AMOUR ET RESPECT

Renée Frappa

Renée FRAPPA

AMOUR

 

ET

 

RESPECT

Marie ouvrit un œil pour consulter la pendule, alors que les premiers rayons du soleil se glissaient sous les volets. Il était sept heures: si elle se levait dès maintenant, elle aurait une heure devant elle, un paisible moment durant lequel elle pourrait se détendre, réfléchir, s'occuper d'elle. Doucement, elle se faufila hors des draps, s'étira, puis sorti de sa chambre vers la salle de bain et passer sous la douche. Une fois sa toilette terminée, Marie enfila un peignoir de soie bleue: celui-ci faisait ressortir sa belle chevelure brune qui retombait en douceur sur ses épaules. A vingt cinq ans, elle était si belle…. et si seule avec son chat.

            Après avoir pris son petit déjeuner et pensé à son rendez-vous de la journée, elle se rendit dans sa penderie choisir une tenue: ensemble pantalon – chemisier de soie écrue. Enfin prête!

            Après une petite caresse à son chat "Bambou", elle prit ses clés de voiture pour se rendre à un entretien d'emploi qui correspondait à ses ambitions. Avec un brin de nostalgie, quitter sa belle maison, son jardin plein de fleurs si parfumées pour rejoindre Paris, lui faisait un petit pincement au cœur: tout ce bruit, toute cette foule lui donnaient le vertige mais elle n'avait pas le choix: elle devait s'assumer.

            Après avoir été mariée avec Dany, un homme très beau, intelligent: une "très bonne situation", mais "coureur de jupons". Deux ans plus tard, tout était consommé: le mariage et ses rêves. Il était temps de tourner la page.

            Sans quitter la route des yeux, elle repensait à sa vie: Très jeune, Marie savait qu'elle voulait occuper un poste de direction. A cette époque, elle vivait avec ses parents, joailliers à la retraite: elle avait eu une jeunesse dorée près d'eux et de ses amis. Malheureusement, au cours d'un voyage aux antipodes, l'avion percuta une montagne: il n'y eut aucun survivant. Maintenant, Marie vivait seule dans leur maison. Que de souvenirs heureux et douloureux parmi toutes ces pensées: une larme coula sur ses joues.

Pourtant, elle se rendit à l'évidence: la vie continuait et il fallait se battre pour atteindre le but qu'elle s'était fixé, comme l'avait fait son père. Elle mettrait tous les atouts de son côté pour réussir sa vie. C'était, pour l'instant, son seul but: après, elle "aviserait".

            C'est dans cet état d'esprit qu'elle se présenta à son rendez-vous. Le siège de la société de cette grande maison de couture, se trouvait sur les Champs-Élysées, dans un imposant immeuble. Après avoir pris l'ascenseur, elle se trouva face à une hôtesse qui la fit patienter dans un petit salon, afin que le P.D.G. la reçoive. Lorsque celui-ci arriva, elle eut le souffle coupé par sa beauté, son élégance. Très sûr de lui, il se présenta:

-    Stéphane MOREL – Je suppose que vous êtes Marie DAX.

Après une franche poignée de main, il l'invita à passer dans son bureau en lui proposant un café qu'elle accepta bien volontiers. Il étudia son Curriculum Vitae et leva les yeux : il semblait comblé par ce qu'il venait de lire. Aussi lui proposa-t-il un poste de directrice de la boutique de couture. Marie écoutait d'un air distrait, tellement troublée par cet homme, son regard d'un bleu perçant, attendant sa réponse. Il lui tendit le contrat: sans l'étudier, elle s'empressa de signer. Pour sceller cet accord, il l'invita à déjeuner, ce qu'elle accepta avec une joie intense. Malgré ses résolutions de ne plus tomber amoureuse, cet homme la fascinait:

- Je vous emmène dans un café où la cuisine est très raffinée. Cet endroit est fréquenté par de nombreux artistes peintres, vedettes de cinéma; il devrait vous plaire…

Effectivement, l'intérieur faisait plus songer à une grande maison familiale. C'était un endroit chaleureux et accueillant, qui plut tout de suite à Marie. Ils s'installèrent autour d'une petite table ronde où un très beau bouquet était déposé. C'était un moment de détente: Stéphane était un homme très sympathique. En la regardant, il lui proposa:

- Marie, puisque nous sommes appelés à collaborer, appelez-moi "Stéphane": nos rapports en seront facilités.

Leurs relations démarrèrent sur "les chapeaux de roue". En prenant l'apéritif, il la questionna sur sa vie: il voulait tout savoir. Elle s'y soumit bien volontiers.

-    Stéphane, assez parlé de moi; dites-moi les grandes lignes de votre vie, pour mieux vous connaître, moi aussi.

-    Oh! Marie, si je commence à vous faire des aveux, je crains que nous manquions de temps. Aussi je vous propose de terminer notre déjeuner et de reporter à plus tard mes confidences.

Le déjeuner terminé, ils se quittèrent jusqu'au lendemain, jour de la prise de fonction de Marie.

Sur le retour, elle ne pouvait cacher son trouble et ses émotions; elle n'avait qu'une hâte, rentrer chez elle et retrouver "Bambou".

Assise sur le canapé, elle se sentait heureuse et essayait de comprendre ce qui avait pu la mettre dans cet état. Elle ferma les yeux et dut se rendre à l'évidence: elle était tombée amoureuse au premier"coup d'œil"; Elle s'affola car elle ne voulait pas à nouveau souffrir; qu'elle était dans l'ignorance ! Peut-être était-il marié et père de famille: il fallait qu'elle chasse ses idées vagabondes.

Aussi alla-t-elle se coucher avec un bon livre mais elle n'arrivait pas à se concentrer sur sa lecture. Comme il était tard, elle essaya de s'endormir pour être en "super-forme" le lendemain.

-    Bonjour le chat ! Tu sais, je vais devoir t'abandonner jusqu'à ce soir. Tu m'attendras bien sagement… Viens, que je te fasse des caresses avant que je me prépare!

Aujourd'hui, Marie va faire un effort pour paraître à son avantage. Le soleil brillait; aussi enfila-t-elle une belle robe très printanière, chaussures et accessoires assortis. Un regard dans la glace lui renvoya l'image d'une jeune femme superbe avec des jambes aux galbes parfaits, ce qui la mit en confiance.

            Arrivée à la boutique, Marie devait recevoir les directives de Stéphane, être présentée au personnel qui était déjà installé. Dès que Stéphane arriva, son regard fit le tour de la table. Ses yeux s'arrêtèrent sur Marie, ce qui n'échappa pas aux autres car ils remarquèrent qu'il était fasciné par sa beauté, ce que tous pouvaient comprendre. Lorsqu'il prit la parole, on le sentait très troublé; mais il assuma ce pourquoi il était là, chose qui fut faite dans une très bonne ambiance. Le personnel ayant rejoint son service, Marie se trouva seule avec Stéphane qui ne put se retenir de la complimenter sur sa beauté. Avant d'aller à l'essentiel de son travail, il lui montra son bureau qu'une seule porte séparait du sien. Il lui expliqua ce qu'il attendait d'elle, lui souhaita bonne chance avant de se retirer.

            Marie fit le tour de son nouveau territoire: elle constata que tout était réuni pour travailler dans de bonnes conditions. Elle  avait la responsabilité de créer la collection d'automne… et déjà une myriade d'idées qui lui tournaient la tête. Elle appela Annie, la responsable de fabrication, pour qu'elle lui présente les tissus. Importés d'Europe, pour la plupart, ceux-ci étaient de toutes premières qualités; des lainages, des soies, du cachemire de magnifiques couleurs. Après avoir fait le point avec Annie, elle devait rencontrer Nicolas, le styliste, ce qui allait lui prendre beaucoup de temps pour choisir les modèles et exposer ses idées qui devraient "faire fureur" cet hiver. Après les premières ébauches, Marie regarda sa montre et poussa un petit cri.

-    Oh! Mon Dieu, déjà dix neuf heures !

La journée était passée d'un trait; aussi pria-t-elle Nicolas d'arrêter, en lui proposant de tout reprendre le lendemain. En retournant à son bureau, Marie se trouva nez à nez avec Stéphane: 

-    Excusez-moi, Marie, mais avant que vous partiez, je voudrais faire le point avec vous, sauf si vous êtes attendue.

-   Pas de problème, personne ne m'attend, a part mon chat. Je suis à votre disposition.

-   Dans ce cas, allons dans mon bureau: nous y serons plus à l'aise et comme j'ai très soif, j'en profiterai pour me désaltérer.

De ce pas, il se dirigea vers le bar et offrit une boisson à Marie. Il se sentait très à l'aise auprès d'elle; aussi, après avoir fait le point sur la situation et félicité Marie, il lui suggéra d'aller dîner au café, tout près du Siège. Marie était ravie.

            Ils partirent. Dehors, la température était très douce. Arrivés au restaurant, ils s'installèrent: tout y respirait la détente; le pianiste jouait des mélodies. Ils commencèrent à parler de tout et de rien. Marie voulait en savoir plus et surtout connaître la vie privée de Stéphane. Et c'est sans scrupule qu'elle lui posa la question:

-   Stéphane, lorsque nous nous sommes quittés hier, vous m'avez laissé sur ma faim et m'avez promis de me raconter votre vie.

Il la regarda intensément dans les yeux

-    Chose promise: chose due ! Vous savez, Marie, sur bien des points je vais vous surprendre. Tout d'abord, permettez-moi de vous tutoyer: cela sera plus intime.

-    Je vous en prie ! J'accepte bien volontiers.

-    Voilà – mes parents sont les fondateurs de trois boutiques de couture: une à New York, dont mon Frère Anthony est directeur; une à Londres; et celle de Paris, que tu connais. J'ai toujours vécu dans ce milieu: au fil des années, notre clientèle s'est faite de gens fortunés, de vedettes, de riches clientes venant de l'étranger.

Marie l'écoutait, attentive:

-    Je me rends compte que tu as eu une vie fascinante.

-    Ne crois pas cela: tout n'était pas rose…ou cela l'était jusqu'au jour où au cours d'un défilé, je fis la connaissance de Séréna, un célèbre mannequin. Je n'étais pas le seul à la regarder: tous les regards masculins convergeaient vers elle, mais c'est vers moi qu'elle vint, une coupe de champagne à la main, très à l'aise. Elle savait qui j'étais; moi je croyais que je l'attirais. Pauvre naïf que j'étais! Je ne l'ai compris que plus tard…. Beaucoup plus tard. Une relation s'est établie entre nous. Je la présentai à ma famille: eux aussi tombèrent sous son charme. Fille intelligente, elle sut s'attirer toutes les sympathies, même celle de mon frère Anthony venu de New York pour les fêtes de Noël. Notre relation durait depuis six mois et tout allait bien entre nous. Je profitai des fêtes pour l'épouser. Nous partîmes en voyage de noces à Venise: Ce furent des jours inoubliables. Nous passions pratiquement nos journées au lit à nous aimer et nous sortions juste le soir pour dîner et découvrir les nuits animées. Après cette semaine passée loin des tracas quotidiens, nous rentrâmes à Paris. Chez nous, à notre arrivée, je constatais qu'une main féminine était passée par-là. Mon appartement était parfait: des fleurs partout; le réfrigérateur avait été rempli de bonnes choses. Le champagne était au frais et rien n'avait été négligé. Séréna ne cessait d'admirer les pièces et leur décoration: Une sorte de satisfaction brillait dans ses yeux.

-    Chéri, je suis émerveillée par ce cadre aussi luxueux; j'espère pouvoir y rester le plus longtemps possible et que je ne serai pas trop souvent appelée à me déplacer à l'étranger pour mon travail.

-    Ecoute, Séréna, dans la précipitation nous n'avons jamais abordé ce sujet: Je peux te dire que tu n'as aucune inquiétude à avoir. Tu peux démissionner tout de suite: J'ai largement de quoi subvenir à tes besoins. Tu pourrais m'aider à diriger la boutique…

Quelle idée avais-je eu d'aborder ce sujet: sa réplique fut immédiate:

-   Chéri, comment as-tu pu penser un seul instant que je renonce à ma situation?

L'erreur que nous avions faite, c'est de ne pas en avoir parlé auparavant. Séréna se rapprocha de moi et m'embrassa. Elle allait passer à la salle de bain lorsque mes parents vinrent nous souhaiter la bienvenue:

-    Alors les enfants, comment vous sentez-vous?

-    Tout s'est bien passé.

-    Nous sommes heureux que vous soyez de retour.

En buvant une coupe  de champagne, à chacun de raconter ses péripéties… puis l'heure avançant, mes parents se retirèrent non sans nous avoir invités à venir dîner chez eux.

Etant épuisés, nous n'avions qu'une envie, aller nous coucher: Ce fut encore une nuit d'ivresse.

Nous n'étions pas encore levés que le téléphone retentit: Séréna devait se rendre d'urgence à New York pour un défilé. Je n'étais pas d'accord mais elle me fit comprendre que je devais accepter; je n'avais pas le choix.

-    Alors je te propose une chose: j'appelle Anthony à New York; il viendra t'accueillir à l'aéroport et te conduira à ton hôtel. Cela évitera de te fatiguer à porter tes valises.

Après avoir réfléchi, elle fut d'accord et me remercia par un tendre baiser. Mon frère n'y vit aucun inconvénient et me promit qu'il serait à l'arrivée de l'avion.

Le départ était prévu pour le lendemain: j'avais beaucoup de peine qu'elle me quitte aussi prématurément après notre mariage. Elle s'envola et je me retrouvai seul dans cet appartement où des effluves de son parfum flottaient encore. Comme promis, Anthony l'attendait: elle lui donna le nom de son hôtel mais comme mon frère était célibataire, il lui proposa de  venir chez lui.

-    Vous êtes ma belle-sœur, et une présence féminine dans ma maison me changera de ma routine.

Lorsque je lui avais présenté Séréna, j'ai tout de suite compris qu'elle lui plaisait, et l'inévitable arriva: je le sus beaucoup plus tard, quand je remarquai qu'elle se rendait de plus en plus souvent à New York. Confiant, je ne me suis jamais méfié.

Un jour, alors que nous venions de dîner, je la vis partir en courant aux toilettes: elle se mit à vomir. J'étais affolé, car elle était d'une pâleur à faire peur. Je lui demandai ce qui se passait, si elle allait mieux…. Voulait-elle que j'appelle un médecin, mais là aussi sa réaction me surprenait, prétextant que ces nausées étaient dues au décalage horaire et à ses défilés.

-   Ne t'inquiète pas, une bonne nuit et cela ira mieux demain.

Elle alla se coucher; mais dans la nuit, j'entendis des gémissements qui provenaient de la salle de bain. J'y courus; et là, je la trouvai étendue sur le sol, baignant dans une mare de sang.

J'appelai aussitôt le médecin qui arriva très vite et nous la portâmes sur le lit. Après l'avoir examiné, il me demanda de sortir. Un peu plus tard, il réapparut:

-    Je suis désolé, votre femme vient de faire une fausse couche: je suis obligé de la faire hospitaliser parce qu'elle a perdu beaucoup de sang.

J'étais effondré car j'avais pris toutes les précautions lorsque nous faisions l'amour. Le ciel me tombait sur la tête: comment avait-elle pu me faire une chose pareille?

Malgré tout, je me rendis à l'hôpital: le docteur m'assura que tout allait bien; Séréna ayant une très bonne constitution, elle se remettrait très vite.

J'entrai dans la chambre, elle avait été placée sous perfusion et dormait.

Installé à son chevet, j'attendis. Elle entrouvrit les yeux, mais lorsqu'elle me vit, elle détourna aussitôt son regard et se rendormit sans rien me dire. De toute façon, ce n'était ni le moment ni le lieu pour avoir des explications.

Trois jours plus tard, elle revint à la maison. Elle ne parla pas, à part quelques banalités; elle faisait comme si rien ne s'était passé. Moi je n'en pouvais plus, il fallait que je sache…

Maintenant que Séréna était rétablie, je la retrouvai dans sa chambre et lui demandai si elle n'avait rien à me dire. Elle me raconta ce qu'elle avait vécu avec mon frère, elle était sois-disant désolée. Une fureur s'empara de moi:

-   Tu es….. désolée? Alors que nous venons seulement de nous marier! Quel genre de femme es-tu donc? Tu me trompes! et de plus, avec….. mon frère. Je te ne le pardonnerai jamais: tu prépares tes bagages et tu quittes cet appartement: je veux que, ce soir, lorsque je rentrerai, tu aies quitté les lieux.

Elle se mit à pleurer, me suppliant de lui laisser une autre chance, mais il n'en était pas question.

Autant je l'avais aimé, autant je la haïssais, meurtri que j'étais. Tout était parti: mon amour, ma confiance…. Et c'est "vidé" que je sortis.

J'ai erré dans la ville, puis me suis assis sur un banc pour "faire le point". Je me rendis compte que je m'étais marié sur un "coup de foudre" et que, dans le fond, je ne connaissais rien de Séréna. Je sus beaucoup plus tard, par des "connaissances", qu'elle avait "jeté son dévolu" sur moi depuis longtemps, uniquement pour porter un nom célèbre.

Je compris alors que j'avais épousé une femme calculatrice et que ses sentiments faisaient partie de son jeu: tout était faux.

Comme je le lui avais demandé, Séréna était partie. Je n'ai pas cherché à savoir où elle avait posé ses valises.

-     Voilà, Marie, tu sais tout. Depuis, j'ai voué une haine envers toutes les femmes jusqu'au jour où tu es entrée dans mon bureau.

Marie était stupéfaite par ses aveux, elle tendit le bras et lui caressa la joue:

-     Comme tu as dû souffrir!

-     Oui, tu peux le dire: je ne souhaite à personne de subir une telle humiliation. Après trois ans, j'ai "tourné la page": la solution était de m'investir "à fond" dans mon travail, ce que je fis.

Il était tard. Sur ces entrefaites, le serveur leur apporta la note. Stéphane la régla et ils sortirent main dans la main. Ils flânèrent sur les quais de la Seine; Stéphane prit Marie dans ses bras: Peut-être était-ce simplement le fruit de son imagination, mais Marie entendait leurs cœurs battre au même rythme; elle leva la tête et plongea son regard dans ses yeux bleus. Le trouble qu'elle y décela, faisant écho au sien, la combla de bonheur.

Elle ferma les yeux; Stéphane lui prit les lèvres, ce qui fit chavirer Marie. Ils s'embrassèrent avec une violence presque douloureuse, avides l'un de l'autre; elle se laissa aller à la sauvagerie de ces baisers et de ces caresses. Pour eux, plus rien n'existait. Pourtant, Marie se ressaisit et demanda à rentrer:

-   Non! Pas tout de suite: mon petit chat m'attend.

-   Bon, d'accord! Accepte au moins que je te raccompagne.

-   Si tu veux, mais seulement jusqu'à ma voiture.

Malheureusement, au moment de partir, la voiture ne démarra pas – plus de batterie – elle avait oublié d'éteindre ses feux. Que faire à une heure pareille? A part téléphoner à sa voisine de bien vouloir s'occuper de son chat: ce que la voisine fit: heureusement, c'était une dame charmante toujours prête à rendre service.

Stéphane trouva l'autre aspect de la solution:

-    Ecoute! Nous sommes près de chez moi; viens dormir à la maison.

Marie n'avait pas le choix, elle accepta. Ils arrivèrent à l'appartement. Stéphane lui montra sa chambre, la salle de bain.

Il s'approcha d'elle, dans le grand silence du salon: le temps sembla soudain s'arrêter. Marie sentit son sang s'accélérer dans ses veines; au fur et à mesure, l'émotion montait en elle. Il la serra dans ses bras, l'embrassa avec fougue. Elle avait l'impression que ses jambes se dérobaient et sentait le désir prendre possession d'elle. Qu'allait-il lui arriver?

-    J'ai envie de Toi, Marie; – lui murmura-t-il en la pressant davantage contre lui – je t'aime, viens dormir avec moi.

Comment résister? Elle savait qu'il était sincère; mais elle trouvait que faire le saut était prématuré. Elle perdit tout contrôle lorsque Stéphane la prit dans ses bras et la porta dans la chambre. Elle ne put résister, comme hypnotisée qu'elle était. Tout en l'embrassant, Stéphane dégrafa sa robe, la laissant glisser sur la moquette; descendit jusqu'à la poitrine de Marie et laissa glisser sa bouche sur sa partie la plus intime. Il l'embrassa à nouveau: Marie vit que ses yeux brûlaient de désir; elle se mit à le caresser et tous deux poussaient des petits gémissements. Stéphane la prit très délicatement et ce fut l'extase comme Marie ne l'avait jamais connue. C'est exténués qu'ils s'endormirent dans les bras l'un de l'autre.

Aussi, lorsque le réveil se mit à sonner, il fallait faire face à la réalité et retourner à la boutique. D'un commun accord ils n'arriveraient pas ensemble pour éviter tous les commérages.

Marie avait pris soin de téléphoner au garage, afin que sa voiture fut prête. Elle partit la première après avoir embrassé Stéphane avec ferveur.

-    A tout de suite, je t'aime…..

Puis elle disparut. Quant à lui, tout à ses émotions de la nuit, il pensait qu'il n'avait jamais vu de beauté aussi dévastatrice, que Marie était vraiment une femme exceptionnelle sur bien des points, la synthèse parfaite de la beauté et de l'intelligence. Il serait resté là des heures durant à penser à elle, mais le devoir l'appelait tout en sachant qu'il la retrouverait à la boutique. En arrivant, il la salua comme si rien ne s'était passé, face à la présence du styliste qui se trouvait près d'elle.

Cet amour intense durait depuis des mois; la collection se présentait sous les meilleurs auspices et Marie assumait à merveille ses responsabilités, ce qui n'était pas pour déplaire à Stéphane qui avait trouvé en elle une précieuse collaboratrice. Tous les prétextes étaient bons pour eux à se rendre dans leurs bureaux et s'embrasser.

Leur liaison durant depuis cinq mois, Stéphane décida de présenter Marie à ses parents. Il téléphona:

-    Oh! Stéphane, tu te fais de plus en plus rare! Tu vas bien au moins?

-    Rassures-toi Maman, tout va très bien; mais comme tu le sais, la collection est au mois de septembre et je suis très occupé.

Sa mère sentit dans sa voix une certaine émotion:

-    Maman, si je t'appelle, ce n'est pas sans raison; je voudrais te demander, ainsi qu'à Papa, de nous recevoir.

-    Mais tu as dit "Nous"! Tu ne seras pas seul?

-    Non! Je voudrais vous présenter une femme merveilleuse, elle est aussi ma collaboratrice. Es-tu d'accord?

-    Mais bien sûr, mon chéri, j'en ferai part à Papa; et je suis sûre qu'il sera très heureux d'apprendre que tu as rencontré une femme qui ne te déçoive pas et que tu refasses ta vie: tu as payé lourdement en te mariant la première fois.

-    Tu sais Maman, tu ne seras pas déçue: Marie est une femme sublime.

-    Quand veux-tu venir? J'ai hâte de la connaître.

-    Alors disons samedi!

-    D'accord, je vous attends pour le dîner.

-    Merci Maman, je t'embrasse!

Ce repas ne posait aucun problème à ses parents, il suffisait d'informer la bonne de préparer un menu fin mais simple.

Ses parents, malgré leur immense fortune, étaient restés des gens très ouverts, toujours prêts à aider leur prochain. Ils habitaient Neuilly dans une immense propriété, avec un grand parc, où tout respirait le bonheur.

Dès que Stéphane eut posé le combiné, il s'empressa d'aller retrouver Marie et lui faire part de sa décision:

-    Chérie, viens dans mes bras! J'ai à te parler. Je t'aime tellement…. Accepterais-tu que je te présente à mes parents: Ils souhaitent faire ta connaissance: Qu'en penses-tu?

Marie ne savait que dire; il la pressait"je t'en prie, dis Oui ! .." Elle ne savait pas lui résister.

-    Tu sais, tu me fais un grand honneur, mais comment vont-ils réagir? Je ne suis que ton employée!

-    Je te rassure tout de suite! Ils sont prêts à t'accueillir les bras ouverts. Nous devons y aller samedi pour le dîner.

Il ne restait plus que deux jours avant ce rendez-vous. Marie se rendit chez le fleuriste pour faire livrer un magnifique bouquet de fleurs, en remerciement pour cette invitation.

Le grand jour arriva. Elle décida de mettre une belle toilette pour faire honneur à Stéphane. Aussi opta-t-elle pour une robe étroite noire, légèrement fendue sur le coté, les épaules dénudées mais couvertes négligemment d'une étole de soie blanche; avec un collier de perles et les boucles assorties, cadeau de ses parents. Aussi, lorsque Stéphane la rejoignit, il eut du mal à retenir un cri d'admiration devant son extrême beauté. Un baiser… puis ils prirent la route: le trajet fut court et arrivèrent vite à la propriété familiale. Traversant le parc, Marie n'en croyait pas ses yeux: C'était merveilleux. Les parents de Stéphane les attendaient sur le perron.

-    Chers parents, je vous présente Marie!

Ils lui souhaitèrent la bienvenue dans leur demeure.

-    Je vous en prie, entrez!

Stéphane lui fit visiter les lieux: tout était fabuleux: des tableaux de maître accrochés aux murs, des tapis d'Orient dans toutes les pièces. Ce décor contribuait à créer une ambiance incroyable.

Après avoir rejoint ses parents au salon, Stéphane se joignit à eux pour porter un toast à Marie, puis sa maman les convia à s'installer sur la terrasse pour le dîner: tous savouraient ce moment. La bonne leur servit un repas délicieux, puis la discussion s'engagea:

-    Tout d'abord, Marie, je voudrais vous remercier pour votre délicate attention: j'adore les fleurs.

-    Je vous en prie! C'est peu de chose.

Stéphane les observait en silence. L'une était jeune, brune. L'autre, aux cheveux blancs, épanouie et sûre d'elle. Quel contraste! Il remarqua que Marie leur plaisait beaucoup. Son père ne tarda pas à lui dire son admiration; de même, sa maman de le complimenter.

-   Parlez-nous un peu de vous, de vos projets!

-   Pour l'instant, dit Stéphane, nous n'avons rien décidé; une fois la collection terminée, nous aviserons. Nous sommes trop pris pour l'instant.

Sa maman s'adressa à Marie: c'est là qu'elle apprit le tragique accident de ses parents, qu'elle se trouvait seule, sans aucune famille, jusqu'à sa rencontre avec son fils.

Son père, ayant constaté l'émotion de sa femme, changea de conversation et les invita à faire un tour dans le parc. Chacun d'eux apprécia puis, l'heure avançant, Stéphane considéra qu'il était grand temps de rentrer chez eux; aussi prirent-ils congé, non sans les avoir remerciés chaleureusement de leur accueil.

En voiture, Marie dit à Stéphane son admiration pour ses parents et qu'il avait beaucoup de chance.

-   C'est vrai! Je le reconnais, je les adore et tu verras que toi aussi, lorsque tu les connaîtras mieux, tu les aimeras à ton tour.

Timidement, Marie lui confia:

-   Tu sais, je les aime déjà. J'ai senti cette chaleur qu'il y a entre vous et qui me manque tellement depuis que j'ai perdu mes parents.

Stéphane, ému, ralenti et lui donna un petit baiser.

-    Tu sais, chérie, un jour nous nous marierons et tu seras la fille qu'ils n'ont jamais eue et qu'ils désiraient tellement; et là, nous serons une vraie famille.

On était à un mois de la présentation de la collection et beaucoup de travail les attendait, afin de mener à bien celle-ci. Heureusement qu'ils étaient entourés par une équipe de professionnels: tous avaient adopté Marie; ils l'appréciaient pour ses décisions et sa gentillesse: elle avait toujours un petit mot ou une petite attention pour chacun.

Nous étions au mois d'août. Stéphane invita Marie au "Fouquet's", non sans raison: il lui réservait une surprise. Marie ne se doutait de rien. Ils furent reçus avec beaucoup d'égards car Stéphane était coutumier des lieux. Le maître d'hôtel les accompagna à leur table. Ils ne passèrent pas inaperçus: ils formaient un couple superbe. Tous les regards se retournaient vers eux pour les admirer. Une fois installés, Stéphane commanda une bouteille de champagne et tendit une coupe à Marie. Puis il lui demanda:

-       Sais-tu au moins quel jour nous sommes?

-       Oui, le 15 août.

-       C'est ta fête, chérie. Ferme les yeux et donne moi ta main.

Ce qu'elle fit. Il lui glissa une bague qu'il avait achetée chez un grand joaillier.

Marie ouvrit les yeux, regarda sa main: un magnifique diamant brillait de mille feux.

-       Oh! Steph! Pourquoi?

-       Ma chérie, je profite simplement de ta fête pour t'offrir ta bague de fiançailles. J'ai voulu que cet instant se passe dans l'intimité.

Marie fut tellement surprise et émue que des larmes coulèrent sur ses joues. Elle l'embrassa tendrement:

-       Je t'aime si fort que rien n'est trop beau pour toi. Ce n'est pas tout, étant donné que tout est fermé cette semaine, si nous faisions une escapade à Deauville pour le week-end. Qu'en penses-tu?

-       Oh! Chéri, je serais folle de joie; cela nous fera le plus grand bien.

-       Le temps de passer à l'appartement enfiler un jean, prendre les maillots de bain et le nécessaire de toilette; nous partons!

-       D'accord!

