Chroniques d'une sortie de route volontaire-1
romualdmartin
Cette nuit c'était un bout de canapé rouge sang pour une nuit sans violence. C'est ben, la tête dans le bouillon qui me l'a proposé la veille autour du verre du milieu.
J'ai encore mon rodage de vie de famille, un truc pour chaque chose et chaque chose à sa place, des principes de postiers morts ou de grand-mère acariâtre. Ça s'est rapidement estompé, comme les bleus sur les genoux quand t'es mômes.
Chez lui tout est dessiné, chaque petit objet à la con, et croyez moi que y en a. De la hotte à vapeur de shit à la salière, tout a une forme particulière, même les couteaux sont harmonisés avec des mains d'enfants, ils pioncent juste entre les verres de cantine et la bouilloire Bauhaus, les couteaux pas les mômes. Il n'est pas aidé par son ex grognasse, mais c'est un bon daron. Elle, elle préfère jouer aux pigeons et venir lui chier sur l'épaule de temps en temps, quand il relève le nez.
Pour sa baraque en tous cas, c'est loin d'être le bordel, toute la vaisselle vis juste en mode bohème. Elle se promène dans l'appart aux murs blancs et stériles comme une chambre d'hôpital. C'est tout ce petit bordel qui fait sa vie. Et c'est tant mieux, car, putain qu'est-ce que c'est triste une piaule d'hôpital.
J'ai pioncé, toussé comme un tubard, faut que j'arrête la clope, on dirait une pompe à glaire quand je parle. Apres trois quatre quintes, j'ai bu mon thé, pas de café chez lui. Ça n'arrange pas le moral au réveil pour les accros comme moi. Bref, j'ai bu un thé, il a pris sa douche, on s'est installé 30s dans la peau d'un couple gay, mais sans se toucher la bite. Puis fallait que je trace, j'avais peut être un travail ou un café à prendre, ça allait dépendre du chemin, si j'avais envie de suivre le soleil ou pas.
Ouais J'avais perdu ma piaule du 11eme, réquisitionnée par un autre, on m'offrait encore un tour de la ronde à savoir si on peut m'héberger, l'incertitude ça fait gamberger. J'avais la caisse qui m'appelait de l'autre bout de paris pour que je vienne la farcir, mais pioncer sur une banquette arrière, ça me filait pas la gaule, un banc tiède m'attirait plus, malgré ce putain de vent réducteur de couilles.
Une fois le café passé en terrasse, à achever un bouquin du gros Charles, fallait que je pense à mon cul, au sens propre. Je me suis tapé un aller-retour dans mon ancienne vie, rien de nostalgique, c'était juste pour prendre une douche et changer de calbar, « sdf mais pas clodo » comme disait l'autre con, un ex collègue qui cache sa gêne et sa médiocrité dans des poncifs et des vannes de merde, surement pour se dédouaner d'être sot.
Hier j'ai vu la petite, fallait que je sois présentable, peut être un mauvais mec, mais faut rester propre, même en pleine houle. Comme ça si le banc a refroidi, tu seras plus simple à enterrer. Les gens s'en voudront moins de t avoir laissé tomber.
Si tu ne sens pas trop mauvais, y aura moins de larmes, on passera l'éponge plus vite pour virer tous tes fluides corporels. Faut rester éphémère sur du long terme, y a comme un truc dans le genre.