Au loin, l'orage

My Martin

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Un soldat (vêtements élégants ?) ou un berger (bâton) ? Il regarde la femme, sur l'autre rive 

Nue, elle allaite son enfant. Elle regarde le spectateur 

 

Derrière le jeune homme, deux colonnes. Des ruines antiques ?  

La végétation est luxuriante 

 

A l'arrière-plan, l'orage va s'abattre sur la ville 

 

 

Giorgione 

né en 1477, à Castelfranco Veneto, près de Venise 

mort en 1510, à Venise 

 

1506-1508. "La Tempête" 

Venise, Galerie de l'Académie 

Huile sur la toile 

Hauteur 82 cm. Largeur 73 cm 

 

 

Quatre éléments confèrent à la composition une dimension universelle 

L'homme et la femme, absorbés dans leurs pensées  

Les réalisations humaines -les constructions  

La nature domine l'ensemble 

 

Ou les quatre éléments 

L'eau, l'air, la terre, le feu  

 

Multiples interprétations 

Un simple tableau pastoral  

Une allégorie de l'harmonie universelle  

Une légende mythologique  

Adam et Eve, chassés du Paradis  

La femme -la maîtresse de Giorgione  

Io, prêtresse au temple d'Héra à Argos, l'une des maîtresses de Jupiter. Se changeant en nuage, il lui donnait de fréquents rendez-vous  

L'éclair, Cupidon -le coup de foudre ? 

 

Le soldat ou le berger porte une chemise blanche, un habit précieux. Un gentilhomme vénitien. Pose contemplative, sourire intérieur. La figure du commanditaire ou de l'artiste ? 

 

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La Tempête est commandée par Gabriele Vendramin (famille qui exerçait dans le commerce des poissons salés), l'une des principales figures du cercle intellectuel de Venise 

 

1530. Marcantonio Michiel 1484-1552 rédige d'importantes observations relatives aux collections de ses contemporains. Il décrit le tableau. " Un petit paysage sur la toile avec une tempête, une femme gitane et un soldat" 

 

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La radiographie révèle un repentir. En bas à gauche, le personnage d'une femme nue aux pieds dans l'eau, a été effacé 

 

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Riche en pigments, la peinture de Giorgione se fond en nuances  

Préparation sombre. Des modulations, par taches ou frottis du pinceau  

 

La couleur organise l'espace du tableau 

A l'arrière-plan, les tons blancs et bleus pâles 

Au premier plan, le vert 

 

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Le dessin apparaît dans les radiographies des peintures de Giorgione -première disposition des éléments du tableau 

Il n'est pas systématiquement suivi par une mise en couleurs -à la différence de la pratique en vigueur à Florence, où le dessin structure l'œuvre, tout au long de son exécution  

Giorgione peut modifier son projet initial 

La création s'ouvre à une relative spontanéité  

 

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Giorgione est un poète, un musicien amoureux de la nature 

Un rapport subtil unit l'homme à la nature, qui obéit à ses propres règles 

L'intelligence humaine induit une distance avec la nature ; les personnages de La Tempête sont absorbés dans leur monde intérieur 

  

  

"La Tempête" appartient aux poésies (poesia), un genre élaboré à Venise, au tournant du XVe / XVIe siècle 

Le mouvement pastoral marque la poésie italienne de l'époque 

 

En littérature, un courant bucolique 

Filippo Galli / Filenio Gallo 1465-1503. Religieux et poète  

Giovanni Badoer 1465-1535. Homme politique, diplomate et poète 

Francesco Pitti / Pizio da Montevarchi. Humaniste et poète 

Francesco Colonna 1453-1538. "Le Songe de Poliphile" (1499). Un combat d'amour en songe. Roman illustré  

Jacopo Sannazaro 1457-1530. "L'Arcadie" (1502), poème. Un itinéraire spirituel placé sous le signe de Mnémosyne, la mère des Muses  

 

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L'Arcadie est une terre idyllique pastorale, harmonieuse. Le terme vient de la province grecque d'Arcadie, au centre de la péninsule du Péloponnèse, et remonte à l'Antiquité classique 

Dès l'Antiquité, l'Arcadie symbolise un âge d'or. Cette représentation s'ancre dans la poésie bucolique latine et hellénique -l'Arcadie, le pays idéal 

 

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Pour la première fois dans l'histoire de la peinture occidentale, essentiellement un paysage  

Comparé à l'espace réservé à la nature, l'espace réservé aux personnages est secondaire  

 

Le paysage n'est pas encore un genre indépendant 

 

 

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Giorgio da Castelfranco -dit Giorgione ("Grand Georges") 

Peintre vénitien 

1477. Naissance à Castelfranco Veneto, à quarante kilomètres, au nord-ouest de Venise 

1510. Mort (33 ans), à Venise 

 

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Giorgione parfait son apprentissage dans l'atelier de Giovanni Bellini 1430-1516. Peintre officiel de la Sérénissime. Le précurseur de l'école vénitienne 

Tout est imprégné de sacré ; la création est une manifestation divine 

La couleur. Giovanni Bellini est un maître des paysages de l'arrière-plan 

 

A l'âge de dix-huit ans. Les peintres vénitiens terminent leur formation et s'établissent à leur compte  

Vers 1495 ou 1496. Giorgione réalise ses premières œuvres, en toute autonomie 

 