Ce qu'ils firent. Les routes étaient surchargées et ils mirent beaucoup de temps - Enfin arrivés – Stéphane connaissait Deauville et c'est devant un superbe hôtel face à la mer qu'il s'arrêta. Le bagagiste prit leur sac et le porta dans leur chambre. Sitôt installés, ils enfilèrent leur maillot et filèrent à la plage, main dans la main. Marie se sentait une âme de gamine et couru dans l'eau. Stéphane se félicitait d'avoir eu cette idée. Ils se rejoignirent, s'amusèrent comme des fous; puis ils rentrèrent dans leur chambre.

-       Es-tu heureuse de la journée ma chérie?

-       Oh! oui mon amour, mais je n'ai qu'une hâte, aller au lit; ce bain de mer m'a épuisée.

Elle se jeta sur le lit et s'endormit. Lorsque Stéphane la rejoignit, Marie dormait déjà. Cette nuit-là, ils ne firent pas l'amour, trop épuisés. Il lui déposa un tendre baiser sur le front, se lova contre elle et s'endormit à son tour.

Ils ouvrirent les yeux à huit heures: pas de temps à perdre en traînant au lit, s'ils voulaient profiter de leur dernière journée. Une douche, un copieux petit-déjeuner et ils partirent à la plage: la journée passa très vite. Ils récupérèrent leurs affaires à l'hôtel et prirent aussitôt la route après avoir pris un rafraîchissement. Deux heures après, ils étaient de retour. Marie fit couler un bain moussant et se laissa glisser dans la baignoire; mais avant qu'elle put faire le moindre geste, Stéphane sauta dans le bain. Il lui fit l'amour: c'était merveilleux; puis tous deux sortirent de l'eau. Stéphane l'embrassa et lui essuya le dos.

-   Ouf ! chéri, quelle journée !  Veux-tu prendre quelque chose avant d'aller au lit?

-   Non, tu es gentille, je te remercie.

Stéphane ne s'était pas rhabillé; aussi Marie pouvait-elle admirer son corps athlétique errer dans le salon. Comme elle l'aimait !

Le lendemain, ils devaient être en forme: c'était la dernière "ligne droite" avant le grand jour. Faire la liste des invités, préparer et décorer le grand salon, installer les sièges. Tout cela demandait beaucoup de temps: organiser le passage des mannequins. Heureusement, Annie était rôdée à ce genre de manifestation et sa collaboration était très précieuse à Marie.

Leur vie était, chaque jour, un enchantement et ils n'étaient jamais assouvis l'un de l'autre.

-   Ma chérie, tu sais quoi ! Un ami devait se rendre à l'Opéra avec sa femme. Un imprévu l'en empêche; aussi m'a-t-il gentiment proposé d'accepter ses places. Ce que j'ai fait en pensant que cette sortie te plairait.

-   Je vais te faire un aveu: je ne suis jamais allée à l'Opéra.

-   Rassures-toi! Te connaissant, Marie, tu apprécieras; c'est un lieu magique: tu vas y côtoyer tout le "gratin". Mon ami m'a dit que cette année, on donnait "CARMEN". Le chanteur est venu spécialement d'Italie pour cette soirée de gala. C'est un vrai cadeau pour les amateurs d'Opéra. Aussi, tu te choisiras une très belle toilette, car la tenue de soirée est exigée.

Dès le lendemain à la boutique, Marie choisit une robe longue, de soie bleu-glacé, un manteau de dentelle qu'elle agrémenterait d'un collier d'aigues-marines, boucles d'oreilles et bracelet; cadeau de ses parents. De beaux escarpins compléteraient sa toilette.

Le lendemain, en rentrant de la boutique, ils allèrent vite se préparer pour être à l'heure à l'Opéra.

Stéphane prit un smoking noir, mit une chemise à col cassé impeccablement amidonné et termina par un nœud papillon en soie.

Marie enfila sa robe, se coiffa en relevant sa chevelure en un chignon haut sur la tête, qu'elle retint par un filet aux mailles d'or. Lorsqu'elle fut prête et que Stéphane la vit aussi bien parée, il poussa un cri:

-   Mon Dieu ! Marie ! que tu es belle !

Il s'approcha et l'embrassa délicatement pour ne pas mettre en péril son maquillage aux teintes douces légèrement rosées.

Marie appréhendait mais lorsqu'elle fut dans le grand hall, elle se sentit parfaitement à l'aise au milieu de cette agitation et fière de se trouver au bras de Stéphane. Ils étaient entourés de femmes plus belles les unes que les autres, dans leurs robes scintillantes et leurs bijoux de valeur. Les flashs crépitaient de toutes parts et on se serait cru au festival de Cannes. Pressés par la foule, ils se rendirent dans leur loge. Au passage, ils reconnurent des visages familiers: ceux de leurs meilleures clientes. Les lumières baissèrent et le spectacle commença. Le chanteur avait une voix qui vous faisait frissonner. Marie mit sa main dans celle de Stéphane, la pressa et lui dit à l'oreille son émerveillement.

-   Cela fait partie de la férie de l'Opéra, chérie.

La représentation se termina sur une ovation de la foule, puis chacun sortit

-   Chérie, cela t'a-t-il plu ?

-   Tu sais, je n'ai pas de mot pour te dire ce que j'ai ressenti.

Stéphane la taquina: c'est vrai, cela change de la routine

-   La saison prochaine, nous prendrons un abonnement.

Marie lui tendit ses lèvres pour le remercier.

-   Oh, Chéri! j'y pense, n'oublie pas de dire ma gratitude à ton ami: grâce à lui, j'ai découvert un autre monde.

-   Pas de problème, cela sera fait.

Ils rentrèrent et promirent de ne plus sortir le soir tant que la présentation n'aurait pas eu lieu, pour être en super-forme au jour "J".

Toute la semaine se déroula ainsi: coucher tôt, lever tôt. Un petit jogging dans le parc, une bonne douche et la boutique.

Nous étions début septembre, le temps commençait à changer, les premières feuilles mortes apparaissaient, les journées devenaient plus courtes.

Le grand jour arriva. Ils avaient prévu d'être tôt à la boutique pour s'assurer que tous leurs ordres avaient été respectés, ce qui avait été fait. Ils allèrent dans le bureau en attendant que tous les invités soient en place: des hôtesses devaient les installer.

Un petit coup à la porte: c'était Annie qui venait les chercher. Ils arrivèrent main dans la main, sous un tonnerre d'applaudissements. Le Tout-Paris était là. Ils remarquèrent également la présence de nombreuses personnes du monde politique, de la presse, de la télévision. Stéphane monta sur un podium pour les remercier et en profita pour leur présenter Marie, que sa présence à ses côtés intriguait. Il prit le micro et s'adressa à la foule:

-   Votre attention, s'il vous plaît! Je vous remercie de votre présence et je profite de cette occasion pour vous présenter Marie, ma collaboratrice, qui deviendra très prochainement ma femme!

Il scella ses paroles par un tendre baiser. La foule les applaudit longuement sous les caméras; les flashs crépitèrent de toutes parts. Pour eux, c'était le couple de l'année. Stéphane et Marie les saluèrent en leur souhaitant une très bonne soirée, puis ils se retirèrent quelques instants avant que le défilé ne commence.

Stéphane prit Marie dans ses bras et l'embrassa:

-   Que penses-tu de mon annonce?

-   Que tu es un homme imprévisible, mais que tu es aussi un homme merveilleux. Tu ne peux pas savoir ce que j'ai ressenti: je n'oublierai jamais cet instant.

Puis ils allèrent rejoindre leur place. Le défilé commença; à chaque passage de mannequin, on pouvait voir les regards émerveillés de l'assistance. Stéphane devait clore celui-ci au bras de la mariée. Ce fut l'explosion, toute l'équipe sut qu'une fois encore, c'était une réussite. Ses parents vinrent les féliciter, particulièrement Marie à qui ils firent part de leur impatience de les voir mariés. Stéphane leur annonça que le mariage se ferait avant la fin de l'année. Dès que serait fixée la date, ils seraient les premiers avertis. De ce pas, ils partirent au salon où un cocktail était offert. Ils furent félicités par toute l'assistance. A chacun de reconnaître la beauté de Marie, sa classe et l'intérêt qu'elle portait à tous. La soirée terminée, ils rentrèrent à l'appartement: le repas était prêt car Pauline, la bonne, restait à demeure; Marie n'avait aucun souci de ce côté là. Durant le repas ils échangèrent longuement leurs commentaires sur le déroulement de leur journée:

-   Ma chérie, tu sais que tu as fait sensation!

-   Je ne sais pas, si tu le dis….

-   Tous les hommes te regardaient avec envie et aussi…… les femmes!

-   Mais non, tu t'es fait des idées! Dans l'assistance, toutes étaient ravissantes et quant aux hommes, je n'ai vu que toi, mon amour! Et maintenant, arrête de me taquiner!

C'était l'heure d'aller au lit: un petit câlin et ils s'endormirent dans les bras l'un de l'autre.

Le lendemain, au petit-déjeuner, ils lurent les journaux: tous faisaient écho du défilé. Marie et Stéphane figuraient en première page, avec des commentaires des plus élogieux. Le téléphone n'arrêtait pas de sonner: à chacun de les féliciter sur cette façon merveilleuse et touchante d'annoncer en public leur prochain mariage. Ils avaient beaucoup donné de leur personne et la fatigue commençait à se faire sentir; aussi Stéphane proposa-t-il à Marie d'aller passer quelques jours chez ses parents. Rien ne pouvait faire davantage plaisir à Marie; ce séjour lui permettrait de faire plus ample connaissance avec eux. Inutile de préciser qu'ils furent ravis de leur arrivée et apprécièrent qu'ils viennent pour une dizaine de jours.

Marie et Sophie, la maman de Stéphane, ne se quittaient plus: un lien très fort s'était établi; aussi passaient-elles des heures à discuter de tout: des affaires, de la politique, de ce qui se passait dans le monde.

Stéphane passait de longues heures avec son père: c'est de cette façon qu'il apprit la mésaventure de son frère; rien n'avait marché avec Séréna qui était allée s'installer chez lui après que Stéphane l'ait "mise dehors". Elle avait fait la connaissance d'une "célébrité" et l'avait laissé tomber.

-   Tu vois, papa, je lui en ai vraiment voulu, après ce qu'il m'a fait. Maintenant, j'ai pitié de lui et je lui pardonne.

Ils marchèrent dans le parc, rejoignirent Marie et Sophie; ils se mirent à discuter tous les quatre sur leur projet de mariage.

-   Avez-vous fixé une date?

-   Non, pas encore mais je pense que fin octobre serait parfait. Qu'en dis-tu, ma chérie? - tout en lui pressant les mains - Disons le 20 octobre ? les journées sont encore très belles.

-   D'accord pour cette date

Tous les quatre s'embrassèrent, heureux qu'ils aient pris cette décision dans leur demeure. Les parents de Stéphane demandèrent à la bonne de leur apporter le champagne afin de fêter cela.

-   Marie, si vous voulez, je peux vous aider à organiser votre mariage.

-   Je suis d'accord, car je ne sais par où commencer….

-   Tout d'abord, nous devons dresser la liste des invités, ce qui n'est pas rien. Combien de personnes avez-vous de votre côté?

Marie eut des larmes dans les yeux et répondit:

-       Personne.

La maman de Stéphane, émue, la prit dans ses bras, puis Stéphane et son père; comme c'était triste de ne pas avoir de famille.

-       Marie - lui dirent les parents de Stéphane - nous vous considérons comme notre fille, et nous vous promettons que vous aurez un grand mariage.

De leur côté, bien sûr, la liste d'invités serait longue: environ deux cent personnes.

-       Je vous propose de le faire ici,

-       qu' en penses-tu, Stéphane? - dit la maman.

-       Je suis d'accord. Et toi, Marie?

-       Oh oui! J'aime tellement cette demeure!

-       Nous ferons installer deux dais dans le parc: nos invités y seront à l'aise et je suis sûre qu'ils apprécieront la nature, ce sera idyllique. Pour votre robe, Marie, avez-vous une idée?

-       Oui, j'en ai une très précise; je la veux en satin blanc; et pour le voile, des mètres de dentelle blanche retenus  par un diadème.

-       C'est parfait, je vous félicite pour votre bon goût!

-       Je verrai tout cela à la boutique, avec Annie.

-       Nous, nous occuperons du repas, nous allons faire venir une équipe de cuisiniers, de serveurs, un orchestre, de la décoration florale, de la cérémonie à l'église.

-       Je voudrais vous remercier pour tout ce que vous allez faire, c'est tellement généreux de votre part.

-   Stéphane vint, la prit dans ses bras et la rassura:

-   Ne sois pas gênée, ma chérie! Mes parents sont très disponibles et très heureux de se rendre utiles.

Ces dix jours passèrent à une allure vertigineuse. Et c'est avec regret qu'ils mirent fin à leur séjour, qui leur avait été très bénéfique. Après avoir embrassé Stéphane, sa maman avait eu une petite larme à l'œil en embrassant Marie qu'elle aimait tellement. Pierre serra son fils dans ses bras, ainsi que Marie:

-     A bientôt les enfants, bon retour!

Ils restèrent presque muets durant le trajet. Arrivés chez eux, ils se jetèrent dans les bras l'un de l'autre, tout à leur joie; dans très peu de temps, ils uniraient leur destin: celui-ci s'annonçait fabuleux.

Marie n'avait jamais été aussi heureuse. Comme elle aurait aimé avoir encore ses parents pour leur faire partager sa joie et apprécier Stéphane. Mais la vie est ainsi faite; elle se serra contre Stéphane, chassant sa mélancolie. Il l'embrassa:

-       Ma chérie, il est temps d'aller au lit, demain nous devons retourner à la boutique. Une fois leur toilette terminée, ils se glissèrent dans les draps de satin, ils étaient tellement attirés l'un par l'autre, qu'ils ne pouvaient pas se passer de faire l'amour avant de s'endormir.

Le lendemain, ils arrivèrent à la boutique. Stéphane réunit les responsables pour faire le point sur la situation: il constata que le chiffre d'affaire montait en flèche, il les félicita pour leur travail.

Quant à Marie, elle se rendit auprès du styliste.

-       Bonjour Nicolas! Etes-vous disponible? Je voudrais m'entretenir avec vous.

-       Oui, je vous écoute.

-       Voilà: sachez que Stéphane et moi avons fixé notre mariage au 20 octobre.

-       Félicitations, Marie, comme je comprends: vous voulez que je vous aide à choisir le modèle de votre robe de mariée.

-       Pas exactement le modèle, je l'ai en tête: voici les détails.

Nicolas fit un croquis, Marie le fixa, apporta une ou deux petites retouches et le lui tendit

-     Marie, avez-vous choisi les tissus?

-     Non, pas encore, mais je compte sur vous pour me faire des propositions; je repasserai demain, au revoir Nicolas et merci.

Marie  alla rejoindre Stéphane au bureau.

-       Alors - demanda-t-elle, comment cela s'est passé pendant notre absence?

-       Parfaitement bien, notre collection remporte un vif succès. Comme nous étions réunis, j'ai chargé le directeur de faire part à tout le personnel de notre futur mariage.

-       Et toi, qu'as-tu fait?

-       Je suis allé voir Nicolas pour ma robe et je dois y retourner demain pour choisir les tissus.

-       Tout cela est parfait! Excuse-moi j'ai une course à faire qui me prendra environ une heure.

-       Pas de problème, j'assure!

Il l'embrassa tendrement et sorti. Marie en profita pour téléphoner à sa future belle-mère pour "papoter" un peu: elle savait que ce coup de fil lui ferait vraiment plaisir.

Stéphane se rendit chez son joaillier habituel pour acheter les alliances: on le reçu dans un salon privé où un responsable lui apporta les plateaux.

-     Que le choix est difficile!

Il opta pour un modèle serti de diamants; c'était une des plus belles pièces. Pour lui, il prit un simple anneau en or. Il demanda à ce qu'on les livre la veille du mariage et s'en alla.

Il s'arrêta devant une boutique où il vit des petites mules, rehaussées sur le dessus d'un brillant qui scintillait. Il entra, les acheta et demanda qu'on lui fit un très beau paquet. Les emplettes terminées, il rejoignit Marie. Après une journée bien remplie, ils rentrèrent. Stéphane s'empressa d'aller déposer son paquet sur le rebord du lit et lui faire la surprise.

Après le dîner, ils s'installèrent confortablement sur le canapé et regardèrent la télévision, blottis l'un contre l'autre.

-     Tu sais, chéri! j'ai appelé ta maman: elle t'embrasse et m'a dit qu'ils étaient lancés "à fond" dans l'organisation de notre mariage. Tout ce bonheur me fait peur! Embrasse moi mon amour! Dis-moi que je ne rêve pas.

-     Non, tu ne rêves pas, tu seras bientôt ma femme et je ferai tout pour te rendre heureuse.

Ils partirent dans leur chambre main dans la main. Lorsque Marie vit le paquet, elle demanda à Stéphane:

-       Qu'est-ce que c'est?

-       Ouvre-le, c'est pour toi, ma chérie, pour tout le plaisir que tu me donnes.

Lorsqu'elle vit les mules, elle "craqua":

-     Elles sont adorables!

Marie se jeta sur Stéphane pour le remercier.

-     Tu me gâtes trop, ce n'est pas juste.

Ils s'embrassèrent et se roulèrent sur le lit. Stéphane la déshabilla: il ne pouvait résister à ce corps si parfait; et c'est tout naturellement qu'ils firent l'amour. Marie se leva pour prendre une douche et prit ses mules sans cesser de les admirer, puis une fois sa toilette terminée, alla se lover auprès de Stéphane.

Le lendemain en se réveillant, elle se rappela qu'elle avait rendez-vous avec Nicolas pour choisir le tissu de sa robe. Aussi, elle demanda à Stéphane de se dépêcher: elle avait hâte de voir les résultats.

Arrivée à la boutique, elle alla directement à l'atelier. Sur son passage, tous la félicitaient pour son futur mariage. Elle arriva enfin auprès de Nicolas, qui l'attendait.

-     Excusez-moi pour le retard!

Il lui tendit les esquisses et les échantillons de tissus. Après un bon moment d'observation, elle se décida pour un modèle fourreau, très échancré dans le dos, qui sera taillé dans un satin très blanc. Nicolas fit venir Annie pour lui prendre les mensurations. Celles-ci correspondaient à une taille quarante. Marie fut surprise. Toutes ses toilettes étaient dans une taille inférieure. Elle ne s'attendait pas à cette révélation. Puis tous ensemble choisirent le voile: il était parsemé de petites fleurs incrustées. Exactement ce qu'elle voulait. Elle choisit ensuite des escarpins en satin, des gants… tout serait parfait.

Une fois à son bureau, elle fit part à Stéphane de son impatience à l'épouser.

-     Viens dans mes bras ma chérie, je veux t'avouer quelque chose: moi aussi je suis très impatient, je t'aime tellement!

Elle noua  ses bras à son cou, tout en l'embrassant.

-     Plus que quelques jours et tu seras… Madame Stéphane MOREL.

C'est vrai, le temps passait à une allure fulgurante. Ils devaient partir en voyage de noces juste après la réception. Stéphane ne lui avait pas dévoilé la destination. Il lui avait seulement demandé de prévoir des toilettes, des maillots de bain et des tenues décontractées. Il voulait lui faire une merveilleuse surprise.

Ils étaient assis au salon; le téléphone retentit: le frère de Stéphane, ayant reçu l'invitation, voulait les féliciter:

-     Bonjour Stéphane! J'ai appris que Cupidon avait à nouveau frappé à ta porte! Je suis très heureux pour toi, tu le mérites. J'ai hâte de faire la connaissance de Marie. Je suis sûr qu' elle est une femme sensationnelle, si je me fie aux dires de maman.

-     C'est vrai, tu ne peux pas savoir à quel point.

-     J'arriverai vendredi soir, j'irai directement chez nos parents. A demain, je vous embrasse tous les deux!

-     Entendu! Fais un bon voyage!

La veille du mariage, Marie et Stéphane se rendirent à la demeure des parents: l'accueil fut des plus chaleureux. Les deux dais avaient été plantés dans le parc: un où le banquet devait être servi; l'autre servirait pour l'orchestre et le bal qui suivrait. Tout avait été décoré de lys blancs. Les tables étaient dressées, les nappes blanches, la vaisselle étincelante; c'était impressionnant à voir, ces deux cent cinquante couverts alignés. Rien n'avait été oublié et le personnel installait les chaises.

Marie rejoignit sa future belle-mère et l'embrassa:

-     Je voudrais vous remercier, vous avez fait un travail formidable, vous êtes une merveilleuse organisatrice

-     Vous savez, je dirige cette demeure depuis des années, d'innombrables réceptions y ont été données. Je suis contente que cela vous plaise.

Elles s'embrassèrent à nouveau. Anthony arriva comme prévu, très heureux de retrouver sa famille. Marie lui fut présentée, puis les deux frères se retirèrent. Ils eurent une longue discussion: c'était nécessaire mais le temps avait apaisé les esprits et la paix était revenue entre eux. Ils rejoignirent les autres, qui les attendaient pour sabler le champagne.

-     Mes enfants, dit le père, je lève mon verre à nos retrouvailles et vous souhaite à tous beaucoup de bonheur.

Après avoir pris un léger repas, tous regagnèrent leur chambre. Nos amoureux s'étreignirent longuement, fous de bonheur à l'idée que demain ils seraient mari et femme.

Demain, ils devaient être à la mairie à dix heures, la cérémonie religieuse étant à onze heures. Marie se leva tôt, prit un bain moussant puis enfila un peignoir. Devant la coiffeuse, elle se maquilla légèrement et se fit un très beau chignon; il ne lui restait plus qu'à s'habiller. Elle descendit sur la terrasse où le petit-déjeuner devait être servi. Le soleil était levé, ce qui promettait une belle journée!

Stéphane arriva et l'embrassa longuement; puis ce fut au tour de ses parents et d'Anthony.

Après la dernière mise au point pour l'entrée à l'église. Il était convenu que le papa de Stéphane accompagnerait Marie à l'autel: Dieu sait qu'il était fier, pour lui, c'était même un honneur, Marie lui plaisait vraiment et l'avoir pour belle-fille le remplissait de joie. Tous montèrent se préparer. Annie était arrivée comme convenu pour aider Marie à enfiler sa robe, qui passa d'abord un très beau slip en dentelle, porte-jarretelles assorti et ses bas.

Puis elle enfila sa robe qui la moulait: c'était une merveille, avec une légère traîne. Annie lui posa un voile interminable, qu'elle coinça avec des petites pinces; puis elle mit le diadème et rabattit le voile par dessus. On eut dit une apparition. Enfin, elle chaussa ses escarpins, les gants et descendit au salon; tous l'attendaient au bas de l'escalier: Stéphane, avec un bouquet d'orchidées et de lys, dont la fragrance se répandait dans la pièce.

Tous eurent le souffle coupé par sa beauté. Stéphane lui prit la main et lui glissa à l'oreille:

-     Je n'ai jamais vu de mariée aussi belle; je t'aime, mon amour.

Les amis et parents les plus proches attendaient. La limousine décorée de fleurs blanches s'avança jusqu'au perron. Il fallut plus de dix minutes pour installer la mariée et son immense voile, dans la voiture. Enfin, ils prirent la direction de la mairie; tout le cortège de limousines suivait. Sur le trajet, les passants saluaient la mariée comme une princesse et les voitures qu'ils croisaient "les klaxonnaient".

Le passage à la mairie fut bref puis, ce fut le départ pour l'église. Devant celle-ci, une foule immense les attendait et c'est sous les applaudissements que Marie apparut. Le cortège se mit en place. Stéphane était entré au bras de sa maman et avait pris place devant l'autel pendant que les invités s'installèrent. Les orgues jouaient la marche nuptiale; Marie arriva au bras de son beau-père, très lentement, le petit garçon et la petite fille tenant le voile. L'église était comble avec un immense tapis rouge recouvrant l'allée centrale et des fleurs blanches, accrochées à chaque rangée. Arrivée près de Stéphane, elle lui "jeta un coup d'œil" et le trouva très séduisant, grand, fier dans sa veste sombre, son pantalon rayé, sa chemise neigeuse et nœud papillon. Il la regarda lui aussi, d'un regard tendre.

La messe commença, puis vint l'échange des alliances, moment sacré et très émouvant pendant que l'orgue interprétait l'"Ave Maria de Charles GOUNOT. La messe se terminant et sur l'invitation du prêtre, ils s'embrassèrent. Arriva le moment des félicitations: les parents de Stéphane furent les premiers. Sa maman prit Marie dans ses bras:

-     Je te souhaite beaucoup de bonheur!

-     Merci maman, dit Marie, tout simplement.

Puis ce fut au tour Stéphane:

-     Mon fils, je te souhaite d'être très heureux!

Son père fit la même démarche, serra Marie dans ses bras, l'embrassa et lui présenta tous ses vœux ainsi qu'à Stéphane qui s'était rapproché

-     Merci papa!

Son mari la regarda, surpris, mais fut très touché par les sentiments qui animaient Marie en égard pour ses parents. Suivirent Anthony, la famille et le défilé des invités; enfin, le personnel de la boutique et de l'atelier. Tout cela dura plus de quarante minutes.

Stéphane prit le bras de sa femme; souriants, ils sortirent lentement: ils reçurent une pluie de riz et de pétales de fleurs. Les photographes firent crépiter leurs appareils; de même, la radio et la télévision leur tendaient leurs micros en les "bombardant" de questions. Heureusement, la limousine s'avança et ils purent se libérer. Le cortège repartit vers la propriété.

Dans la voiture, nos mariés s'embrassaient. Son mari la taquina:

-     Comment Madame MOREL a-t-elle trouvé la cérémonie?

-     Tu sais chéri, je ne trouve pas les mots pour te dire à quel point je suis heureuse: tout était parfait. Je n'arrive pas à réaliser que je suis ta femme; je suis sur un petit nuage.

-     C'est pourtant la réalité!

Ils arrivèrent enfin; Sitôt descendus de voiture, les invités, très élégants,  les cernèrent: les jeunes mariés furent félicités pour cette belle cérémonie. La brigade des serveurs arrivait avec les boissons. Après un long moment, ceux-ci invitèrent les convives à s'installer sous le dais. Tous trouvèrent le décor sublime. Après s'être livrés à une séance de photos, nos jeunes mariés s'isolèrent un moment puis ils vinrent également rejoindre leur place sous les applaudissements.

Le service commença, chacun papotant avec son voisin ou sa voisine.

-     Chéri, qui est cette belle femme à côté d'Anthony?

-     C'est Julie, la fille d'un célèbre fourreur parisien.

-     J'ai remarqué que ton frère lui porte beaucoup d'intérêt.

-     C'est vrai, peut-être est-ce une nouvelle idylle qui commence. Qui sait?

Les jeunes époux étaient  à côté de leurs parents. Un repas exquis leur fut servi, qui dura jusqu'à la fin de la soirée. Puis, tous passèrent dans l'autre dais, l'orchestre jouant et les serveurs préparant le champagne.

Ce furent les mariés qui ouvrirent le bal, en tournant au rythme d'une valse viennoise; puis Marie dansa avec son beau-père, son beau-frère…. C'était un instant magique de voir tous ces couples évoluer sur la piste. Stéphane dansait avec sa maman; Anthony, avec Julie. Marie n'avait pas un instant de répit: tous voulaient danser avec elle; c'est épuisée qu'elle rejoignit son mari.

-     Viens dans mes bras, chérie!

Il l'embrassa, lui dit quelques mots à l'oreille qui la firent sourire.

Ils s'éclipsèrent discrètement dans leur chambre. Marie retira sa somptueuse robe et l'étala sur le lit avec précaution, puis elle enfila un tailleur de soie blanche. Du haut de la fenêtre, Marie jeta son bouquet de mariée. Ce fut Julie qui l'attrapa.

Ils allèrent dire au-revoir à la famille:

-     Stéphane, prends bien soin de Marie – lui dirent ses parents – et que Dieu vous bénisse!

Anthony posa un baiser sur la joue de sa belle sœur. Ils saluèrent la foule et s'engouffrèrent dans la limousine: direction l'aéroport, puis destination Nice.

Marie voulait savoir où son mari l'emmenait.

-     Surprise, ma puce. Dans deux heures, tu seras fixée; je te demande juste un peu de patience.

 Il lui passa le bras autour de ses épaules; elle ferma les yeux et s'assoupit, la tête pleine d'images. Deux heures après, ils atterrissaient à Nice.

Un chauffeur les attendait pour les emmener au port. Stéphane avait réservé un yacht privé avec tout l'équipage. Ils devaient faire une croisière sur la méditerranée.

Tout l'équipage était sur le pont lorsqu'ils montèrent à bord; le commandant vint leur souhaiter la bienvenue en les invitant à entrer. Du champagne fut servi, suivi de la visite du bateau. Après tout cela, Marie et Stéphane se retirèrent dans leur cabine.

-     Tu sais, chéri, tu m'avais parlé d'une surprise, c'est réussi! Je n'ai jamais fait de croisière et ne connais pas du tout la méditerranée.

Elle se jeta dans ses bras et s'embrassèrent longuement:

-     Je te remercie, mon amour!

-     Je t'en prie, je suis heureux à la pensée que tu vas découvrir des endroits fabuleux. Viens chérie, allons sur le pont un moment; nous irons ensuite nous coucher: la journée a été longue et fatigante, qu'en penses-tu?

-     Je suis d'accord! Respirer l'air de la mer, nous fera du bien.

Le bateau avait levé l'ancre. Ils respirèrent à pleins poumons, puis rentrèrent.

