Un homme et son bâton

Troma Oz

J'ai vu un homme et son bâton,

L'échine voutée, le regard sur ses pieds,

J'ai vu un homme en toutes saisons,

Rester au sec sous la pluie qui tombait

 

Parcourant les routes des vaches

Entre salers et limousines,

Suivant son chemin de fontaines,

Avançant sans croiser d'épine,

Au gré des traces de pas sans peine,

De cet homme sans destin et sans tâche,

 

Ses cheveux pendaient de son capuchon,

Son visage échappant à l'ombre,

Dans un ruisseau d'indifférence,

Naviguant au travers des songes,

Ne comptant plus les secondes chances,

Errant tel un berger sans ses moutons,

 

J'ai vu un homme et son bâton,

L'échine voutée, le regard sur ses pieds,

J'ai vu un homme en toutes saisons,

Jamais mouillé par la pluie qui tombait,

 

Fuyant les rêves et les espoirs des lâches,

Des gros salaires aux limousines,

De toute cause d'envie et de haine,

Le château derrière les épines,

Indiffère son âme sans peine,

En dehors des vents et marrées il marche,

 

De la magie plein son vieux baluchon,

Il marche à travers les jours sombres,

Dans les nuits blanches quand les loups dansent,

Il marche sans même frôler les ondes,

Sans but et sans fin il avance,

À l'abri de sa cape et son bâton,

 

J'ai vu un homme et son bâton,

L'échine voutée, le regard sur ses pieds,

J'ai vu un homme et son bâton,

Traverser les gouttes d'eau sans les toucher,

Je lui ai volé son bâton,

Et j'ai vu le courant l'emporter,

Je lui ai volé son bâton,

Depuis je marche sans ne plus me mouiller,

Je suis un homme et son bâton,

La honte ne touche plus mon regard vidé,

Caché dessous mon capuchon,

J'avance sans ne plus jamais me mouiller.

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