Musique maestro !

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L’immense et regretté Richard Wagner disait que ‘’la musique commence là où le pouvoir des mots s’arrêtent’’. Avec les autres grands compositeurs de sa trempe comme Mozart, Bach ou Beethoven, ils ont inventé un nouveau langage où les lettres étaient remplacées par des notes, les phrases par des mélodies, les livres par des partitions et les histoires par des symphonies. Le langage musical est ancestral, immuable et universel.

Mais Wagner avait une vision un peu manichéenne de la chose. Pour lui, la musique était supérieure aux mots car elle permettait de transgresser les limites posées par le langage à proprement parler. La musique était envisagée comme une continuité des mots, une extension vers un univers plus large que celui du verbe. Il va de soi aussi que, par leur beauté, ces mélodies se suffisaient à elles-mêmes.

Depuis l’époque moderne, la pensée de Wagner et de ses congénères qui est de placer la musique comme extension des mots est balayée. En effet, les compositeurs d’aujourd’hui s’arrêtent à une vision complémentaire de ces deux arts ancestraux. Avant, on était soit poète, soit musicien. Aujourd’hui, quasiment tous ceux qui font de la musique sont en fait les deux. La musique apporte toujours la part émotionnelle de la chose. Et les mots alors dans tout ça ? Les mots sont là pour le message. Aujourd’hui deux mondes s’opposent : d’une part celui de la musique électronique qui donne en général la part belle aux mélodies en oubliant quelque peu les paroles, et le reste, les chansons avec compositeur, parolier et interprète ! Et c’est cette dernière catégorie qui nous intéresse.

Car récemment un petit collectif parisien est sorti de la savane musicale française : Fauve. Ils ont fait le choix d’utiliser une prose musicale brute en mettant l’accent sur les paroles, la mélodie servant juste à appuyer les mots. C’était un pari gagnant. Ils utilisent leur musique comme thérapie, comme exutoire même. "Réussir à s’armer contre les sales pensées, serrer les poings, serrer les dents, leur rentrer dedans, essayer d’attraper des syllabes à la volée et essayer d’en faire des bougies qui éclairent, finalement c’est pour ça que j’écris."

‘’Il me dit des mots d'amour / Des mots de tous les jours, / Et ça m'fait quelque chose’’. Edith Piaf le savait, l’amour et les mots font bon ménage. De Cabrel à Shakira, en passant par Bruel, les Beatles, Rihanna et les autres, les chansons d’amour ont toujours été une valeur sûre. Mais au-delà de ces chansons pour la plupart commerciales, il existe des chansons à textes. De vrais poèmes. On pourrait les apprendre au collège car sans la musique les mots sont toujours là. Prenons des exemples. Dans la Nouvelle Star – désolé de la référence, ne fuyez pas – Florian, jeune et brillant candidat avait repris un poème de Guillaume Apollinaire : ‘’Le pont Mirabeau’’. D’autres artistes sont des esthètes dans la fabrication de leurs paroles. À cet égard, Hubert Felix Thiéfaine est pour moi un des plus grands poètes modernes. Ses paroles engagent un maelstrom de sentiments. Notamment ce ressenti de débauche qu’il prêche dans ‘’La fille du coupeur de joints’’. Damien Saez entre dans la même catégorie. Son plus grand poème, et le plus personnel aussi, est ‘’Châtillon-sur-Seine’’, une chanson hommage à ses plus proches et fidèles amis. Parfois les mots suffisent pour faire ressentir l’émotion.

Je pense donc que Wagner avait tort. Les mots, le langage sont autosuffisants. La musique ne sert qu’à les appuyer, les embellir, les magnifier. Nous continuerons à écouter de la musique car au-delà des notes et des accords il y a des paroles, de la poésie et surtout des messages.

Par Julien Rozenblum.