Au rythme de nos pas

Anne Sephora Paul

 

 

 

AU RYTHME DE NOS PAS

 

Anne Séphora Paul

 

Patience n’en revenait pas ! 

Alors qu’elle se croyait ferme dans sa décision de faire une croix sur les hommes, la voilà confrontée à un dilemme.

Josh De Ravel était de retour !

 

- Bonjour Patience, mais réveille-toi vite ! Il y a un nouveau en cours de danse et il est CAAANOOON. Wow !

- C’est bon, Grace, retourne sur terre deux minutes, s’il te plaît ! Tous les mois, des nouveaux rejoignent le cours. Alors, calme-toi et tire les rideaux, j’ai cours qu’à 11 heures.

- Mais, Patience tu ne comprends pas ! Le nouveau n’est autre que Josh De Ravel, celui qui fait craquer toutes les filles et qui fait la une de la presse people et artistique !

Patience ouvrit grand les yeux à cette déroutante annonce.

- Josh De Ravel ? Mais c’est impossible, que fait-il ici ?

Patience sauta de son lit et commença à faire les 100 pas dans sa chambre, toute paniquée, sous le regard éberlué de sa copine de chambre, Grace.

Celle-ci ignorait que Josh était l’homme qui avait brisé le cœur de Patience, deux ans plus tôt.

Patience sentit tout son corps se mettre à trembler et n’arrivait pas à rester calme. Elle était terrifiée à l’idée de croiser Josh De Ravel en cours de danse… ou ailleurs.

- Mais Patience que se passe-t-il, tu connais Josh De Ravel ?

- Grace, oh, Grace, si tu savais !

- Mais, raconte-moi Patience, que se passe-t-il ? Tu as l’air effrayé !

- Tu me promets de n’en parler à personne ? Promets-le-moi, s’il te plaît.

- Je te le jure, Patience, tu es ma meilleure amie et jamais je ne te trahirais.

- D’accord, je vais te le raconter.

Deux ans auparavant, Patience Donovan et Josh De Ravel étaient élèves à l’école d’art de Bonneville. Ils étaient les meilleurs de leur classe et s’appréciaient beaucoup. On pouvait même dire qu’ils étaient les meilleurs amis du monde. Néanmoins, comme le dit si bien le dicton : Entre l’amour et l’amitié, il n’y a qu’un pas.

Josh De Ravel était sans compter, le plus prisé par la gent féminine. Celles-ci craquaient toutes pour ce séduisant gaillard aux yeux bleus. Agé à l’époque de 25 ans, sa tête brune sur un corps affuté par la danse attirait ces demoiselles comme un aimant. Alors que Patience, elle, de nature réservée, refusait toute relation car elle était malencontreusement tombée amoureuse du mauvais gars. Un soir, elle avait dit à Josh ce qu’elle ressentait pour lui. Mais grande avait été sa désillusion quand Josh s’était moqué d’elle. Il l’avait humiliée au bal de fin d’année devant toute l’école en embrassant Sarah Connors, la fille du directeur. Patience en portait encore les séquelles aujourd’hui.

- Mais Patience, c’est horrible ce qu’il t’a fait. Oh, ma chérie, ne pleure pas, c’est du passé tout ça, hein ?

- Si c’est du passé, pourquoi diable ai-je cette douleur à la poitrine ? C’est comme si on me poignardait à nouveau en plein cœur.

- Patience t’es une femme formidable, une des meilleures danseuses du pays, toujours disposée pour aider les autres et bien plus encore. Tu es belle de l’intérieur comme de l’extérieur.

Patience se sentit émue par les compliments de son amie. Mais, ce n’étaient pas les souvenirs de cette dure humiliation du passé qui lui faisaient autant de mal. Le plus dur était qu’elle était toujours amoureuse de Josh De Ravel.

 

Il était 10 h 30. Patience quitta sa chambre en compagnie de Grace qui n’avait pas voulu la laisser seule. En marchant silencieusement aux côtés de son amie, Patience se rendit compte que jamais le fait d’aller en cours ne lui avait paru si pénible.

- Dis Grace, sais-tu au moins pourquoi Josh De Ravel a rejoint l’école de danse ?

- Oui, ma chère, et tu vas vouloir te noyer si je te le dis.

- Ah bon ? S’il te plaît, Grace, dis-le-moi. Je préfère l’apprendre de la bouche de ma meilleure amie.

