Une tâche de vin

Aurore Rodi (Ancienne Alice Gauguin)

Cela faisait quelques mois qu'il entendait des voix. On l'avait diagnostiqué Schizophrénique. Il prenait son traitement, qui l'embourbait dans le néant de ses nouvelles émotions ; mais continuait, sans plus le dire à quiconque, à attendre ses voix. Il ne voulait plus du carcan médical et du rejet de sa famille.

Les, mais il compris finalement qu'il s'agissait d'une seule voix ; et qui n'était au début ni masculine ni féminine, était plutôt un gémissement androgyne.

Fut un soir, où il n'avait entendu de voix, qu'il rentra chez lui, avec un sourire béat d'apaisement. Il fit ses premiers pas dans la maison, s'attardant avec tendresse à caresser ses chats, avant de poser sa veste sur le porte manteau, et d'aller se servir un bon verre de vin qu'il s'abreuverait devant la télévision. 

Tout était parfait, sans ces, sans cette voix. Mais zappant la télé, il tomba sur un film d'horreur. Au bout de cinq minutes, surprise dans le film d'un moment où un bruit sec de verre explose. Alors là, sans raison apparente, et sans qu'il ne s'en rende compte, son propre verre de vin lui explosa dans la main.

Il fallait bien que la journée ne dure pas en si bon terme si longtemps !

Alors qu'il allait se laver les mains et se défaire des éclats de verre, il pris de l'essuie tout pour aller laver son sol.

Mais, alors qu'il commençait à dérouler l'essuie tout, il se figea d'un coup. Le vin semblait parler, plutôt, le vin s'était figé en forme de traces ressemblant à une phrase : "ra pp l t oi l fil du la ".

Il essaya de traduire : rapp toi la file du l ????

La fin, il ne trouva guère, et pris tous ses somnifères prescrits pour se coucher.

Il avait photographié les tâches de vin avant de les laver, afin de poursuivre leur traduction le lendemain.

Le sol était bien sec, comme cette nuit le serait, d'été.

Le lendemain matin, avant de partir travailler, une petite vue d'œil sur le salon.

Mais ?????

Les tâches de vin étaient à nouveau là, alors qu'il était sûr de les avoir lavées.

Et elles reproduisaient le même schéma, preuve en était de son appareil photo.

Glacé, il alla s'asseoir sur la balançoire de son jardin et y resta muré des heures ; avant de décider d'aller faire quelques courses nécessaires.

A la caisse du supermarché, pendant toujours à ce vin là, il prit automatiquement le journal local.

Revenant chez lui, à pas de loups, (y aurait-il quelqu'un pour lui faire une mauvaise blague ? était-il réellement schizophrène ?), il retrouvera la tranquillité de sa demeure.

S'en fichant de la tâche de vin qu'il essuierait plus tard, il se lova dans son sofa tâchant de se concentrer sur le journal.

Et là en première page, la une citait : "La fille du lac".

Le prénom inscrit en dessous de la photo de la berge était... Isabelle. Elle s'était noyée.

Il venait de la quitter, la veille de son problème d'explosion du verre de vin.






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