De Deïteus Mythica, le Mythe des Demi-Dieux
Dominique Capo
Le simiesque, futur Humain, resté sur les masses continentales, lui, accepte les choses telles qu'elles sont. Il traverse les climats et les périls avec fatalité. Moins conscient des dangers, il ne mesure pas les difficultés qui l'attendent. Il ne cherche pas à les surmonter.
Ce simiesque, en fait, ne dépasse pas 1, 25 mètre pour un poids d'une trentaine de kilos. Il garde une face verticale, des maxillaires proéminents, des canines relativement grandes, et des molaires et des prémolaires très développées. Sa capacité crânienne maximale est de 500 cm³, son volume cérébral très bas.
Malheureusement, consécutivement aux bouleversements cataclysmiques subis, la terre ne lui permet pas de se nourrir correctement sur place. Les fruits à cueillir et les larves à déterrer ne sont plus assez nombreux. Il n'y à bientôt plus assez à manger pour tout le monde. La disette, la famine s'installent. Il est obligé de se remettre en route. Vient donc l'Ère des colossales marches. Il se met à émigrer un peu au hasard.
Vagabond et conquérant, curieux et déterminé, il va de plus en plus loin à l'intérieur de contrées vierges de toute vie humaine. Il s'avance de lieu en lieu, au gré du climat, de la faune et de la flore. Parfois, il croise certains de ses congénères. Et, suivant les circonstances, il s'accouple avec ses femelles ou le combat. Lui aussi finit par se différencier de ses ancêtres. Dans un premier temps, ce simiesque se dirige en suivant le parcours des saisons. D'une savane se transformant au gré des paysages aux climats où alternent les violentes sécheresses et les grandes glaciations imprévisibles, il constate des différences entre la faune et la flore. Il croise d'innombrables animaux sauvages aux dents et aux griffes mortelles. Puis, un jour, il atteint ce qui sera des millions d'années plus tard les « Colonnes d'Hercule ».
Il les traverse à pieds par un chemin de plusieurs centaines de kilomètres de large. Il pénètre dans des régions encore plus hostiles. Il s'aventure plus avant, remonte assez facilement vers le Nord en y suivant les rhinocéros, les hippopotames et les stégodons. Il suit les migrations massives des équidés et des mammifères. Il s'implante dans des territoires recouverts d'immenses calottes gelées. Par vagues successives, ou au hasard des chasses, il occupe tous les regroupements continentaux de l'hémisphère Nord.
Parallèlement, ses propres transformations morphologiques s'accentuent. Il hérite de traits moins primitifs. Il grandit, forcit. Son cou s'épaissit. Sa vue s'aiguise, il se fait plus adroit. Son cerveau se développe de nouveau et occupe maintenant un volume de 800 cm³. Il acquiert la capacité de saisir des pierres ou d'autres matériaux avec ses mains. Il peut se servir de galets pour briser la carapace d'un fruit ou pour le lancer sur un animal. Il apprend à répéter le geste lorsque la bête est blessée, à se saisir d'une écorce quand celle-ci lui résiste. Pour se défendre contre les fauves, il improvise sans cesse, ce qui l'oblige à prendre des décisions aussi soudaines que vitales pour sa survie. Mais il ne se nourrit encore de petites proies et de végétaux divers. Il commence à habiter les grottes des montagnes qu'ils rencontrent. Malgré une mortalité galopante de ses nouveaux-nés, son taux de natalité s'intensifie. Ses filles engendrent maintenant dès leur douzième année.
En conséquence, en quelques centaines de milliers d'années, ce cueilleur devient peu à peu carnivore. Et en une succession de cercles concentriques de trente kilomètres de rayon, il s'avance vers les nouvelles contrées. Il occupe des surfaces de plus en plus considérables.
Jusqu'au jour où, les masses des glaciers forment de gigantesques barrières. Son avancée à un rythme accéléré coupent de ce fait certaines hordes du reste de ses congénères. Et ces dernières divergent bientôt de lui. Elles deviennent autonomes et font émerger une nouvelle Race.
Celle-ci est de taille plus élancée que la précédente. Elle mesure jusqu'à 1, 80 mètre de hauteur. En outre, elle est plus robuste et plus puissante qu'elle, même si ses traits sont toujours aussi primitifs. Ses orbites sont très saillantes. Son front et son menton sont fuyants. Sa tète commence à être bien proportionnée, tandis que son cerveau passe de 800 cm³ à 1300 cm³.
Cette Race devient rapidement beaucoup plus évoluée que sa sœur. Elle apprend facilement à user de la pierre pour se faciliter la vie. En percutant deux galets l'un contre l'autre, elle en tire des éclats ; et ces éclats lui fournissent le matériau nécessaire afin d'obtenir des outils tranchants. Certains d'entre eux servent d'ustensiles au quotidien, et permettent de fabriquer des armes – comme des haches ou des harpons -. D'autres sont utiles pour racler, creuser, écraser, extirper des racines, découper la viande ou la peau. Mais surtout, ils rendent possible la désarticulation des carcasses des grands herbivores.
Les modifications que ces techniques apportent, modifient radicalement le comportement de ce nouveau simiesque. Elles l'amènent à se socialiser davantage. Tous les actes de son existence s'en trouvent changés ; les rôles au sein de son groupe clanique aussi. Des ouvriers spécialisés dans l'art de la taille apparaissent. Chacun améliore ses méthodes afin de parvenir à de meilleures coupes des objets. Les outils se perfectionnent et se raffinent progressivement. Il a donc maintenant les moyens de survie indispensables pour s'éloigner des endroits qui l'ont vu naître. Les déserts, les sommets glacés, les lieux parcourus par des vents impitoyables et coupants ne lui font plus peur.
Poussé par la recherche de nourriture, mais aussi par cet esprit entreprenant qui le caractérise, il quitte les masses continentales où il est né. Il se dirige vers le pan de terre qui va un jour former le Continent d'Atlantyde.
Quand il arrive dans cette contrée qu'il ne connaît pas, il découvre un univers pratiquement inhabité par ses semblables. Il se met à remonter vers le cœur du Continent ; et, partout où il passe, les paysages sont ceux de steppes faiblement arborées. Parsemées de pins et d'essences odorantes, ces dernières laissent parfois apparaître des marécages ou de faibles pics montagneux. Il voit par ailleurs nombre de tigres à dents de sabre, de cerfs, d'ours, de hyènes, de lions, de léopards ou de panthères dans ces régions. Il se met à collecter et à exploiter de nombreux végétaux qui les parsèment pour agrémenter ses repas de manières diverses et variées.
Ses populations deviennent de ce fait de plus en plus nombreuses. Certaines d'entre elles émigrent donc vers l'Ouest du Continent ; tandis que d'autres se dirigent vers l'Est. Elles s'étendent jusqu'à ses frontières méridionale ; puis entrent finalement en contact les unes avec les autres ; tandis que les membres de la Race restés sur les masses continentales extérieures sont en train de s'éteindre du fait de nouveaux changements climatiques.