Ce fut une nuit d'amour inoubliable: bercés par les flots, ils entendaient le bruit des vagues sur la coque. Le lendemain, un copieux petit déjeuner leur fut servi, qu'ils prirent tranquillement; puis une fois leur toilette terminée, ils enfilèrent leur maillot de bain. L'eau de la piscine était chauffée, aussi quel plaisir que s'y jeter et se détendre ensuite sur les transats en appréciant cette mer d'un bleu turquoise.

Le commandant avait mis le cap sur Malte-La Valette, précisément. Si tout se passe bien, ils devraient accoster en début d'après-midi. Il était quinze heures lorsque le commandant vint les prévenir qu'ils approchaient et leur conseilla de monter sur le pont: ils ne le regretteraient pas. Effectivement, ils avaient l'impression de voir une carte postale. La Valette, ville fortifiée, s'approchait lentement et le bateau était prêt à jeter l'ancre. Après s'être préparés, ils descendirent sur le quai et se retrouvèrent au milieu d'une foule cosmopolite.

Stéphane fit signe à un cocher pour faire le tour de La Valette en calèche.

-     Monte ma chérie, installe-toi bien. Ne sois pas affolée de le voir rouler à gauche, c'est la loi, ici.

La voiture était décorée par des tissus bariolés; à l'avant, deux lanternes suspendues. Le cheval avait un bonnet à pompons qui lui emboîtait les oreilles. Le cocher, en costume de toile grise, portait un chapeau noir cerclé d'un ruban aux couleurs nationales.

Marie avait ses grands yeux bleus émerveillés, dans les bras de son mari: rien ne lui échappait. Après avoir fait le tour de l'île; ils s'arrêtèrent et filèrent dans les petites ruelles très animées. Les boutiques se succédaient; c'était le moment de faire du shopping: acheter quelques souvenirs… Et c'est les bras chargés de paquets qu'ils arrivèrent sur le bateau.

-     Ouf! Quelle journée, mon chéri!

-     C'est vrai: cette foule, c'était épuisant.

Ils se mirent vite en maillot de bain et allèrent se détendre dans la piscine. Un serveur leur apporta des boissons fraîches qui furent les bienvenues.

-     Désirez-vous dîner au bord de la piscine?

-     Pourquoi pas, qu'en dis-tu Marie?

-     Je suis tout à fait d'accord

Pour Marie, une seule chose comptait: être avec Stéphane. Après leur repas romantique, ils rentrèrent dans la cabine.

Stéphane téléphona à ses parents pour leur donner des nouvelles; sa maman répondit:

-       Comment vas-tu, et Marie? Tu l'embrasseras pour nous.

Puis elle le "bombarda" de questions: où ils étaient, ce qu'ils faisaient….. Stéphane mit fin à la conversation, prétextant qu'il n'entendait plus rien. Ils se mirent au lit: chaque nuit était une révélation qui leur faisait comprendre la profondeur de leurs sentiments.

Chez ses parents, le sujet n'était pas le même; ils leur préparaient une énorme surprise, pour leur cadeau de mariage. Ceux-ci avaient acheté une demeure pas très loin de chez eux: celle-ci était fermée depuis longtemps, flanquée de deux tourelles, assortie d'un pigeonnier. Son architecture baroque la rendait très originale. Un immense parc la cernait, mal entretenu; les buissons envahissaient les allées, les arbres n'avaient pas été taillés et la pelouse, très haute. Il y avait beaucoup de travail à faire. Son papa prit donc la décision de faire intervenir une équipe de jardiniers, pour tout remettre en état. L'intérieur de la maison était très clair avec de très belles cheminées, un immense salon; à l'étage, de nombreuses chambres: tout était dans le style de la maison. Des travaux étaient nécessaires et là encore, son papa fit venir du personnel compétent pour restaurer cet intérieur. Il fallait faire vite avant le retour de ses enfants. Il laisserait la décoration aux soins de sa belle fille. Il était très fier de son acquisition et rêvait d'y avoir rapidement des petits-enfants.

Pendant ce temps, nos jeunes époux continuaient leur périple. Après Malte, la Sicile, la Sardaigne, la Corse, St Tropez, la principauté de Monaco et le retour à Nice, prévu dans quinze jours.

Pierre et Sophie, les parents, allaient surveiller les travaux: les buissons avaient été déblayés et laissaient apparaître un joli petit puits. Sous les arbres également, ils découvrirent deux bancs en bois. Les ouvriers étaient nombreux et Pierre était heureux de voir le changement. A l'intérieur aussi, tout se passait bien: Sophie l'aimait et trouvait que l'endroit dégageait quelque chose de chaleureux, comme s'il n'y avait eu que des gens heureux pour y vivre. Pierre, lui-même, l'ayant rejoint, avait la même impression.

-       Allez viens, chérie, rentrons.

Arrivés chez eux, la bonne leur montra la montagne de cadeaux qui étaient arrivés en leur absence. Il y en avait des quatre coins de France et de l'étranger.

-       Eh bien! – fit Pierre – heureusement que leur future maison est immense, sinon je ne vois pas où ils auraient pu mettre tout cela, dans l'appartement de Stéphane.

-       C'est vrai, c'est vraiment impressionnant.

Leur fils Anthony était sur le point de repartir pour New-York et ils devaient dîner tous le trois. Il ne tarda pas à rentrer: ils passèrent à table rapidement. Pierre taquina son fils:

-       On ne t'a pas trop vu, ces jours-ci, la responsable de ces absences ne s'appellerait-elle pas Julie?

-       Oh papa! Tu as des dons de voyance.

Sophie souriait. Elle était heureuse d'avoir un mari si proche de son fils.

-       Eh bien oui! c'est vrai, depuis le mariage, nous nous sommes vus tous les jours. Et chaque jour, je l'apprécie de plus en plus: Au-delà de sa beauté, elle est très intelligente, cultivée. Elle a fait les Beaux-Arts et va bientôt exposer ses tableaux. Je dois avouer qu'elle me plaît vraiment et j'ai cru sentir que c'était réciproque. Je crois que vous allez devoir me supporter souvent

-       Tu sais bien – dit sa mère – que tu seras toujours le bienvenu et qui sait ce que l'avenir te réserve. Peut-être as-tu rencontré la femme qui partagera ta vie … et sera la mère de tes enfants

-       On verra bien! Avez-vous des nouvelles de nos jeunes mariés?

-       Oui, tout se passe bien; normalement ils devraient revenir très bientôt.

Effectivement, ils étaient à Monte-Carlo, leur dernière escale. Demain, ils seraient à Nice pour rentrer ensuite sur Paris. Ils étaient heureux et tristes à la fois de devoir quitter ce yacht qui les avait fait rêver pendant tout leur voyage. C'est avec la tête pleine de souvenirs merveilleux et inoubliables, qu'ils rejoindraient la capitale.

Le lendemain, après avoir remercié le commandant et l'équipage, ils débarquèrent à Nice, tout bronzés. Une voiture attendait pour les conduire à l'aéroport; ils  étaient très chargés, ramenant des souvenirs de toutes leurs escales. A l'aéroport, Stéphane téléphona à ses parents pour les prévenir de leur arrivée.

-       Nous sommes très impatients de vous revoir. Nous vous attendons pour le dîner; bon voyage! Nous vous embrassons, à tout à l'heure!

Une fois embarqués, Stéphane prit sa femme dans ses bras et l'embrassa:

-       Heureuse de rentrer, ma chérie?

-       Oui et non, je vais regretter beaucoup de choses:le bateau, la mer, le chaud soleil du sud… enfin tout!

-       Ne sois pas triste, nous aurons d'autres occasions.

Ils arrivèrent à Paris. Le commandant de bord annonça que la température extérieure était de dix degrés. Marie et Stéphane s'habillèrent donc plus chaudement pour débarquer. En plus, le temps était gris! Ils récupérèrent leurs bagages que le bagagiste déposa dans la voiture qui les attendait pour les conduire à Neuilly.

Ses parents attendaient leur arrivée lorsque la voiture entra dans l'allée; ils coururent à leur rencontre pour les accueillir. Marie se jeta dans les bras de sa belle-mère.

-       Bonjour maman! Comment allez-vous?

-       Très bien, je vous remercie. Laissez-moi vous regarder: toute bronzée, que vous êtes belle.

-       Merci beaucoup

-       Bonjour ma petite Marie. Je suis très heureux de vous revoir! – s'exclama son beau-père

-       Et moi alors!? – riposta Stéphane.

-       Viens mon chéri – lui dit sa maman.

-       Allons, ne sois pas jaloux – lui répliqua son papa.

Et tous les quatre rentrèrent dans la demeure et le personnel s'occupa des bagages.

La bonne apporta le champagne, et chacun de lever sa coupe à leurs retrouvailles.

-       Anthony n'est pas là?

-       Non, il a du rentrer à New York: une affaire importante l'attendait; il ne pouvait différer son départ. Mais rassures-toi, tu ne tarderas pas à le revoir; une relation s'est établie avec julie.

Nos jeunes mariés se regardèrent en souriant:

-       Nous en avions le pressentiment au mariage: il y a des regards qui ne trompent pas; c'est parfait – dit Stéphane – attendons la suite.

Tout en discutant, ils se dirigèrent à la salle à manger pour le dîner. Pierre et Sophie commençaient à leur poser des questions sur leur voyage. Mais Stéphane les interrompit:

-       Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vous invite à venir, un soir, à la maison; je vous présenterai mes films et vous vous rendrez compte que nous avons fait un voyage fabuleux.

-       Oui, c'est vrai – dit Pierre – vous devez être fatigués; surtout que demain…. Je veux que vous me réserviez votre après-midi, j'ai une surprise pour vous.

-       Dis-m'en plus, papa!

-       Pas question, sinon ce ne serait plus une surprise. Soyez patients. Allez plutôt vous coucher pour "récupérer"; vous avez une journée chargée qui vous attend. En passant, jetez un coup d'œil dans la pièce du fond: une montagne de cadeaux vous y attend.

-       Oh mon Dieu! Et bien, nous verrons tout cela demain.

Ils ne se firent pas prier. Après s'être souhaité une bonne nuit, chacun regagna sa chambre.

Nos jeunes mariés étaient contents de se retrouver là. Après un passage à la salle de bain, ils se glissèrent dans le lit: quelques petits bisous et ils s'endormirent comme des bébés.

Le lendemain, ils firent surface à huit heures:

-       Bonjour ma petite femme, as-tu passé une bonne nuit?

-       Oui, j'ai tellement bien dormi dans cette maison qu'il aurait fallu un tremblement de terre pour me réveiller; et toi?

-       Moi aussi, quoiqu'un peu intrigué par la surprise que mes parents nous réservent; j'ai hâte de savoir…

-       Ne te conduis pas comme un bébé qui fait des caprices. Allons plutôt prendre notre petit-déjeuner, puis nous nous occuperons de nos cadeaux.

Il n'y avait que la bonne dans la maison, ses parents étaient partis donner un dernier "coup d'œil" à la maison de leurs enfants pour voir si tout était terminé: le changement était spectaculaire, les ouvriers avaient quitté les lieux.

Après avoir pris un copieux petit-déjeuner, Stéphane et Marie allèrent dans la pièce du fond. Lorsqu'ils ouvrirent la porte, ils prirent peur devant cet amoncellement de paquets; des gros, des petits, c'était impressionnant.

-       Mais où allons-nous mettre tout cela?

Ils commencèrent à en ouvrir quelques-uns, à lire les cartes.

-       Eh bien! – fit Marie – nous allons avoir du travail pour remercier tout le monde.

La fin de la matinée s'approchait, il était temps pour eux d'arrêter et d'aller se préparer pour le déjeuner. Les parents n'allaient pas tarder à rentrer. Lorsqu'ils descendirent, ils ne furent pas surpris: Pierre et Sophie les attendaient au salon.

-       Bonjour les enfants! avez-vous "récupéré"?

-       Nous sommes en pleine forme – répondirent-ils en chœur

-       Vous avez des mines superbes, toutes bronzées; que vous êtes beaux! – dit Sophie.

-       Et moi – répliqua Pierre – tu ne me trouve pas beau?

Ce qui déclencha un rire.

-       Mais oui, tu es beau – dit-elle en allant l'embrasser – depuis tant d'années! C'est ridicule de me poser cette question.

La bonne vint les prévenir de passer à table, que le repas allait être servi.

Ils s'exécutèrent. Pierre leur donna des nouvelles de la boutique: il s'y était rendu à plusieurs reprises durant leur absence.

-       Rassurez-vous, rien de nouveau. Vous avez de la chance d'être entourés par une équipe professionnelle jusqu'au bout des doigts qui, en plus, vous respecte. Ils vous attendent avec impatience.

-       Cela ne saurait tarder, dit Stéphane, encore quelques jours….

Pierre se leva et leur demanda de se préparer pour partir.

-       Je vous emmène avec ma voiture.

Stéphane, intrigué, essaya d'en savoir plus auprès de sa mère; mais elle fit celle qui n'avait rien entendu.

Nos jeunes mariés montèrent à l'arrière et s'embrassèrent, tout en se laissant guider. Ils arrivèrent devant une grille: Pierre alla l'ouvrir et les invitèrent à descendre. Ils prirent l'allée en silence et se trouvèrent devant un grand escalier. De chaque côté, des statues étaient posées comme des sentinelles. Stéphane et Marie regardaient la beauté des lieux avec des yeux ébahis. Sophie s'amusait de voir leur réaction.

Pierre ouvrit la demeure, suivi de Sophie. Une fois dans le grand hall, Pierre prit les clefs et les tendit à ses enfants:

-       Voilà, c'est la surprise que ta mère et moi voulions vous faire! Acceptez ces clefs! Vous êtes ici chez vous: c'est notre cadeau de mariage.

-       Oh mon Dieu! – Marie fondit en larmes et Stéphane était abasourdi.

-       Ce n'est pas possible, nous ne pouvons pas accepter.

-       Mais si! Nous souhaitons que vous y soyez très heureux comme nous, nous le sommes depuis des années dans la nôtre.

Stéphane prit ses parents dans ses bras, les yeux embués de larmes. Marie se joignit à eux: elle était tellement émue qu'aucun mot ne sortait de sa bouche pour exprimer toute sa reconnaissance à ses beaux-parents. Elle ne put que les embrasser.

-       Nous espérons que bientôt, vous nous donnerez des petits-enfants et qu'ils pourront s'épanouir dans ce cadre merveilleux; c'est notre vœu le plus cher.

Une fois les émotions passées, ils visitèrent les lieux. Ils ressentaient de bonnes sensations, comme une sorte de paix.

-       Vous savez, Marie, je vous ai laissé le soin de  la décorer à votre goût. Pour vous aider, une décoratrice viendra. Lorsque vous aurez déménagé l'appartement de Stéphane et, peut-être, votre maison; les décisions vous appartiennent.

La visite terminée, Pierre les invita à découvrir le parc: il était merveilleux avec sa grande pelouse; ses grands arbres de plusieurs essences, pointaient fièrement leurs crêtes vers le ciel…. Ces massifs de fleurs…c'était le paradis!

Marie et Stéphane n'auraient jamais pu soupçonner qu'un tel endroit pouvait exister à Paris.

-       Et voilà mes enfants! La visite est terminée, qu'en pensez-vous?

Pour eux, aucun qualificatif assez fort n'existait pour exprimer ce qu'ils ressentaient. Ils ne purent que dire merci, merci encore.

Ils rentrèrent encore tout bouleversés. Les jeunes mariés s'embrassèrent, ils étaient fous de joie:

-       Qu'en penses-tu ma chérie?

-       Oh! Stéphane, je n'ai qu'une hâte, l'habiter tout de suite.

-       Je vais m'occuper de mon déménagement rapidement. As-tu pris une décision pour ta maison?

-       Oui, je prendrai les meubles, les tableaux, la vaisselle, l'argenterie; et je la vendrai.

-       Tu as oublié quelque chose dans ta liste: Bambou, ton chat!

-       Bien sûr que non! Dès que nous serons installés, je le récupèrerai chez ma voisine qui s'en occupe depuis que je vis avec toi.

-       J'espère qu'il ne m'en tiendra pas rancune! Comme il va être heureux, lui aussi, de profiter du parc à sa guise.

C'était l'heure du dîner; ils allèrent rejoindre Pierre et Sophie à la salle à manger. Eux aussi étaient émus en les voyant si heureux. Ils savaient qu'en offrant cette demeure, ils avaient fait leur bonheur. A table, la conversation fut très animée; tous avaient de nombreuses suggestions à faire, sur l'installation, la décoration….

-       Papa, comment as-tu fait pour dénicher une telle merveille?

-       Chut, C'est mon secret!

-       En plus, pas très loin de chez vous; c'est incroyable!

Marie était rêveuse: dans sa tête, elle commençait à faire des plans.

-       Vous savez Marie – dit Sophie – si vous avez besoin de moi pour vous installer, je suis à votre disposition.

-       Merci maman, je n'osais pas vous le demander. Je pourrai profiter de vos conseils qui me seront bien utiles.

-       Je crois que la première chose à faire, c'est de recenser vos meubles: qu'en penses-tu Stéphane?

-       Oui, c'est primordial; après, nous pourrons faire des plans pour savoir où les déménageurs devront les mettre. Que penses-tu faire de ceux qui sont dans le séjour?

-       Ne t'inquiète pas chéri, j'ai ma petite idée là-dessus.

-       D'accord, je pense aussi que nous ne devrions pas déballer nos cadeaux ici.

-       Oh! En parlant de cadeaux, nous vous avons ramené des petits souvenirs que nous avons complètement oublié de vous donner. Je vais les chercher – Ce que fit Marie.

Pour Sophie, une très belle robe d'intérieur brodée d'or. Pour Pierre, une épée avec des incrustations de pierres précieuses, pour compléter sa collection.

-       C'est très gentil, les enfants, d'avoir pensé à nous!

Stéphane et Marie comprirent qu'ils avaient visé juste dans leur choix.

Ils s'aimaient tellement, tous les quatre; ils formaient une "sacrée famille". Après une infusion, ils allèrent se coucher. Stéphane prit Marie dans ses bras:

-       Ma chérie, quelle belle demeure!

Tous les deux n'arrêtaient pas d'y penser.

-       C'est vrai qu'elle est belle! tu sais, mon amour, tu as des parents merveilleux.

Dans leur joie, ils se caressaient et firent l'amour jusqu'à l'épuisement.

Le lendemain matin, Stéphane et Marie firent le planning de tout ce qu'ils avaient à faire et prirent contact avec l'entreprise qui devait se charger du déménagement; il n'y avait aucun problème: la période était propice puisque nous étions fin novembre; à cette époque, les gens changeaient très peu de logement. Stéphane fixa la date, donna les adresses et promit de leur apporter les clés dans la journée.

Pendant ce temps, Marie en profitait pour remercier toutes les personnes qui leur avaient envoyé des cadeaux et des fleurs.

Sophie vint voir sa belle-fille:

-       Alors, Marie, vous vous en sortez?

-       Oui, j'ai presque terminé. J'ai une bonne nouvelle: nous habiterons notre belle demeure dans une semaine; si vous saviez comme je suis impatiente!

-       Je vous comprends, j'étais comme vous… elle s'approcha de Marie et l'embrassa.

-       Maman, je voudrais vous demander quelque chose qui me ferait un immense plaisir: j'aimerais…. J'aimerais que vous me tutoyiez.

-       Avec plaisir, ma petite Marie, au début, cela va me "faire drôle", mais je vous considère comme ma fille et cela ne fera que renforcer nos liens.

-       J'en suis très heureuse!

Pierre et Stéphane vinrent les rejoindre

-       Alors, vous avez terminé?

-       Oui chéri! quel est le programme à venir?

-       Il nous reste à aller chez moi, puis chez toi pour rassembler nos affaires, ce qui n'est pas rien: nous aurons tout juste le temps de tout faire.

Pierre leur proposa de prendre l'apéritif et déjeuner, après quoi, ils seraient libres. Une fois le repas terminé, ils prirent leur manteau:

-       Couvrez-vous bien – dit Pierre – la température a baissé.

Le temps était gris, un petit vent froid s'était levé; l'hiver s'avançait à grands pas. Pierre avait donné l'ordre à Paul d'allumer les cheminées.

-       Vous, ne nous attendez pas ces deux jours-ci, nous coucherons à mon appartement.

-       D'accord, nous comprenons, on ira vous voir lorsque vous aurez aménagé.

Ils s'embrassèrent et partirent en faisant signe. Pierre et Sophie se retrouvèrent tous les deux:

-       Quel vide quand ils ne sont pas là!

-       C'est vrai qu'ils tiennent de la place.

-       Allez!viens, habille-toi et allons faire une promenade dans le parc nous aérer un peu.

L'air frais leur fouetta le visage; la nature avait revêtu ses couleurs d'automne: des jaunes, des rouilles, des marrons… les feuilles tombaient et formaient un parterre qu'il était agréable de fouler. La promenade terminée, ils rentrèrent et demandèrent à la bonne de leur servir le thé: ils le dégustèrent tranquillement avant de passer leur soirée devant la télévision.

Nos jeunes mariés étaient submergés: ils avaient sous-estimé le travail engendré par un déménagement. Dans une semaine, ils seraient à la propriété; rien qu'à cette pensée, ils ne sentaient plus leur fatigue. Stéphane avait un peu de nostalgie  à quitter son appartement où il avait vécu des moments si intenses avec Marie. Ils allèrent prendre leur douche et s'écroulèrent sur leur lit: ils savaient que demain, ils devraient se lever très tôt. Après s'être souhaité bonne nuit, ils s'endormirent comme des bébés.

-       Bonjour ma chérie! il faut te réveiller;

-       Déjà! J'ai l'impression que je viens de me coucher.

-       Allez! Du courage! Il faut nous dépêcher, nous préparer, déjeuner….pas de temps à perdre.

Le jour du déménagement était arrivé: ils n'avaient pas franchi la porte de la propriété, que les déménageurs étaient là. Marie sortit les plans pour donner les ordres.

Six "costauds" portaient le piano, que Marie fit mettre au salon. Stéphane s'occupait de faire placer les meubles à l'étage. Tout se passait relativement bien… si bien qu'à midi, c'était fini.

Stéphane vint rejoindre sa femme qui se blottit dans ses bras.

-       Tu sais, ma chérie, maintenant que nous avons toutes nos affaires, je me sens vraiment chez moi; et toi?

-       Moi aussi! Il ne reste plus qu'à défaire nos paquets et de nous occuper de la décoration. Tu sais, la décoratrice vient demain ainsi que tes parents.

-       Nous aurons de l'aide, il ne faut pas que nous nous angoissions.

Ils s'embrassèrent longuement.

-       Bon! Vu l'heure, nous allons déjeuner.

Ils se rendirent à la cuisine: celle-ci était très grande, toute équipée, une grande baie s'ouvrant sur le jardin. Une fois Marie et Stéphane installés, Pauline, la bonne de Stéphane, les servit. Elle allait se retirer, mais Marie lui demanda de prendre avec eux son repas. Celle-ci apprécia beaucoup ce geste. Après le repas, ils passèrent au salon où ils prirent leur café. Après cette pause, chacun vaqua à ses occupations jusqu'au soir.

Marie n'avait envie que d'une chose: prendre un bon bain, dîner et se coucher; ce qui était aussi le souhait de Stéphane.

Ils rejoignirent leur chambre, se glissèrent dans des draps de satin. Le silence le plus complet régnait malgré le vent dans les arbres. Ils se serrèrent l'un contre l'autre, trop heureux d'être dans cette ambiance feutrée, et s'endormirent trop fatigués pour faire quoi que ce soit. Le lendemain, ils descendirent à neuf heures. Pauline avait déjà tout préparé. Ils prirent leur petit-déjeuner tranquillement. Pauline fit part à Marie de l'arrivée de la décoratrice:

-       Faites-la patienter, j'arrive…

-       On vous a également livré une magnifique plante.

Qui avait pu leur faire cette surprise!

Stéphane lu la carte:

-       Nous vous souhaitons la bienvenue dans votre demeure et que vous y soyez très heureux. A tout de suite. Signé Pierre et Sophie.

-       Chérie, ce sont mes parents

Stéphane tendit la carte à Marie qui alla rejoindre la décoratrice pour faire le tour des pièces, tout en prenant des notes.

-       Que faites-vous des anciens meubles?

-       Je les garde, ils sont tout à fait dans le style de la maison.

-       J'ai pensé les moderniser par l'apport de luminaires contemporains.

-       Oui, vous avez raison, ils auront beaucoup plus de charme.

Les parents ne tardèrent pas à arriver; Marie les reçut, les remerciant de leur délicate attention.

-       Ou est Stéphane?

-       Il est en train de déballer et d'installer son bureau.

-       Nous allons aller l'aider.

Après avoir discuté longuement avec la décoratrice, Marie avait pratiquement conclu un accord: elles se reverraient le lendemain.

Marie monta au bureau rejoindre Stéphane et ses parents. Ils avaient bien avancé, pratiquement terminé.

-       Bon! Je crois que vous avez assez travaillé et qu'il est l'heure d'aller se restaurer: Pauline nous attend.

Ils s'installèrent. Le repas fut très convivial. Après s'être habillé chaudement, ils sortirent dans le parc. Pierre leur fit une petite leçon sur les essences des arbres: tous étaient très intéressés et étonnés de découvrir ses connaissances. Tout doucement, ils se rapprochèrent de la maison pour aller se réchauffer et boire un thé. Cette fin de soirée serait consacrée à déballer ce qui allait dans les pièces du bas; mais l'essentiel était en place. Demain, la décoratrice devait venir avec son personnel pour poser les lustres en cristal, les rideaux, les tentures, les miroirs, les tableaux…. La soirée était bien avancée; Pierre et Sophie décidèrent de prendre congé.

Aussitôt, Marie se blottit dans les bras de son mari:

-       Alors mon bébé! Es-tu contente de ta journée?

-       Fatiguée, mais ravie. Dieu merci, il ne nous reste pas grand chose à faire.

Enlacés, ils allèrent s'asseoir sur le canapé, devant la cheminée et restèrent songeurs jusqu'au moment où Pauline vint leur proposer une dernière tasse de thé. Ils l'invitèrent à s'asseoir avec eux et discutèrent; elle aussi leur avait été précieuse pour faire du rangement. On pouvait dire que tous avaient mis "la main à la pâte"; pour tout le travail accompli, ils la remercièrent.

Pauline leur dit qu'elle n'avait jamais vu de demeure aussi belle, qu'elle appréciait sa chambre, située sur l'aile gauche et surtout, le silence qu'elle n'avait pas dans l'appartement de Stéphane.

-       Je vais me refaire une santé!

Ce qui fit rire ses patrons. Pauline se retira en leur souhaitant une bonne fin de soirée.

Stéphane prit soin de mettre de la musique douce. Assis côte à côte, ils regardaient les flammes et appréciaient ce moment de détente:

-       Regarde-moi chérie! tu sais que tu es très belle !

-       Tu n'es pas mal non plus, mon chéri; je crois qu'il est temps d'aller au lit!

Ils étaient heureux. Marie regardait leur chambre, les murs entièrement habillés de soie rose, leur lit à baldaquin. Il ne manquait plus que les voilages, les tableaux et les miroirs….

-       Allez, viens vite ma chérie!

Il l'attira à lui, l'embrassa sur toute la surface de sa peau, puis il lui fit l'amour.

Ils n'étaient jamais assouvis l'un de l'autre. Ils s'endormirent bien lovés l'un contre l'autre.

Le lendemain, la décoratrice donna les ordres à son équipe: elle fit mettre une magnifique statue en albâtre dans le hall, de grandes glaces aux cadres dorés à la feuille d'or, qu'elle fit poser sur différents pans de mur; les lustres, les tableaux et voilages, les plantes… c'était vraiment le dernier cachet qui faisait le tout. On se serait cru dans un palais. La décoratrice avait vu juste: tout s'harmonisait. Aussi, lorsque les maîtres des lieux descendirent, ils ne purent que les féliciter:

-       Vous avez fait du bon travail, bravo! Il ne vous reste plus que la décoration de l'étage, mais nous pensons que cela sera plus facile. Nous vous laissons la maison, nous devons nous absenter cet après-midi. Si vous avez des questions à poser, adressez-vous à Pauline: elle est au courant.

Ils devaient aller chercher Bambou, le chat. Marie était tout heureuse de retrouver son compagnon des jours sombres. Ils sortirent et furent surpris par la température qui baissait de plus en plus. Paul, le jardinier, s'affairait à ramasser les feuilles mortes. Après un bref salut, ils prirent la route. Lorsqu'ils arrivèrent devant la maison de Marie, ils aperçurent Bambou, couché sur la terrasse, comme s'il avait deviné que sa maîtresse viendrait. Lorsqu'il la vit, il s'approcha et tourna autour de ses jambes. Elle le prit dans ses bras, le caressa et lui parla à l'oreille tout doucement:

-       Nous sommes venus te chercher, mon Bambou, et plus jamais je ne te quitterai.

Ils allèrent chez la voisine; Stéphane lui glissa quelques billets dans sa main et ils la remercièrent d'avoir gardé et pris soin du chat. Aussitôt, ils repartirent; Marie ne voulut pas entrer dans sa maison, maintenant qu'elle était vide; ils prirent la route pour rentrer à Neuilly.

En arrivant, ils furent stupéfaits: les lampes étaient éclairées, la cheminée allumée; que c'était beau!

Marie porta Bambou pour le présenter à Pauline:

-       Mon Dieu! Qu'il est mignon

– elle le caressa –

je crois que nous allons bien nous entendre.

-       Vous aurez une bouche de plus à nourrir.

-       Ce n'est pas un problème, j'adore les animaux.

