Chapitre 4 - Quatorze ans pour l'éternité
pindariste_
Chapitre 4
Samedi 11 septembre 2021
Diana Delaunay
Lucie pose ses affaires dans ma chambre pendant que je vais chercher du jus de fruits dans la cuisine. Je suis contente qu'elle soit là, on ne s'est pas vues depuis le début des vacances d'été. Je suis beaucoup sortie avec les filles et elles ne voulaient pas trop que Lucie vienne. De plus, je me suis dit qu'elles ne s'entendraient pas forcément très bien et que Lucie se sentirait à l'écart. Ensuite, je sais qu'il faut que je commence à me faire plus d'amies, car Lucie est très gentille, mais on n'a pas vraiment les mêmes points communs, donc je ne peux pas tout faire avec elle ou mes parents.
Je sais que les filles ne l'aiment pas trop, mais peut-être que cette soirée va les réunir. Peut-être qu'en apprenant à la connaître, elles vont l'apprécier un peu plus.
– Elles arrivent dans moins de dix minutes normalement. On a décidé de commander des pizzas ce soir, annoncé-je à Lucie.
Elle me répond par un mouvement de tête, trop occupée à regarder les photos accrochées à mon mur. J'en ai rajouté pas mal depuis la dernière fois qu'elle est venue. Je la vois fixer les photos que j'ai prises avec les filles. Elle analyse chaque détail. Ensuite, elle passe aux autres : mon voyage. Je la vois sourire en voyant l'image où je nourris des écureuils avec ma mère.
– Diana, Lucie ! Les filles sont là ! crie mon père depuis en bas.
On dévale les escaliers en direction de l'entrée. Je prends les filles dans mes bras et leur fait la bise. Je remarque bien leurs visages quand elles aperçoivent Lucie derrière moi. Elles lui font un vague signe de main avec un faux sourire car il y a mes parents. Je sais très bien qu'elles auraient fait comme si elle n'était pas là sinon.
Les filles s'assoient toutes sur mon lit et commencent à parler de la nouvelle paire de basket qui vient de sortir. Je remarque bien l'inconfort de Lucie : elle joue avec son pendentif et regarde par la fenêtre. Je n'ose pas l'interpeller, de peur de déranger les autres qui commencent à rire et parler fort. Ça aurait été plus facile pour moi si j'étais assise à côté de Lucie mais je suis en face.
Mon amie se lève et part aux toilettes. Les filles s'arrêtent de parler et la regarde marcher.
– Pour une fois qu'elle change de style vestimentaire, commence Elena.
– C'est ridicule, ça lui va pas du tout, elle a pas la personnalité pour, continue Sarah en rigolant.
– Un alien qui essaie de trouver sa place ici mais qui n'y arrivera jamais, conclut Candice.
Je ne dis rien et fais comme si n'avais pas entendu. Les filles rigolent et passent à un autre sujet.
Je n'ose pas défendre Lucie. Je n'ai pas envie de perdre mes nouvelles amies avec qui j'ai de nombreux points communs. Sans elles, je ne pourrais pas sortir aussi souvent. Je passe de bons moments avec elles pour être honnête. Certes, je ne trouve pas ça très sympa de critiquer les autres, mais tout le monde a des défauts.
– Venez, on va dans le jardin, propose Candice.
C'est vrai qu'il fait beau et pas trop froid. J'ai un assez grand jardin et on a assez de chaises normalement. Les filles commencent à descendre et je croise Lucie dans le couloir, qui était en train de revenir. Elle nous suit en bas. Les filles continuent de parler de mode, de maquillage et de voyages. On parle majoritairement de l'Espagne et des îles Maldives, etc. en attendant l'heure du repas.
* * *
Lucie s'assoit sur la chaise de mon bureau en nous écoutant silencieusement. Les filles ont décidé de se mettre du vernis à ongles avant de dormir. Je la vois prendre une feuille et commencer à gribouiller dessus. Je sors de mes pensées et continue de mettre du vernis à Ambre. J'aperçois Lisa du coin de l'œil se diriger vers Lucie. Elle prend violemment sa feuille et froisse la feuille avant de la rendre à mon amie.
– Il ressemble à rien ton dessin. On dirait un avocat, lance-t-elle avant de revenir s'asseoir.
Lucie regarde le morceau de papier gâché avant de le jeter à la poubelle. Je regarde Lisa, qui est fière d'elle. Elle a un petit sourire en coin. Mon amie pose son crayon dans ma trousse et fixe le mur en face d'elle. Elle ne doit plus avoir envie de dessiner.
Ça m'attriste de la voir comme ça, mais en même temps, je ne comprends pas pourquoi elle ne réagit pas, pourquoi elle se laisse marcher dessus. Elle devrait s'imposer un peu plus et se faire entendre.