Bláþráður
blondy-snow
« L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages,
les colorations changeantes de la mer,
le scintillement des phares sont un prisme
merveilleusement propre à amuser les yeux sans les lasser. »
Charles Baudelaire
Un bruissement harmonieux, cyclique vient briser l'épaisseur du silence. La houle. Les vagues qui viennent mourir une à une sur le sable, doux linceul, froid linceul sous les rayons du soleil couchant. La mer crache abondamment les filles de Poséidon qui s'échouent encore et encore, inlassablement. Mais leurs doigts si fins, si glissants ne parviennent à s'accrocher au rivage. Les voluptueuses se happent et provoquent certaines accoutumances au fil des épiques avancées. Sable mouillé. Êtres marins rejetés, abandonnés, ne retrouvant jamais le chemin du retour, destinés à finir dans les poches crevées des marcheurs solitaires. Et quand le combat devient trop difficile, Poséidon rappelle sa chaire, sa matière. Elle retourne près de lui. Repos de courte durée. Il décide d'en envoyer d'autres. D'autres qui reçoivent les rayons acharnés de Phébus que les enfants d'Eole tentent tant bien que mal de chasser en cette fin de journée. Combat marin, combat céleste. La nature impose ses lois.
Mais Phébus apprécient les filles de Poséidon, elles ont en leur possession le pouvoir de le refléter. Miroir éphémère et changeant. Ainsi, une lueur divine, un scintillement féerique vient donner de l'éclat à la fade obscurité de la nuit tombante. Ce n'est point l'astre solaire qui éclaire mais l'ondoyante mer. Prisme de lumière, elle reflète la blancheur céleste. L'armée aquatique, infinité à peine perceptible dans son éternité, porte tour à tour le poids de la création du Maître de la chaleur. Nuances de bleu, nuance de blanc, les deux se rencontrent dans un choc thermique qui crée, l'espace d'un instant, un tableau d'une magnificence éclatante.
Les nuages, rêverie poétique, meublent le ciel d'un nonchalant hasard. Constructions impalpables, ils hantent l'étendue céleste d'un bleu outremer qui tend à pénétrer dans les ténèbres. Formes étranges, en mouvement constant, ils ne gardent jamais la même structure, s'adaptant au gré des envies des souffles de Eole. Ils disparaissent peu à peu dans l'horizon mystérieux, horizon qui avale au fil du temps les langueurs océanes, ne formant plus alors, sous l'oeil hagard du contemplateur, qu'un fil bleu.