Atterrissage en douceur (kiss landing)
jbatistuta
Au son de la portière, le taxi passe la première et accélère dans un brouillard de poussière laissant loin derrière tout ce qui m’est cher. Je pars en séminaire à l’autre bout de la terre et je laisse ma femme, célibataire, sans son homme pour la distraire. Elle était fière et préférait se taire, pour ne pas prolonger les adieux et laissait ses yeux me guider vers d’autres cieux, au-delà des frontières, au-dessus des mers et des nuages pelucheux. En route pour l’aéroport, je me remémore ce jour ou ma vie a basculé, ce même trajet emprunté dans le passé pour la trouver, ce passeport pour un amour si fort qu’il m’a à jamais transformé. Elle m’a donné son visa pour que je parte seul là-bas et hier soir nos ébats m’ont mis dans de beaux draps ! C’est comme si je ne pouvais plus décoller de ma peau, le parfum de la sienne, c’est comme si elle avait emménagé dans ma boite crânienne. Elle s’y installe, le plus souvent sans prévenir, pour rappeler à mon bon souvenir les secrets de sa sensualité, me dévoilant ainsi son intimité comme dans une cabine privée. C’est l’essence même de mon existence, et ce bouquet réveille en moi un désir si puissant que tous mes sens sont en émoi. Je n’ai plus qu’une idée en tête, la retrouver au lit, en tête à tête sans nos habits. Dans ce mouchoir de poche, le souffle de mes soupirs semble suffisant pour la dévêtir. En effet, elle ne me fait pas languir et sans jamais perdre de temps, ses boutons se décrochent, pour qu’une ballade coquine se dessine, un aller-retour sans escale ni détours.
Après ces quelques atermoiements, voilà venu l’heure de l’embarquement; j’emprunte alors le tapis roulant, le tapis volant qui me conduit à mes dépends bien loin de mon amante. Sitôt installé sur mon siège en classe affaire, me voilà vite aux petits soins de l’hôtesse de l’air et alors qu’elle m’apporte un verre, mon esprit erre déjà à mille pieds, pris au piège par des égarements plein de légèreté. Ses jambes ne me sont pas étrangères, elles me rappellent des nuits blanches entières où les voyant déployées comme les ailes d’un charter, je me suis envolé avec ma partenaire. Longues et filiformes, elles semblent défiler dans le couloir comme sur un podium, sous le regard charmé des hommes qui ne perdent rien de sa trajectoire alors qu’elle nous sert à boire. Il est grand temps de me verser ce sérum ambré, histoire que ça m’assomme, que je reste bien sage et que je ne perde pas mon sang-froid durant le voyage. Mais à chaque turbulence, je vois son corps qui danse et se déhanche avec élégance tout en m’offrant ses jolies protubérances lorsqu’elle se penche. C’est le remue-ménage dans les soutes à bagages tout comme dans son corsage où sa poitrine semble vouloir prendre le large. Vu l’envergure de l’habitacle, je me sens comme prisonnier dans ma ceinture mais pour autant pas question de me libérer. Ma place privilégiée en première classe me permet d’apprécier le spectacle de ses figures aériennes et son profond décolleté. Je dois au plus vite reprendre mes esprits et une allure plus sereine si je ne veux pas partir en vrille devant cette fille, qui me prive d’oxygène. Voilà un peu de répit tandis qu’elle se dirige vers la queue pour demander rapidement aux passagers que tout le monde s’asseye, pendant que le pilote maintient le contrôle de l’appareil. Dans un dernier soubresaut, on pivote et j’en profite pour admirer à travers le hublot le coucher de soleil pour qu’il m’aide à trouver le sommeil. Quand je commence à piquer du nez, je sens sa main sur mon épaule, il est temps de m’attacher. J’aperçois alors qu’on survole des routes éclairées qui semblent tracer le chemin vers ma nouvelle destination. Je suis plein d’excitation.