- Ta meilleure amie ? Tu es sérieuse Pat ?

- Mais bien sûr, que je suis sérieuse ! Tu es toujours là quand j’ai besoin de toi, et par-dessus tout, tu es la sœur que je n’ai jamais eue.

Les yeux de Grace s’éclairèrent à cet aveu.

- Oh Pat, merci beaucoup ! Bon, je vais te le dire, mais tu me promets de ne pas te suicider, de ne pas arrêter les cours ou de ne pas quitter la ville ?

- Bien sûr… allez, dis-moi, Grace, vite !

- Ok… c’est bon, je te le dis. Bon, voilà, à ce qu’il paraît, Josh De Ravel organise un gala de charité pour les artistes de rue.

- Artistes de rue ?

- Oui, tu sais bien, les gens qui ont du talent mais qui n’ont pas les moyens pour payer des cours dans une école d’art.

- Mais pourquoi ferait-il ça ? demanda Patience.

- Peut-être parce qu’il veut encore plus de popularité.

- Non, ma question était débile. Même si Josh ne m’a jamais aimée à cause de ma classe sociale ou parce qu’à ses yeux j’étais trop coincée, il est en premier lieu, l’être humain le plus gentil et le plus affectueux que je n’ai jamais rencontré.

- Ah ouais ?

- Oui, je t’assure. Ce que tu vois dans les magazines ce n’est pas le vrai Josh De Ravel. Le Josh que je connais est un autre homme.

Patience eut du mal à réaliser ses propres paroles. Mais au fond d’elle-même, elle savait qu’elle avait raison. Mais elle remercia Dieu que Grace n’ait pas demandé d’explication. En arrivant devant l’entrée de l’école, Patience se sentit soudain dépourvue de toute force physique et ne put avancer. Et voilà que des questions lui pleuvent l’esprit : se rappellera-t-il toujours de moi ? Quelle sera sa réaction en me voyant ? Me repoussera-t-il ? M’humiliera-t-il encore comme la dernière fois qu’on s’était vu ? Oh, mon Dieu, aimera-t-il ma tenue ?

- Oh, Patience, reprend toi et sois une femme. Merde !

En voyant le regard ahuri de son amie Grace, Patience se rendit compte qu’elle avait réfléchi à haute voix.

- Je t’interdis de dire un mot… !!! somma-t-elle à Grace

- Oh, mais je n’ai rien dit.

- Et ne t’avise pas de rigoler.

- C’est promis.

Ni Patience, ni Grace n’arrivèrent à respecter leurs promesses. Elles se mirent toutes les deux à rire en plein milieu de la cour de l’école.

Elles riaient si fort qu’on pouvait les entendre dans toute l’enceinte.

- Humm ! Je vois que vous êtes de nature heureuse ce matin, les filles !

En se retournant, Patience s’immobilisa sous le regard bleu de Josh. Ce fut Grace qui bougea la première.

- Bonjour, M. De Ravel, comment allez-vous ?

- Je me porte très bien merci.

- En fait, mon amie Patience et moi, on a été prise dans un violent fou rire.

- Ah oui ? Et puis-je savoir ce qui a causé ce fou rire si bon à entendre en si bon matin ?

« Ah, s’il savait ! songeait malgré elle, Patience. Il n’a pas changé, toujours aussi beau. Ses yeux couleur bleu marine, sa bouche, son torse, ses mains, son sourire… Mais, attend une seconde ! Pourquoi fait-il semblant de ne pas me connaitre ? »

- Humm ! Sinon Patience, on ne serait pas en retard ! lui souffla Grace.

- Euh… oui, allons-y.

- Bonne journée à vous, M. De Ravel, glissa Grace.

De la cour au casier, ni Grace, ni Patience n’osèrent prendre la parole. Ce qui rassura Patience. Mais c’était sans compter sur la perspicacité de Grace.

- Mais dis donc, Pat, tu ne lui as même pas adressé un bonjour !

- Je sais. Je ne pouvais pas. Je te jure que rien ne me sortait de la bouche.

- Eh bien ça, je l’ai bien remarqué et je parie que lui également.

- C’est sûr et comme d’habitude, il a bien dû se moquer en son for intérieur.

- Non, pas du tout. Il semblait gêné.

- Quoi ? Lui gêné ! Le grand Josh De Ravel gêné devant la petite Patience Donovan de rien du tout ?

