A l'assaut du Mont Ventoux
fanchie
Cruel, hostile, sauvage, impitoyable... Le Mont Ventoux est un ogre réclamant de la chair fraîche, un vampire s'abreuvant de la sueur et des larmes des coureurs ayant eu l'audace de le défier. Il est de ces lieux où la Terre semble tellement morte qu'elle en devient sinistrement vivante, de ces pentes où chaque coup de pédale s'apparente à une vaine tentative de survie face à un prédateur attendant la gueule ouverte que sa proie succombe à l'épuisement.
Sur son crâne pelé par le Mistral incessant, le Mont Chauve concasse les cuisses, incendie les poumons et broie les ambitions des téméraires. Tel Ulysse face au chant des sirènes, l'audacieux se trouve irrésistiblement attiré par les hurlements de ce vent qui rend fou. Ceux-ci deviennent des mots que ce souffle infernal susurre à son oreille, des mots l'invitant à lâcher prise, à s'abandonner dans les bras de Perséphone, reine des Morts.
Le sommet de ce Géant de Provence n'est qu'une vaste étendue désolée, petit bout de Lune échoué sur une terre qui perd ses contours et fait défaillir les forçats de la route. Mâché par la machine, l'œil vidé de son étincelle, le héros victorieux semble perdu sur le toit de ce monde irréel. Mais il pourra fièrement regarder Hercule dans les yeux : ils partageront, à tout jamais, le prestige d'être tous deux revenus des Enfers...