Chapitre I
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Il était beau. Bon sang qu'il était beau. Et il ne la regardait qu'elle.
Ça lui était tombé dessus sans qu'elle ne s'y attende : Samuelle était arrivée à l'université trois mois plus tôt, et elle avait croisé Alexandre presque tous les jours à la bibliothèque universitaire depuis. Good morning everyone and … Ils s'étaient jetés des regards timides, essayaient de se rencontrer en prétextant une envie de café aux mêmes heures, et même quelques fois Alexandre imitait un coup de téléphone dans le hall alors qu'elle fumait tranquillement une cigarette dehors. Cloudy today but…
Samuelle ne s'était pas attendue à le croiser ce soir, alors qu'elle sortait avec des amies. Ni même à ce qu'il ne vienne la voir, pour lui dire qu'il ne voulait qu'elle depuis le premier jour. Elle n'aimait pas la musique, ses amies elles dansaient en rythme depuis presque une heure sur la piste, mais Samuelle ne s'ennuyait pas pour autant : Alexandre et elles discutaient depuis le début de la soirée, et elle ne perdait pas une miette de ses mots. And we're takin git with Sia's hit this week…
Ils allaient s'embrasser, et elle n'attendait que ça. Alexandre l'avait entrainée dehors, en lui prenant discrètement la main pour ne pas attirer l'attention de ses amies. Et ils étaient là, leurs visages à quelques centimètres à peine et leur souffle en suspens.
Et tout à coups, Samuelle senti l'acide remonter le long de sa gorge. Sa tête tournait, son monde semblait s'évanouir autour, mais elle refusait de quitter les yeux de celui qu'elle avait observé en secret durant des mois.
Puis, avant même qu'elle n'est le temps de réaliser l'un de ses fantasmes, son buste se releva mécaniquement, et son corps rejeta tous les alcools qu'elle avait bu à peine six heures plus tôt.
It is 7'30am, and you're listening to…
La tâche verdâtre sur son drap la ramena à la réalité : elle était dans son lit, seule. Son réveil tentait l'alarmer depuis presque vingt minutes mais rien n'y faisait : on était Dimanche, elle embauchait bientôt, et elle était gravement en retard.
Bon sang, bon sang, bon sang !
« Idiote ! S'insulta-t-elle. »
En essayant de chasser les images incroyables de son rêve, elle prit son draps et l'emmena jusqu'à la salle de bain. Ses pieds trainaient, elle les soulevait à peine et après avoir passé les tissus sous l'eau, elle le laissa tremper dans le lavabo. Ses vêtements étaient en désordre dans le petit placard de leur vingt-deux mètre carré : elle en choisit au hasard et se rendit au travail après avoir tamponné son visage d'un peu de fond de teint.
Le chemin n'était pas très long, en à peine trois minutes, la jeune femme rejoignit le restaurant français dans lequel elle servait dix heures par semaines. Il était à quelques rues de chez elle, et par chance, il ne pleuvait pas aujourd'hui.
« Samuelle ? Qu'est-ce que tu fais ici ? Fut la première chose qu'Antoine, le second de salle, lui dit lorsqu'elle arriva.
- Comment ça ?
- On est le troisième week end ! C'est Juliet qui bosse aujourd'hui ! »
Et en effet, à peine cinq secondes plus tard, sa collègue fit son entrée dans le vestiaire. Putain, jura Samuelle. Elle embrassa rapidement ses collègues, et jeta un coup d'œil à la feuille d'horaires pour vérifier ses haires de la prochaine semaine. Elle lança un au revoir rapide, et pris le chemin du retour.
Ses jambes lourdes la portèrent jusqu'à son appartement au deuxième étage d'un petit immeuble sur Oxford Street, et elle s'effondra dans son lit, en espérant continuer le rêve qui, malgré elle, n'aurait jamais dû être interrompu.
*
« Sam ! Sam ! SAM ! Réveille-toi !”