- Arrête Pat, bien sûr qu’il a été gêné. Même moi, je l’étais. A voir la façon dont tu le dévisageais de la tête au pied, c’était très embarrassant.

Patience se sentit rougir. Elle était bien consciente d’avoir examiné ce corps irréprochable de haut en bas, mais elle préféra changer de sujet.

- Bon. Et si on allait en cours d’anglais ?

- Allons-y.

 

Assis à la cafeteria, Josh repensait à sa rencontre avec Patience. Sa Patience à lui. Mais il avait beaucoup de mal à la reconnaître. En deux ans, elle avait beaucoup changé. Rester calme en la présence de cette magnifique jeune femme au corps de sylphide et aux splendides yeux verts avait été pour lui une véritable torture.

Il savait au fond de lui que Pat ne pouvait pas l’avoir oublié. Trois ans de confrérie. Ils étaient du même âge. Il n’avait pas de secret pour elle et elle non plus.

Enfin presque…

Parce qu’il n’avait jamais eu le courage de lui dire qu’il l’aimait. Son orgueil avait été le plus fort. Comment, lui, Josh De Ravel, pouvait s’enticher d’une simple fille de campagne ? Certes, Patience avait beaucoup de talent, elle dansait comme une fée. Elle était toujours là pour lui, même quand il devenait insupportable par moment. Oh, comme il regrettait de l’avoir repoussée quand elle lui avait avoué ses sentiments. Il se rappela ne pas avoir remarqué d’alliance à son annulaire, mais cela ne signifiait rien. Elle était trop parfaite pour rester seule.

- Ah, quel hypocrite je fais ! Je l’ai laissée… elle a tout à fait le droit de vivre sa vie avec un autre.

- Tu parles tout seul maintenant ?

- Excuse-moi, Garry, je réfléchissais à haute voix.

Garry Novel, un jeune homme de 27 ans, était l’agent de Josh depuis deux ans bientôt. C’était lui la pièce maitresse de la carrière de Josh. Et le plus important, c’était à lui que Josh se confiait depuis le départ de Patience de sa vie. Garry avait été un véritable soutien pour Josh. Il l’avait ramené à la raison quand Josh avait voulu tout abandonner en regrettant son geste envers la seule femme qu’il aimait. Patience Donovan !

- Et puis-je savoir qui a le droit de vivre avec une autre ? C’est une autre petite bourgeoise qui te repousse ?

- Mais non, ne sois pas idiot. Aucune femme ne me résiste, sauf…

La phrase de Josh resta en suspens. Mais Garry en connaissait la fin.

- Tu étais au courant, hein ?

- Au courant de quoi ?

- Ne fais pas l’innocent, Garry. En m’emmenant dans cette école pour auditionner les meilleurs danseurs pour le gala, tu savais que Patience Donovan y était inscrite comme élève.

- Bingo ! Tu m’as eu.

- Mais pourquoi, Garry ?

- Comment ça pourquoi ? Je suis ton meilleur ami, je te signale. Je ne veux que ton bien. Et toi et moi, nous savons que tu es mal sans Patience Donovan.

- Je vis très bien.

- Sans elle, tu ne vis pas, tu survis mon vieux.

- Là, t’es très dur !

- Non. Je t’aime trop mon pote. C’est pour toi que je le fais.

- Et c’est quoi le plan B ?

- Quel plan B ?

- Ne fais pas l’imbécile. Je te connais. Le plan A fut de m’emmener dans la même école qu’elle. Alors, c’est quoi le plan B ?

- Il te faut une cavalière pour le gala. Pour la danse du TANGO. Tu t’en souviens ? Eh bien, devine qui est la meilleure danseuse de cette école ?

- Démon !

- Je le sais, mon cher Josh, c’est pour ça que je suis ton agent.

- Pour ça, pas besoin de passer les auditions. Mais il va te falloir un plan C, parce qu’elle ne me parle pas.

- Eh bien ça mon pote, je crois que tu l’as bien cherché.

- C’est bon, pas la peine d’en rajouter, répondit Josh en taquinant son ami.

En fait, Garry avait déjà tout planifié. Il s’était entretenu avec le prof de danse. Patience sera obligée de danser un tango avec Josh au gala de charité, car elle était en dernière année et c’était son examen pour obtenir son diplôme de danse. Sans oublier les heures de répétition après les cours.