Une fois à terre, il se promena pour arriver devant la cheminée où il s'étendit. Stéphane était à l'étage: il fit le tour des pièces et c'est avec soulagement qu'il s'aperçut que tout était fini. Il appela Marie qui s'empressa de le rejoindre.

-       Regarde, chérie! tout est en place. Tes ordres ont-ils été respectés?

-       Exactement, tout est parfait!

 L'équipe était partie. Ils descendirent pour dîner. Bambou n'avait pas changé de place; il semblait apprécier son petit coin. Pauline vint le chercher pour lui faire manger ses croquettes; le changement ne lui avait pas "coupé l'appétit". Stéphane, soucieux:

-       Alors, le chat! Où vas-tu coucher cette nuit?

-       Je crois qu'il a trouvé sa place près de la cheminée.

Marie alla lui chercher sa couche, puis téléphona à ses beaux-parents.

-       Allô! C'est Marie, bonsoir maman!  comment allez-vous?

-       Très bien, merci; et toi?

-       J'ai une bonne nouvelle: toute notre installation est terminée. C'est sublime et nous sommes même allés récupérer le chat.

-       J'en suis ravie pour vous, nous passerons un soir pour admirer tout cela.

-       D'accord, vous êtes ici chez vous. Je vous embrasse tous les deux.

-       Bonsoir ma petite Marie; une grosse bise à Stéphane et une caresse à Bambou.

A ce moment, Stéphane s'approcha de Marie:

-       Mon amour, je ne voudrais pas t'enlever ton enthousiasme, mais demain, nous devons impérativement aller à la boutique; ce, toute la journée.

Marie fit la moue… elle aurait aimé rester chez elle, mais une réunion importante devait avoir lieu. Alors, ce soir, ils devaient se coucher tôt. Dehors, la pluie tombait, il faisait froid et c'est avec un immense plaisir qu'ils se glissèrent dans le lit. Comme ils s'y sentaient bien en sécurité! et dire que demain, ils auraient à se lever tôt. Dans les bras l'un de l'autre, ils se souhaitèrent une bonne nuit.

Ils se levèrent à sept heures, toilette… habillage… Comme toujours, ils étaient très élégants! S'en suit le petit-déjeuner, préparé par Pauline; et Bambou qui vint se frotter à eux en ronronnant:

-       Alors, le chat! Tu as bien dormi?

Stéphane lui ouvrit la porte, il sortit mais ne s'éloigna pas et dès leur départ, celui-ci rentra.

Lorsqu'ils arrivèrent à la boutique, un accueil particulier leur fut réservé. Tous leur témoignaient leur sympathie; cela leur fit chaud au cœur. Ils se rendirent à la salle de conférence: tous les cadres étaient là et se levèrent à leur arrivée. L'ordre du jour était de faire le point sur les ventes: celles-ci progressaient sans cesse; l'achat de nouveaux tissus pour la prochaine collection, les nouvelles tendances etc.….

La journée fut longue. Stéphane proposa à Marie de dîner à l'extérieur, mais elle refusa:

-       Chéri, ne m'en veux pas, mais je préfère rentrer pour profiter de notre belle demeure.

-       Comme tu voudras! J'espère seulement que tu ne deviendras pas trop casanière!

-       Mais non, chéri!

Ils s'embrassèrent longuement et prirent le chemin du retour.

Les jours s'écoulèrent et, tout doucement, nous arrivions en décembre. D'ailleurs, le temps était là pour le leur rappeler: quelques flocons de neige avaient fait leur apparition, ce qui donnait un cachet particulier au parc, et faisait apprécier leur intérieur douillet.

Ce soir là, les parents vinrent leur rendre une petite visite; ils se rendaient au théâtre. Ils étaient très heureux de se retrouver et en voyant leur installation, ils furent émerveillés:

-       Marie, je te félicite pour ton bon goût?

-       Je vous remercie mais je n'ai fait que donner des ordres.

Pierre rappela à Sophie qu'ils devaient partir, sinon ils manqueraient le début de la pièce. Il connaissait bien sa femme et savait qu'étant avec Marie, elle n'arrêtait plus de papoter de "choses et d'autres".

Stéphane aida sa maman à prendre son manteau. Après avoir été embrassés par leurs enfants, ils partirent en promettant qu'à leur prochaine visite, ils resteraient plus longtemps:

-       Au revoir les enfants!

Ils passèrent à table, mais Marie n'avait pas faim, elle se sentait fatiguée.

-       Ma chérie, tu ne manges pas? Je te trouve pâle, tu n'es pas malade, au moins?

-       Je ne pense pas, c'est sûrement un peu de surmenage, ne t'inquiète pas; je vais au lit.

Elle l'embrassa et monta dans leur chambre.

Un peu plus tard, Stéphane la rejoignit: elle somnolait et était agitée. Il lui toucha le front: elle ne semblait pas fiévreuse. Après avoir éteint, il s'allongea près de Marie et songea; il ne savait que penser: peut-être avait-elle pris froid? Pas de panique, si demain elle n'était pas bien, il appellerait le médecin.

Le lendemain matin, lorsque Marie se réveilla, elle mit un pied à terre mais se recoucha aussitôt: elle avait des vertiges et des nausées:

-       Alors ma chérie! comment te sens-tu?

-       A vrai dire, pas mieux: je suis désolée mais je suis incapable d'aller à la boutique aujourd'hui.

-       Ne t'inquiète pas pour cela, j'irai seul; mais avant, je téléphone au médecin pour qu'il passe le plus tôt possible. Veux-tu ton petit-déjeuner?

-       Non, merci! Je serais incapable d'avaler quoi que ce soit.

-       Avant de partir, je préviendrai Pauline pour qu'elle s'occupe de toi, tu n'as qu'à rester tranquille.

-       D'accord, chéri!

Stéphane partit inquiet. Sa femme était tellement dynamique que rester au lit ne lui ressemblait pas.

Marie réfléchissait: oh! Mon Dieu….

Elle pensa qu'elle n'avait pas eu ses cycles et que, lorsque Annie lui avait pris ses mensurations, elle avait une taille de plus mais n'y avait pas prêté attention. Serais-je enceinte?

Le docteur arriva sur ces entrefaites. Pauline l'accompagna à l'étage et se retira.

-       Bonjour docteur Simon

-       Bonjour madame Morel, que vous arrive-t-il?

Elle lui fit le détail de ses malaises…. Après l'avoir auscultée, il ne fit que confirmer ce qu'elle redoutait:

-       Vous êtes enceinte d'environ trois mois.

Marie laissa couler des larmes sur ses joues, mais c'était des larmes de bonheur.

-       Ce n'est pas une maladie! Je vais vous prescrire un traitement qui vous "coupera" vos nausées et vous vous reposerez deux ou trois jours.

-       Merci docteur!

-       Si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous pouvez m'appeler à n'importe quel moment.

Le médecin se retira….

Et Marie de s'extasier – je vais avoir….un bébé de Stéphane; mais, comment va-t-il réagir?

Elle n'allait pas tarder à le savoir; dans une heure environ, il sera auprès d'elle.

Lorsqu'il arriva, il se dirigea auprès de Marie:

-       Alors ma chérie,! comment te sens-tu? Que t'a dit le docteur?

-       Je vais mieux, Stéphane! Je …. Je suis…

Il la regarda en pensant au malaise de ce matin: il comprit soudain:

-       Es-tu enceinte?

-       Oui chéri! j'attends un bébé; tu n'est pas fâché au moins?

-       Fâché?! Au contraire, je suis le plus heureux des hommes!

Il l'embrassa, submergé par cette merveilleuse nouvelle. Ils pleurèrent de joie, dans les bras l'un de l'autre.

-       Nous allons être parents dans six mois!

Ils n'arrivaient pas à réaliser. Pauline était allée chercher les médicaments et les apporta à Marie pour qu'elle commence son traitement tout de suite.

-       Pauline, nous avons une grande nouvelle à vous annoncer: Marie attend un bébé!

-       Je vous félicite tous les deux – toute émue qu'elle fut.

-       Aussi vous faudra-t-il être aux "petits soins"…

-       Soyez rassuré, monsieur! J'ai l'habitude, j'ai eu moi-même deux enfants…. – elle se retira.

-       Tu sais Stéphane, je n'ai pas l'intention de me faire dorloter; dans un ou deux jours, tout sera rentré dans l'ordre. Vas vite déjeuner, tu dois avoir faim!

-       C'est vrai, cette nouvelle m'a donné de l'appétit; et toi? Veux-tu quelque chose?

-       Pas pour le moment, je verrai plus tard…

Lorsque Stéphane remonta dans la chambre, Marie dormait calmement. Il s'assit sur un fauteuil et la regarda…. Qu'elle était belle, avec ses cheveux noirs, éparpillés sur l'oreiller. Il réalisait tout ce bonheur qui lui était arrivé en si peu de temps, cela lui faisait même peur. Comme elle dormait, il partit sur la pointe des pieds, puis retourna à la boutique avec l'intention de lui passer un "coup de fil" dans l'après-midi.

Marie dormit une bonne partie de l'après-midi; Pauline alla la voir: elle était réveillée:

-       Comment vous sentez-vous?

-       Mieux, merci; les remèdes ont du commencer à faire leurs effets.

-       Que désirez-vous? Un thé, une tisane ou quelque chose de plus consistant?

-       Une tisane fera l'affaire.

-       Je vous l'apporte et je vous prépare un  bouillon de légumes pour ce soir.

Le téléphone sonna; Pauline lui passa le combiné; c'était Stéphane:

-       Comment te sens-tu, ma chérie?

-       Beaucoup mieux, j'ai dormi jusqu'à cinq heures.

-       Oh ma chérie! je me sens responsable de tes problèmes.

-       Non, ne dis pas cela, je t'en prie; je suis tellement heureuse, je vais me rétablir rapidement. Je t'aime, tu sais!

-       Moi aussi, à tout à l'heure!

Pauline lui apporta sa tisane, que Marie but aussitôt:

-       Je voudrais passer à la salle de bain, pouvez-vous m'aider?

-       Oui, bien sûr!

Elle mit un pied à terre et se leva: ses vertiges avaient disparu, elle se sentait bien. Elle décida donc de faire sa toilette, se coiffa; elle avait repris "des couleurs".

Elle enfila une robe d'intérieur et descendit s'asseoir au salon y lire une revue. Son chat vint se frotter à ses jambes, puis se coucher près d'elle, pour y chercher quelque caresse.. c'est comme cela que Stéphane les trouva, blottis l'un contre l'autre.

-       Tu as l'air bien mieux, ma chérie!

-       C'est le cas, en effet.

Il lui tendit un beau paquet, qu'elle s'empressa de dénouer. En ouvrant, elle découvrit un collier en or serti de pierres en Lapis-Lazuli.

-       Steph', pourquoi m'offrir cette merveille?

-       Ce cadeau, ma chérie, n'est rien à côté de celui que tu vas me faire.

Elle se blottit dans ses bras et l'embrassa passionnément.

-       Merci mon amour, mais tu me gâtes trop. Tu ne m'as pas dit si tu préférais une fille ou un garçon.

-       C'est le premier et je n'ai pas de préférence; quel que soit le sexe, je serai heureux. Comment allons nous l'appeler si c'est un garçon? As-tu une idée, chérie?

-       Oui, une petite idée…. J'aimerais qu'il porte le prénom de mon père, Raphaël; et si c'est une petite fille, Isabelle, comme ma maman, si tu n'y vois pas d'inconvénient.

-       Aucun, bien au contraire, j'en suis ravi. – il s'entraînait: " Raphaël Morel, Isabelle Morel. – cela "sonne" bien!

-       Six mois, c'est vite passé!

-       Et il va falloir faire préparer la chambre, acheter le nécessaire, chercher une nurse….

-       Pour l'instant, nous allons téléphoner à mes parents pour leur annoncer cette bonne nouvelle:

-       Allô maman! C'est Stéphane;

-       Oh bonsoir mon fils, quel hasard!

-       Nous avons une merveilleuse nouvelle à vous annoncer, et elle va vous combler de joie.

-       Dis-nous vite! Nous sommes impatients

-       Nous allons avoir un bébé!

-       Pierre! Viens vite! – elle mit le haut-parleur.

Les futurs grands-parents criaient et pleuraient de joie à cette nouvelle.

-       Tu ne peux pas savoir le bonheur que nous ressentons; nous vous félicitons. Comment va Marie?

-       Très bien, merci! – il ne voulait pas les inquiéter.

-       Dis-lui que nous passerons un soir, en attendant prends bien soin d'elle! Nous vous embrassons tous les deux.

Pauline les invita à passer à table: Marie mangea son potage, un yaourt, une pomme qui "passèrent" très bien.

Une fois le repas terminé, ils dirent bonsoir à Pauline et se retirèrent dans leur chambre pour y regarder un instant la télévision, toujours serrés l'un contre l'autre.

Marie s'endormit. Stéphane éteignit la lampe de chevet et sombra lui aussi, dans un sommeil profond.

Lorsque Marie se réveilla, elle trouva son mari rasé et habillé, prêt à partir.

-       Pourquoi ne m'as-tu pas appelée, je voulais aller à la boutique.

-       Il n'en est pas question! Le docteur t'a dit de te reposer. Tu iras la semaine prochaine.

Elle n'insista pas. ils s'embrassèrent et Stéphane fila….

Dans la matinée, elle se prépara en enfilant une robe d'intérieur et descendit au salon près de la cheminée. Elle prit un livre: il y avait si longtemps qu'elle n'avait pas consacré du temps à la lecture; elle allait profiter de cette occasion pour se rattraper. Elle ne vit pas passer la journée. Son mari rentra et fut heureux de voir qu'elle allait bien. Il l'embrassa tendrement:

-       Je vois que la future maman va bien: et j'en suis ravi, ma chérie!

-       Et toi, as-tu bien travaillé?

-       Oui, ce n'est pas le travail qui manque: je crois que nous serons obligés d'embaucher deux employées pour aider Annie, qui est débordée.

-       Viens t'asseoir près de moi, chéri. j'ai pensé à beaucoup de choses, nous devons "pendre la crémaillère" rapidement, avant les fêtes de fin d'année. Nous devons fixer la date et envoyer les invitations.

-       Quand tu voudras! – ils se mirent d'accord – Téléphone à maman, tu sais bien qu'elle adore cela.

Ils furent interrompus par l'arrivée des parents de Stéphane, qui étaient impatients de venir les féliciter et leur exprimer leur joie. Pierre prit Marie dans ses bras et lui dit toute sa reconnaissance:

-       Tu fais de moi le plus heureux des hommes; j'ai tellement attendu ce moment!

-       Moi aussi – dit Sophie qui s'était jointe à eux – c'est un vrai bonheur qui nous arrive.

-       Asseyez-vous, nous allons fêter cet événement.

Marie demanda aussitôt à Pauline de leur servir le champagne:

-       Quand vous êtes arrivés, nous étions en train de discuter de la "pendaison de la crémaillère"; nous voulons la faire mi-décembre.

-       Je suis partante pour l'organisation, il ne faut pas que Marie se fatigue! – s'écria Sophie.

Ce qui fit sourire Marie…

-       Vous n'avez qu'à faire la liste des invités, me la donner et je m'occupe de tout; je prendrai le même traiteur que pour votre mariage, la même équipe de serveurs, mais moins nombreux; c'est évident.

-       Tu n'est pas une mère – dit Stéphane – tu es une vraie fée.

Marie proposa de faire le buffet dans la salle de jeux.

-       Oh oui! Très bonne idée ma chérie. maman, lundi après-midi, je te transmettrai la liste.

-       C'est parfait! Cela me laissera une semaine pour tout organiser.

Après le départ des futurs grands-parents, nos jeunes mariés prirent leur repas et montèrent se coucher.

-       Tu n'es pas trop fatiguée, ma chérie?

-       Non, j'ai retrouvé la forme.

-       Dans ce cas, j'ai une surprise….

Marie avait deviné ce que pouvait être la surprise…Stéphane lui sauta presque dessus et lui fit l'amour.

-       Dis-donc, c'est un viol?

-       Quel toupet! J'avais deviné dans tes yeux que c'est ce que tu désirais – il la prit dans ses bras.

Le lendemain, ils allèrent se promener dans le parc: il faisait très froid. Ils n'y restèrent pas très longtemps.

-       Nous serions mieux à l'intérieur.

Dès leur arrivée, Pauline leur servi un bon chocolat chaud, près de la cheminée. Marie alla jouer du piano: Stéphane était stupéfait de son talent; il est vrai qu'il ne l'avait jamais entendue auparavant.

-       Mais dis-donc, cachottière! Tu es une vraie virtuose!

-       Tu trouves?

-       Chérie, je te découvre chaque jour…. As-tu encore beaucoup de secrets comme celui-la?

-       Peut-être, mais je ne veux pas tout te dévoiler.

Elle lui tendit ses lèvres et ils s'embrassèrent tendrement.

Vers la fin d'après-midi, ils avaient établi leur liste: cinquante invités seulement. Puis leur soirée se déroula comme très souvent: devant la télévision.

Le lundi suivant, ils retournèrent à la boutique. Comme convenu, Stéphane se rendit, dans l'après-midi, chez ses parents avec la liste qu'il remit à sa maman.

-       Bonjour maman! Papa n'est pas là?

Il avait remarqué, en entrant, que sa maman avait un air inquiet:

-       Si, mais il est au lit avec de la fièvre. J'ai prévenu le docteur Simon qui doit passer rapidement.

-       Je monte voir papa et j'attendrai le médecin.

Celui-ci ne tarda pas. Après avoir bien ausculté Pierre, il déclara que c'était la grippe, qu'il allait le mettre sous traitement et qu'il devrait rester au lit quelques jours.

Après un rapide calcul, Stéphane comprit qu'il ne serait pas rétabli pour la crémaillère; il en parla à sa mère.

-       Oui, je m'en doute, mais ne vous inquiétez pas; faites-la sans nous

-       Pas question, nous la reporterons; j'appelle Marie pour la prévenir.

-       Allô ma chérie! je suis chez mes parents, papa est au lit avec la grippe et il doit rester alité quelques jours.

-       Je suis désolée, Steph' – embrasse-le de ma part et dis-lui que je lui souhaite un prompt rétablissement.

-       Marie, le but de mon coup de fil, c'était pour te demander que l'on reporte la date de la crémaillère. Y vois-tu un inconvénient?

-       Aucun, de toute façon, pas question de faire la fête sans eux; arrange-toi avec ta maman et dis-lui qu'elle n'entreprenne rien.

-       Je t'embrasse, chérie! à tout à l'heure!

-       Bon! Maman, c'est d'accord avec Marie, tu ne fais aucune démarche: nous reportons la crémaillère à une date ultérieure. Marie t'embrasse et te souhaite de ne pas attraper la grippe à ton tour.

 Puis il partit rejoindre sa femme qui l'attendait au bureau, pour rentrer chez eux.

-       Excuse-moi de t'avoir fait attendre, chérie!

-       Ce n'est pas le problème, je suis contrariée de savoir ton père malade; pourvu que la grippe ne soit pas trop mauvaise.

-       Tu sais, j'ai discuté avec le docteur Simon: il m'a dit qu'en ce moment, il y a une très forte épidémie et m'a recommandé que tu ne rendes pas visite à papa, vu ton état.

-       Cela m'ennuie, je l'aime tellement.

-       Tu lui téléphoneras; et puis, nous verrons comment sa santé évolue.

-       Ta journée ne t'a pas trop fatigué?

-       Non, pas du tout.

Stéphane s'inquiétait sans arrêt, il était aux petits soins. Comme les rues étaient gelées, il la tenait solidement par le bras. Enfin, ils étaient chez eux. A chaque arrivée à la maison, ils appréciaient la chaleur et le cadre de leur demeure. Pauline les attendait: c'était une vraie "perle"…. et en plus, très bonne cuisinière. Leurs journées se ressemblaient et nous arrivions à une semaine de Noël: rien n'était prévu. Ils savaient qu'Anthony serait là pour les fêtes. Ils leur restait à acheter tous les cadeaux, demander à Paul d'installer le sapin dans le salon.

-       Tu sais Stéph', nous pouvons aller faire les achats demain, si ton emploi du temps te le permet.

-       C'est une bonne idée: avant la cohue dans les magasins.

Après le dîner, Stéphane appela ses parents pour avoir des nouvelles:

-       Allô! Bonsoir maman, c'est Stéphane! Comment vas-tu? Et papa?

-       Moi, ça va; mais pour papa, ce n'est pas la grande forme: il faut qu'il retrouve ses forces.

-       Maman, si je comprends bien, il ne sera pas totalement rétabli à Noël; je te propose donc de faire Noël chez vous. Tu y réfléchis et tu me tiens au courant? Je te quitte; nous t'embrassons, ainsi que papa.

-       Qu'en pense ta maman, que nous allions chez eux? – demanda Marie.

-       Elle doit me rendre la réponse….

-       Je serais heureuse qu'elle accepte; je ne veux surtout pas qu'ils passent Noël seuls.

-       Tu es un amour! – et Stéphane lui fit un petit "bisou".

Le lendemain, sa maman appela pour leur dire qu'ils étaient d'accord.

-       Nous serons combien?

-       Cinq, avec Anthony.

-       C'est tout?

-       Eh oui maman! C'est Noël, il faut que ce soit un repas familial, l'essentiel est que vous ne passiez pas ce jour tout seul. Comment va papa?

-       Il commence à se lever, c'est une question de jours avant qu'il ne soit complètement rétabli.

-       C'est parfait, je vous embrasse, à bientôt.

Le lendemain, comme prévu, ils partirent très tôt faire leurs achats. Il y avait déjà foule dans les rues de la Capitale; beaucoup de touristes profitent de cette époque et de l'ambiance de Noël pour venir visiter Paris.

Marie avait fait la liste. Lorsqu'ils rentrèrent, ils avaient les bras chargés de cadeaux. Pendant leur absence, Paul avait installé le sapin et s'occupait d'installer les guirlandes électriques.

Marie décida de ne pas aller à la boutique cet après-midi: elle voulait finir la décoration de son sapin et y déposer ses paquets; vérifier qu'elle n'avait oublié personne. Noël était dans deux jours. Après le déjeuner, Stéphane partit seul; mais avant de quitter sa femme, il la serra dans ses bras:

-       Ma chérie, si tu savais combien je t'aime!

-       Moi je ne t'aime pas, je t'adore!! Allez, file! Protège – toi bien du froid.

Profitant qu'il était seul, il se rendit chez le joaillier pour acheter à marie, son cadeau: une parure en diamants; rien n'était trop beau pour elle.

Marie lui avait commandé une chevalière en or, avec ses initiales gravées dessus et leurs deux prénoms à l'intérieur.

Tout était en place sous le sapin; il brillait de mille feux et Marie resta devant jusqu'à l'arrivée de son mari.

Elle pensait avec nostalgie à ses Noëls d'antan, lorsqu'elle avait encore ses parents; elle fut très émue: une petite larme coula sur ses joues. Chaque année, à cette époque, elle ressentait davantage leur absence.

Son mari rentra et vit son émotion:

-       Ma chérie, que t'arrive-t-il?

-       Excuse-moi, je pensais à mes parents; j'aimerais tellement les avoir près de moi…

Stéphane la prit dans ses bras pour la consoler:

-       Ne sois pas triste, ma chérie; là où ils sont, ils te voient et te protègent

Enlacés, Stéphane lui demanda ce qu'elle avait prévu pour le soir du réveillon:

-       J'aimerais que nous allions à la messe de minuit, puis nous rentrerions déguster un bon repas préparé par Pauline; à moins que tu n'aies prévu autre chose.

-       Cela me va très bien.

Elle n'attendait pas d'autres réponses; il était tellement facile à vivre; toujours d'accord avec ses décisions.

-       Quel merveilleux sapin! C'est une réussite!

-       Oh! tu sais, Paul m'a bien aidé à mettre les boules et les bibelots.

-       Chérie, as-tu pensé que pour le prochain Noël, il faudra ajouter deux petits chaussons?

-       C'est vrai que j'ai eu la même pensée que toi: viens, allons nous asseoir sur le canapé.

-       Demain, ma chérie, la boutique est fermée; nous pourrons faire la "grasse matinée".

-       C'est vrai? Je suis enchantée! Je me sens si bien ici, avec toi.

Le fait qu'ils soient ensemble suffisait à leur bonheur. Après le repas, ils allèrent se coucher et écoutèrent de la musique, serrés l'un contre l'autre. Ils passèrent une merveilleuse nuit.

Stéphane se réveilla le premier et descendit chercher le petit-déjeuner que Pauline lui prépara.

-       Bonjour chérie! regarde ce que je t'apporte.

-       Comme c'est gentil! J'apprécie ton geste: il y a si longtemps que je n'ai pas déjeuné au lit.

-       Il faut bien que je gâte la future maman si je veux qu'elle me fasse un beau bébé.

Elle dévora tout ce qu'il lui avait apporté: Stéphane riait de la voir manger; il la taquina:

-       Tu as bon appétit!

-       C'est normal! Je dois manger pour deux.

Ils "traînèrent" au lit jusqu'à dix heures, ce qui leur arrivait très rarement. Stéphane alla se faire couler un bain et s'y laissa glisser. A son tour, Marie se leva et regarda par la fenêtre: la neige était tombée pendant la nuit; le spectacle était féerique: les arbres avaient revêtu leurs manteaux blancs. Elle alla vite à la salle de bain:

-       Chéri! as-tu regardé par la fenêtre? Tout est blanc!

-       Viens plus près: j'ai quelque chose de plus important à te dire

Il lui prit le bras et l'invita à partager son bain.

-       Tu es incroyable, chéri! tu profite que je suis une faible femme.

Ce qui fit rire son mari; dès qu'elle fut dans la baignoire, Stéphane lui frotta le dos.

-       Dans le fond, je ne regrette pas ton offre… c'était très agréable!

En sortant, ils enfilèrent un peignoir en éponge blanche et descendirent au salon.

-       Je crois que je vais passer la journée dans cette tenue.

-       Et bien, moi aussi! Nous nous habillerons en fin d'après-midi.

La sonnette retentit. Pauline alla ouvrir: c'était le fleuriste qui livrait un magnifique bouquet de roses rouges. Sur le bristol, Marie découvrit encore une délicate attention de son mari: "Joyeux Noël, mon amour!"

-       Merci chéri, elles sont magnifiques!

-       Fais-moi plaisir, joue-moi un  morceau de piano.

Marie s'exécuta, quelle joie de l'entendre; ses doigts glissaient sur les touches: elle avait vraiment du talent et Stéphane ne se lassait pas de l'écouter.

Pauline vint les prévenir que le déjeuner était prêt. Se rendant à la cuisine, ils demandèrent à Pauline de se joindre à eux. Marie la félicita pour son délicieux déjeuner. Tous deux se retirèrent au salon. Ayant du temps libre, ils feuilletèrent l'album de photos de Marie. Elle lui montra les photos: toute petite avec ses parents, en communiante, puis au collège avec ses amies. C'est toujours émouvant de replonger dans le passé….

Après avoir "flemmardé" en peignoir, toute la journée, ils montèrent se préparer. Dans sa penderie, Marie choisit une toilette, une belle jupe ample noire à mi-mollets, avec un haut en dentelle noire. Elle mit une parure de pierres, un léger maquillage un peu de parfum. Ouf! Enfin prête! Son mari mit un costume foncé, chemise blanche et nœud papillon. Lorsqu'il vit sa femme, il lui fit des compliments:

-       Tu es extraordinaire, ma chérie!

-       Toi aussi! Tu es très beau; embrasse-moi! Tu sais, Stéph', nous partons de suite: je voudrais m'arrêter chez le fleuriste pour faire livrer des fleurs à tes parents. Ensuite, nous nous rendrons à l'église.

-       Comme tu veux, chérie! je suis prêt.

Elle mit un superbe manteau de fourrure et une toque assortie. Son mari enfila son pardessus. Les voilà partis: il y avait beaucoup de circulation; les routes étaient gelées. Heureusement qu'ils n'avaient pas beaucoup de trajet à parcourir. Il y avait un monde fou sur les trottoirs: c'était vraiment l'ambiance de Noël. Ils s'arrêtèrent chez le fleuriste et décidèrent d'aller à l'église à pied. Etant en avance, Stéphane invita sa femme à prendre un thé bien chaud dans une brasserie. Tous les clients étaient parés pour cette nuit magique:

-       On y va?

-       Allez! Je te suis.

Ils se rendirent à l'église: celle-ci était presque comble. Ils allèrent voir la crèche, qui était vivante. En voyant l'enfant Jésus, tous deux étaient très émus; cet instant leur rappelait tellement de souvenirs. Ayant pris place, la messe ne tarda pas à commencer. Marie et Stéphane priaient secrètement pour leurs parents. Minuit vint et une voix s'éleva dans le silence, chanta "Minuit chrétien"… des frissons parcoururent les fidèles: c'était toujours un moment très fort. Une fois la messe terminée, ils allèrent chercher la voiture; Marie ne risquait pas de tomber: son mari la tenait solidement par le bras. Ils mirent un temps fou pour rentrer: beaucoup d'embouteillages un peu partout… enfin arrivés!

Pauline avait allumé les chandeliers et dressé une table magnifique, digne d'un grand restaurant; ils mirent une musique douce… Stéphane servit une coupe de champagne et leva celle-ci:

-       Joyeux Noël, ma chérie!

-       A toi aussi, chéri; je me pose une question: savoir si le Père Noël est passé…

Comme deux gosses, ils allèrent sous le sapin et découvrirent leurs cadeaux. Marie fut éblouie par le sien, elle se jeta dans les bras de son mari:

-       Tu es fou, chéri!

-       Oui, d'amour!