Il ne dispose pas d'un atelier, il n'instruit pas des apprentis, qui prendraient en charge la réalisation de certaines parties des tableaux 

 

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Giorgio Vasari 1511-1574. "Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes" (1550). Il donne à l'artiste, le surnom de Giorgione ("Grand Georges"), « pour son allure et sa grandeur d'âme » 

ou en raison de sa taille, sa stature physique 

 

Giorgione est un homme courtois, épris de conversations élégantes et de musique. Sur son luth, il joue des madrigaux  

 

Sa culture est humaniste 

Son caractère raffiné et poétique place Giorgione dans la proximité du Cinquecento (XVIe siècle) de Raphaël 1483-1520. Le début du XVIe siècle, l'apogée de la Renaissance 

Giorgione, peintre, poète, musicien, homme du monde ; l'homme du nouveau siècle 

 

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Giorgione visite les collections d'antiques de ses commanditaires -Giovanni Grimani, à Venise. Sculptures, marbres, vases, bronzes, pierres précieuses. 1587, don à la Sérénissime 

 

Le Pérugin 1448-1523. École ombrienne (entre Florence et Rome, le cœur vert du pays). L'un des maîtres de Raphaël 

Lorenzo Costa 1460-1535. École de Ferrare (Émilie-Romagne) 

 

Léonard de Vinci 1452-1519 -séjour de deux mois à Venise (avril 1500). Apporter la lumière par des couleurs claires, faire surgir les figures du fond sombre 

 

Les artistes lombards. La Lombardie, échanges commerciaux et goût naturel pour l'art nordique, les Flandres  

 

Les portraits de Hans Memling 1435-1494. Peintre primitif flamand 

Les peintres et graveurs nordiques. Soin apporté aux paysages 

Jérôme Bosch 1450-1516. Peintre des Pays-Bas bourguignons. Mouvement des primitifs flamands. " Visions de l'Au-Delà" (1505-1515), cycle de quatre panneaux peints à l'huile 

 

Albrecht Dürer 1471-1528. Peintre allemand. Gravures sur bois et sur cuivre. Deux séjours à Venise 1494-1495. 1505-1507  

 

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Giorgione médite sur les thèmes de ses peintures. Significations bibliques, historiques, littéraires 

 

Attitude platonicienne -Platon, philosophe grec 428 à 347 avant J.-C. Le monde des idées éternelles et immuables. La réalité sensible est une copie imparfaite de ces idées 

 

La philosophie néo-aristotélicienne est professée à Venise et à Padoue. Aristote, philosophe grec 384 à 322 avant J.-C. Les cadres logiques, théoriques, politiques de la connaissance  

 

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Milieux raffinés et cultivés. Gabriele Vendramin. Hieronimo Marcello. Venier. Taddeo Contarini 

 

L'accès de Giorgione aux commanditaires a pu être assuré  

par son ami Pietro Bembo 1470-1547, poète. Cardinal de l'Église catholique. Protecteur de Giorgione. Il restaure la poésie lyrique italienne. Ses écrits contribuent à la renaissance de l'intérêt pour les œuvres de Pétrarque 1304-1374 -poète et humaniste italien de la République de Florence. Les idées de Pietro Bembo jouent un rôle décisif dans la formation du madrigal (poésie recherchée, savante), la forme musicale profane la plus importante du XVIe siècle 

 

ou par de riches Vénitiens. Taddeo Contarini, un marchand fort versé en alchimie, occultisme. Gabriele Vendramin 

 

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Giorgione ne reçoit des commandes, ni des corps religieux, ni de la Sérénissime ; mais d'une élite d'intellectuels liés aux familles patriciennes, pour l'ornement de leur studiolo 

Plutôt que les sujets religieux habituels, ces commanditaires préfèrent des portraits, des œuvres de petit format. Pour sujet, des images mythologiques ou allégoriques 

La peinture de Giorgione se situe entre la philosophie et la poésie 

 

Ces nouveaux objets sont parfois protégés par un couvercle peint, que l'on ôtait pour les contempler, en compagnie d'amis choisis 

 

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La continuité du paysage est assurée par la représentation de la lumière atmosphérique, qui unifie les plans et les figures 

Des couches colorées. Le clair-obscur est enveloppant 

 

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Des figures dans un paysage idéal. La lumière est fonction de l'heure du jour et des conditions météorologiques 

 

Le coloris de Giorgione s'adoucit, s'éclaire de chaudes nuances  

En référence au classicisme, romain ou toscan -peut-être importé en 1508 à Venise, par le dominicain Fra Bartolomeo 1472-1517. La méditation religieuse  

 

Nouvelle sensibilité de l'École du Danube (Allemagne et Autriche. Importance accordée au paysage. Le paysage état d'âme), avec une interprétation italienne plus équilibrée 

 

Étude sur la proportion idéale, thème en vogue à l'époque, inspiré de la statuaire classique et en ces mêmes années, aussi traité par Albrecht Dürer 

 

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Giorgio Vasari. La peinture romaine antique, ses décors complexes, ses scènes aux paysages et figures idylliques. Les couleurs sont juxtaposées 

La peinture vénitienne serait l'héritière légitime de la peinture romaine antique 

 

Le nouveau style se diffuse à Venise, car il fait revivre la peinture ancienne 

 

 

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Automne 1510. Une épidémie de peste noire s'abat sur Venise  

  

25 octobre 1510. Décès de Giorgione (33 ans) 


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