« Hum, rusé ce cher Garry ! »

 

Le cours d’anglais tirait à sa fin et Patience n’en avait rien retenu. Elle n’arrêtait pas de repenser à la rencontre de ce matin avec Josh. A chaque fois qu’elle le voyait ou pensait à lui, elle se sentait toute petite et faible. Cet homme avait un vrai pouvoir de séduction avec les femmes. Mais Pat savait très bien qu’il n’avait pas besoin de la séduire pour cela.

- Dis donc, Grace, pourquoi es-tu silencieuse comme cela ? Tu me rends plus nerveuse que je ne le suis déjà.

- Je viens de voir passer devant nous l’homme de ma vie.

- Quoi ?

- Il s’appelle Garry Novel. Il est sur le campus depuis une semaine déjà. Il est trop mignon, je craque Pat. Retiens-moi, s’il te plaît !

Toutes les deux pouffèrent de rire à cette exclamation.

- Mais pourquoi je ne suis jamais au courant de ce qui se passe sur le campus ?

- Ça doit être parce que tu as fait de la salle de danse ta deuxième maison !

- Oh, mais tu exagère. Je sors un peu.

- Une fois sur quatre, oui !

« Grace n’a pas tort », songea Patience.

Certaines personnes noyaient leur chagrin dans le boulot. Mais elle, elle avait choisi de se noyer dans sa passion, la danse. Patience était une véritable machine à bouger. Tout y passait : le zouk, la samba, le tango et le Sega, entre autres. Elle avait tout réussi dans la vie, sauf conquérir le cœur de Josh De Ravel. Du moins, le pensait-elle !

- Le cours de danse est dans 15 minutes.

- Je sais, Grace…

- Ce qui veut dire !

- Ce qui veut dire quoi ?

- Que Josh De Ravel sera là en tenue de danse avec tous ses muscles à l’air… hum, j’ai hâte.

Sans le savoir, Grace éveilla une chaleur qui embrasa le corps de Patience. Mais Pat décida de se reprendre.

- Mais dis donc toi, tu n’avais pas jeté ton dévolu sur le cher Garry ?

- Oh, je n’y crois pas ! Patience Donovan jalouse !

- Mais je ne suis pas jalouse ! Qu’est-ce que tu racontes ?

- Mais si. Mais ne t’en fais pas. Josh De Ravel, je regarde sans toucher. Par contre, ce cher Garry, je le mangerais bien tout cru.

- GRACE… !

Et un chapelet de rires les emporta à nouveau.

Patience était très nerveuse, car elle savait que se confronter à Josh De Ravel était dangereux. Elle ne pourrait pas se concentrer sur le cours et encore moins en le voyant danser. Josh De Ravel était un vrai génie de la danse. Et d’ailleurs, ils avaient appris cette discipline ensemble.

 

- Bonjour tout le monde, intervient le professeur Collins.

Le professeur Collins était renommé pour sa capacité à transformer n’importe qui en un danseur professionnel. Grand, très mince, yeux marron et cheveux bruns, c’était un vrai Don Juan d’une quarantaine d’années. Patience était son élève préférée.

- Bonjour, professeur Collins, répondirent en chœur les élèves.

- Aujourd’hui, nous avons un invité comme vous devez tous le savoir.

Au même moment, Josh et Garry pénétrèrent dans la salle.

Patience ne sentit plus le sol sous ses pieds, et le clin d’œil que lui lança Grace n’arrangea en rien son état.

- Bonjour, Monsieur De Ravel, Monsieur Novel, les gratifia le professeur Collins.

- Bonjour à tous, répondirent Josh et Garry en chœur.

Aussitôt, Josh parcourut la salle du regard, cherchant Patience au milieu de tous les élèves rassemblés au centre de la salle. Sa recherche fut de courte durée quand il l’aperçut dans une tenue de danse rouge.

« Ses jambes sont plus belles qu’avant », nota-t-il.

Garry prit la parole :

- Rebonjour à tous, je m’appelle Garry Novel et je suis l’agent de Josh De Ravel. Nous sommes sur le campus pour préparer le gala de charité organisé par mon client, afin de dénicher les étudiants talentueux mais désargentés et les aider à amorcer une carrière. Vous l’avez certainement déjà lu dans la presse. Nous avons eu vent que votre école possède les meilleurs danseurs du pays. Et comme Josh De Ravel est toujours en quête de la perfection, le gala de charité n’est pas une exception à la règle.