Stéphane appréçia sa superbe chevalière:

-       Pauline, voulez-vous venir s'il vous plaît: le Père Noël a pensé à vous!

Marie lui tendit un beau paquet enrubanné. Délicatement, elle l'ouvrit et découvrit un très beau cardigan.

-       Je vous remercie sincèrement tous les deux, je suis très touchée.

-       Nous vous souhaitons un joyeux Noël.

-       Moi aussi! Si vous le désirez, vous pouvez passer à table; je vous sers tout de suite.

C'était le repas traditionnel de fêtes: foie gras avec des toasts chauds, dinde aux marrons, bûche de Noël: le tout arrosé de vin millésimé. Ils finirent sur une coupe de champagne et invitèrent Pauline à en prendre une avec eux.

Stéphane se leva, s'adressant à Marie en se penchant:

-       Madame veut-elle m'accorder cette danse?

-       Excusez-moi, Monsieur, je dois demander la permission à mon mari.

-       Il ne refusera pas: c'est un ami!

Stéphane l'enlaça pour un tango, il la serrait tellement fort que Marie lui dit:

-       Si tu continues de me serrer, je crois que je vais accoucher.

-       Excuse-moi, j'ai une oreille bouchée; je n'entends pas ce que tu me dis.

-       Tu n'es qu'un "sale menteur"….

Stéphane la reconduit à sa chaise:

-       Oh! Chéri, tu ne penses pas que nous devrions aller au lit?…. finir notre réveillon.

-       Voilà une bonne idée! - Il continua à la taquiner - tu commences à avoir un joli petit ventre rond, tu dois avoir trop mangé!

-       Arrête de te moquer! C'est de ta faute si je grossis

-       Mon amour, c'est pour te faire râler: ne te fâche pas…

Il l'embrassa et lui fit l'amour très délicatement, puis ils s'endormirent, enlacés…. Un merveilleux réveillon.

Lorsqu'ils se levèrent, c'était Noël. Après avoir pris le petit-déjeuner, ils allèrent se préparer pour se rendre chez leurs parents. Marie opta pour une robe en lamé mais, surprise, elle ne pouvait pas la fermer à la taille. Déçue, elle remis la toilette qu'elle avait pour le réveillon, mit sa parure en diamant qui brillait de mille feux; en la regardant, Stéphane lui dit:

-       Tu as l'air contrariée, ma chérie!

-       Oui, c'est vrai, je le suis: je ne rentre plus dans ma robe en lamé!

-       Ce n'est pas grave, tu es magnifique telle que tu es. Tu vois que j'avais raison lorsque je te disais que tu avais grossi….Après les fêtes, tu te choisiras d'autres toilettes à la boutique. Allez! Ne fais pas cette moue; moi aussi je me suis habillé comme hier. Viens dans mes bras, j'ai envie de t'embrasser. Tu sais, chérie, il ne faut pas oublier les cadeaux de mes parents.

-       Oui, j'y pensais

-       Es-tu prête?

-       Oui, le temps d'enfiler mon manteau et nous partons.

En sortant, ils admirèrent le parc: c'était une féerie. Les routes enneigées ne facilitaient pas la circulation. Ils arrivèrent enfin. Leurs parents les attendaient:

-       Bonjours papa, comment te sens-tu?

-       Très bien, mon fils!

-       Et toi, maman?

-       Très très bien!… et vous avoir près de nous le jour de Noël me comble de joie.

-       Déshabillez-vous, mettez-vous à l'aise!

-       Et toi, Marie, comment te sens-tu? Tu as l'air de te porter comme un charme!

-       Oui, c'est vrai, je me sens très bien.

Une fois installés dans le salon, Sophie et Pierre offrirent leur cadeau. Lorsque le paquet fut ouvert, ils restèrent bouche bée: c'était "le baiser", une magnifique sculpture en marbre de RODIN. Ils ne savaient que dire! Stéphane et Marie les prirent dans leurs bras pour les remercier:

-       Vous avez fait une folie!

-       Cela nous faisait plaisir de vous offrir cette œuvre; elle vous ressemble tellement!

-       Nous la mettrons dans notre chambre; elle y a tout à fait sa place.

A leur tour de donner leurs paquets: à Pierre, un livre ancien relié en cuir et or, qui était un recueil de poèmes et dont il avait parlé quelques jours auparavant. Avec ce présent, un magnifique chandail; il appréçia vraiment.

Au tour de sa maman de recevoir son cadeau – un vrai casse-tête de trouver un cadeau original, car il ne lui manquait rien. Stéphane décida donc de lui offrir un ordinateur portable car le sien était ancien et encombrant; elle aimait écrire des poèmes et surfer sur internet. Avec cela, une écharpe en soie. Elle était ravie. Après s'être tous congratulés, Marie demanda:

-       Dites-moi, maman, Anthony n'est pas arrivé?

-       Si, mais il est sorti. Asseyez-vous, nous allons en parler: voilà: Nous avons eu une longue conversation avec lui; il nous a confié que depuis votre mariage, il entretenait une relation avec Julie; qu'il l'aimait et qu'il n'avait qu'une hâte: la revoir. Il nous a paru très amoureux. Nous serions très heureux que lui aussi se marie. Nous ne connaissons pas tellement Julie; nous savons seulement que cette jeune femme est brillante et issue d'une excellente famille. D'ailleurs, nous pourrons en savoir plus puisque Anthony nous a demandés de l'inviter, ce que nous avons accepté avec plaisir.

-       C'est parfait – dit Stéphane – comme cela, nous pourrons faire plus ample connaissance.

-       Nous aimerions tant qu'elle ressemble à Marie!

-       Impossible, maman, ma femme est unique. Chacun sa personnalité!

Sur ces paroles, Anthony et Julie arrivèrent: Tous leur souhaitèrent la bienvenue; elle était très belle et d'une élégance raffinée. Autant Marie était brune, autant Julie était blonde.

Pierre offrit à chacun une coupe de champagne avant de passer à table, puis il leva sa coupe:

-       Joyeux Noël à tous!

Une fois chacun à sa place devant la magnifique table, la conversation alla bon train.

Anthony s'adressa à Stéphane et Marie:

-       Maman m'a dit que vous attendiez un heureux événement: je vous félicite! Je serais fier d'être "tonton"

Pierre discutait avec Julie:

-       Alors, il paraît que vous êtes peintre?

-       Oui, effectivement

-       Je vous admire; dans ce milieu, ce n'est pas toujours facile de se "faire un nom". Vous exposez?

-       Oui, je dois faire une exposition d'une dizaine de tableaux au musée d'Orsay, mi-janvier.

-       Je vous promets, Julie, d'aller voir vos chefs-d'œuvre;

-       J'aurai beaucoup de plaisir à vous accueillir; je vous enverrai des cartons d'invitation.

-       Je vous remercie; moi-même, je peins, mais uniquement pour mon plaisir; j'adore me rendre dans les expositions.

Anthony se mêla à la conversation:

-       Qu'est-ce que vous pouvez bien vous raconter, tous les deux?

-       Nous parlons peinture

Et pierre rajouta:

-       Je suis fier d'avoir des femmes de talent à ma table.

Sophie papotait avec Marie et Stéphane. L'ambiance était bonne; tous s'entendaient bien et des éclats de rire fusaient…. Ils étaient installés à table depuis quatre heures et n'avaient pas vu passer le temps. Sophie pensa que ses invités avaient besoin de se dégourdir les jambes; elle leur proposa donc d'aller prendre l'air dans le parc pendant un petit moment: la digestion serait plus facile pour tous.

La nature était si belle; tout était enneigé. Stéphane et Anthony se bombardèrent de boules de neige, comme deux gosses. Leurs parents s'amusaient de les voir agir de la sorte et les revoyaient lorsqu'ils étaient petits et cela leur rappelait quelques bons souvenirs. Après ce bol d'air, ils rentrèrent.

-       Vous avez eu une bonne idée de nous faire sortir; cela nous a fait le plus grand bien.

La bonne leur apporta le dessert et le café; Pierre mit de la musique. Ils dansèrent en s'échangeant leur partenaire. Lorsque Sophie dansa avec son fils Stéphane, elle lui confia.

-       J'ai l'impression que ton père se sent pousser des ailes, de danser avec de si belles femmes: je suis très heureuse de voir qu'il a retrouvé sa forme.

-       Tu as raison, ma petite maman – il l'embrassa tendrement sur le front – tu ne m'as pas dit ce que tu pensais de Julie.

-       Elle est très bien, très douce. J'ai pu apprécier sa culture.

Et au même moment, ils virent le couple enlacé en train de s'embrasser.

-       Ils ont l'air de s'adorer!

-       Avec papa, nous aimerions tellement que lui aussi trouve enfin le bonheur.

-       Cela a l'air d'être bien engagé.

Tous reprirent leur place et quelle ne fut pas la surprise de voir Pierre chanter un air de Noël: il avait une très belle voix… Applaudissements.

-       Bravo!

Puis, chacun chanta son petit couplet et ils reprirent tous en chœur le refrain.

Ils étaient tous repus par le repas; Pierre leur offrit une coupe de champagne et, à nouveau, la conversation s'engagea: sur le travail, les sorties, les derniers films, la politique, New York…. Tous les sujets "y passèrent". Lorsqu'ils s'aperçurent qu'il était minuit, ils décidèrent de partir. Anthony devait raccompagner Julie. Tous se levèrent et remercièrent Sophie et Pierre pour cette sublime journée et quittèrent la propriété.

Pierre et Sophie se retrouvèrent seuls; Pierre embrassa sa femme

-       Tu sais ma chérie, il y avait bien longtemps que je n'avais pas passé un aussi bon Noël.

-       C'est vrai, tous les quatre sont formidables.

Ils montèrent dans leur chambre: il était temps; la fatigue commençait à se faire sentir.

En se quittant, les deux frères se promirent de se téléphoner pour mettre au point une sortie pour la Saint Sylvestre.

Stéphane et Marie, sitôt arrivés, se mirent au lit; eux aussi étaient las: la veille au soir, ils s'étaient couchés très tard.

-       Viens dans mes bras, ma chérie.

Aussitôt, Marie s'endormit dans le creux de l'épaule de son mari, après lui avoir souhaité une bonne nuit.

Lorsqu'ils ouvrirent un œil, il était temps de se lever. Ils avaient donné une journée libre à Pauline: elle l'avait bien mérité; c'est Marie qui prépara le petit-déjeuner.

-       Que veux-tu faire aujourd'hui, ma chérie?

-       Je ne sais pas. Peut-être pourrions-nous appeler Anthony et décider d'une sortie, avec Julie, évidemment.

-       OK! Je l'appelle sur son portable.

-       Allô Anthony! Tu vas bien?

-       Oui, merci!

-       Que fais-tu aujourd'hui?

-       Avec Julie, nous avons décidé d'aller au restaurant, puis faire un tour au Trocadéro dans l'après-midi; si notre sortie te tente et avant d'aller chercher Julie, je passe vous prendre.

-       D'accord, si cela ne dérange pas Julie.

-       Oh! non, elle sera ravie; à tout à l'heure!

Stéphane en fit part à Marie:

-       C'est parfait! Je monte faire ma toilette et m'habiller.

Encore le casse-tête pour choisir un vêtement dans lequel elle se sentira à l'aise. Elle finit par trouver une robe en velours bronze. Dans sa tête, elle se dit: demain, je vais à la boutique me choisir d'autres toilettes.

Chaque jour, elle se regardait dans la glace et trouvait qu'elle était "enveloppée" pour quatre mois de grossesse. Elle en parlerait à son gynécologue, avec qui elle avait rendez-vous dans deux jours. Une fois prête, Stéphane vint la rejoindre

-       Tu es belle, ma chérie; cette robe te va à ravir.

Ils étaient prêts et Anthony fut là très peu de temps après.

-       Bonjour les amoureux!

Ils lui firent l'honneur de leur intérieur:

-       C'est magnifique… et ce parc, quelle beauté, quel silence! Je vous félicite!

-       Nous t'invitons à venir passer une soirée avec Julie, quand tu veux.

Ils partirent rejoindre Julie. Celle-ci fut surprise de les voir tous les trois. Elle remercia Anthony pour cette bonne idée. Ils formaient un beau quatuor et ne passaient pas inaperçus.

-       Où allons-nous? – demanda Stéphane

-       J'ai réservé une table dans un restaurant sur les Champs-Élysées; il est nouvellement installé. Ils servent uniquement des fruits de mer: cela vous vous va?

-       C'est parfait, après les copieux repas que nous avons fait, nous apprécierons….

Ils arrivèrent dans un lieu décoré de filets de pêche, de gros coquillages, d'étoiles de mer… c'était un endroit très typique. Un garçon leur désigna leur table et leur apporta l'apéritif peu de temps après, avec la carte. Ils commandèrent un immense plateau de fruits de mer et de crustacés.

Le repas se passait dans une bonne ambiance: ils étaient sensiblement du même âge et c'était sans cesse des éclats de rire.

Stéphane s'adressa à son frère et à Julie:

-       Alors… des projets? Allez-vous  vous marier bientôt?

Nos amoureux se regardèrent:

-       C'est dans nos intentions; n'est-ce pas, chéri?

-       Oui, c'est sûr! Julie ne peut pas quitter Paris; je vais donc en parler à papa et lui proposer un échange: je dirigerais la boutique de Londres et le directeur de Londres, celle de New York; je pense qu'il n'y verra pas d'inconvénient. Cela me permettrait d'habiter Paris, travailler à Londres et revenir en fin de semaine dans la capitale où Julie pourra aussi me rejoindre avec "Eurostart": c'est rapide et c'est la seule solution; après, nous verrons…. Julie et moi, on vous envie un peu; nous aimerions tellement être comme vous.

-       Patience les tourtereaux, votre tour viendra – dit Stéphane en se tournant vers sa femme et l'embrassant – as-tu bien  mangé, mon "bébé"?

-       Oui, je me suis régalée!

Le repas terminé, ils se levèrent et se rendirent au Trocadéro. A l'intérieur, il y avait beaucoup de visiteurs.. trop, même. Ils se faisaient bousculer dans tous les sens. D'un commun accord, ils décidèrent de sortir et s'engouffrèrent dans un cinéma pour finir l'après-midi. Anthony était désolé:

-       Avec Julie, nous n'avons pas eu une bonne idée de faire ce choix.

-       Ne vous inquiétez pas, nous avons passé une bonne journée; n'est-ce pas, Marie?

-       Mais bien sûr! rien que le fait d'être ensemble m'a comblée.

Anthony voulut les ramener chez eux mais Stéphane refusa

-       Mais non! nous prendrons un taxi; reste donc avec Julie.

-       Venez passer la soirée de samedi avec nous: avec Marie, nous serions ravis.

-       D'accord!

Ils s'embrassèrent et chaque couple partit de son côté. Arrivés chez eux, ils trouvèrent Bambou qui les attendait.

-       Tu veux sortir? Allez! Je suis sûr que tu ne resteras pas longtemps dehors, avec ce froid.

Ils se mirent à l'aise et allèrent s'asseoir un moment devant la cheminée:

-       J'apprécie beaucoup Julie – dit Marie.

-       Moi aussi; je crois que nous n'allons pas tarder à "être de mariage".

-       C'est bien mon avis.

-       Si nous allions nous coucher, chérie! qu'en penses-tu?

-       D'accord! Je fais rentrer Bambou.

-       Alors, le chat, tu es gelé! Vas vite dans ton panier te réchauffer.

-       Veux-tu un thé, chéri, avant de monter?

-       Non-merci!

-       Alors, allons-y.

Marie se déshabilla et se regarda dans la glace. Stéphane l'observait, un sourire au coin des lèvres. Instinctivement, elle attrapa sa chemise et l'enfila pour cacher ses rondeurs….

-       Je t'en prie, ne me regarde pas ainsi; je suis grosse et je me déteste.

-       Grosse! Tu es "folle!" Tu es ravissante ainsi; tu n'as jamais été aussi "appétissante".

Ce disant, il se rapproche d'elle pour la prendre dans ses bras et caresser son ventre rond. Il la mit sur le lit et lui prouva une fois de plus son amour.

Le lendemain, ils se rendirent à la boutique. Marie retrouva Annie:

-       Il faut me venir en aide; j'ai tellement grossi que je ne rentre plus dans mes toilettes.

-       Ne vous inquiétez pas! je vais vous trouver des modèles que vous pourrez porter jusqu'à la fin de votre grossesse; je vous prépare tout cela et vous le fais livrer.

-       J'apprécie votre gentillesse, Annie! Vous m'avez remonté le moral – elle alla retrouver Stéphane.

-       Alors, ma chérie tu as trouvé ce que tu cherchais?

-       Oui, Annie s'en occupe.

-       Tu vois! Tu n'avais pas de quoi t'énerver.

-       Je voudrais bien te voir: si tu avais un gros ventre, comment tu réagirais! Fais-moi un "bisou"; tu te souviens, chéri, je dois me rendre chez le gynécologue cet après-midi.

-       Je t'accompagnerai; je ne veux pas que tu tombes, étant donné l'état des trottoirs.

-       Ok!

-       Nous irons déjeuner dans notre petit restaurant et nous nous rendrons directement chez le docteur.

Quand ils arrivèrent chez le médecin, celui-ci les reçut immédiatement.

-       Comment allez-vous, madame Morel?

-       Bien, sauf que je me trouve grosse pour quatre mois: est-ce normal?

-       Déshabillez-vous et allongez-vous.

Il l'examina, lui passa une échographie: elle eut "une larme" en voyant l'écran:

-       Je peux vous dire que tout est normal: ce sera un gros bébé. Ralentissez un peu vos activités et revenez dans trois mois.

-       Merci docteur! – Ils partirent….

-       Chéri, as-tu bien regardé l'écran?

-       Quelle question! Mais j'avoue que je n'y comprenais pas grand-chose; la prochaine fois, je pense que les images seront plus nettes. L'essentiel est que tout soit normal. Par contre, je veux que tu passes moins de temps à la boutique: promet-le moi!

-       Tu n'as pas besoin d'insister, chéri! Tu sais, je me sens tellement bien chez nous que d'y rester sans sortir ne sera pas une punition.

-       C'est moi qui serai puni, si je ne t'ai pas près de moi, au bureau. Après, il y aura notre bébé et là, ce sera définitif…

-       Et oui! Je changerai de métier! Je deviendrai…une maman.

-       Oh mon amour! Je te vois déjà tenant notre enfant dans tes bras; je t'aime: tu me combles de joie!

-       Et puis…. Je dois installer la chambre de bébé, m'occuper d'acheter toute la layette. Tu vois, c'est énorme, le travail qui m'attend. Heureusement que Pauline m'aidera, et ta maman aussi.

-       Tu peux compter sur elle; à l'idée d'être grand-mère, elle est sur un nuage.

Ils allèrent dîner. Pauline les servit; après quoi ils se retirèrent au salon.

-       Me ferais-tu la grâce d'un morceau de piano, mon "bébé" ? – lui demanda-t-il en faisant la moue.

-       Lorsque tu fais cette tête là, tu sais bien que je ne peux rien te refuser.

-       Moi, je ne me lasse pas, je pourrais t'écouter une nuit entière.

-       N'y compte pas! deux morceaux, c'est tout. Après, dodo!

-       N'oublie pas le petit câlin!

-       Pas de danger avec toi dans le lit.

 C'était déjà la fin de la semaine, aussi Marie prévint-elle Pauline de la visite de d'Anthony et Julie.

-       Vous nous préparerez un dîner léger, je vous fais confiance.

La fin de l'après-midi arriva. Marie et Stéphane allèrent se promener dans le parc, main dans la main; ils étaient silencieux et profitaient vraiment du calme qui régnait. Marie se mit à fredonner. Anthony et Julie arrivèrent; Julie poussa un cri d'exclamation:

-       Mon Dieu! Quel bel endroit, c'est le paradis! Je crois que vous aurez souvent ma visite. –  s'exclame Julie

-       Attends – lui dit Anthony – tu n'as pas tout vu…

Ils entrèrent. A voir la tête de Julie, tous rirent; ils lui firent visiter le rez-de-chaussée, puis l'étage:

-       Qu'est-ce que  c'est grand! Vous devez vous y perdre?

-       Chéri s'il te plaît, peux-tu dire à Pauline de nous servir le champagne?

Ils s'installèrent autour de la cheminée.

-       Quelle chance avez-vous d'habiter une si belle propriété !

-       C'est vrai, on ne peut pas rêver mieux.

Et ce fut Stéphane qui revint avec le champagne et les coupes.

-       Tu te souviens, on devait mettre au point une sortie pour le réveillon de la Saint Sylvestre. Que chacun donne son avis: commencez, les filles!

Marie proposa:

-       Si nous allions danser?

-       Toi, Julie, qu'en penses-tu?

-       Cela ne me déplaira pas non plus; à vous, les garçons, de décider. Nous, on vous suit

-       Il faut choisir un endroit où l'on peut manger et danser – dit Stéphane – je connais un endroit, à Montmartre. Un instant, je téléphone d'abord pour savoir s'il y a encore de la place.

-       Et tes parents, chéri! tu ne leur as pas demandé s'ils voulaient se joindre à nous.

-       Ne t'inquiète pas, Marie – lui répondit Anthony – maman m'a dit qu'ils étaient invités chez des amis.

-       Bon! Alors le problème est réglé de ce côté-là.

Stéphane prit le téléphone et se présenta:

-       Avez-vous une table pour quatre personnes, pour le réveillon?

-       Un instant s'il vous plait – lui répondit le maître d'hôtel – vous avez une chance inouïe: des clients viennent de se décommander, a cause de l'état des routes.

-       Soyez gentil de me la réserver.

-       Vous pouvez compter sur moi, monsieur Morel

-       Voila une bonne chose de faite!

Une fois le repas terminé, ils s'installèrent au salon.

-       Ma chérie, veux-tu nous montrer tes talents de pianiste?

-       D'accord, mais pas longtemps!

Il était tellement fier de sa femme…. Les premières notes s'égrenèrent; ils l'écoutaient dans un silence religieux. Lorsqu'elle eut fini, ils l'applaudirent et la félicitèrent.

-       Chérie, tu es vraiment une virtuose!

C'est à regrets qu'Anthony et Julie se retirèrent après s'être donnés rendez-vous pour le réveillon.

Ils allèrent se coucher; à force de veiller tard, ils manquaient de sommeil.

Le lendemain matin, un livreur apporta à Marie ses toilettes, ravissantes; elle avait l'embarras du choix.

C'était une semaine un peu bouleversée, avec les fêtes, le sorties; finalement, ils n'avaient qu'une hâte: que tout cela soit terminé.

Marie prit des nouvelles de ses beaux-parents. Ils allaient bien et confirmèrent leur séjour chez leurs amis. Anthony leur avait dit qu'ils sortaient tous les quatre, pour le réveillon. Sophie était enchantée de voir la complicité qui existait entre les deux couples et leur souhaita de bien s'amuser.

Le grand soir arriva rapidement. Marie prit un bain parfumé, se coiffa avec soin: elle releva ses cheveux en chignon maintenu d'un peigne de strass doré et termina avec un savant maquillage. En se voyant, elle fut fière d'elle. Dans sa chambre, elle enfila un pantalon de crêpe noir, une tunique en lamé très souple, avec les manches faites de bandes en lamelles "or".

-       Tu es lumineuse, mon bébé; cette toilette est superbe: elle t'amincit. On ne devine même pas que tu es enceinte.

Elle alla mettre ses bijoux, se parfuma et mit des escarpins "or" avec un petit talon: l'ensemble était parfait.

Stéphane, quant à lui, prit un smoking, cela s'imposait. Voilà, ils étaient prêts. Marie enfila une superbe veste de vison; son mari son pardessus.

-       Tu sais chéri, tu es très élégant.

Ils prirent un temps fou pour arriver: toutes les avenues étaient bouchées. Enfin, ils retrouvèrent Anthony et julie qui les attendaient, serrés l'un contre l'autre devant le restaurant.

-       Excusez-nous pour le retard… allez, rentrons vite, vous devez être gelés!

Ils se trouvèrent dans un endroit très chic; ils se déshabillèrent: Julie portait un fourreau noir découvrant une épaule, lui donnant une allure sensuelle.

-       Anthony! Avoue que nous avons de la chance; nous sommes accompagnés par les deux plus belles femmes de ce lieu.

-       C'est vrai! Nous sommes comblés.

Tous les regards convergeaient vers leur table. La clientèle était très "select".

-       Alors! Comment trouvez-vous cet endroit? – demanda Stéphane.

Tous s'accordaient pour lui répondre que ce lieu était merveilleux, et qu'ils présageaient de bien s'amuser.

L'orchestre était également très "bon": tous les musiciens étaient vêtus de rouge. Après le cocktail qui leur avait été offert, le service commença: Ils apprécièrent les mets très fins et les vins, qui leur furent servis. L'orchestre "haussa le ton" et la piste s'anima; un animateur fit son apparition pour souhaiter aux convives une bonne soirée. Il commença par distribuer des chapeaux, des langues de belle-mère, des serpentins etc.….

-       Allez! Tous sur la piste!

Ce qui eut pour effet de dérider tous les couples. Ils commencèrent par la "chenille". C'était fait, la fête était réellement lancée: tous les couples se mélangèrent et s'invitèrent. Vers minuit, l'animateur prit le micro et commençait à égrener les secondes: dix, neuf, huit ….et souhaita une bonne année à tous, des cris s'élevèrent et tous s'embrassèrent.

Stéphane prit Marie dans ses bras.

-       Bonne année, mon amour! Et fais-moi un beau bébé!

-       Bonne année à toi aussi, mon cœur!

Puis ce fut au tour d'Anthony et de Julie

-       Nous vous souhaitons de vous marier très bientôt et d'être aussi heureux que nous le sommes.

Ils allèrent à leur table, sabler le champagne. Puis ils retournèrent sur la piste: des serpentins volaient au dessus de leur tête, des confettis… cela dura jusqu'au petit matin. Des couples commencèrent à partir; nos amoureux firent de même; ils avaient passé un "sacré réveillon". Chacun partit vers sa destination.

Marie s'affala sur son siège de voiture, épuisée. Stéphane lui confia:

-       Je ne regrette pas cette soirée, on peut dire que l'on s'est bien amusés; n'est-ce pas chérie?

-       Oh oui! C'est vrai, mais je tombe de sommeil.

En rentrant, le temps de se déshabiller et faire sa toilette, Marie courut dans son lit et s'endormit comme "une masse".

Stéphane souriait en la regardant; il se glissa dans le lit, à côté d'elle. Ils dormirent jusqu'à midi et lorsqu'ils descendirent, ils présentèrent leurs vœux à Pauline: elle était un peu désorientée:

-       Dois-je vous servir le petit-déjeuner ou le déjeuner?

-       Le petit nous suffira….

L'après-midi, ils devaient se rendre chez leurs parents, leur présenter leurs vœux. A cet instant, le téléphone retentit. Stéphane prit l'appareil:

-       Bonjour ma petite maman; je te présente mes meilleurs vœux et ceux de Marie pour cette nouvelle année, ainsi qu'à papa.

-       Je te remercie; je t'appelle pour te prévenir que nous sommes toujours chez nos amis: ils ont souhaité nous garder un ou deux jours. Je te ferai savoir lorsque nous serons rentrés. Présente tous nos vœux à Marie; je vous embrasse très fort; à bientôt.

-       C'était maman; ils sont absents un ou deux jours. Ils te présentent leurs vœux.

-       Cela veut dire que nous n'avons pas à sortir?

-       Exactement.

Ils prirent leur petit-déjeuner; Marie souriait.

-       Qu'est-ce qui te rend si heureuse?

-       Tu ne devines pas? comme nous n'avons pas d'obligation, je vais aller me recoucher tout l'après-midi.

-       C'est génial, je te suis!

-       Avant de monter, chéri, écoute le répondeur: il doit y avoir "des tas" de messages. Je te laisse même le soin d'y répondre.

-       Ma chérie, on peut dire que tu es "sympa" cette année.

Il l'enlaça, puis Marie monta dans la chambre. On lui aurait "donné la lune" qu'elle n'aurait pas été plus heureuse. Elle se glissa dans les draps. Plus tard, son mari la rejoignit et ils s'endormirent. Dans le fond, cette annulation les arrangeait bien tous les deux, cela leur permettrait de reprendre leur travail en pleine forme. Au réveil, Stéphane demanda à Marie si elle avait récupéré.

-       Oui, je suis en pleine forme, et toi?

-       Moi aussi, je suis prêt à recommencer!

-       Ne rêve pas et dépêchons-nous de nous préparer. J'ai pas mal de choses à voir à la boutique.

La collection de printemps se préparait; Marie devait vérifier si tous ses ordres étaient respectés. Stéphane aussi avait un rendez-vous pour traiter un nouveau marché. Lorsqu'ils arrivèrent à la boutique, tout le personnel vint leur présenter leurs vœux. Anthony passa leur dire bonjour et déjeuna avec eux.

-       Ah! Stéphane, nos parents sont rentrés.

-       C'est gentil de me le faire savoir. Nous y passerons ce soir, en rentrant. Et Julie, que fait-elle?

-       Elle prépare son exposition; je dois l'aider cet après-midi. C'est beaucoup de travail, je ne serai pas de trop.

-       Tu sais, Anthony, nous l'adorons, c'est vraiment une fille formidable.

-       Je le reconnais… et c'est grâce à vous que j'ai eu la chance de faire sa connaissance.

-       C'est le destin, "mon vieux"!

Après le repas, chacun vaqua à ses occupations. La journée passa assez vite et lorsque celle-ci fut terminée, Marie et Stéphane allèrent présenter leurs vœux à ses parents qui furent ravis de les voir. Après cet échange, ils burent une coupe de champagne.

