Chansang
-algos-
Le sang ruisselle et les traits rouges qu'ils dessinent sont comme les partitions divines des immortels maîtres. Qu'il est plaisant de voir en plus du résultat l'action même ! Ainsi moi qui ne jouissait avant que du spectacle terminé, l'artiste effectue maintenant devant moi ces gestes d'une indiscutable beauté. Et soudainement de la pièce situé en contrebas émerge la pure création d'un esprit malade mais surtout génial. Rien ici n'est épargné, la plus totale des souffrances pour la plus délectable des jouissances. Hurle le cadavre vivant exposant son intégrité aux yeux de ce petit comité, hurlent les regards carnassiers devant ce spectacle relevant à la fois du pathétique et du dramatique.
Désormais arrive le moment où le maître vient se servir dans la chair encore vivante, la viande se mouvant, se mouvant, se contorsionnant en d'horribles spasmes douloureux. Relevant sa manche encore immaculée, il plonge profondément sans les tréfonds anatomiques et semble écarter les morceaux sanguinolents peu intéressants. Son bras se tend soudain en un immobilisme d'une maniaque beauté et sans sa main la pureté de l'homme, palpitant en de pathétiques soubresauts organiques, inondant la scène d'un rouge plus lumineux, comme si la vérité se trouvait aux confins de l'horreur en une liquide luminescence. Les yeux, quels yeux si vrais et emplis de la pire des terreurs que lancent ceux du supplicié. Nous ne sommes rien jusqu'au moment précis où l'âme prend réellement conscience d'elle-même, au moment fatidique de s afin, que gâchis de beauté éphémère. Les chants doux semblent se taire en un Lamento décroissant, et le silence se fait sur la scène. Toute cette tempête malicieuse de destruction, cette folie absolue exploitée jusqu'à l'expiration finale. Plus rien n'a de sens, sinon l'Eternité.