Les élèves commencèrent à parler entre eux.

Garry continua :

- Est-ce que vous avez des questions jusque-là ?

- Oui, moi j’en ai une, répondit Grace, toute malicieuse.

Un sourire s’ébaucha sur les lèvres de Patiente et elle s’inquiéta aussitôt de ce qu’allait dire son amie. Grâce avait bien lancé qu’elle le mangerait tout cru, non ?

A cette idée, Patience sourit à pleines dents, sous le regard interrogateur de Josh. En effet, depuis qu’il était entré, Josh n’arrivait pas à retirer son regard de Patience. Et elle s’en était aperçue et était en passe de fléchir car elle sentait le désir monter en elle. Patience avait envie d’être entre ses bras, qu’il l’embrasse et lui dise je t’aime. Mais elle se reprit tout de suite et s’efforça d’écouter la question de Grace à Garry.

- Vous allez organiser une audition pour les différents programmes ?

- Au fait, Madame…

- C’est Mademoiselle Grace !

- Ok… Mademoiselle Grace, Josh et moi nous avons préféré faire confiance à votre professeur, Monsieur Collins.

Collins poursuivit :

- Eh bien, effectivement, le programme a déjà été élaboré par moi et quelques professionnels de Londres. Je vous informe que ce gala est capital pour votre diplôme de fin d’année. Tout se jouera là-bas !

Des murmures se firent entendre dans la salle.

Le professeur éleva légèrement la voix pour se faire entendre.

- Voici le détail du programme. Mademoiselle Donovan, vous serez la partenaire de Monsieur De Ravel sur un tango et sur une samba brésilienne.

« Mademoiselle ? Le professeur Collins s’est adressé à Patience en disant Mademoiselle. Elle n’est pas mariée », pensa gaiement Josh.

Mais il se reprit tout de suite. Être toujours une Mademoiselle ne veut pas dire qu’elle n’avait personne dans sa vie.

« Mais, c’est déjà un début », se dit-il, reprenant espoir.

M. Collins donna la liste des activités et les heures des répétitions.

Ensuite, tous rentrèrent chez eux pour préparer les moments de dur labeur qui les attendaient.

 

Il était 21 heures. Josh était assis dans le salon, sirotant un café quand Garry le rejoignit l’air soucieux.

- Que se passe-t-il Garry ? lui demanda Josh.

- Euh, rien, je suis juste un peu fatigué, et toi ?

- Moi, ça va, je pense et repense toujours à Pat.

- Hum…

- Quoi hum ?

- Rien Josh, c’est juste que j’ai revu l’amie de Pat. Tu sais, celle qui m’avait parlé en cours de danse.

- Grace ?

- Oui, elle-même.

- Et ?

- Ben, je n’arrive pas à me l’enlever de la tête. Elle est très spéciale. Elle ne parle pas que d’elle tout le temps. Elle me laisse m’exprimer. Elle rigole à toutes mes blagues et elle est très belle.

- Eh bien mon pote, je te souhaite la bienvenue au club des amoureux.

- Je ne suis pas amoureux ! s’esclaffa Garry.

- Bien sûr que si…

- Mais non, je ne suis pas amoureux, Josh, et arrête avec ça !

- Si tu n’as pas réellement le béguin pour la charmante Grace, alors dis-moi pourquoi tu es sur la défensive ?

Garry ne répondit pas à la question et resta muet.

Un long moment de silence s’installa dans la pièce. Puis, Garry reprit :

- Dis Josh, et si on allait faire un tour chez les demoiselles ?

- Tu deviens fou mon pote, ça doit être le symptôme de l’amour.

- Mais je suis sérieux. On trouve une excuse et on débarque là-bas. On ne va tout de même pas attendre les cours de danse pour les voir !

- Tu as raison. Mais trouvons vite une excuse.

 

Patience et Grace étaient installées devant un reportage sur la carrière de Britney Spears.

- Elle danse trop bien Britney. Tu as vu les chorégraphies ? C’est d’enfer… !

- Tu as raison, Grace, Britney est une vraie pro. Surtout avec cet habit !

- Elle a été géniale notre journée, hein ?

- Pff ! Tu peux dire ça pour toi, hein ! Alors comment s’est passé ce café que tu as pris en compagnie du beau Garry ?