-       A la santé des futurs parents et surtout de Marie: que tout se passe bien – Sophie demanda si la chambre du bébé était prête.

-       Non, pas encore, je m'en occupe cette semaine, je vais choisir le lit et tout le nécessaire pour la nursery

-       Veux-tu que je t'accompagne?

-       Avec plaisir maman, au moins je suis sûre de ne rien oublier. Dans ce cas, je vous attends jeudi après-midi à la maison. Vous pouvez venir, papa; vous nous donnerez votre avis sur nos choix.

-       J'accepte avec plaisir!

-       Au fait, chers parents, avez-vous passé un bon réveillon?

-       Oui, tout était parfait. Tu les connais, avec eux on ne s'ennuie jamais. Et vous?

-       Nous aussi, nous avons passé une magnifique soirée avec les amoureux.

Puis il parlèrent de choses et d'autres jusqu'au moment où ils décidèrent de rentrer. Marie rappela le rendez-vous à ses beaux-parents:

-       A jeudi!

-       Au revoir les enfants! rentrez bien; et merci de votre visite!

Lorsqu'ils arrivèrent chez eux, ils firent une petite promenade dans le parc. La neige avait fondu, les jours grandissaient un peu; c'était bon signe. Enlacés, ils s'approchèrent de la demeure et, devant la porte, Bambou se promenait: lorsqu'il les vit, il vint se frotter contre les jambes de Marie qui le prit aussitôt dans ses bras. Pauline s'empressa de leur ouvrir la porte.

-       Ah! Le chat, je vois que tu te fais porter, tricheur!

Ceux-ci allèrent se mettre à l'aise.

-       Le repas est prêt! Je peux vous servir quand vous voulez.

-       Merci Pauline! Dix minutes et nous arrivons.

Ensuite, ce fut une soirée comme les autres: ils regardèrent un film et regagnèrent leur chambre:

-       Viens dans mes bras, ma chérie! que je puisse caresser mon bébé et l'embrasser.

Il ne se lassait jamais, c'était physique, chez lui; il fallait qu'il touche sa peau satinée et encore dorée.

-       J'ai envie de toi, mon amour!

-       Humm!… moi aussi, je n'attendais que cela.

Il l'étreignit; ce fut une fois de plus l'extase; épuisés, ils s'endormirent enlacés.

C'était déjà jeudi. Durant l'après-midi, ses beaux-parents vinrent chercher Marie, comme promis.

-       Si je ne dérange pas – dit Stéphane – je viens avec vous.

-       Oh chéri! comment peux-tu dire une chose pareille? Au contraire, j'en suis ravie, nous pourrons choisir ensemble.

Ils allèrent dans un magasin et choisirent d'un commun accord, un berceau en osier, un lit , une commode, une armoire, une table à langer, une baignoire…. Et tout le nécessaire pour les biberons. Ensuite, la layette: des brassières, des chaussons… et de quoi garnir le berceau: couvertures, des petits draps avec divers motifs; ensuite, des rideaux en voile blanc pour fixer sur le berceau etc.…. c'est "fou" ce qu'il faut comme matériel pour un premier enfant. Ils demandèrent que tout leur soit livré.

Ils allèrent ensuite prendre un thé:

-       Marie, tu ne peux pas savoir comme nous sommes impatients – lui confia Sophie – nous en sommes à compter les jours.

-       Il ne faut pas, ce n'est pas encore le moment, patience maman!

-       Bon, avec Pierre nous allons rentrer: nous avons des amis qui doivent passer à la maison.

-       Et bien, nous aussi! N'est-ce pas, chérie?

-       Allez! Je te suis.

-       Tu n'es pas trop fatiguée?

-       Un petit peu, mais ce n'est rien; une bonne nuit et cela passera…

C'est vrai qu'elle avait beaucoup grossie, elle atteignait son sixième mois. Elle devait se rendre chez son médecin pour un autre examen. Elle ne voulait pas inquiéter son mari mais elle souffrait du dos et des jambes. Malgré cela, il s'en était aperçu et en parla au médecin. Après avoir examiné Marie, le médecin confia que le bébé serait gros et que tout était normal. Il insista pour qu'elle cesse toute activité et qu'elle se repose.

-       Tu as entendu ma chérie: j'exige que tu reste à la maison et que tu respecte ce que le docteur t'as dit.

-       Pas de problème, je me reposerai lorsque nous aurons fini d'installer la chambre du bébé, avec l'aide de Pauline, évidemment.

Le magasin avait livré leur commande et les livreurs avaient tout déballé et placé.

Pauline mit les rideaux après le berceau qui s'harmonisaient parfaitement avec le tissus en soie des murs; ensuite, ce fut la nursery qui se garnit, la table à langer, les boites de couches, tout le nécessaire de toilette et la commode pleine de layette. Marie était très émue lorsque tout fut fini.

Stéphane rentra, elle lui demanda de la rejoindre à l'étage.

-       Bonjour ma chérie, tu vas bien?

-       Oui, maintenant, ferme les yeux.

Elle poussa la porte de la chambre du bébé. Lorsque Stéphane rouvrit les yeux, il prit sa femme dans ses bras et l'embrassa tendrement.

-       C'est magnifique! Je réalise vraiment que bientôt, nous aurons un petit "bout de chou" dans ce berceau. Tu fais de moi l'homme le plus heureux du monde.

Ils passèrent à table.

-       Tu sais, ma chérie, je me suis renseigné auprès du docteur Simon pour qu'il  nous trouve une nurse; il a affirmé que ce n'était pas un problème et qu'il pourrait en envoyer une le temps venu.

Cette nouvelle rassura Marie.

-       J'ai encore une autre surprise pour toi!

Il se leva et lui donna un paquet:

-       Qu'est-ce que c'est?

-       Ouvre, tu verras!

C'était un très beau livre qui s'adressait aux futures mamans: "comment s'occuper d'un bébé"; il traitait de tout, en très imagé.

-       Mon amour!…. quelle bonne idée tu as eu! Il va vraiment me servir. Je te remercie. Je vais avoir le temps de le "potasser", maintenant que je ne vais plus à la boutique: cela m'attriste de t'abandonner.

-       Ne t'inquiète surtout pas: tout marchera bien; je suis bien entouré et j'ai une bonne équipe.

Ils montèrent se coucher; Stéphane regardait sa femme, malgré ses rondeurs: il la trouvait toujours aussi appétissante. Mais parfois, au plus fort de leur relation physique, il avait peur de blesser le bébé et de faire souffrir Marie.

-       Bonne nuit, ma chérie!

Elle lui tendit ses lèvres et s'endormit dans ses bras.

Le lendemain, Stéphane partit à la boutique. Marie dormait encore; il lui laissa un mot d'amour à côté de son déjeuner, il lui promettait de l'appeler plusieurs fois dans la journée.

Marie se leva. Avant de descendre, elle ne put s'empêcher de "jeter un coup d'œil" à la chambre de bébé. Comme elle avait hâte que ce soit terminé, qu'elle puisse serrer son enfant dans ses bras. Elle descendit et trouva Pauline qui s'affairait à lui préparer un petit déjeuner.

-       Bonjour madame, comment vous sentez-vous ce matin?

-       Pour tout vous dire, Pauline, je ne ferais pas un "cent mètres"

Ce qui la fit rire. Elle ne savait que faire pour lui être agréable; elle était une vraie mère pour Marie qui lut le petit mot déposé par son mari, qui lui réchauffa le cœur. Dans la matinée, elle commença à lire son livre: elle le trouva très détaillé et apprit des choses qu'elle ne soupçonnait même pas.

Stéphane lui téléphona:

-       Bonjour ma chérie, tu vas bien? As-tu trouvé mon petit mot?

-       Oui, tu es un amour!

-       Que fais-tu?

-       Je lis le livre que tu m'as offert; c'est un plaisir. Et toi, tout se passe bien?

-       Oui, je suis triste, tu me manques tellement; je vais trouver la journée incroyablement longue. Allez! Je t'embrasse, mon bébé; à plus tard!

Les jours et les mois passèrent au même rythme. Le soir, ils ne sortaient plus et ne recevaient pas non plus. Ses beaux-parents passaient très souvent, ainsi que Julie dont l'exposition était terminée: elle avait remporté un vif succès. Anthony avait rejoint Londres mais venait toutes les fins de semaine. Même le temps avait changé: nous étions au printemps; il faisait très doux et la nature revivait. Aussi, Marie allait-elle se promener avec Pauline; mais elle ne marchait pas très longtemps et avait de plus en plus de difficultés à se mouvoir: il lui fallait l'aide de Pauline, même pour prendre son bain; c'était une vraie "galère". Nous étions fin avril; elle devait accoucher au mois de mai. Durant les derniers temps, son ventre ressemblait à une montgolfière et elle ne pouvait plus sortir de sa chambre: c'était dur pour elle, une femme si active, de se voir dans l'incapacité de faire quelque chose. Elle restait en robe d'intérieur très large, toute la journée. Le docteur Simon passait la voir très souvent:

-       Je suis inquiète, docteur, je me trouve anormalement grosse. Est-il possible que j'aie des jumeaux?

-       Non, je n'entends qu'un seul cœur; et aux examens, je n'ai vu qu'un gros bébé. Allez-vous accoucher à l'hôpital?

-       Ah non! Il n'en est pas question; l'hôpital est fait pour les malades et la grossesse n'est pas une maladie. Je veux avoir mon enfant dans cette maison.

-       Reposez-vous, madame Morel, je passerai vous voir très souvent; au cas où vous auriez besoin de moi, vous pouvez me joindre jour et nuit.

-       Je vous remercie, docteur.

Stéphane arriva et monta rapidement voir sa femme.

-       Bonsoir ma chérie, quoi de neuf?

-       Pas grand-chose; le docteur Simon m'a rendu visite et a trouvé que tout était normal. Il m'a demandé si j'accouchais à l'hôpital: je lui ai dit que je tenais absolument à ce que mon bébé naisse dans cette maison.

-       Je ne suis pas sûr que tu aies raison, je ne voudrais pas que tu prennes des risques; réfléchis encore.

-       C'est tout réfléchi, chéri, ma décision est prise.

Stéphane comprit que c'était inutile d'insister, espérant qu'elle n'aurait pas à le regretter; mais il était quand même inquiet.

-       Je descends dîner, je reviens passer la soirée avec toi – il l'embrassa sur le front.

Lorsqu'il fut avec Pauline, il lui fit part de son inquiétude; il trouvait sa femme fatiguée:

-       Rassurez-vous monsieur, c'est normal; elle est tellement grosse: je pense qu'elle ne va pas tarder à accoucher.

-       Je ne sais pas si elle vous a mise au courant: elle ne veut pas aller à l'hôpital; je compte donc sur vous pour tout préparer.

-       Cela sera fait, monsieur; soyez tranquille.

 Après le dîner, il rejoignit sa femme. Elle dormait paisiblement; il l'embrassa et parti dormir dans la chambre voisine pour ne pas la déranger. Le lendemain, lorsqu'il se rendit auprès de sa femme, elle était réveillée:

-       Bonjour mon "bébé", comment te sens-tu ce matin?

-       Je ne sais pas trop; je ne peux même pas m'asseoir dans le lit.

-       Je vais t'aider….- il lui souleva les oreillers, elle se calla.

-       Dis-moi, chéri, tu n'es pas venu hier-soir?

-       En es-tu sûre? Tu dormais; tu ne m'as pas vu.

-       Oh! J'en suis désolée!

Il la prit dans ses bras et l'embrassa.

-       Je vais aller à la boutique. Au cas où quelque chose se passe, dis à Pauline de m'appeler, je viendrai immédiatement.

-       Chéri, veux-tu assister à l'accouchement?

-       Bien sûr! Je tiens à être près de toi, je veux être présent lorsque notre bébé arrivera.

-       Cela va te répugner et après tu ne voudras plus de moi

-       Arrête de dire des bêtises, repose-toi bien. Je t'aime comme un fou. – un petit "bisou" et il partit.

Marie prit son petit-déjeuner que Pauline lui avait apporté; elle se leva ensuite mais elle sentit couler un liquide sur ses jambes; elle appela Pauline qui l'aida à se recoucher:

-       Qu'est-ce qui m'arrive?

-       Vous commencez à perdre les eaux. Madame, restez tranquille; je préviens le docteur Simon et votre mari.

Ce qu'elle fit. Elle sortit de l'armoire une alèse qu'elle glissa sous Marie; un drap de bain. Elle lui fit sa toilette et descendit faire bouillir de l'eau.

Le docteur Simon, suivit de son assistante, ne tarda pas à arriver; ainsi que Stéphane.

Après l'avoir auscultée, il lui déclara qu'elle était en plein "travail", qu'il fallait attendre et que tout irait bien. Les paroles rassurantes du docteur n'empêchaient pas Marie d'être tétanisée par la peur. Une douleur plus fulgurante lui coupa le souffle; Marie ne s'attendait pas à une telle souffrance. Son mari était près d'elle:

-       Oh! Chéri, c'est affreux!

-       Est-ce que sera long ? – demanda Stéphane au docteur.

-       Probablement, des heures….

Marie fondit en larmes:

-       Ah non! Je n'y arriverai pas!

Stéphane regrettait de l'avoir écouté et de ne pas l'avoir emmenée à l'hôpital. Des vagues bouillantes montaient dans le corps de Marie. Bien que très entourée, elle se sentait seule avec sa douleur. Le docteur lui avait écarté les jambes en lui intimant l'ordre de pousser, mais elle ne pouvait pas. Une contraction plus éprouvante lui arracha des cris:

-       Respirez  fort, madame Morel, et poussez!

Exténuée, Marie continuait à pousser…. Et pousser encore. Pauline avait fait du café pour tous; les cris de Marie emplirent à nouveau la chambre.

-       Oh ma chérie!

Stéphane était livide de voir sa femme souffrir autant. Le docteur commença à s'inquiéter sans toutefois le montrer. A nouveau, les douleurs la submergèrent, elle se remit à pousser, mais toujours rien…..

Le docteur procéda à un nouvel examen; et c'est là qu'il s'aperçut que le bébé se présentait "par le siège".

-       Je vais devoir le retourner.

Un cri perçant échappa à Marie qui fit monter les larmes aux yeux de Stéphane.

-       Courage! Mon amour.

Elle sentit le bébé bouger:

-       Je n'en peux plus, docteur!

Une nausée la prit, suivie de plaintes. Stéphane se jura de ne plus jamais lui faire l'amour. Il l'entoura de ses bras, tandis qu'ils mêlaient leurs larmes. Elle poussa à nouveau…. Un faible vagissement fit écho à ses cris: de son énorme ventre sorti un minuscule bébé, une petite fille, toute rose et parfaitement formée qui gigotait entre les mains du docteur. Ses parents, étonnés et ravis, la regardaient:

-       Elle est si jolie – dit Marie qui tenait le nouveau-né dans ses bras, en pleurant.

-       Voilà, ce n'est pas si terrible; toutes ces douleurs disparaîtront et seront vite oubliées.

A cet instant, le sourire de Marie s'effaça, elle se remit à crier; la douleur avait repris de plus belle:

-       Que se passe-t-il? – demanda Stéphane, tandis que de nouveau, elle se tordait en gémissant

-       Cela arrive parfois – expliqua le docteur – des contractions après la délivrance sont parfois pires; dans quelques minutes, elle expulsera le placenta.

Marie se mit à pousser: un flot de sang jaillit; Stéphane, d'une voix étranglée:

-       Est-ce normal, docteur?

Soudain, une petite tête apparut: un petit visage aux grands yeux étonnés, qu'elle expulsa et suivi d'un unique placenta:

-       Marie, ma chérie! nous avons…. Un deuxième bébé: un fils!

L'accouchement avait duré dix heures:

-       Je n'en crois pas mes yeux, ils sont si beaux et se ressemblent comme "deux gouttes d'eau"; dis-moi, chéri… je rêve!

Ils pleuraient et riaient en même temps tout en les tenant dans leurs bras.

-       Merci, merci ma chérie!

Stéphane se ressaisit et demanda au docteur Simon des explications sur cette surprise:

-       Cela arrive, compte tenu de la position des jumeaux, qu'on entende qu'un seul cœur.

Puis le médecin posa quelques points de suture à Marie. Pauline lui rafraîchit le visage. C'était fini, elle était délivrée; elle eut un sourire heureux. Après un si long calvaire, ses souffrances étaient déjà oubliées. Lorsque Stéphane la pris dans ses bras, il s'excusa:

-       Je suis désolé de t'avoir imposé cette épreuve.

-       Cela valait la peine: chéri, nous avons un garçon et une fille; tu te rends compte?  Raphaël et Isabelle Morel: tu ne trouve pas que cela "sonne" bien?

-       Oui mon amour. Allez, maintenant je te laisse dormir, tu as besoin de repos.

  Le docteur Simon vint en fin de soirée, accompagnée de la nurse; il fit les présentations:

-       Tout va très bien; demain, elle pourra se lever un moment pour faire sa toilette.

Il alla voir les jumeaux qui dormaient avec leurs petits poings fermés.

Agnès vint ensuite se présenter à Marie. Elles discutèrent de l'essentiel; elle se retira enfin en l'assurant qu'elle veillerait bien sur ses enfants. Plus tard, elle fit la connaissance de Pauline. Finalement, tout se "mettait en place".

Stéphane descendit au salon pour annoncer la bonne nouvelle à ses parents.

-       Allô, maman?

-       Oh! Stéphane, que t'arrive-t-il?

-       Un bonheur immense, Marie a accouché!

-       Comment va-t-elle? Comment cela s'est-il passé? C'est une fille? Un garçon? – elle n'arrêtait pas de le "bombarder" de questions.

-       Je t'en prie maman, laisse moi parler! Marie m'a donné un garçon… et une fille!

-       Quoi? Des jumeaux! Tu entends, Pierre: nous sommes grands-parents de jumeaux. – tous les deux pleuraient de joie.

-       Nous ne pouvons pas attendre demain pour les voir, nous arrivons! Nous ne resterons qu'un instant.  – Sophie raccrocha.

Stéphane annonça la bonne nouvelle à Julie: elle n'en cru pas ses oreilles:

-       comment vas-tu les appeler,

-       Raphaël et Isabelle.

-       Félicitations! C'est un bon choix. Comment va Marie?

-       Tu sais, elle a beaucoup souffert; maintenant, elle se repose. Tu pourras prévenir Anthony, s'il te plaît? Je n'arrive pas à le joindre.

-       Bien sûr, tu peux compter sur moi. Il sera là en fin de semaine, nous passerons vous voir. A bientôt… et félicitations! Embrasse Marie pour moi.

Il téléphona au magasin pour commander un autre berceau et un lit. Le vendeur fut très surpris lorsqu'il apprit la situation:

-       Monsieur Morel, je vous les fais livrer demain à la première heure.

-       Je vous remercie.

 Les parents ne tardèrent pas à arriver: ils étaient tous les deux dans une telle excitation que Stéphane en sourit.

-       Calmez-vous, je vais vous montrer mes deux "merveilles". – ils arrivèrent dans la chambre.

-       Mon Dieu! Qu'ils sont beaux! Tu peux être fier.

-       Mais… je le suis!

Sophie se demandait à qui ils ressemblaient.

Stéphane leur expliqua que ses bébés avaient les yeux bleus mais qu'il était difficile de définir les ressemblances: Endormis comme ils l'étaient, ils étaient les mêmes.

-       On voudrait bien embrasser Marie!

Stéphane entrouvrit la porte de sa chambre, mais Marie dormait paisiblement.

-       Ne la réveille surtout pas, nous reviendrons demain.

-       Oui, je préfère qu'elle se repose, elle a tellement souffert durant dix heures qu'elle a besoin de récupérer.

-       Nous le comprenons; étant donnée l'heure, nous te laissons et te félicitons; à demain, passe une bonne nuit!

Stéphane alla rejoindre Pauline pour le dîner:

-       Vous devez être fatigué, monsieur!

-       Oui, la journée a été dure, avec toutes ces émotions; je mange juste un repas léger et je vais me coucher.

Lorsqu'il fut à l'étage, tout le monde dormait, aucun bruit ne venait troubler cette sérénité. Il se glissa dans son lit et s'endormit aussitôt.

Quand il se réveilla, il s'empressa d'aller voir Marie.

-       Bonjour ma chérie!

-       Bonjour mon cœur. – ils s'embrassèrent.

-       Comment te sens-tu? As-tu bien dormi?

-       Oui chéri, tu peux le dire, j'en avais vraiment besoin.

-       Je suis tellement content que tu aies récupéré un peu.

-       Et nos bébés? Je ne les ai pas entendus.

-       Il est tôt, ils dorment encore. Agnès te les apportera, lorsqu'elle leur aura donné leurs soins.

-       J'ai faim. Peux-tu demander à Pauline de nous monter notre petit-déjeuner?

-       Pas de problème. Je descends le chercher.

Il revint avec un grand plateau garni: "café, lait, jus de fruits, croissants…"

Marie se calla seule dans ses oreillers et Stéphane se mit à côté d'elle. Ils déjeunèrent en parlant de Raphaël et d'Isabelle, des parents de Stéphane.

-       Mes parents doivent passer te voir cet après-midi.

Il se rendit à la salle de bain pour se préparer. Il avait quelques courses à faire: passer à la mairie déclarer la naissance des enfants, puis à la boutique pour leur annoncer la bonne nouvelle. Avant de partir, il alla embrasser sa femme et entra dans la chambre des enfants. Marie était en train de leur donner leur premier bain. Stéphane était en extase:

-       Bonjour Agnès, comment s'est passée votre nuit?

-       Très bien, monsieur, vos enfants ont été très sages.

-       Ma femme est très impatiente de les voir

-       Le temps de les faire manger, de les habiller et je les lui amène.

-       Si vous avez besoin d'aide, sonnez! Pauline vous aidera.

-       Merci monsieur.

Lorsqu'il partit, il croisa Pauline qui se rendait auprès de sa femme.

-       Bonjour madame!

-       Bonjour Pauline!

-       Je trouve que vous avez bonne mine; je vais vous aider à vous lever et à faire votre toilette.

-       Merci, vous êtes gentille.

Marie posa un pied parterre, soutenue par Pauline. Elle se trouvait bizarre, sans son énorme ventre. Tout doucement, elles se rendirent à la salle de bain.

Marie appréçia…. Sous la douche, elle se sentit revivre, puis se maquilla un peu, se coiffa et enfila un déshabillé bleu nuit. Pauline la reconduisit ensuite à sa chambre, l'installant dans un fauteuil, le temps de refaire le lit "à fond".

-       Allez! Il faut vous recoucher: cela suffit pour aujourd'hui.

-       Vous avez raison, il ne faut pas faire d'imprudence.

Pauline alla rejoindre Agnès qui s'apprêtait à amener le bébés à Marie: Raphaël en bleu, Isabelle en rose.

Lorsque Marie les prit dans ses bras, elle les embrassa, les respira:

-       C'est fou ce qu'un bébé peut sentir bon!

Qu'ils étaient beaux, comme ils se ressemblaient; c'était un magnifique tableau:

-       Oh! Regardez, Agnès! Raphaël a ouvert les yeux. Qu'ils sont beaux!

Sa sœur en fit autant; Marie cria:

-       Mais, ce sont les mêmes! Comme j'aimerais pouvoir les nourrir!

Mais le docteur Simon s'y était opposé: son accouchement l'avait trop affaiblie. Il avait mis les bébés au biberon, de manière que tous puissent les nourrir tour à tour.

Agnès les prit pour les recoucher.

-       Allez les bouts de choux, la visite est terminée.

-       J'aimerais tellement les garder avec moi.

-       Eh non, vous devez vous reposer et retrouver vos forces.

E son côté, Stéphane avait fait ses courses. Il se rendit à la boutique, inutile de vous dire l'accueil qui lui fut réservé: tous tenaient à le féliciter et avoir des nouvelles de sa femme.

Lorsque tout fut fini, il prit le chemin du retour. Il avait hâte de retrouver toute sa petite famille. Il prit tout de même le temps de s'arrêter chez le fleuriste pour lui prendre un énorme bouquet de roses rouges. Quelle belle journée ensoleillée! en arrivant dans le parc, il entendit le chant des petits oiseaux; toutes les plantes commençaient à fleurir et l'air était parfumé. Vite, il rentra et monta en courant à l'étage retrouver sa femme:

-       Ma chérie, tu as une mine superbe!

Il l'embrassa et lui offrit les fleurs:

-       Quel beau bouquet de roses ! S'il te plaît, mets-les dans l'eau; merci chéri!

-       Je vais voir les bébés.

Il se pencha sur les berceaux et déposa un baiser sur leurs petites mains:

-       Oh Agnès! Qu'est-ce qu'ils sont mignons habillés ainsi!

Ils avaient les yeux ouverts: Lui aussi, il remarqua le bleu acier de leurs iris. Il se retourna vers Marie:

-       Chérie, ils avaient les yeux ouverts; tu crois qu'ils m'ont vu?

-       Je ne sais pas, pose la question à Agnès.

-       Tu as vu comme ils sont adorables; avoue, ma chérie, que nous avons fait du bon travail..

-       Tu sais, tous les enfants de l'amour sont beaux.

-       Au fait, as-tu déjeuné?

-       Oui, Pauline m'a apporté mon plateau.

-       Moi, je vais te laisser un instant et aller manger; mon estomac crie famine.

-       Bon appétit, chéri!

Il rejoignit Pauline qui attendait.

-       Vous avez vu, monsieur, le magasin a installé le second berceau et le lit.

-       J'ai remarqué, en effet.

Ils déjeunèrent en tête-à-tête et, évidemment, parlèrent des bébés; c'était le sujet actuel de toutes les conversations.

Ils avaient à peine terminé que les parents de Stéphane arrivèrent avec un énorme paquet. Ils avaient acheté un  landau anglais à deux places pour promener leurs petits-enfants dans le parc.

-       C'est notre cadeau

-       C'est une idée merveilleuse, je vous remercie!

Ils montèrent voir Marie; Sophie et Pierre la serrèrent dans leurs bras en n'arrêtant pas de la remercier, après s'être inquiétés de sa santé:

-       Comme vous voyez, je me remets de mes émotions.

Ils allèrent à la nursery: là, ils furent en adoration devant leurs petits-enfants:

-       Tu vois Pierre, je n'ai jamais vu de plus beaux bébés!

Ce qui le fit sourire. Puis ils allèrent papoter avec leurs enfants:

-       Vous nous avez offert le plus beau cadeau de notre vie: merci encore! Nous allons vous laisser; Marie a besoin de se reposer mais rassurez-vous: nous passerons très bientôt.

Marie se remettait très bien; elle se levait presque toute la journée. Son plus grand plaisir était de contempler ses enfants. Chaque jour, les enfants s'éveillaient de plus en plus. Son immense joie était de se mettre dans un fauteuil et de leur donner le biberon, soit à l'un, soit à l'autre. Elle commençait à faire son apprentissage de maman.

Stéphane aussi, passait beaucoup de temps auprès d'eux. Leur vie était complètement bouleversée. Stéphane avait réintégré leur chambre, pour le plus grand bonheur de Marie. Il pouvait à nouveau la serrer dans ses bras; cet éloignement avait été une période difficile pour lui:

-       Chérie, si tu savais combien le fait de dormir près de toi me comble de joie.

Elle lui caressa la joue et lui tendit ses lèvres…

Le week-end arriva; comme promis, Anthony et Julie passèrent les voir en soirée, les bras chargés de peluches. Eux aussi furent émus et s'empressèrent de les féliciter. Marie et Julie discutèrent:

-       Tu as de la chance d'avoir mis au monde ces deux "bouts de chou".

-       Patience, après ce sera ton tour.

-       J'espère bien! J'aime tellement les enfants; j'en veux au moins trois…

Anthony avait entendu la fin de la conversation:

-       Que veux-tu en triple?

-       Des enfants, mon chéri!

-       C'est tout! Cela me rassure – il l'enlaça – il faudra que je demande la recette à Stéphane.

Ce qui les fit rire. Ils allèrent ensuite tous dans la chambre de Marie:

-       Je vais chercher le champagne – suggéra Stéphane – nous allons fêter cet événement.

-       C'est normal, petit frère, avoir des jumeaux, ce n'est pas courant.

Ils étaient tous bien installés: Stéphane arriva avec son plateau, une bouteille et des petits fours; il fit le service. Ils levèrent tous leurs verres à la santé des enfants et de Marie qui était bien calée dans ses oreillers.

-       Alors Anthony, c'est pour bientôt le mariage?

-       Dis-leur, chérie.

-       Nous pensons nous marier le vingt juillet; nous avons choisi cette date par rapport à nos activités.

-       C'est parfait – s'écria Marie – c'est une bonne période pour de nombreuses raisons: le temps, les longues journées… et où allez-vous habiter?

-       Oh! – dit Julie – mes parents ont une belle maison sur la Butte Montmartre. Ils ne l'occupent plus; ils ont préféré avoir un appartement place Vendôme, à côté de la boutique et de l'atelier de fourrure: c'est avec plaisir qu'ils nous ont proposé de l'habiter. De ce côté là, le problème est réglé dans un  premier temps. Après, nous verrons…Quant au mariage, nos parents doivent se rencontrer pour faire la mise au point sur le nombre d'invités, le repas, le lieu etc.… j'irai, bien sûr, choisir la robe de mariée à votre boutique.

-        Stéphane te présentera Annie. Tu peux lui faire entièrement confiance pour son bon goût. Elle saura te conseiller.

Marie s'adressa à son mari:

-       Nous aussi, il nous faut décider d'une date pour le baptême.