Moran tambourinait à la porte depuis quelques minutes, et Samuelle tentait de ne pas y prêter attention. Mais le vibreur de son téléphone sur la table de nuit, les rayons du soleil et l'acharnement de Moran à vouloir détruite leur porte d'entrée l'avait réveillée : et il était impossible de l'ignorer maintenant.
Ses jambes lourdes la guidèrent automatiquement vers son dressing, où elle enfila un sweat en vitesse, puis elle ouvrit la porte à son amie.
« Je veux absolument TOUT savoir ! S'empressa Moran en allant s'installer sur une chaise.
- De quoi est-ce que tu parles ?
- Le canon d'hier soir ! Ne me dis pas que tu… C'est quoi cette odeur ?
- J'ai.. Je supporte mal la vodka.
- Alors là, je veux bien te croire ! Vas prendre une douche, je vais faire du café et après on ira manger un truc. »
Sans attendre, Samuelle se jeta sous la douche : elle avait un peu le tournis encore, mais l'eau chaude lui procurait un bien fou.
Le café lui retournait un peu l'estomac, mais ce qui la rendait plus vulnérable était la voix de Moran, qui ne cessait de parler –beaucoup trop fort- de la veille au soir.
« Mais c'était une occas' en hors Sam ! Pourquoi tu n'es pas allée…
- Et pour lui dire quoi ?
- Je n'en sais rien, mais tu n'y perds pas au change. »
Elle avait surement raison, se dit Samuelle, mais ce type n'était pas sa première préoccupation en ce moment.
Nous étions le 17 Mars. Et pour l'instant : aucun coups de fil, aucun message ni même d'email de la part de sa famille. Elle les avait quittés pile 10 mois et demi plus tôt, et père et mère avaient décidé de ne plus lui adresser un mot. Ils avaient arrêté les placements sur son compte en banque, jusqu'à même la retirer de tous leurs documents officiels et refusaient de lui renvoyer son courrier. Elle se rendit compte un mois après son départ qu'ils avaient résilié son forfait téléphonique aussi.
Le jour où elle était partie, elle ne leur avait laissé qu'un mot, écrit sur papier qu'elle avait collé sur le réfrigérateur. « Ne vous inquiétez pas. » Et comme leur orgueil était égal à leur fortune, ils avaient coupé les ponts. Sam ne s'en mordait pas les doigts, au contraire, elle était un peu déçue seulement.
En Juillet dernier, après l'obtention du bac, elle était partie. Après des semaines de préparations, de rendez-vous pour les documents officiels obtenus en urgence –et grâce au réseau familial- Samuelle s'était rendue à la gare Montparnasse, sans vraiment choisir une destination, elle était montée à bord d'un train qui partait pour l'aéroport. Sa valise ne l'encombrait pas, elle n'avait pas pris beaucoup d'affaires. Son passeport et un visa international suffisaient, où qu'elle veuille aller. Puis elle avait répété le schéma une fois rendue dans le terminal de Roissy, et sur un coup de tête, elle avait embarqué sa vie pour Toronto.
Au début, elle avait été morte de trouille : et si ce n'était pas la bonne décision ? Et si elle avait tort ? Si la vie ici n'était pas si affreuse après tout ?
Moran était dans l'avion, sur le siège à côté du sien : elle l'avait prise sous son aile, et ensembles elles s'étaient inscrites à l'université.
Elles ne s'étaient plus quittées depuis.
Moran venait d'une petite ville de l'Ohio, où son père avait emménagé lorsqu'elle était petite. Les voyages la lassaient, ses parents se déchiraient la garde de leurs trois filles et sa mère, partie rejoindre Paris après sept ans de mariage aux Etats Unis, passait peu de temps chez elles. La jeune fille avait décidé de quitter cette vie dès sa majorité. Elle était donc partie pour Toronto faire ses études, après un au revoir à ses deux petites sœurs dans la capitale française. Les deux amies s'étaient entendues dès leurs premiers échanges.
« Dan veut qu'on les rejoigne au Club d'ici une demie heure, tu viens ?