- Génial ! Après le café, il m’a emmenée près du lac où on a parlé et rigolé de tout et de rien. C’était un instant magique.

- Tu l’aimes ?

- Oui, je crois. Mais tu sais bien qu’il ne s’amourachera jamais d’une fille comme moi !

- C’est ce que je pense de Josh vis-à-vis de moi. Mais j’espère malgré tout une tout autre tournure. Et je te le souhaite aussi.

- Merci Pat, tu es un ange.

Au même moment, on sonna à la porte, et les filles se mirent à paniquer.

- C’est qui, d’après toi ? demanda Grace.

- Je ne sais pas, va voir.

- Nous y allons toutes les deux, d’accord ? J’ai peur.

- Moi aussi.

Les deux filles se dirigèrent vers la porte sur la pointe des pieds, toutes tremblantes.

- Qui est là ? crièrent-elles d’une même voix.

- Josh De Ravel et Garry Novel. Nous nous excusons pour l’heure tardive mais on a pensé qu’on pourrait regarder un film tous ensemble.

Grace et Patience s’observèrent, ahuries. Elles étaient en tenue de chambre et l’affolement pouvait se lire dans leurs yeux.

Patience ouvrit la porte et, en apercevant Josh, elle se sentit fondre sous son regard.

- Bonsoir. Excusez-nous, mais on n’attendait pas de visite ce soir.

- Oui, nous le savons, répondit Garry en s’adressant à Grace par-dessus l’épaule de Pat.

- Mais, entrez donc, l’invita Grace.

Et tous les deux se dirigèrent vers le salon en laissant Josh et Pat sur le pas de la porte.

- Tu peux entrer aussi, balbutia Pat.

- Merci beaucoup.

- Pour l’histoire de regarder un film à 22 heures…

- Oui, ce n’est qu’un prétexte. Garry voulait revoir Grace et je l’ai accompagné.

Patience fut déçue par les révélations de Josh. Il était là seulement en tant qu’accompagnateur et non pas parce qu’il avait envie de la voir. Néanmoins, Pat se reprit, se disant que cela ne devait pas la blesser autant car elle savait très bien que Josh ne l’aimait pas.

« Mais qu’en fait-il de notre amitié ? Serait-ce que du passé pour lui ? », s’écria-t-elle intérieurement.

Deux minutes plus tard, Josh et Pat étaient dans la cuisine, préparant des snacks alors que Grace et Garry se racontaient les bêtises de leur enfance. Pat commença à jalouser Grace. Garry semblait bien l’apprécier et elle avait de la chance. Tandis qu’elle…

- Qu’as-tu fait après l’école d’art ? lui demanda Josh.

- Ben, je me suis inscrite ici pour l’obtention d’un diplôme en danse, répondit Pat.

- Hum, c’est bien. Moi, comme tu dois le savoir, j’enchaîne les contrats et je suis tout le temps en tournée.

- C’était notre rêve à tous les deux. Je suis contente que toi, au moins, tu réalises le tien.

- Tu y arriveras aussi, ne t’en fais pas. T’es la meilleure en danse et tu le sais.

- Etre la meilleure ne suffit pas, et ça, tu le sais aussi.

- La Patience Donovan que je connais ne pensait pas comme cela il y a cela deux ans.

- Avec le temps, on évolue Josh.

- Oui, c’est vrai, mais on évolue en mieux.

- Que veux-tu insinuer ?

- Il y a deux ans, tu étais prête à tout donner pour que ton talent soit reconnu par les vrais professionnels, même si c’était pour faire de la danse de rue.

- Rêver, c’est pas interdit Josh. Mais la vérité est toute autre.

- La vérité c’est que tu es l’une des plus belles femmes au monde, avec un véritable talent pour la danse.

Une des plus belles femmes au monde ? Le pensait-il vraiment ? se demanda Patience tout émue. Ils terminèrent leur conversation car Grace les interrompit en les informant du début du film.

 

Deux semaines plus tard, les préparatifs pour le gala avançaient à vive allure. Patience et Josh se voyaient tous les après-midis pour leurs répétitions. Jusqu'à ce jour, ils se contentaient de bien s’entendre et de travailler leur chorégraphie. Josh ne fut pas déçu par le talent de la jeune femme.

- Dis Patience, tu as quelque chose de prévu après la répète ?

- Euh, non pas vraiment, pourquoi ?

- Je t’invite à prendre un café, il faut qu’on parle.