-       Tu sais,"mon bébé", courant juin serait parfait! D'ici là, tu auras retrouvé la forme.. et ta ligne! – lui dit-il pour la taquiner – mais dès que nous aurons fixé la date nous vous la communiquerons.

-       D'accord! Pas de problème.

-       Je vous rassure: nous n'avons pas l'intention de faire une fête grandiose, mais plutôt familiale: nos parents et vous.

-       Au fait – demanda Anthony – qui sont les parrains  et marraines?

-       Nos parents. Notre fils s'appellera Raphaël-Pierre; notre fille, Isabelle-Sophie: ils porteront les prénoms des parents de Marie, avec ceux de nos parents.

Anthony trouva que c'était de très jolis prénoms et que nos parents en seraient très touchés;

-       Julie! As-tu vu l'heure?

-       Oui chéri, je vais voir une fois encore les bébés, et nous rentrons.

Stéphane les accompagna:

-       Merci beaucoup et à bientôt.

Il était tard, les enfants dormaient. Stéphane et Marie avaient une chance inouïe: les enfants ne pleuraient pratiquement jamais, ce qui leur permettait de passer de bonnes nuits tranquilles; et il y avait Agnès, à qui l'on pouvait faire entièrement confiance.

Stéphane se glissa dans le lit, prit Marie dans ses bras, l'embrassa et lui souhaita une bonne nuit. Elle s'endormit dans le creux de son épaule.

Heureusement, le lendemain était un dimanche. Ils pourraient dormir plus tard… lorsque Stéphane sentait Marie si près, il était obligé de se faire violence pour ne pas lui faire l'amour mais il savait qu'il ne devait pas… du moins, pas encore.

Le lendemain, le soleil filtrait à travers les volets. Pauline leur monta leur petit-déjeuner. Ils "traînèrent" au lit. Avant qu'ils ne se lèvent, Agnès leur amena Raphaël et Isabelle. Ils en prirent chacun un…. De jour en jour, ils "changeaient". Ils remarquèrent, mis à part leur ressemblance, que leurs bébés avaient trois petites taches de rousseur à l'intérieur de leurs "menottes".

-       C'est la "marque de fabrication", ma chérie! – ils rirent aux éclats.

-       C'est tout ce que tu trouves à dire?

Puis ils échangèrent leurs bébés mais ils avaient l'impression d'avoir toujours le même dans les bras.

-       Heureusement, chérie, qu'ils ne sont pas du même sexe, sinon je ne sais pas comment nous les différencierions.

 Un instant plus tard, Agnès vint les rechercher pour les mettre au lit.

Stéphane se leva, suivi de Marie, et allèrent à la salle de bain. Une fois leur  toilette terminée, Marie enfila une robe bleue; son mari lui en fit compliment.

-       Tu as presque retrouvé ta ligne, ma chérie.

-       Tu trouves? Sais-tu ce qui me ferait plaisir? Je voudrais que tu m'aides à descendre au salon.

-       Comme tu veux! Je peux même t'y porter.

-       Inutile, ton bras me suffira.

 Elle sentait son courage revenir et en avait assez d'être dans sa chambre

-       Lorsque nous aurons déjeuné, j'irai aussi faire un tour sur la terrasse.

-       C'est une très bonne idée, chérie, il fait doux; cela te fera le plus grand bien de t'aérer.

Pauline fut très surprise de voir sa patronne au salon.

-       Je suis très heureuse, madame, de vous voir ici. Allez-vous déjeuner à la salle à manger?

-       Oui, bien sûr; et après, je vais faire un tour sur la terrasse.

-       Vous verrez comme la nature a changé…

-       Je m'en doute!

Tout renaissait: le parc, la vie dans la maison, c'était le bonheur complet.

-       Mon "bébé", tu n'as pas vu le magnifique landau que mes parents nous ont offert.

-       Non, tu me caches tout.

-       Un instant, je vais le chercher.

-       Mon Dieu, qu'il est grand!

-       Il le faut; ils ne resteront pas tout petits! Plus cela ira, plus ils tiendront de la place.

-       Pour les promener dans le parc, ce sera génial. Tes parents sont adorables d'y avoir pensé.

Le chat fit son apparition et alla se frotter contre les jambes de Marie. Elle le prit dans ses bras, le caressa.

-       Alors, mon Bambou! Je t'ai abandonné? – il ronronnait comme pour lui souhaiter la bienvenue. – tu sais, dans quelques mois, tu auras des petits copains pour jouer.

Bambou se sauva….

-       Alors, ma chérie! tu as retrouvé ton copain?

-       Oui mais il est déjà reparti…

-       Ne t'inquiète pas! il ne tardera pas à revenir.

Pauline vint les prévenir qu'ils pouvaient passer à table

-       Nous arrivons, Pauline.

Ils étaient heureux de reprendre leurs habitudes. Une fois le repas terminé, il enlaça sa femme et ils allèrent s'asseoir sur le banc de la terrasse.

-       Oh mon Dieu! Comme c'est beau et quel parfum! Il faudra féliciter Paul d'avoir planté de si belles fleurs. Chéri, j'ai l'impression de renaître. – il l'embrassa.

-       Et moi mon "bébé": te voir récupérer tes forces me comble de bonheur!

Il la regarda, elle avait un air songeur.

-       A quoi penses-tu?

-       A nos enfants: je les imagine courant dans le parc, se balançant; comme ils seront heureux dans ce cadre merveilleux !

-       Là, tu vois, il faudra attendre quelque temps, avant que ton rêve ne se réalise. Allez viens, nous rentrons; pour ta première sortie, cela suffit.

Ils se dirigèrent vers le canapé et écoutèrent de la musique, collés l'un à l'autre; puis ils montèrent auprès de leurs enfants : ils étaient réveillés:

-       Peut-on les prendre?- demandèrent-ils à Agnès.

-       Je ne suis pas contre, mais cela risque de leur donner de mauvaises habitudes et en grandissant, ils deviendront capricieux.

-       Alors nous allons nous contenter de les regarder.

Ils se penchèrent pour les embrasser et leur dire des mots d'amour. La soirée se termina ainsi.

Nous étions début juin. Marie était en pleine forme et n'avait plus besoin d'aide pour s'assumer. Après le départ de Stéphane, elle téléphona à ses beaux-parents pour leur communiquer la date du baptême;

-       C'est parfait pour nous; nous en parlerons plus longuement cet après-midi, nous avons l'occasion de passer te voir.

-       Cela me fait vraiment plaisir; je vous attends.

Pour Marie, c'était toujours une joie d'être avec eux. Elle monta à la nursery voir ses enfants. Agnès était en train de les habiller. Elle prit "Isa" dans ses bras et la couvrit de baisers.

-       Comme tu es belle, ma chérie! tu reconnais ta maman?

-       Je pense que c'est encore un peu tôt.. – lui dit Agnès.

Elle alla ensuite vers "Raph":

-       A ton tour, mon petit bonhomme! Tu sais toi aussi, tu es beau; quand tu seras grand, tu seras aussi beau que ton papa.

Lui aussi eut sa part de câlins.

-       Vous pensez que nous pourrons bientôt les sortir ?

-       Oui, bien sûr, madame! Nous choisirons une journée sans vent; vers la fin de la semaine. Lorsque votre mari sera là, cela lui fera vraiment plaisir d'assister à leur première sortie.

-       D'accord, vous savez Agnès, j'apprécie de vous avoir; seule, je ne m'en sortirais pas.

-       Merci madame!

Marie descendit déjeuner avec Pauline. Stéphane ne rentrait que le soir mais il n'oubliait jamais de l'appeler deux à trois fois par jour pour prendre des nouvelles et lui dire son amour. Comme convenu, ses beaux-parents vinrent en début d'après-midi:

-       Bonjour ma petite Marie; nous sommes ravis de te trouver en si bonne forme. Tu as une mine superbe… et quelle ligne!

-       Je vous remercie; installez-vous dans le salon; Pauline va nous servir le café.

-       Comment vont nos petits-enfants?

-       Très très bien; ils changent de jour en jour, de plus, ils sont très sages.

Ils prirent leur café tranquillement et parlèrent du baptême et des prénoms:

-       Notre fille s'appellera Isabelle-Sophie; notre fils, Raphaël-Pierre.

-       C'est un grand honneur que tu nous fais, de nous avoir choisis comme parrain et marraine. Nous nous efforcerons de nous en montrer dignes.

-       C'est normal, je vous aime tellement – dit-elle en se dirigeant vers eux pour les embrasser – venez! nous allons monter voir vos petits-enfants.

 Ils entrèrent dans la nursery; Agnès finissait de changer leur couche. Elle donna un bébé à chacun des grands-parents: comme ils étaient fiers de les tenir dans leurs bras et de pouvoir les embrasser!

Arriva l'heure du biberon:

-       S'il te plaît Marie, laisse moi le lui donner.

Marie donna l'autre bébé à Pierre, mais il décréta qu'il ne saurait pas faire… ils faisaient plaisir, ces enfants, de voir de quelle façon ils avalaient leur biberon: rien qu'à les regarder, pierre s'en amusait; un moment après, bien repus, ils commencèrent à fermer leurs petits yeux. Agnès les prit délicatement et les mit dans leur berceau.

Pierre, toujours en extase, ne put s'empêcher de dire:

-       Quel magnifique tableau, cette séance de tétée;

-       Oh oui! – répondit Sophie – nous nous sentons rajeunis.

Tout en regagnant le salon, Marie expliqua que le baptême se ferait en famille:

-       Vous, Anthony et Julie.

-       C'est parfait, rien n'est plus beau qu'une fête de famille;

Ils étaient ravis.

-       Pauline, s'occupera du repas; je vous rappelle la date: le vingt juin; vous pouvez le noter sur votre agenda.

-       Rassure-toi Marie, nous ne risquons pas de l'oublier; et le vingt juillet, le mariage d'Anthony et Julie. Nous avons rencontré les parents de Julie pour organiser la cérémonie: ce sont des gens adorables, malgré leur immense fortune, et de plus, très accueillants.

-       Comme vous ! vous devriez bien vous entendre;

-        Eh bien! Ma chère Marie, nous allons rentrer, nous avons quelques courses à faire.

-       Déjà? Stéphane va être déçu que vous ne l'ayez pas attendu.

-       Une autre fois; tu l'embrasseras  pour nous.

-       Je n'y manquerai pas.

  Après leur départ, Marie attendit son mari en feuilletant une revue. Les journées étaient longues sans lui. Enfin, il arriva; elle avait entendu la voiture. Elle se précipita vers la porte et se jeta dans ses bras.

-       Quel accueil!

-       Mon chéri, tu m'as tellement manqué!

Ils s'embrassèrent comme s'ils ne s'étaient pas vus depuis un mois.

-       Ta journée s'est bien passée, chéri?

-       Plus que bien, nous avons des commandes qui affluent de partout.

-       Et toi, mon "bébé"?

-       J'ai eu la visite de tes parents; ils m'ont demandé de t'embrasser; ils étaient désolés de partir avant ton arrivée: ils avaient des courses à faire; tu sais, ils ont bien profité de leurs petits-enfants. Ils sont vraiment adorables.

Ils allèrent au salon.

-       Veux-tu que je te serve quelque chose?

-       Non-merci ma chérie! j'attendrai le repas.

Pauline ne tarda pas à les inviter à passer à table.

Après le dîner, Stéphane n'avait qu'une hâte, voir ses bébés. Marie le suivit

-       Tu sais chérie, si je n'avais pas des obligations, je crois que je passerais ma journée dans leur chambre.

-       Et moi, dans tout cela, qu'est-ce que je deviendrais?

-       J'ai dit: la journée, pas la nuit! Tu sais bien que je ne suis rien sans toi, mon amour.

 Ils s'embrassèrent devant les berceaux, où leurs petits anges dormaient. Ils allèrent se coucher: ils restaient étendus, serrés l'un contre l'autre.

-       Combien de temps encore vas-tu ma faire languir?

-       Une dizaine de jours, environ

-       J'ai tellement envie de te faire l'amour…

-       Je te ferai patienter jusque là;

-       Alors, commence tout de suite.

-       D'accord! c'est toi le maître. – je ne voudrais pas que tu fasses un caprice.

Ils éclatèrent de rire; un moment après, ils sombrèrent tous les deux dans les "bras de Morphée".

Stéphane partait tôt le matin, la maison était endormie. Seule Pauline l'attendait à la cuisine pour le petit-déjeuner. Après quelques banalités échangées, il alla embrasser ses enfants, puis il partit.

Marie descendit à son tour, elle avait beaucoup à faire pour préparer le baptême. Elle s'entretint avec Pauline, lui demandant de proposer deux menus différents; après, Marie choisirait:

-       Nous ne serons que huit, avec vous et Agnès.

-       Je m'en occupe, madame.

Marie commanda les dragées, prit rendez-vous avec monsieur le Curé pour fixer l'heure du baptême. Elle monta auprès de ses enfants; c'était l'heure de la toilette et du biberon: elle ne voulait surtout pas manquer ce moment privilégié.

-       Vous savez, Agnès, en fin de semaine, lorsque mon mari sera là, nous pourrions les mettre dans leur landau et les promener dans le parc. Qu'en pensez-vous?

-       Si vous voulez mon avis, madame, vous avez raison: cela leur fera le plus grand bien…. Et à vous aussi!

Marie alla se faire couler un bon bain parfumé. Elle se sentait mince, jeune en pleine forme. C'est avec plaisir qu'elle se choisit une robe bleue, après avoir mis un soupçon de maquillage. Elle se rendit dans le bureau pour mettre un peu d'ordre dans son courrier qui s'était amoncelé. Elle entendit sonner – tiens: a onze heures, qui pouvait bien venir?

Pauline ouvrit: c'était Julie.

-       Quelle bonne idée de venir me voir!

-       J'avais ma journée libre et, je l'avoue, j'avais très envie de voir les bébés… et toi aussi, bien sûr! – Marie sourit.

-       Je te comprends. Tu déjeunes avec moi?

-       Oui, si tu m'invites…. Avec grand plaisir!

-       Vas à la chambre des enfants, je te rejoins; je vais prévenir Pauline.

Lorsqu'elle monta, elle trouva Julie devant les berceaux, béate d'admiration.

-       Il faut que je te surveille, que tu ne m'en kidnappes pas un…

-       Rassure-toi, comme je ne saurais pas lequel choisir, je les prendrais tous les deux. Tu sais, je te trouve très en beauté!

-       Tu n'es pas mal non plus!- elles partirent dans un éclat de rire.

-       Tu as des nouvelles d'Anthony?

-       Oui, bien sûr; il m'appelle très souvent. Il sera là vendredi soir; j'ai hâte, c'est très dur d'être séparés.

-       Allez viens! Pauline doit nous attendre.

Elles s'installèrent:

-       Au fait, es-tu passée à la boutique choisir ta robe?

-       Non, je n'irai que la semaine prochaine.

La conversation continua sur d'autres sujets; elles étaient aussi bavardes l'une que l'autre. L'après-midi était presque terminé et elles papotaient toujours… lorsque Julie regarda sa montre, elle n'en revint pas qu'il soit aussi tard.

-       Je monte embrasser les enfants et je me sauve.

-       Merci de ta visite; reviens quand tu veux: tu m'as fait passer une agréable journée;

-       Tout le plaisir a été pour moi.

Une heure après, Stéphane arriva; il trouva sa femme au salon:

-       Quelle est cette beauté qui se trouve là? – il l'enferma dans ses bras.

-       Ma chérie, que tu es belle! – en la dévorant de baisers.

Pour eux, c'était un plaisir sans cesse renouvelé, de se retrouver le soir, de profiter de leurs enfants, de s'aimer la nuit.

Le samedi arriva, il faisait un temps magnifique.

-       Chéri! peux-tu sortir le landau? Nous irons promener "Raph" et "Isa" dans le parc.

-       Voilà une bonne idée!

Agnès et Pauline les descendirent et les placèrent dans le landau. Ils avaient l'air d'apprécier.

-       Allez! En route, nous allons faire un "sprint"

-       Tu es fou! Il faut les pousser lentement.

-       Décidément, tu crois tout ce que je dis!

-       Excuse-moi.

Deux paires d' yeux bleus les regardaient. Ils étaient très fiers de se promener tous les quatre dans les allées du parc, de respirer les odeurs, d'admirer la nature.

-       Tu sais chérie! au printemps prochain, nous ferons installer une balançoire… peut-être deux; les enfants adorent… et aussi un piscine!

-       Très bonne idée, nous aurons tout l'hiver pour y penser.

Après deux heures de balade, les enfants dormaient. Ils rentrèrent et laissèrent les enfants au landau, dans la pièce contiguë au salon.

Pauline les attendait pour leur servir le déjeuner.

-       Veux-tu que nous allions voir mes parents cet après-midi?

-       Avec plaisir!

-       Une petite sortie avec ton mari te changera. J'ai l'impression qu'il y a un siècle que nous ne sommes pas sortis tous le deux.

-       C'est vrai, nous avons tellement été occupés… mais dorénavant, nous nous accorderons quelques soirées, rien que nous deux.

-       Cela me fait très plaisir de te l'entendre dire.

Après avoir donné leurs instructions, ils prirent la voiture et se rendirent chez les parents de Stéphane. Quelle ne fut pas leur surprise lorsque Sophie ouvrit la porte.

-       C'est pas vrai. Vous! Comme c'est gentil d'être venus !

-       Alors ma petite Marie, tu es de plus en plus resplendissante.. et le mot est faible! – Et toi, Stéphane, tu vas bien?

-       Très bien, je te remercie.

-       Venez vous asseoir au salon, nous serons mieux pour discuter.

Sophie était en train de demander des nouvelles des bébés, lorsque Pierre survint.

-       Marie, Stéphane! Oh mes enfants, quelle joie de vous voir. – et il les serra dans ses bras.

-       Que voulez-vous que je vous offre? Un thé ou une coupe de champagne?

-       Les deux, ma petite maman.

-       Tu exagères! – lui fit remarquer Marie;

-       Pas de problème!

Pour changer, la conversation s'engagea encore sur les enfants. Marie et Stéphane leur expliquèrent qu'ils avaient fait leur première promenade ce matin dans le parc; dans leur beau landau; ensuite on parla du  baptême qui était dans une semaine:

-       Marie, si tu veux sortir un après-midi, fais-nous le savoir: nous nous ferons un plaisir d'aller les promener.

-       J'accepte bien volontiers, je voudrais passer à la boutique. Julie doit y choisir sa robe de mariée; elle m'a demandé de l'accompagner pour lui donner mon avis. Je vous le confirmerai… je crois que c'est jeudi.

-       Nous serons chez vous très tôt.

-       Merci à tous les deux.

-       Nous allons vous laisser, il est temps d'aller voir nos petits chéris.

Ils regagnèrent leur belle demeure: les enfants dormaient à "poings fermés". La soirée se termina devant la télévision, dans les bras l'un de l'autre.

-       Ma chérie, t'ai-je dis que je t'aimais, aujourd'hui?

-       Non, ce n'est pas grave; peut-être que tu ne m'aimes plus!

Il lui sauta dessus:

-       Comment peux-tu dire cela ! alors que tu es tout ce que j'ai de plus cher!!

Ils s'embrassèrent comme des fous et montèrent dans la chambre. Là, ils se retrouvèrent enfin; Marie se donna à lui avec toute sa fougue. La nuit fut divine…

Les journées se ressemblaient, les bébés, les repas, les promenades, les soirées, leurs nuits sensuelles.

Arriva le baptême; pour eux, c'était un jour très important: Marie et Stéphane considéraient que pour un enfant, c'était une étape dans sa vie religieuse; la prochaine serait la première communion. A l'église, Sophie et Pierre étaient très fiers de porter leurs petits-enfants sur les fonds baptismaux.

Puis, tous revinrent à la demeure; Pauline leur avait préparé un succulent repas en plus d'une très belle table. La journée se passa très bien: ils dansèrent, Marie leur joua du piano… tous étaient joyeux d'être réunis. La prochaine réunion – dit Sophie – sera le mariage: cela sera encore un grand jour.

Puis la soirée se termina dans une bonne ambiance.

Le lendemain, reprise des activités de chacun…. Le temps passait avec une rapidité incroyable.

Lorsque arriva le grand jour pour Anthony et Julie, tous devaient se retrouver chez les parents de Stéphane; les invités, tous très élégants, étaient là quand arrivèrent Marie et Stéphane; Anthony était très beau également.. et très ému. Après la mairie, les limousines se dirigèrent vers l'église Notre Dame, où devait avoir lieu la cérémonie. Une foule immense était là. Lorsque Julie entra au bras de son papa, un silence se fit dans l'assemblée, pour l'admirer; elle ressemblait à une princesse. Anthony eut le souffle coupé. La messe commença une fois que les orgues se turent, puis l'échange des alliances et un baiser… les félicitations qui n'en finissaient plus.

Julie et Anthony étaient unis pour la vie et lentement, ils s' avançérent vers la sortie; tous s'accordaient à dire que c'était un très beau mariage comme on en voit très rarement. Etant donnée la célébrité des familles, un accord avait été conclu avec la presse et la télévision: Julie et Anthony avaient accepté de poser et de répondre à toutes les questions à condition de ne plus être importunés par la suite. Enfin, ils purent rejoindre la limousine qui les attendait pour les conduire au manoir où devait se dérouler la réception. Tous suivirent: deux cent personnes étaient conviées; des amis, des parents, des gens célèbres et de hautes personnalités. L'endroit avait un cachet particulier, tous s'y sentaient à l'aise. De l'organisation parfaite du repas à l'ambiance: tout avait été bien pensé.

Nos jeunes mariés s'étaient éclipsés un instant pour préparer leur départ en voyage de noces. Ils devaient faire escale à Londres puis à New York et Acapulco. Discrètement, ils s'approchèrent de leur famille pour leur dire au revoir, et profitèrent de ce que la fête battait son plein pour s'échapper.

Beaucoup plus tard, les invités les cherchaient: avec beaucoup d'élégance, le papa de Julie leur annonça qu'ils étaient partis en voyage de noces et qu'il était chargé de les remercier pour tous leurs cadeaux ainsi que la sympathie qu'ils avaient bien voulu  leur témoigner. Ce fut un tonnerre d'applaudissements, et la fête repris… il était tard, les couples commençaient à partir, non sans avoir salué  les parents des jeunes mariés.

Marie et Stéphane firent de même: ils avaient tellement dansé qu'ils n'en pouvaient plus. Dans la voiture, ils firent quelques commentaires sur la cérémonie:

-       Quel beau couple! J'ai trouvé Julie très belle, elle m'a fait penser à toi, le jour de notre mariage.

-       C'est vrai, nous sommes des vieux mariés maintenant, mon chéri.

-       Nous verrons cela dans la chambre tout à l'heure, simplement pour tester tes dires.

-       Non, pas ce soir, je suis morte de fatigue…

Ils rentrèrent à pas de loup, pour ne réveiller personne. Lorsqu'ils furent prêts, ils se glissèrent dans le lit. Stéphane eut pitié de sa femme: il se contenta simplement de la prendre dans ses bras et de l'embrasser.

Le lendemain, Marie alla à la nursery et demanda à Agnès si les bébés avaient été sages.

-       Ils ont pleuré l'un après l'autre, ils doivent avoir leurs dents qui veulent percer.

-       Que dois-je faire? Appeler le docteur Simon?

-       Non, rassurez-vous, j'ai fait le nécessaire.

-       Alors mes chéris, vous avez eu des petites misères?

Elle aimait tellement ces moments passés près d'eux. Stéphane, à son tour, vint les voir.

-       Tu sais chéri, ils vont bientôt avoir des dents; cette nuit, ils ont pleuré mais heureusement qu'Agnès est expérimentée. Moi, je me serais affolée.

-       C'est dans l'ordre des choses, ma chérie, ils auront d'autres ennuis en grandissant: les maladies infantiles; avec en plus, l'avantage d'avoir à les assumer en double.

-       Arrête chéri, de me dire de telles choses, sinon, ma journée va être fichue…

-       Tu sais, mon "bébé", ils ont une excellente constitution: ils sauront combattre toutes ces choses-là.

  La vie reprit à la demeure: Stéphane à la boutique, Marie auprès de ses enfants; avec eux, elle pouvait profiter du magnifique été dans le parc car ils ne partiraient pas en vacances cette année. Les enfants changeaient à vue d'œil: dans le landau, au cours des promenades, ils n'arrêtaient pas de "gigoter"; leurs petites jambes étaient toutes dorées. Un beau matin, leurs "quenottes" avaient "percé": de vraies perles blanches! Marie fut très émue, ainsi que Stéphane lorsqu'elle lui en fit part. Ils reconnaissaient bien leurs parents, commençant à faire des "risettes" et toutes sortes de mimiques; chaque jour leur apportait une nouveauté.

Le temps s'écoula et nous arrivions en septembre: la nouvelle collection, son défilé… Stéphane demanda à Marie d'être présente à ses côtés, ce jour-là.

-       Tu sais bien, mon chéri, que rien ne peux me faire plus plaisir; j'espère que tes parents seront là également.

-       Rassure-toi, ils ne manquent jamais un défilé.

Marie appréciait de partager les bons moments avec eux. Un après-midi, Stéphane téléphona à Marie en lui demandant de se faire belle, qu'il passerait la prendre pour dîner au restaurant.

-       Où veux-tu aller?

-       Qu'importe, l'essentiel est que je sois avec toi, je te laisse "carte blanche".

Deux heures après, il klaxonna. Lorsque Marie le rejoignit  et l'embrasa, il ne manqua pas de la complimenter sur sa toilette.

-       Voilà, ma chérie! nous allons sur les Champs-Élysées et ensuite, nous irons au théâtre; mon programme plaît-il à Madame?

-       C'est parfait, mon chéri!

Ils passèrent une bonne soirée. En sortant du théâtre, ils riaient encore: c'est vrai que la pièce était très drôle…

-       Tu sais, chéri, il y a longtemps que je ne me suis pas autant amusée; je t'en remercie!

Stéphane avait chaud au cœur de lui avoir fait plaisir. Chaque jour, Marie remerciait le ciel de lui avoir donné un époux aussi aimant.

La semaine suivante, il y eut la nouvelle collection qui fut présentée: le défilé était magnifique comme toujours. Annie s'était surpassée et ce fut un tonnerre d'applaudissements; comme chaque fois, les photographes, la presse, la radio… tous étaient là dans l'immense salon, avec la foule; chacun avec une coupe de champagne à la main. Stéphane et Marie étaient très entourés; Pierre et Sophie également… il ne manquait qu'Anthony et Julie: ils avaient téléphoné à plusieurs reprises et tout se passait divinement bien pour eux; ils ne rentreraient pas avant la fin octobre. Ils vivaient à Londres: Anthony avait un emploi du temps très chargé mais Julie était avec lui… et cela changeait tout!

Une fois la présentation terminée, ils rentrèrent, ainsi que Sophie et Pierre; tous très heureux que ce soit terminé. Le lendemain, la presse et la "télé" faisaient écho de cette manifestation avec beaucoup d'éloges.

Le "quotidien" reprit le dessus…. Les bébés demandaient de plus en plus d'attention. Le temps avait changé, les jours raccourcissaient et les promenades aussi; mais malgré la baisse de température, Marie tenait à ce que les enfants sortent tous les jours: elle ne voulait pas les élever dans un "cocon". Ses beaux-parents lui rendaient souvent visite  et elle "appréciait" beaucoup. Ils avaient de longues conversations sur l'actualité et tout ce qui se passait dans le monde. C'est par eux aussi que Marie avait appris qu'Anthony et Julie avaient différé leur retour: ils seraient là début décembre. Marie pensait qu'elle allait devoir s'occuper d'organiser les fêtes de Noël, acheter des cadeaux pour tous sans attendre le dernier moment: elle décida donc de faire une liste. Lorsque son mari arriva, elle était assise au bureau, absorbée par ce qu'elle faisait. Elle sursauta:

-       Oh ma chérie! excuse-moi de t'avoir fait peur. – il l'enlaça et l'embrassa – que faisais-tu?

-       Je pensais à Noël.

-       Déjà!

-       Tu sais, le temps passe tellement vite… et avec les enfants, je ne suis pas toujours disponible.

-       C'est vrai que j'ai une petite femme très organisée, je l'avais oublié. Je te laisse un instant, je vais embrasser mes deux "petits amours".

-       Et après?

-       Nous pourrons dîner.

-       Et après? – lui cria-t-elle.

-       Après, nous irons nous coucher.

-       Et après?

-       Je te ferai l'amour! C'est tout ce que tu veux savoir?

-       Oui, c'est bon!

Il quitta la pièce, Marie souriait. Stéphane se sentait si bien chez lui; c'était si agréable pour lui de rentrer, de retrouver sa ravissante femme, ses enfants, la demeure… il priait Dieu pour que rien ne change.

Anthony et Julie arrivèrent début décembre.  Comme prévu, ils téléphonèrent à toute la famille et promirent de venir les voir très bientôt. Ils prirent possession de leur demeure: les parents de Julie avaient veillé à ce que tout fut prêt pour les accueillir; elle était magnifique….. et quelle vue! Ils étaient heureux d'être enfin chez eux. Dès qu'ils seraient installés, ils rendraient visite à la famille. Tous les attendaient avec impatience mais avant, ils voulaient profiter de leur intimité, ce que tous avaient compris.

Un après-midi, Stéphane et Marie allèrent acheter les cadeaux: la liste était longue, cette année. En fin de soirée, lorsqu'ils rentrèrent, ils étaient épuisés mais libérés de ce côté-là. Il ne restait plus qu'à s'occuper du sapin. Marie en fit la demande à Paul.

