Ce qu'il y a à dire et ce que l'on taira.

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“What do you most value in your friends?

– Their CONTINUED existence.”

Au début c'était plus un brouhaha qu'une réelle bande de potes. On traînait ensembles, on s'amusait bien et on buvait beaucoup. Il y avait les parties de cartes surtout, et tous les moments passés dans le hall de la bibliothèque. Les quelques grosses cuites aussi, parce que même s'ils elles étaient à compter sur le bout des doigts, aujourd'hui on s'en rappelle encore, et ça nous arrache toujours le même fou rire. Moi, j'avais déjà mes meilleures amies, avec qui j'avais décidé de me lancé dans l'aventure de l'université, et les autres avait leur propres attachements à droite à gauche.

Il y avait les gars, un toujours avec une bonne vanne à la bouche et l'autre plus calme, mais tout aussi drôle lorsqu'il avait décidé de nous apporter de l'attention. Et puis les filles, des drôles, des grandes gueules, des justes gentilles, des jolies et d'autres moins. Le mélange était assez drôle à regarder de loin, mais je pense que plus on a continué à traîner tous ensembles, plus on en avait rien à faire. Et surtout, on adorait se retrouver. Tous. Je crois que pas une seule fois à ce moment, quelqu'un n'a dit, ou même pensé, qu'il ou elle ne voulait plus prendre part à tout ça. Parce que c'était vraiment chouette.

Et puis il y a eut les départ à l'étranger, opportunité en or que quelques unes de la bande on saisit.     Des filles sont parties, et d'autres gens sont arrivés.

On a commencé à être peu, et à vraiment commencer à se rapprocher tous.

C'est au début du mois d'Avril que tout à vraiment commencé, notre vraie histoire je veux dire. Parce que oui, on a une vraie histoire, mais j'en parlerais plus tard.

Enfin. Au mois d'Avril, on avait tous plus ou moins cours qu'une à deux fois par semaines. Le pire c'était les gars : ils étaient à deux années plus loin que nous dans le cycle, et ça sentait. Pas de stresse des examens, et toujours un verre à proposer, même le lundi. Alors on se voyait tout le temps, pour jouer aux cartes, boire un verre ou café, ou juste regarder un film quelque part.

Je crois que c'est le beau temps qui arrivait qui nous a réellement motivé à nous retrouver plus souvent. On avait la chance d'avoir la plage à moins de deux kilomètres et de pouvoir aller n'importe où quand bon nous semblait.

Je les invitait tous souvent chez moi, on avait une conversation avec au moins dix personnes dessus,  et pas une seule fois on était lassé de se revoir.  Même un amie qui était arrivée après la fondation de tout ça a réussi à trouver sa place. Et l'amie d'une des fille aussi, géniale et toujours là pour tout, avait posé sa petite marque dans tout ça. 

Et puis mine de rien, depuis la rentrée scolaire et sans s'en rendre compte, on avait déjà traversés pas mal de choses ensembles, et peu de personnes avaient encore de tabou les uns envers les autres. L'une de nous souffrait d'une dépression, l'un d'une grave déficience, dont on blaguait même, et une autre d'une humeur que je dirais hivernale. Il y a eu l'apparition de véritable têtes aussi, des sortes de leader, au cours de toutes ces semaines. On était cinq ou six, suivant les dires des uns et des autres. Un garçon et quatre filles, d'après moi. J'en faisais partie, sans trop m'en rendre compte. Il y a eut des petites histoires, des petites querelles, et des moments de malhonnêteté mais c'était pas grave. On s'est plus ou moins tous entraidés, et  ça s'est senti quand on passait une après midi ou un soir ensemble : c'est que quoi qu'il arrivait, on réussissait tous de même à maintenir une harmonie dans tout ça. Et c'était chouette, putain de chouette.

Et puis il y eut le début des grandes vacances, deux ou trois départ en plus et là on était vraiment plus beaucoup. Six ou sept je dirais. Mais ça ne changeait rien : on s'adorait, on se marrait toujours autant et on ne se lassait toujours pas. Ô si, il y a eu un jour peut-être, où j'ai voulu me reposer et passer du temps toute seule dans mon appartement. Mais ça n'a pas duré plus longtemps.

Juillet et Août, j'avais toujours l'impression d'être avec eux. On était tous à au moins cent kilomètres les uns des autres, mais pas un jour ne passait sans que l'un ne nous donne des nouvelles, envoie des photos de ses vacances ou partage une anecdote à la con. C'était étrange d'ailleurs, parce que j'avais beau être chez moi, dans la ville où j'ai vécu des années, le manque se faisait sentir d'une manière étrange. J'avais une famille ici, et une autre là bas. Oui, je peux le dire dans ce sens je pense.