- Parler de quoi ? lui demanda Patience d’une voix tremblante.

Josh lui offrit un sourire très réconfortant.

- Ben, de beaucoup de choses. Deux ans d’absence, ce n’est pas rien.

- D’accord. Alors, on se retrouve dans une demi-heure à la sortie de l’école.

- Comme tu le souhaites. A tout à l’heure !

Assise dans les vestiaires, Pat se sentit tout bizarre. Quand elle était avec Josh, elle était une autre personne. Elle était heureuse, avait souvent très chaud et se permettait de rêver à une quelconque chance avec lui. Mais une chose la rassurait. Josh De Ravel était toujours le gentil jeune homme très têtu qu’elle connaissait. Il terminait toujours ce qu’il entreprenait.

 

- Alors, il s’appelle comment ton prince charmant ? lui demanda Josh.

- Je n’ai pas de prince charmant et tu le sais bien.

- Non je ne le savais pas, je te le jure. Mais pourquoi une fille comme toi est-elle seule ?

- Peut-être parce qu’une fille comme moi n’a pas besoin de prince charmant.

- N’importe quoi, on a tous besoin de quelqu’un qui nous aime dans la vie.

- Ben, j’ai mes parents et Grace.

- Arrête, Pat… tu sais bien de quoi je veux parler !

- Ah oui, j’ai oublié que j’avais affaire à un professionnel du couple !

- Désolé Pat, je ne voulais pas t’ennuyer. Je voulais juste détendre l’atmosphère.

- Ok…, et si on parlait de toi ?

- Que veux-tu savoir ?

- Elle s’appelle comment la future Madame De Ravel ?

- Décidément, on va parler que de couple.

- Ca, c’est toi qui l’as bien cherché.

- Hum, oui je le reconnais. Et pour la future Madame De Ravel, si cela ne tenait qu’à moi, c’est toi que je choisirais pour être la future Madame Patience De Ravel.

Patience resta sans voix. Elle examina les traits de Josh. Il avait l’air d’être très sérieux. Mais pourquoi maintenant ? se demanda Patience. Après tout, il ne lui avait pas dit qu’il l’aimait, juste qu’il voulait faire d’elle sa femme. Peut-être pensait-il qu’avoir sa meilleure amie comme femme lui assurait une vie de cavaleur, que si cela avait été une de ces petites bourgeoises qu’il aime tant ! se rebiffa Patience.

- Tu délires, Josh et ce n’est pas drôle du tout.

- Je suis très sérieux, Pat, lui répondit-il en posant sa main sur la sienne.

Ce contact fit parcourir un frisson dans tout le corps de la jeune femme qui ne put cacher son trouble. Josh la regardait dans les yeux, et cet instant paraissait être une véritable caresse.

- Josh De Ravel n’a pas besoin d’une personne comme moi pour femme ! Je vois déjà la Une des tabloïdes m’humiliant dans leurs articles.

- Que veux-tu dire par une femme comme toi ? Tu es splendide, une femme idéale. Tu as un grand cœur, très belle, talentueuse, t’es un amour.

- Te rends-tu compte que t’es en train de me faire une demande en mariage ? Et tout ceci, après m’avoir repoussée deux ans plus tôt.

- Excuse-moi, Pat, j’avais commis une erreur. Mon orgueil a été plus fort que moi et puis j’avais peur de te gâcher ton bonheur car je n’étais pas un homme pour toi. J’étais irresponsable. Tu méritais mieux.

- Qui es-tu pour décider de ce qui est bon ou pas pour moi ?

- Pat, j’ai beaucoup souffert après ton départ, je t’aimais et je t’aime toujours. Je ne peux pas vivre sans toi.

- Non, ce n’est pas vrai du tout. C’est impossible ! cria Pat en larmes.

Elle s’enfuit ensuite à toutes jambes de la cafeteria…

 

Deux jours passèrent depuis la dernière rencontre de Josh et Patience. Garry et Grace, quant à eux, vivaient une grande histoire d’amour. Ils sortaient tous les soirs et Pat les enviait.

Ce soir, Pat était seule dans l’appartement quand on sonna à la porte. Au fond d’elle-même, elle espérait que ce soit Josh. Elle s’approcha de la porte pour ouvrir quand, tout à coup, elle s’aperçut qu’elle était en tenue de chambre.