-       Bien madame, je m'en occuperai en début de semaine.

-       C'est parfait!

-       Et bien voilà, chéri, nous nous en sommes bien tirés.

-       Grâce à toi! Comme toujours, tu avais tout préparé; ta liste nous été très utile et nous avons gagné un temps précieux.

Les enfants dormaient, il était temps de dîner et d'aller au lit.

Un soir de la semaine, Anthony et Julie vinrent passer la soirée: quelle joie de les revoir! Ils voulaient vite voir les bébés:

-       Vous allez les trouver endormis – leur dit Marie.

-       Comme ils ont du changer!

-       Vous ne pouvez pas savoir à quel point; ils ont chacun deux petites dents; ils sont aussi très gracieux, ce sont de vrais "amours".

Après leur visite à la chambre, d'où ils revinrent émerveillés, ils ne tarissaient pas d'éloges… puis, tous se mirent devant la cheminée, assis confortablement dans le salon: les sujets de conversation ne manquaient pas; depuis cinq mois qu'ils ne s'étaient pas vus…. Tout y passa: leur voyage de noces, qui leur laissa un souvenir inoubliable et un complet dépaysement; leur séjour à Londres, jusqu'à leur installation dans leur demeure à Montmartre.

-       Nous organisons une soirée, samedi prochain: nous comptons sur vous. Il n'y aura que nos parents mais nous aurons grand plaisir à être tous réunis.

-       Nous viendrons, vous pouvez compter sur nous.

Ils avaient tous passé une bonne soirée à papoter et à rire.

Le lundi suivant, Paul apporta le sapin et l'installa. Marie l'aida à le décorer. Majestueux, il trônait au milieu du salon. Lorsque Stéphane rentra, il lui en fit compliments.

-       Il ne reste plus qu'à déposer les cadeaux au pied, les chaussures… sans oublier les petits chaussons!

-       Mon amour, tu es une perle! Si tu n'existais pas, il faudrait t'inventer;

-       J'en suis sûre! – elle l'embrassa en se serrant contre lui.

 Les jours défilaient à toute allure; c'était aujourd'hui qu'ils devaient aller à Montmartre. Très élégants tous les deux, ils arrivèrent à la demeure d'Anthony et Julie. Rien à voir avec la leur: c'était une belle maison en pierres, avec un grand jardin bien entretenu; l'avantage étant la vue in croyable sur Paris: une vraie carte postale!

Nos jeunes mariés leur ouvrirent la porte; tout le monde était là. Après les avoir salués, ils visitèrent la maison avec Julie: c'était adorable, bien décoré façon plutôt moderne.

-       C'est un vrai nid d'amour – lui dirent-ils.

-       Mais malheureusement provisoire – s'exclama Julie – nous avons décidé de passer plus de temps à Londres. Là-bas, nous avons un appartement très confortable dans un bel immeuble, pas très loin de la boutique… et puis, j'adore cette ville.

Ils allèrent rejoindre les autres qui étaient installés à table. Le repas était délicieux, la cuisinière des parents de Julie était venue tout préparer; tout se passa très bien et c'est en se donnant rendez-vous pour le réveillon qu'ils se quittèrent.

Nous étions à quatre jours de Noël et il n'y avait pas de temps à perdre pour préparer cette soirée divine et que tout soit prêt. Côté repas, Pauline avait déjà toutes les instructions: cette année, ils seraient huit; les parents de Julie devaient se joindre à eux. Ils devaient se retrouver à l'église et assister à la messe de minuit.

Arriva le grand soir: comme toujours, Marie mit une très belle robe, se coiffa avec beaucoup de soin. Stéphane, de son côté, mit un costume superbement taillé. Ils étaient prêts pour le départ. Ensemble, ils allèrent voir leurs enfants qui dormaient. Pauline leur fit des compliments sur leur élégance:

-       Je vous remercie, Pauline; nous partons, à tout à l'heure!

Comme toujours, il y avait une circulation incroyable, comme si tout Paris était dans la rue. Enfin, ils arrivèrent à tous se retrouver: il était temps, l'église était presque pleine; il ne restait que très peu de places assises. Comme toujours, la messe de minuit était un moment très fort. Stéphane prit la main de Marie et la serra au moment où ils entendirent "Minuit Chrétien"…. Lorsque la messe fut terminée, Marie exprima le désir d'aller voir la crèche: elle était comme une gamine, fascinée par le bébé sur la paille. Elle pensait que, l'année prochaine, elle amènerait ses enfants. Stéphane l'avait compris et souriait. Quittant l'église, ils se dirigèrent vers la demeure de Stéphane et Marie. Il faisait un froid très vif et chacun n'avait qu'une hâte: rentrer se mettre au chaud….

Après s'être mis "à l'aise", ils admirèrent le sapin qui brillait de mille feux. Marie avait déposé tous les cadeaux dessous et les invités mirent les leurs à côté: une montagne!

Une fois réchauffés, Pauline leur servit une coupe de champagne et les invita à passer à table, magnifiquement décorée; tout s'annonçait pour le mieux. Ils étaient tellement heureux, comme chaque fois, d'être en famille. Le repas était succulent, les vins aussi: Pauline fut félicitée, elle l'avait bien mérité. Après la danse, marie n'échappa pas à son petit concert de piano; elle n'aimait pas refuser: tous le lui avaient demandé, à commencer par Stéphane. Ensuite, la distribution des cadeaux…. Ils étaient tous fabuleux; les enfants aussi avaient été gâtés: cela allait des peluches aux poupées et aux jeux: de quoi amuser une garderie.

La fête était finie et réussie. A regrets, chacun rentra chez soi. Lorsqu'ils furent seuls, Marie et Stéphane tombèrent dans les bras l'un de l'autre et montèrent se coucher: il était temps, la journée avait été longue. Mais Stéphane était toujours en forme et attiré par sa femme: il joua les "prolongations en lui faisant l'amour.

-       Je t'aime, chérie!

-       Moi aussi, tu le sais.

Ils se levèrent à midi. Heureusement qu'ils avaient Agnès et Pauline; donc, pas de souci. Elles étaient contentes: Stéphane et Marie leur avaient donné une belle somme d'argent pour Noël.

En se levant, ils allèrent chercher les enfants pour les conduire au salon et leur montrer leur Noël. Ils étaient petits et restaient assez indifférents: ils apprécieraient mieux dans quelques mois.

Cette année, ils ne feraient pas le réveillon de la Saint Sylvestre, ils ne seraient que tous les deux. Pierre et Sophie invités chez leurs amis; Anthony et Julie, chez les leurs. Mais ils se réjouissaient de passer ce début d'année seuls avec leurs petits "bouts de chou".

Le temps passa, les années… avec leurs joies et leurs peines, les déceptions, les mêmes traditions: perpétuel recommencement. Les enfants  atteignirent l'âge d'aller à l'école et devinrent des "ados"; Stéphane et Marie surveillaient leurs études de très près: ils n'avaient pourtant pas de soucis à se faire; leurs enfants étaient très brillants. Il y avait aussi le sport, la musique et le tennis, qu'ils "adoraient". Ils avaient des amis qui venaient faire la fête à la maison. La piscine avait été construite depuis longtemps, ce qui faisait la joie de toute l'équipe de copains. Stéphane et Marie appréciaient d'avoir toute cette jeunesse autour d'eux. Malgré des années de plus, ils avaient toujours la même passion l'un pour l'autre. Anthony et Julie vivaient les trois quarts de l'année à Londres: ils eurent deux enfants: une petite Nadine et un petit Benjamin, à deux ans d'intervalle. Quand à Pierre et Sophie, ils étaient âgés et sortaient très peu, mais ils n'étaient pas isolés: "Raph" et "Isa" leur rendaient de fréquentes visites; ils adoraient leurs grands-parents. Marie et Stéphane, eux aussi, y allaient plus souvent pour les ramener chez eux où ils restaient de plus en plus longtemps, surtout pendant l'hiver. Ils auraient voulu les garder définitivement, mais leurs parents n'étaient pas encore prêts: ils aimaient passer un peu de temps chez eux. Lorsque les parents n'étaient pas là, Marie et Stéphane sortaient très souvent, soit pour aller au concert ou à l'opéra; au cinéma ou simplement aller au restaurant. Finalement, tout allait bien.

"Raph" et "Isa" terminèrent leurs études et étaient tous les deux diplômés; "Raph" travaillait avec Stéphane: ce milieu lui plaisait énormément, il y remportait un vif succès, tellement beau qu'il était, il ressemblait à son père mais avait un "petit quelque chose en plus", difficile à définir… en le voyant, on avait envie de le prendre dans ses bras; pourtant, il était loin d'être fragile, bien au contraire!

"Isa", c'était un autre problème que ses parents ne comprenaient pas toujours… jusqu'au jour où ils eurent un entretien avec elle: "Isa" leur avoua qu'elle voulait entrer en religion. Marie éclata en sanglots; Stéphane était bouleversé par cette déclaration. Ils essayèrent de l'en dissuader; rien n'y fit. Elle prit sa maman dans ses bras et lui dit:

-       Ne pleure pas, je t'en prie, c'est mon choix; je suis tellement heureuse que Dieu m'ait appelée pour le servir.

-       Tu sais, Isa… si c'est ton choix, nous ne ferons rien pour te faire changer d'avis: nous respecterons ta décision et nous serons toujours là pour toi.

-       Je le sais, vous êtes des parents formidables!

Elle se retira après les avoir embrassés.

-       Je vous aime

-       Nous aussi, ma chérie.

Ses parents accusèrent le coup mais ils n'arrivaient pas  à se faire à l'idée que leur fille deviendrait religieuse. Ils n'avaient "rien vu venir". Durant plusieurs jours, ils ne pensaient qu'à elle et ne se rendaient pas compte que Raph sortait de plus en plus souvent.

Lorsqu'il prenait sa mère dans ses bras et qu'elle le questionnait sur ses relations, il lui disait:

-       Ne t'inquiète pas, ma petite maman, tu connais tous mes amis; je ne fais rien de mal: nous allons en boite et nous nous amusons comme des fous.

-       As-tu une "petite amie?"

-       Non, rien de sérieux, quelques "flirts", rien de plus… tu vois, tu n'as pas à t'inquiéter.

Lui aussi avait été bouleversé lorsqu'il apprit que sa sœur entrait en religion: il aimait tellement sa petite Isa.

Malgré ses belles paroles, Marie n'était pas tranquille, elle ne pouvait pas définir le pourquoi, une intuition… mais elle sentait que Raph lui cachait quelque chose. Elle en parla à Stéphane.

-       Ma chérie, il est jeune, il apprend la vie et il s'amuse.

Mais cela ne la rassura pas; elle décida de le faire suivre et découvrit ainsi le "pot aux roses":

Il rencontrait une femme de quinze ans plus âgée que lui. ils se retrouvaient dans un petit hôtel. Ce fut le "coup de grâce". Comment pouvait-il lui faire cela? Lorsqu'elle en fit part à Stéphane, celui-ci fut furieux.

-       Tu sais qui est cette femme?

-       Oui, j'ai appris qu'elle était mariée avec un homme richissime, banquier de vingt ans son aîné, qu'il est resté paralysé à la suite d'un terrible accident de voiture et qu'il ne sortait plus; des infirmières s'occupaient de lui.

-       Il nous faut absolument mettre les choses "au clair" avec lui, nous lui parlerons ce soir.

A table, marie interpella Raph

-       Tu sors, ce soir?

-       Oui, bien sûr. Je dois retrouver mes amis; nous allons au bowling.

-       Arrête tes mensonges! Avec papa, nous savons où tu passes tes soirées.

Là, il rougit mais ne se démonta pas.

-       Comment peux-tu avoir une relation avec une femme plus âgée que toi, qui plus est, a un mari malade? Tu nous déçois et nous ne nous attendions pas à cela de ta part. aussi, tu vas nous faire le plaisir de cesser toute relation avec elle; as-tu pensé à ton avenir? Aux conséquences? Si les journaux à scandales venaient à l'apprendre, étant donnée sa notoriété. As-tu pensé à nous? A Isa? Nous serions traînés dans la boue; et tes grands-parents? Tu n'est qu'un sale égoïste; est-ce que tu as bien compris?

-       Oui, oui!

-       Alors, ou tu cesses de la voir, ou nous nous en occuperons!

Il se leva, prit sa veste et partit en claquant la porte.

Marie ne comprenait pas ce comportement:

-       J'espère qu'il a compris et qu'il va se ressaisir.

-       Je ne sais pas, mais nous y veillerons! – dit Stéphane, dubitatif.

En fait, pour Raph, c'était son premier grand amour. Elle avait l'expérience qu'il n'avait pas, et qu'elle lui avait fait connaître, ayant une très grande emprise sur lui. il alla la rejoindre, comme d'habitude, et lui raconta la scène que ses parents lui avaient faite:

-       Ils sont au courant de tout et ils exigent que nous cessions de nous voir.

-       Toi, qu'en penses-tu?

-       Je ne suis pas d'accord, j'ai besoin de toi; je t'aime.

-       Moi aussi et je n'envisage pas l'avenir sans toi. Tu as illuminé ma vie et cela, je ne veux pas le perdre.

-       Comment allons-nous faire?

-       Essayons de continuer, nous verrons bien.

C'était tout vu, Marie le faisait toujours surveiller: c'est comme cela qu'elle apprit que rien n'avait changé; Marie décida alors d'aller chez elle lui parler. Elle n'était pas très fière de faire cette démarche mais il le fallait pour Raph, pour qu'il ne gâche pas son avenir, et pour sa famille.

Lorsqu'elle sonna, une bonne vint lui ouvrir:

-       C'est pourquoi?

-       Je suis madame Morel, je désire parler à votre patronne.

-       Je vais la prévenir.

Elle vit arriver une femme très élégante.

-       Inutile que je me présente! Vous savez qui je suis?

-       Oui, de quel droit venez-vous chez moi, que voulez-vous?

-       Je veux que vous cessiez toute relation avec Raph.

-       Puis-je savoir pourquoi?

-       Vous êtes mariée; comment osez-vous agir de cette façon? Au lieu d'être auprès de votre mari; quel genre de femme êtes-vous? Pour détourner un jeune homme qui, à quelques années près, pourrait être votre fils; vous êtes immonde; aussi soit vous arrêtez, soit j'irai voir votre mari et je lui donnerai tous les détails sur votre conduite.

-       Je vous en prie, ne faites pas cela! Sinon, vous le tueriez et vous auriez sa mort sur la conscience.

-       J'en prends la responsabilité, libre à vous de faire votre choix.

Peu de temps après, Marie apprit qu'elle était partie avec son mari, pour des raisons de santé, le docteur lui ayant recommandé le soleil. C'est en ambulance qu'ils partirent dans le midi. Elle eut la délicatesse de ne pas prévenir Raph.

Marie le surveillait: il ne disait rien, il prenait le téléphone et le reposait; elle voyait sur le visage de son fils, sa contrariété. Elle avait envie de le prendre dans ses bras, de le consoler; mais elle ne le pouvait pas, elle respectait sa peine. Marie en parlait longuement avec son mari: il eut une idée de génie.

-       Sous un prétexte quelconque, je vais demander à Anthony de le prendre à la boutique de Londres. Cela lui changera les idées.

-       Tu as raison, je te laisse le soin de t'en occuper

-       Je m'en charge, chérie.

Stéphane en parla à Raphaël; l'idée le séduit. Une semaine après, il était installé chez Anthony et Julie. Enfin, Marie et Stéphane étaient heureux que cette histoire se soit terminée ainsi. Ils se retrouvaient seuls; Isa ne venait que rarement et sortait peu: elle devait demander une permission à la Mère supérieure. Heureusement que Pierre  et Sophie acceptaient de venir chez eux de plus en plus souvent. Malgré l'absence de leurs enfants, ils avaient encore un semblant de famille mais l'ambiance n'était plus la même. Lorsque Marie discutait avec ses beaux-parents, elle leur disait sa peine, parlait du chemin que ses enfants avaient choisi

-       Tu sais, ma petite Marie, quand ils sont petits, nous croyons tous que nous les garderons près de nous et que nous serons maîtres de leur destin, mais la vie est tout autre: nous ne pouvons que nous résigner et accepter les moments qu'ils veulent bien nous consacrer.

-       Vous savez, maman, pas une seule minute je n'avais pensé qu'Isa entrerait en religion.

-       Tu sais, elle est venue nous rendre visite; je l'ai trouvée épanouie, elle m'a prise dans ses bras et m'a dit: " – Tu sais, mamie, je suis très heureuse que Dieu m'ait choisie, je sens en moi une force que je ne connaissais pas auparavant.

-       Que répondre à cela?

Toutes les deux avaient les larmes aux yeux….

Raphaël était toujours à Londres, il s'y trouvait bien et téléphonait très souvent. Marie le questionnait sur ses sorties mais chaque fois, il esquivait ses questions et parlait d'autres choses… il y avait des mois qu'il était parti.

Un jour, il manifesta son désir de rentrer à Paris. Stéphane et Marie en étaient ravis. Il ne précisa pas le jour, il vint à l'improviste, accompagné d'un jeune suédois qu'il avait rencontré à Londres.

-       Je vous présente Steeve.

Ses parents étaient tellement absorbés par la joie de retrouver Raph, qu'ils ne remarquèrent rien et pourtant, leur complicité sautait aux yeux. Au cours du repas, Raph s'adressa à ses parents.

-       J'ai une révélation à vous faire : Steeve n'est pas exactement mon copain comme vous l'avez pensé mais il est mon….. ami dans la vie, d'ailleurs nous nous sommes pacsés.

Le ciel leur tombait sur la tête, une nouvelle fois:

-       Tu plaisantes, j'espère!

-       Non papa, c'est tout ce qu'i y a de plus sérieux; nous nous aimons et comptons habiter ensemble dans un appartement à Paris. Je reprendrais ma place auprès de toi, à la boutique. Steeve est styliste; j'aimerais qu'il travaille avec moi. Sauf si vous n'acceptez pas notre situation; dans ce cas nous irons nous installer à Londres.

-       C'est un ultimatum?

-       Ecoute papa, tu y réfléchis et tu me tiens au courant; la balle est dans ton camp. Merci de nous avoir reçus, nous allons à l'hôtel où nous avons réservé une chambre.

Marie et Stéphane étaient abasourdis par cette nouvelle; ils pleuraient et savaient que, quoi qu'ils disent, quoiqu'ils fassent, Raph ne changerait pas d'avis. C'était donc à prendre ou à laisser; il avait été catégorique.

-       Ma chérie, qu'en penses-tu?

-       J'ai honte, mais je pense que sa place est auprès de toi; plus tard, c'est lui qui devra diriger la boutique. De toutes façons, ils sont pacsés et le resteront même si nous refusons de l'admettre. Mais pas question qu'ils vivent sous notre toit, je ne le supporterais pas.

-       Je partage entièrement ta décision et je lui en ferai part.

-       Je préfère, je me connais: je lui dirais des choses désagréables que je regretterais par la suite.

Lorsque ses beaux-parents furent auprès d'eux, ils leur annoncèrent la nouvelle:

-       Mon Dieu! Vous ne méritez pas cela.

-       Tu sais Sophie – dit Pierre à sa femme – le monde a changé: à notre époque, nous avons eu de la chance avec nos fils, mais ces unions ne sont plus "tabou"; il suffit de regarder le monde artistique, de la politique, pour comprendre que les mœurs ne sont plus les mêmes. Les couples se marient, ont des enfants, se séparent, reforment une famille…. Les filles se pacsent avec les filles et les hommes font de même. Plus rien à voir avec ce que nous avons vécu, ma pauvre Sophie – dit-il, en soupirant – maintenant, tout est accepté, il n'y a plus de morale. Mais rassure-toi, malgré leurs avancées, ils ne sont pas plus heureux. Il faut reconnaître que la télévision a joué aussi un grand rôle: trop de violence, trop de sexe, de drogués. Tous ces programmes  marquent l'esprit des jeunes: il n'y a personne pour les accueillir, les conseiller à la maison. Les femmes vivent plus à l'extérieur que chez elles; les enfants sont livrés à eux-même. Plus tard, ils veulent tous avoir de l'argent, des vacances et une belle voiture; mais le travail, il ne faut pas trop leur en parler et ceci est valable pour la plupart des jeunes. L'ambition est morte. Je préfère m'arrêter là car cela me révolte; Dieu sait pourtant, si j'aurais des choses à dire!

Stéphane et Marie l'avaient écouté et méditaient sur ce qu'il avait dit.

-       C'est vrai que papa a raison: nous avons vécu comme eux, dans l'amour, la joie, dans notre cocon entre nous, sans bien réaliser ce qui se passait autour de nous. Peut-être avons-nous vécus en égoïstes… je me pose la question. Enfin quoi qu'il en soit, cela ne résout pas le problème de nos enfants. ils ont décidé et nous n'avons plus rien à dire.

-       Malheureusement – ajouta Marie.

-       Je sais – dit Sophie – que vous vivez une situation à laquelle vous n'étiez pas préparés et que c'est très dur à supporter.

-       Quand je pense que nous n'aurons même pas la joie d'être grands-parents!

-       N'y pense pas, ma chérie, tu te fais du mal.

Le temps passait malgré tout. Marie, pour se distraire, allait à la boutique de temps à autre. Elle y croisait Raph et son ami. Les liens étaient tendus lorsqu'elle les voyait ensemble: elle avait "froid dans le dos". Malgré ses efforts, elle ne parvenait pas à admettre que son fils soit homosexuel.

Nous étions en hiver; Stéphane décida d'emmener sa femme aux sports d'hiver. Ils passèrent une dizaine de jours à Megève. Marie s'y sentait bien: on pouvait les comparer à des jeunes mariés; malgré toutes ces années, leur amour n'avait pas faibli; ils formaient toujours un superbe couple. Ils rentrèrent début décembre. Habituellement, Marie s'occupait de Noël, mais elle n'avait plus le cœur à organiser des repas de famille, sachant que ses enfants ne seraient pas présents. Elle s'arrangea avec Sophie pour faire simplement un repas, le jour de Noël, chez eux: Sophie n'était pas contre. Pierre n'était pas au mieux de sa forme; il avait dû prendre froid; quatre jours après, son état empira: un horrible sifflement lui déchirait les poumons. Le docteur Simon voulu le faire hospitaliser. Pierre refusa sèchement: il voulait rester cher lui! il avait une pneumonie et la fièvre l'embrasait. Sophie et Marie restèrent toute la nuit pour lui tenir la main. Sophie lui appliquait des compresses glacées sur le front et essayait de lui faire prendre ses remèdes, mais rien ne passait. Le docteur Simon avait l'air inquiet mais il ne se prononça pas: tous avaient compris qu'il n'y avait plus rien à faire et qu'il vivait ses derniers moments. Ils prévinrent toute la famille: Anthony et Julie après avoir laissé leurs enfants chez les parents de Julie; Isa et Raph vinrent à leur tour. Tous étaient là autour de celui qu'ils avaient tant aimé. Le lendemain, il n'était plus: Sophie était effondrée: Stéphane et Marie essayaient de la consoler mais eux aussi ne supportaient pas cette épreuve, c'était trop dur. Le docteur fit une piqûre à Sophie pour l'apaiser: elle s'endormit. Isa lui tenait la main en priant; tous étaient perdus… pourtant il fallait qu'ils réagissent pour organiser les funérailles.

Stéphane et Anthony s'en chargèrent; les obsèques eurent lieu trois jours plus tard à l'église Notre Dame. Sophie n'y assista pas, elle resta avec sa petite-fille; en effet, le docteur Simon s'y était opposé: elle était trop faible. Une foule immense était là, recueillie; le personnel aussi, la boutique ayant été fermée pour trois jours. Ils pleuraient le "grand homme" qu'ils avaient eu la chance d'avoir pour patron. La famille se serrait les uns contre les autres, tous unis dans la même douleur. Il n'y aurait pas de condoléances: un livre avait été déposé à la sortie. Seule, la famille irait au cimetière et lui dirait un dernier ADIEU. Il fut enterré; et sur le caveau, des montagnes de fleurs déposées. Ils rentrèrent et tous "craquèrent" accrochés les uns aux autres. Isa n'avait pas quitté sa grand-mère:

-       Ne sois pas triste, mamie; papy est au ciel: il nous voit.

Mais Isa ne pouvait pas comprendre, elle si pure, que ses grands-parents s'étaient tellement aimés, que Sophie se sentait amputée. Elle disait qu'elle ne pourrait pas vivre sans lui, qu'elle n'aurait plus personne pour lui tenir la main:

-       Nous t'aiderons, mamie, je prierai pour toi.

Ses enfants se réunirent et c'est Marie qui décida que Sophie ne pouvait plus rester dans la maison, seule; elle ne le supporterait pas. d'un commun accord, ils décidèrent qu'elle viendrait vivre avec eux. Nous l'aiderons à s'en sortir: ce sera long mais nous nous battrons. Sophie n'était plus que l'ombre d'elle-même; avec l'aide du docteur Simon, ils l'emmenèrent chez eux:

-       Ne la laissez pas seule, Marie, elle aura besoin de toute votre attention.

-       Vous pouvez compter sur moi.

Il savait qu'un lien très profond les unissait et qu'il pouvait lui faire confiance.

Ils l'installèrent et restèrent près d'elle. Stéphane était effondré et pleurait dans son fauteuil. Marie le prit dans ses bras, essayant de l'aider et de le consoler; elle lui suggéra d'aller au lit. Le docteur Simon avait conseillé de prendre une garde de nuit: il avait raison car cela libérait Marie qui avait également besoin de repos. Elle monta se coucher: dans les bras l'un de l'autre, ils pleuraient; c'était trop dur et inattendu. Ils n'arrivaient pas à imaginer la suite et savaient qu'il leur faudrait beaucoup de temps pour "refaire surface". Dans ces circonstances, Isa avait la permission de venir voir sa mamie; Raph venait aussi tous les jours: il aimait tellement son grand-père; ce qui lui permit de se rapprocher de ses parents et de les consoler. Ils comprirent qu'il était temps d'accepter sa liaison, du moment qu'il était heureux, et de lui pardonner le mal qu'il leur avait fait. La mort de Pierre y était pour quelque chose.

Marie tint parole et c'est sans compter qu'elle s'occupait de Sophie qui recommençait à se lever, malgré son immense peine. Avec le soutien et l'amour que tous lui apportaient, elle reprenait des forces; le docteur Simon venait, lui aussi, apporter son réconfort. Un jour, il avoua à Stéphane et Marie qu'au début, il avait craint pour sa vie.

-       Là, je ne suis plus inquiet, le temps fera son œuvre.

Il y avait six mois que Pierre les avait quittés; Marie passait ses journées avec Sophie: elle avait réussi à la faire sortir dans le parc et essayait de lui changer les idées le mieux possible. A part les siens, elle ne voulait voir personne.

Un soir, Stéphane revint avec un panier dans lequel se trouvait un petit chiot, un labrador noir au regard noisette, se prénommant "Réglisse". Il ne savait pas quoi inventer pour "casser" cette ambiance tellement triste qui régnait à la demeure.

Stéphane pensait que par sa présence, le petit chien apporterait un peu de chaleur. Son jugement se révéla exact: Réglisse grandit rapidement en taille et en affection pour Sophie et Marie. Stéphane savait qu'il avait eu raison: on aurait dit que Réglisse sentait qu'il avait un devoir à accomplir auprès de ses maîtresses. Il s'approchait d'elles et leur léchait les mains, les regardant comme pour leur dire: "Ne soyez pas tristes, je suis là!"; c'était un "amour" de chien.

Quelques mois plus tard, Isa vint les voir et leur demanda de s'occuper d'orphelins, ce que Marie accepta: cela leur ferait un but. Cette idée pouvait être une bonne thérapie pour Sophie, elle qui adorait les enfants.

Les premiers jours furent très difficiles pour Sophie qui n'avait côtoyé personne depuis des mois, mais tout doucement et avec l'amour que ces petits orphelins lui témoignaient, elle reprenait goût à la vie et se sentait utile.

Elle leur racontait des histoires et apprenait à lire aux plus grands. Isa était très présente puis qu'elle avait la responsabilité de ce groupe d'enfants.

Stéphane s'était fait, lui aussi, une raison et le soir, lorsqu'ils se retrouvaient, il serrait sa femme et sa maman dans ses bras ainsi que Réglisse qui lui témoignait un véritable amour.

Grâce à l'amour des siens, Sophie reprit le dessus. Raph et Steeve passaient leur rendre visite. Sophie leur proposa d'occuper la demeure, au lieu d'habiter l'hôtel.

-       Merci mamie, mais nous ne ferons rien sans l'approbation de mes parents.

Ceux-ci ne firent aucune objection: avec le temps, ils acceptaient Steeve; un garçon qui avait une excellente éducation et de bonnes origines; lorsqu'ils étaient ensemble, par respect de la famille, ils n'avaient aucun geste déplacé; ce que Stéphane et Marie appréciaient.

Anthony et Julie appelaient très souvent de Londres, mais leur vie était là-bas: ils venaient rarement en France. Les parents de Julie avaient vendu leur boutique et pris leur retraite; ils se rendaient à Londres sans arrêt auprès d'eux pour profiter, eux aussi,  de leurs petits-enfants.

Marie et Sophie étaient de plus en plus investies à  l'orphelinat: les enfants les adoraient et durant l'été, elles organisaient des goûters; les enfants profitaient de la piscine. Tous leurs cris apportaient un peu de joie dans la demeure.

La vie de Stéphane et Marie avait changé mais une chose était sûre: leur amour était toujours aussi fort et le resterait jusqu'au dernier souffle de leur existence.

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