils pensent que ce doit être Maggy qui la porte sur elle. Mais alors ? Comment va-t-elle se déclencher ? Avec un retardateur comme dans les films ? Peut-elle exploser à tout moment ? Est-ce que cela ferait beaucoup de dégâts au milieu d'une fête foraine ?


- Maggy, on va s'assoir un peu sur un banc, j'ai mal à ma jambe, deux minutes d'accord ?

- Ah zut…je voudrais bien aller encore pêcher des canards.

- On ira après je te le promets, mais asseyons-nous un peu.

Pour la première fois depuis pas mal de temps, Dan se dit qu'il est peut-être enfin tout près de retrouver son épouse et en même temps, il se sent perturbé. Peut-être que l'envie de vivre commence à dépasser celle de mourir. Et puis, il se sent trahi par cette enfant qu'il lui a rendu la vie et qui s'apprête à lui enlever d'une explosion. Non, ce n'est pas possible. Pas Maggy. Pas cette petite innocente qui ne demande qu'à s'amuser et à boire des chocolats. Il ne reste qu'à attendre sur le banc. La police sera là dans quelques minutes et ils se rendront bien compte qu'elle n'y est pour rien. Ou alors, Ils ont raison. Et il rejoindra sa femme.


Une petite pause ça fait du bien. J'aurai bien voulu attraper encore des canards. C'est trop rigolo. Et puis Dan il est trop fort avec les canards ; Il sait bien les pêcher. Et comme ça, j'ai eu une super peluche lapin et un tube pour faire des bulles. Et puis, tous ces gens qui sont arrivés, habillés comme à la télé. Avec des casques, tout en noir, ils font un peu peur. Dan est allé leur parler. Ils veulent me voir tout près et Dan il ne veut pas. Il veut que ce soit lui. Ils lui ont donné un appareil pour me toucher. On dirait presque comme chez le docteur. Sauf qu'on est dehors et qu'il veut que j'enlève mon manteau et il fait froid. Les autres messieurs, ils ont fait un grand cercle autour de nous et ils mettent des sortes de barrières ou une grosse caisse je ne sais pas trop.

Dan parle, il dit plein de choses gentilles. Il me dit que le froid ne va durer que quelques secondes et qu'ensuite, je pourrai vite remettre mon manteau; Il dit qu'il va m'emmener pêcher d'autres canards, boire des chocolats ; Il dit qu'il m'aime. Moi aussi je l'aime. Il me dit merci pour tout ; Je ne sais pas pourquoi, je ne lui ai rien donné. L'appareil fait des bips bips et il est tout froid ; Dan me dit qu'en tout cas, on va rester ensemble quoi qu'il arrive. Je l'aime bien mais j'aimerais aussi retrouver Papa. Le chef des autres gens vient nous. Il n'a pas l'air méchant pourtant.

- Hum. Vous pouvez arrêter je pense. Je peux vous parler une minute ?

  • Quel texte ! D'abord l'on plaint Dan, puis l'on est heureux pour lui, il reprend goût à la vie grâce à cette petite fille. Et puis le doute....l'horreur se met en place ...Bravo, bien ficelé !

    · Il y a plus de 8 ans ·
    Louve blanche

    Louve

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