« Mais après tout, pensa-t-elle,  il m’a déjà vue vêtue ainsi ».

- Qui est là ? demanda-t-elle, soucieuse de connaître l’identité de son visiteur.

- C’est moi.

Patience eut un sourire, elle reconnaissait cette même voix grave qui la faisait tressaillir à chaque fois.

Elle lui ouvrit la porte, avec un sourire qui surprit Josh car il la pensait remontée contre lui.

- Excuse-moi pour la tenue, mais je n’attendais personne ce soir.

- Oui, je le sais, j’étais moi aussi seul à l’appartement vu que Garry est sorti.

- Avec Grace… oui, je suis contente pour eux. Ils vont bien ensemble.

- Oui, ils le méritent.

- Rentre, fais comme chez toi. Je vais nous faire un café. En passant, pour l’autre jour au café, je tiens à m’excuser. C’est juste que tu m’as surprise.

- Je le sais et tu n’as pas à t’excuser. Ta réaction était justifiée. Je me suis conduit comme un goujat envers toi alors que nous étions les meilleurs amis.

- Etions ? répondit Pat avec sarcasme…

Josh sourit et la suivit dans la cuisine pour l’aider à préparer le café. La voyant gesticuler dans la cuisine, Josh se mit à la détailler.

« La tenue de chambre sied à merveille sur ce corps mince et parfait », pensa-t-il.

Toujours aussi joyeuse et aimante. C’était une femme merveilleuse, et il l’aimait. Ca, il en était convaincu.

- Le gala de charité est dans deux jours et je flippe un max, lui révéla Pat avec un sourire d’angoisse.

- Pourquoi cela ?

- Ben, il y aura la presse people, et tes amis sont également des célébrités. Danser avec toi est un immense privilège, mais aussi un véritable casse-tête.

Josh lui sourit.

- Parfaite comme tu es, je trouve que tu n’as aucune raison d’avoir peur. Moi, j’ai plutôt hâte de montrer au monde entier la femme que j’aime et l’artiste accomplie.

- Quoi ? balbutia Pat.

Josh s’approcha d’elle, l’enlaça par la taille et plongea son regard dans le sien. Il lui sourit et déposa un baiser léger sur les lèvres de la jeune femme en continuant de la regarder dans les yeux. Ensuite, ce baiser devint plus pressant et Pat ne put qu’y répondre. Les mains de Josh parcoururent le dos de la jeune femme en une caresse soyeuse. Ce qui augmenta le désir de la jeune femme. Pat se sentit plus gourmande des lèvres de Josh. A contrecœur, Josh s’écarta d’elle.

- Patience, je t’aime. Je suis désolé pour ce qui s’est passé il y a deux ans. Je t’aime et j’en suis sûr.

- Je t’aime aussi, Josh, je t’aime, répondit Pat les larmes aux yeux.

 

Le soir du gala, les quatre tourtereaux s’y rendirent en limousine. Patience et Grace étaient fascinées par la galanterie de leurs hommes. Elles avaient l’impression d’être dans un conte de fées. Garry et Josh étaient en smoking noir et chemise blanche.

« Deux vrais gentlemen », songea Patience.

Grace, quant à elle, portait une robe rouge avec les épaules nues.

« Garry en est tout conquis », pensa Patience avec malice.

Patience, elle, portait une robe de tango marine avec des chaussures à talons noires de 8 cm.

- Même avec des talons, tu fais plus grand que moi, dit-elle à Josh avec un grand sourire.

- Oh, mais ça chérie, cela peut être un avantage… si tu vois ce que je veux dire ? lui répondit Josh avec un clin d’œil.

« Fait-il allusion à la nuit torride que nous avons passée la nuit dernière ? », pensa malicieusement Patience.

 

Le gala de charité fut un véritable succès. Josh avait créé, par la suite, une école d’art au nom de Patience Donovan. Quant à Grace et Garry, ils vivaient dans la même ville que Pat et Josh et ils attendaient des jumeaux.

Patience Donovan et Josh Corneli s’étaient mariés deux semaines après le gala et faisaient désormais la Une de tous les magazines people.

Patience avait obtenu son diplôme, possédait une école d’art à son nom offerte par Josh et suivait son mari dans des spectacles à travers le monde.

Il ne faut donc pas se fier aux événements contraires de la vie. Chaque personne a un destin, il faut juste laisser les choses se mettre doucement en place.

Fin

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