A la rentrée, après les vacances, on avait tous peur un peu de ce qui allait se passer. On avait tous changés, tous repris un mode de vie ordinaire et les filles parties repointaient, à notre petit bonheur, le bout de leur nez à l'université, après quasiment six mois d'absente. Mais on s'en foutait : on était tous ensembles, et on acceptait toujours tout le monde. Parce qu'on était ouverts à tous, et que mine de rien, elles nous avaient manquées.

Et puis finalement, malgré quelques petits trucs, et quelques malaises aussi, on s'en ai plutôt bien sortis. On se retrouvait toujours, pour des verres et des cafés, pour des nouvelles cuites, et toujours pour nos parties de cartes.

Le premier vrai problème s'est installé fin Septembre, quand l'une de nous a commencé à s'égarer pendant les soirées.  C'était simple : une seconde elle était avec nous, et l'autre elle ne l'était plus. On avait qu'à tourner la tête et c'était comme ci elle s'était évaporée. Ça a commandé à nous inquiéter, mais l'une de nous, que tous considéraient beaucoup malgré son arrivée tardive dans le groupe, prenait soin de maintenir la nénette dans un droit chemin. Ou enfin, elle la surveillait, et quelque part, même si ça nous énervait un peu et qu'on ne comprenait pas, on savait qu'elles étaient en sécurités. Elles étaient proches, très proches, et je pense qu'elles se suffisaient.

Mais ça a dérapé : il y a eu un soir où la nénette s'est retrouvée toute seule, et où elle a été obligée d'appeler un des gars au secours. Au début ça nous a fait rire, et puis finalement on s'est rendu compte qu'elle allait trop loin. Parce que non seulement elle se mettait en danger, et de plus elle empiétait sur la vie des gens.

Alors on lui a dit, tous quasiment. Et chacun à notre manière, qu'elle soit douce ou forte. Mais elle a bougé, elle a compris, elle s'est prise en main et tout est redevenu dans l'ordre.

Ce qu'on avait pas calculé c'était un petit tracas, qu'on avait mis au second plan ; enfin pour ma part, c'était un petit tracas. La copine de la nénette, qu'on avait l'habitude d'appeler son ange gardien, s'est fait plaquée. D'une manière pas très honnête. Et elle était sacrément amoureuse, et heureuse en plus. Mais du jour au lendemain il l'a lâchée. Alors forcément au début on a tous pris sa défense, enfin toutes surtout. On était pratiquement  qu'un groupe de filles aussi, il faut le dire. L'un des gars en avait rien à faire je pense, et l'autre il était amoureux d'elle depuis un moment, alors il restait discret devant nous sur la question, mais au moins il se montrait compréhensif.

Bref on a pris sa défense pendant longtemps, et faut dire qu'elle s'en ait plaint un bon moment aussi, mais c'était pas grave au début : on était soudés, encore plus qu'avant et on se lâchait pas. Alors c'était pas le moment de la lâcher non plus. Surtout qu'elle était présente, pour tout le monde quasiment. Alors on s'est accroché. Même quand elle a commencé à déconner avec tout le monde.

Ça, c'est arrivé un peu après, début Octobre je dirais. Une amie ne la sentait pas depuis un moment déjà, mais comme elle n'était pas souvent avec nous, on s'est dit qu'elle ne pouvait pas comprendre. Alors on a pas pris ses remarques en compte et on a continué à donner des excuses à l'ange.

La nénette a commencé à se plaindre aussi, et une autre des filles, une grande gueule qu'on adore pour ce qu'elle est justement. Mais on arrivait pas à lui en vouloir à l'ange gardien, parce qu'on l'adorait tous. Trop même, d'après moi. Elle était arrivée après tout le monde, c'est la vérité, mais elle avait pris une place au sein du groupe, une influence qu'on a sûrement pas senti venir.

Donc quand ça s'est gâté avec elle, c'était plus pareil.