- Good ! Aide moi à faire le ménage, et après on décolle. »
Le Club, à l'angle de la 17ème et 6ème avenue au Nord de Chinatown, quartier où elles avaient rapidement élue domicile à leur arrivée – sur Oxford Street-, était à une petite vingtaine minute. En à peine une heure, le temps s'était terriblement rafraîchis : on comptait en moyenne -1°C au mois de Mars, mais les deux amies auraient parié sur quelques dizaines de degrés en moins. A son arrivée au Canada, Samuelle avait troqué ses shorts contre des jeans plus chauds, et ses vieilles converses, rangées au fond d'un placard, avaient été échangés contre une paire de botte d'hivers. Si elle avait un regret, l'air glacé de sa nouvelle vie en était le principal.
Leurs amis étaient tous installés, à leur table habituelle au fond du petit bar familial. Elles les rejoignirent, et les ragots, qui certainement avaient commencé bien avant leur arrivée, se multiplièrent.
« YOU SAW ALEX ? S'écria Gabriella.
- Au Jackson hier soir ! Sur la huitième ! dit Dan.
- Oui, et elle n'est même pas allée le voir ! Ajouta Moran.
- J'y crois pas ! Damn it ! S'extasia Gabriella. »
Paul fut le seul à ne pas réagir, et Samuelle le remercia avec sourire. Il était l'homme le plus discret qu'elle eut jamais rencontré. Originaire su sud de l'Asie, ses grands parents avaient émigrés à New York au début des années soixante-quinze, avant les grands conflits. Il étudiait dans la city depuis trois ans, et attaquait cette année un master en économie, tout comme Daniel, son meilleur ami et beaucoup, au plus grands regret de Samuelle, beaucoup plus expressif. Dan était grand, brun et ni trop beau, ni trop laid. Mais il était drôle, et toujours là pour se débarrasser des situations embarrassantes.
Gabriella, elle, était surement la fille la plus incroyable de leur petite bande : elle venait de Grèce, et ses parents avaient élus domicile à Toronto après avoir visité Genève, Shanghai, Athène, et Los Angeles. A l'aise avec son corps, sa forte personnalité et sa joie de vivre contagieuse, elle était à elle seule l'âme de cette bande d'amis à peine née.
Ils s'étaient tous rencontrés à l'université, près de la machine à café. Gabriella et les colocataires, toutes trois inscrites au département des langues étrangères, se rencontrèrent dans l'amphithéâtre, au jour de la rentrée.
Ils prirent tous l'habitude de sortir dans ce petit bar, où ils pouvaient s'amuser sans contraintes, et surtout hors du campus.
Respirer.
Samuelle en avait rêvé depuis ses seize ans, et à trois mois de son anniversaire, elle se satisfaisait enfin de son choix. Non pas qu'elle l'eut regretté depuis ces derniers mois, mais elle avait hésité, de nombreuses fois. Elle qui aimait la discrétion, la solitude et même l'exclusion ; elle s'était pourtant habituée à la présence de ses nouveaux amis. Et surtout, elle ne s'en lassait.
Respirer.
La seule chose qui semblait lui manquer fut Coline, dont elle n'avait eu de nouvelles depuis sa fugue qu'une seule fois. Et brièvement. « J'espère que tu trouveras ce que tu cherches, si tant est que tu en ai la moindre idée. Tu restes ma petite âme sœur à moi. Je t'adore. » furent les uniques mots que Samuelle lu de son amie d'enfance, lorsqu'elle osa enfin lui envoyer de ses nouvelles après trois semaines de silence. Coline ne lui avait répondu que ces quelques phrases, et Samuelle s'en était contenté.
Elle méritait ces écarts de sentiments, elle le savait.
Et même si certains aspects de son ancienne vie, parfois, lui manquait, elle ne regrettait rien.
C'était ce qu'elle se répétait tous les matins, et à chaque fois qu'elle avait un doute.
Et cela arrivait beaucoup plus souvent qu'elle ne l'aurait prévu.
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( ndla : les incohérences sont mon rayon., j'en en ai corrigé au maximum, ainsi que les fautes d'orthographes que j'ai pu remarquer. )