Un nouveau taxi m’attend à la sortie de l’aéroport international Kennedy. Ce véhicule jaune canari me conduit dans la ville à travers les buildings et les avenues qui quadrillent les lieux comme pour mieux contenir la faune urbaine qui grouille à en perdre haleine. Il me dépose aux pieds des gratte-ciels où j’attrape le vertige en regardant ces deux tiges qui s’élèvent comme des tours jumelles; j’ai envie de m’envoyer en l’air avec elles. A la réception de l’hôtel, je croise le personnel de navigation, qui m’a précédé à la sortie de l’avion. Je retrouve mon hôtesse de l’air qui d’un sourire complice me souhaite bonne nuit avant de partir avec sa valise à roulette tandis que moi je la poursuis du regard avant qu’elle prenne la poudre d’escampette. Je suis sur ses talons jusqu’au pied de l’ascenseur, puis les portes se referment pour un voyage dans le tunnel ascensionnel. Pendant que cette passerelle nous mène au septième ciel, elle se tient dans un recoin de la nacelle, perchée sur ses escarpins. Le miroir de la cabine devient un complice privilégié et me livre son arrière train porté par des bas en satin, que reflète le tain d’un regard coquin. Quand l’ascenseur marque l’arrêt, on sort au même pallier dans une parfaite concordance et on rejoint nos chambres dans la plus grande indifférence. Cette jolie demoiselle me rappelle l’univers intemporel et sensuel de ma vie personnelle et me fait plonger dans des souvenirs qui provoquent chez moi une réaction chimique incontrôlable. Arrivé sur place, je me retrouve seul dans la chambre du palace, avec le décalage horaire qui retient mes paupières, malgré la nuit noire qui couvre la ville entière. Un verre d’alcool avec de la glace pour avaler mon somnifère et mon calvaire sera bientôt loin derrière. Je dors à poings fermés quand la porte d’entrée s’entrouvre comme la dentelle de la pucelle, doucement pénétrée. Dans l’ouverture, se glisse une belle créature, une silhouette irréelle aux jolies courbures. Je suis séduit par son apparence dont la tenue éclaire par transparence sa poitrine qui se balance. Je suis sensible à ses charmes à peine visibles et j’ai hâte de découvrir ce qui se cache derrière tant de mystères, et qui m’est désormais accessible. Difficile de croire à son innocence avec ces deux pointes d’impertinence qui me font des avances pour j’espère de douces confidences. Je ne peux quitter des yeux les bretelles, ces routes en dentelle qui plongent entre les gorges de ma belle. Je devine plus bas des porte-jarretelles attendant l’heure providentielle pour me mener par le bout de la ficelle aux dessous de ma demoiselle. Ses trésors sont bien dissimulés mais pour me faire patienter des indices sont habilement placés pour que je sois suspendu jusqu’au clou de la soirée : son petit trou bien caché par de la broderie finement décorée. Elle soulève ainsi le voile pour que son corps me dévoile : sa beauté à poils. Plus de faux semblant, je suis bien devant son corps nu s’offrant à moi intégralement. A l’approche du matelas, elle glisse alors son index contre mes lèvres et me chuchote que je rêve, alors que sa nuisette glisse au pied de la couette et qu’elle noue ses bas autour de mes bras. Cette invitée surprise s’allonge à mes côtés et ses mains plongent sur mon corps qui ne songe plus qu’à satisfaire ce désir qui m’attise. En guise d’ébauche, elle monte sur moi et me chevauche. Je reste sans voix, me pliant impuissant à ce passe-droit. Pas d’issue de secours, ses mains me clouent au lit au rythme de son va et vient tandis que ses formes se dérobent à la lumière du contre-jour. Ses seins valsent alors contre ma chair pendant que ma cavalière devient pensionnaire du membre qu’elle habite comme une locataire passagère. Je n’ose pas ouvrir d’avantage les yeux et découvrir le visage de l’adultère dont je suis l’otage dans ma suite hôtelière. L’atmosphère devient soudain particulière quand elle s’époumone dans la chambre qui résonne. La crinière de mon écuyère fouette ma jugulaire quand elle se cabre de jouissance et que je la rejoins solidaire. Dans l’extase qui m’embrase, mes yeux s’écarquillent et je reconnais cette fille dont je suis amoureux, la femme de ma vie qui me suit dans mes rêveries, dans ce monde voluptueux. Cet orgasme tel un réveil me sort de ce fantasme pendant que le soleil diffuse à travers la verrière une lumière légère qui renvoie sur ma couche l’ombre d’une femme imaginaire dont ma semence se répand dans ses artères comme une rivière.