Ça a commencé avec une fois ou elle a dit rire des soucis d'une de mes meilleures amie. Et rire d'une dépression, ce n'est pas normal. Et me le dire à moi non plus ce n'était pas normal. Et tout ça à son propre anniversaire, alors que tout le monde s'amusait, et elle aussi on croyait. Mais elle avait bu, et l'alcool elle le tenait pas si bien que ça en fait. Elle a pleuré, elle s'est plaint, et elle a raconté des choses qu'on ne raconte pas dans ces moments là. Elle a dit des choses aussi, sur une fille qu'on fréquentait de temps en temps. Comme quoi elle était insupportable, et qu'elle méritait beaucoup de ce qui lui arrivait. Puis elle était de moins en moins réglo. Par exemple une fois, fin Octobre début Novembre je crois, elle a raconté à la nénette qu'on avait reparlé de la période où elle était irresponsable. Et je crois que c'est là que ça a  dérapé. Elle s'en ai pris à plus fort qu'elle sans s'en rendre compte je crois, et elle a pas calculé que trois têtes du groupes avaient déjà pris partis, moi y compris.

L'amoureux lui, on le perdait un peu. Il restait avec nous, mais je crois qu'il voulait la sauver. C'était tout à son honneur, mais il se perdait lui-même  dans tout ça d'après moi. Il avait plusieurs amis, des gars qu'on ne connaissait pas, qui étaient en dehors de tout ça, et ils lui répétait de la laisser tomber mais il  ne pouvait pas. Et je crois qu'au fond lui, même s'il en était capable, il ne le voulait pas. Il a commencé à être plus discret sur la question, même si certains étaient au courant de ses pensées. J'étais fière d'être de ceux là, parce que je l'adorait, comme j'aurais adoré un frère. Alors quand il se confiait, même une seconde, à moi : j'étais contente. Il me faisait confiance autant que moi je lui faisais confiance, alors j'étais contente. Mais il ne la lâchait pas, il persistait, tout comme ma meilleure amie, qui était sa plus grande confidente. Qui l'est toujours d'ailleurs, enfin d'après ce que je pense. Ils sont restés soudés tous les trois, alors que tout les autres l'avaient laissée tomber, l'ange.

Il faut dire que durant l'année précédente, elle nous avait vendu une personne droite, honnête, généreuse et gentille. Et que jamais, jamais, nous n'aurions soupçonnés un tel renversement de sa part. Elle était devenue méchante quelques fois, et par dessus tout elle n'était plus digne de confiance. Et je crois qu'avant ça, nous ne nous étions pas rendus compte à quel point c'était un critère important entre nous. On a essayé de la raisonner, avec la nénette, ma meilleure amie et l'amoureux. Chacun notre tour on a essayé de l'aider, de lui parler et de lui faire comprendre qu'elle avait un problème. Mais son orgueil était trop fort, et son manque de remise en question aussi, et on a tous abandonné. Alors on l'a laissé tomber malgré ses efforts pour revenir vers nous.

Et depuis tout à changé. L'amoureux s'est éloigné, il reste dans son coin et ma meilleure amie a décidé de ne pas prendre parti, comme à chaque fois.

La nénette et la grande gueule qu'on adore pour ça, on s'est rapprochées. Parce qu'il faut le dire, la nénette, c'était pas la première fois qu'elle perdait son pilier dans la bande. Alors moi et la grande gueule, on l'a pas lâchée. Et on a découvert une personne qui ne s'effaçait plus, et qui malgré ses coups d'éclats qu'on ne comprenait pas tout le temps, était au moins quelqu'un en qui on pouvait avoir confiance.

Entre temps, le gars le plus discret est partis de l'université à la fin de son semestre. Les filles rentrées de l'étranger ont réussi à retrouver un place au sein de ce qui reste du groupe. Et nous, les têtes, et les fondateurs de cette histoire, on essaie de s'en sortir. Ou du moins, on tente de rester souder.

Mais il va y avoir d'autres départ, d'autres arrivées, d'autres déceptions et d'autres rapprochements. Je crois que l'harmonie et la débâcle font partis intégrale de ce que l'on forme tous ensembles. On s'en relève, mais on est touchés.

Et quelques fois, j'aimerais que ça s'arrête. J'aimerais qu'on retourne au mois d'Avril, l'année dernière. Que tout revienne au point de départ. Oh oui.

Et d'autres, je me dis que même s'il y a eut tout ça, et bien d'autres choses que ne n'évoque pas ici, on s'est tous rencontrés et c'est super. Ce sont des gens qui malgré ce qui a pu arriver et ce qui arrivera encore, on marqué ma vie. Pour ce qu'ils sont et ce qu'ils ne sont pas, ce qu'ils disent et ce qu'ils taisent et pour ce que l'on s'apporte à tous.

Et puis qui sait, peut-être qu'on se retrouvera tous à un moment. Ou peut-être pas. Enfin, dans tout les cas, ce n'est que ma version de l'histoire.