Une île
Djamel Cheniki
Imaginez une île. Cette partie de la planète où semble s'entremêler, dans une symbiose romanesque, solitude et mystère. Cette petite terre vagabonde, perdue au large d'un océan sans fin. Ce minuscule bout du monde planté là, surplombant l'écume, défiant les vagues, refusant toute notion de départ ou d'anéantissement. Et toute l'infinité d'eau qui l'entoure ou le ciel immense qui l'enveloppe l'indifférent au plus haut point.
Puis, telle une irrégularité dans ce gigantesque bleu, beau et merveilleux fait de ciel et de mer, telle une excroissance perverse, gâchant l'ordre des choses, toute habillée qu'elle est d'une nudité de sirène, notre île, se dresse, hagarde et fière, écoutant dans le silence de l'univers, les plaintes chaudes et amères des vagues interminables, caressant ses flancs et mourant sur son rivage.
Aujourd'hui, je ne puis m'empêcher, chaque fois que la vue d'une île s'offre à mes yeux ou que son image traverse mon esprit, de penser aux poètes et aux artistes que leur destin moqueur a rendus des hommes-îles parmi les Hommes.