Album

-algos-

Petit texte à propos de mon ressenti face à ces vieux albums photos familiaux. C'est un texte qui date quelque peu, mais je trouve qu'il ira très bien comme première publication ici.

Le passé survient, entre les étagères des meubles dont l'intérieur renferme les mémoires de ceux qui sont nos parents. J'ouvrai le vieux meuble au style un peu rétro et apparu devant moi un ensemble de reliures colorées ; rouges, bleus, jaunes, et parfois aux motifs fantaisistes, des albums souvenirs attendaient là, espérant d'être un jour lus et relus. Les albums de mes parents et grands-parents.
Un parfum de mélancolie enivrant me fit prendre délicatement, comme l'on recueillerait un vieux chat qui se loverait entre nos bras content d'un peu de compagnie. Lorsque j'ouvrai, l'album crissa de vieillesse, ses plaques de plastiques et de papiers superposés lançait à celui qui les manipulait une salutation des plus singulière, que seul les hommes en quête du passé connaissent.
Je vis alors sous mes yeux s'étaler des photos aux couleurs s'évanouissant, des sourires et des visages heureux tirés tout droit de l'enfance et de la jeunesse. Je ne pus m'empêcher de leur sourire en retour. Pourtant je voyais, je voyais qu'ils parlaient, s'adressaient, riaient pour la personne qui avait pris cette photo. Je devinais derrière ces faciès juvéniles, lisses et pure visages que le temps a usé, toute la joie, l'insouciance capturée en un instant, conservée sur un fin film plastifié. Comme d'imperturbables témoins, elles délivraient souvenirs sur souvenirs en un carnaval de personnages et de lieux. Je voyais encore toute cette vie qui s'exprimait à travers elles, comme des sentiments chantant pour l'éternité sur leur si fragile support.
Toutes ces personnes si jeunes, certaines je les connais, d'autres moins, d'autres ne me sont connus que par ce que l'on m'en a dit, d'autres encore me resteront à jamais inconnues. J'étais un explorateur, en quête d'un objet qui ne peut être contenu, la mélancolie. Je me surpris à rire lorsque je les voyais rire, à rester songeur quand apparaissait parmi les pages le portrait d'un parfait inconnu et à tenter de lui parler à travers l'espace et le temps.

Puis je refermai le vieil album, emplit d'une légère tristesse, d'une amertume mélancolique. Je quittai donc le monde des polaroids et autres vieux artefacts photographiques pour retourner dans le compliqué monde du présent. Mais un jour ce sera moi dans l'album, ce sera au tour de mes enfants de revivre un cours instant, l'intensité de ma jeunesse.

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