Vertus de la pêche à la ligne

Jean Claude Blanc

avant d'aller aux urnes...

         Vertus de la pêche à la ligne

Pêcheur devant l'Eternel, garde ma canne en réserve

Ne vais pas prendre ma carte, ce printemps est trop froid

Les partis politiques, que le Bon Dieu m'en préserve

Même s'il m'y invite, le brasseur Nicolas

Ne suis pas prêt à jouer, nigaud Dupont la Joie

 

Vais me refaire une bonté, changer d'identité

Désormais impayable marinier sans filets

Pour la pêche à la ligne, dimanche serai dans le thon..

En ce temps à l'orage, ça mord à l'hameçon

 

Surprendre la morue exige de l'expérience

Surtout pas faire de bruit, prendre son mal en patience

Négliger les vairons, qui ne font pas la maille

Vite les remettre à l'eau, sans faire de détail

 

Je prends mon épuisette, ma pipe, ma musette

Haddock, tonnerre de Brest, pour lui faire sa fête

Au fameux espadon, que l'on dit gros poisson

Muet comme une carpe, mais pas un esturgeon

Pas comme le maquereau une espèce d'anguille

Reconnaissable de suite, a sa queue qui frétille

 

Ce serait désobligeant, déranger le saumon

Qui va pondre ses œufs, au sein du court bouillon

Faisant fi des requins et des menus goujons

Dans un vaste océan, il prendrait le melon

 

Mais faut des alevins pour peupler la rivière

Sûrement pas des ombres qui craignent la lumière

La tanche est repoussante, le hareng tout autant

Préfère la rascasse, le barbue, le merlan

 

Friture à déguster provenant de chez les merlus

Où ça sent la marée, la murène qui pue

Le loup et le mulet, le pèlerin marteau

Je ne m'y risque pas, perds le fil aussitôt

 

La truite familière, habite les ruisseaux

On l'a apprivoisée, la gavant d'asticots

Pour mieux la crocheter cette pauvrette ablette

Le barbeau, le brochet, meilleurs dans l'assiette

Demandez au merlan, il connait la recette

 

En connait un rayon, le gars de la marine

Pour ne pas se sentir, se pince les narines

Consulte son manuel, pour faire sa cuisine

Est-ce poisson pilote ou une fine sardine

Finalement pourri en arrivant au port

Dégoûté de lui-même, se jette par-dessus bord

C'est bon pour les jeunots, pêcher dans l'inconnu

A craindre d'alpaguer d'ignobles détritus

Des godasses de reste, des vestes vermoulues

Qu'on balance, usagées, que bonnes pour la poubelle

Même l'écolo pêcheur, ses merdes s'y amoncellent

 

Sur les étangs sans fin, aussi je mène ma barque

Ne prendra jamais l'eau, je rame dans les nuages

N'y a pas de limites, pour atteindre le large

Pas de barrage, ni de retenue, à nager dans une flaque

 

Ouverture de la pêche, hélas que celle des voix

N'étant pas pèlerin, seulement aiglefin

Prendrai pas mon permis, ce serait à contre-emploi

La roussette qui nous guette, vraiment un coupe faim

 

Le macro esturgeon, dont on fait le caviar

Ne lui veut aucun mal, que jouer colin-maillard

L'énorme animal, Il en pont des milliards

Les écailles dorées, des fortunés, la star

 

Assis dans les roseaux, ne vois âme qui vive

Je cherche vainement le bon côté de la rive

La mulle a ses humeurs, difficile à comprendre

Si elle n'attaque pas ne songe qu'à se défendre

 

Mon cerveau de limande se débine trop visqueux

J'ai la tête de l'anchois salé pas venimeux

Me mettant à la place de la raie des eaux profondes

Je flotte à mon aise dans le trou du cul du monde

 

Celui de la Terre des Hommes, me fait plus guère envie

L'abime des océans, ce n'est pas ce qu'on croit

Cohabitent les mollusques avec les poissons scie

Sur le plancher des vaches, se perchent oiseaux de proie

Pêcheur c'est ma vertu, je les réconcilie

 

Putain d'humanité, trop bien organisée

Où faut toujours un chef, en sévices commandés

Les sirènes du progrès, remontent comme la marée

Croisière du cachalot, de Loti, j'ai pris note

Ne vais pas me noyer me dorlote la lotte

 

Que de circonvolutions à la veille de voter

Car c'est interdit d'en faire publicité

Permettez-moi quand même d'y faire allusion

Sachant que je ne prêche pas la révolution

Que celle des espèces toutes en régressions

« Pas l'homme qui prend la mer, c'est l'amer qui prend l'homme »

Je le comprends Renaud, lui qui en fait des tonnes

De ses tonneaux de bière, connaisseur gastronome

Mais entre vous et moi, en se regardant en face

Qui est le plus sensé, qui est le plus vorace

La bête, sot animal, confectionne son royaume

Et en n'obéissant qu'à ses nobles propres normes

Alors que la société survit en aquarium

Devenu pour nous un dogme, hisser le plus haut dôme

 

Humanité servile qui fait la charité

A qui on jette des graines, pour qu'elle foute la paix

On l'observe s'agiter dans son bocal glacé

Sont belles ses écailles qui ont de doux reflets

Antibes parc aquatique, posé sur le buffet

 

Pêcheur libre, digne, dimanche me lèverai tôt

Contournant la mairie, l'isoloir des gogos

Que pisse le mérinos pour un ordre nouveau

Vais titiller la truite, pas la blonde ni le jeunot

 

Il est près de minuit, le six passera au sept

Il faut que je me dépêche de vous lancer la perche

Déroule mon moulinet, trop vite sur internet

Mes vers sont périmés, mes écrits valent pas lerche

N'ayant plus rien faire, à l'aube partie de pêche

J'en ai fait religion, que d'être dans la dèche…

Hélas il y a loin de la parole aux actes

Comme affabulateur, j'aime croire au miracle

« Le vieille homme et la mer », d'Ernest Hemingway

C'est pas de la gnognote, a vraiment existé

A vaincu l'espadon, pourtant pas bien portant

Par contre match nul, les deux agonisants

 

C'est le geste qui compte, et le tempérament

Barbotent les canards, dans la vase de la mare

Grenouillent les têtards, mourant par accident

Trouve ça plutôt génial, l'amer n'est plus à boire

 

Mes rimes coulent à flot, mais souvent tombent à plat

J'essaye de vous distraire, de ces élections extra

Bipèdes raisonnables, qu'avaient les doigts palmés

Signez pas le registre, de la marque « A voté »

Moi j'ai trouvé l'excuse, sage martin pêcheur

Je dois faire recette, de poiscailles sans valeur

Sachant que tout me fait ventre, fais ma cuisine au beurre

J'avale les arêtes, qu'importe mon honneur

 

Je suis venu à bout de ce texte tortillé

Etant contorsionniste, je vous le sers tel quel

A vous de le traduire, à nos élus zélés

Ces élites vous trompent, en battant le rappel

D'ailleurs on annonce, une tempête de grêle

Dimanche aux abris, des pigeons à la pelle JC Blanc 2017 (bouder ça compte c'est notre voix)

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