Ai-je passé le temps d'aimer ?
My Martin
Mon amant me délaisse
Ô gai ! Vive la rose !
Je ne sais pas pourquoi
Vive la rose et le lilas !
On dit qu'elle est plus belle
Je n'en disconviens pas
On dit qu'elle est malade
Peut-être qu'elle en mourra
Mais si elle meurt dimanche
Lundi, on l'enterrera
Mardi, il reviendra me voir
Ô gai ! Vive la rose !
Mais je n'en voudrai pas,
Vive la rose et le lilas !
18e siècle. Chanson traditionnelle
***
J'ai la mémoire qui flanche
J'me souviens plus très bien
Comme il était très musicien
Il jouait beaucoup des mains
Tout entre nous a commencé
Par un très long baiser
Sur la veine bleutée du poignet,
Un long baiser sans fin
Quel pouvait être son prénom
Et quel était son nom ?
Il s'appelait, je l'appelais,
Comment l'appelait-on ?
Pourtant, c'est fou ce que j'aimais
L'appeler par son nom
De quelle couleur étaient ses yeux ?
Je ne crois pas qu'ils étaient bleus
Étaient-ils verts, étaient-ils gris ?
Étaient-ils vert-de-gris ?
Ou changeaient-ils tout le temps de couleur
Pour un non, pour un oui ?
Habitait-il ce vieil hôtel
Bourré de musiciens ?
Pendant qu'il me ... pendant que je ...
Pendant qu'on faisait la fête,
Tous ces saxos, ces clarinettes
Qui me tournaient la tête
Lequel de nous deux s'est lassé
De l'autre, le premier ?
Était-ce moi ? Était-ce lui ?
Était-ce donc moi ou lui ?
Tout ce que je sais, c'est que depuis,
Je ne sais plus qui je suis
Voilà qu'après
Toutes ces nuits blanches
Il ne me reste plus rien,
Rien qu'un petit air qu'il sifflotait,
Chaque jour en se rasant
la..la..la..la...
Chanson (1963) écrite et composée par Serge Rezvani (né en 1928). Écrivain, auteur-compositeur-interprète
***
Comprenne qui voudra
Moi mon remords ce fut
La malheureuse qui resta
Sur le pavé
La victime raisonnable
À la robe déchirée
Au regard d'enfant perdue
Découronnée défigurée
Celle qui ressemble aux morts
Qui sont morts pour être aimés
Paul Éluard (1895-1952)
'Comprenne qui voudra' (1944)
Paul Éluard évoque les femmes tondues publiquement, à la fin de la Seconde Guerre mondiale
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Que sont mes amis devenus
Que j'avais de si près tenus
Et tant aimés
Ils ont été trop clairsemés
Je crois le vent les a ôtés
L'amour est morte
Ce sont amis que vent me porte
Et il ventait devant ma porte
Les emporta
Rutebeuf (vers 1230-1285)
'Le Dit de la grièche d'hiver' (vers 1256)
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Ai-je passé le temps d'aimer ?
Jean de La Fontaine (1621-1695)
'Les deux Pigeons' (1678)