De Deiteus Mythica, le Mythe des Demi-Dieux, pages 168 à 171 / 1803

Dominique Capo

Histoire des Civilisations

Mésopotamie, IVème millénaire avant J.C. :


Située au cœur du Moyen Orient, à plus de 900 kilomètres à l'Est de la Méditerranée, dans une plaine monotone brûlée par le vent, cette région semble depuis toujours n'être qu'un éternel désert. C'est pourtant sur ce rude théâtre que se sont développés l'agriculture et le commerce, la médecine et l'astronomie, la littérature et la musique, le système de gouvernement et la religion au cours du millénaire précédent. Les antiques mésopotamiens sont bien ceux qui, parmi les premiers, font renaître la Civilisation de ses cendres.

Enserrée entre le Caucase, le Golfe Persique, les plateaux Iraniens et le désert Arabo-syrien, la Mésopotamie n'est qu'une large vallée, drainée par le Tigre et par l'Euphrate. Chargés de limon, ces deux fleuves ne cessent de remplir leur lit et coulent au-dessus de la plaine entre deux cordons d'alluvions.

Si cette vallée est extraordinairement fertile, seule la peine des hommes au cours des millénaires passés, la met en valeur. La crue est en effet très irrégulière et se situe au printemps. Tout au long de l'année, l'écoulement des eaux est difficile en basse Mésopotamie. Il faut donc construire tout un système de canaux pour amener l'eau des fleuves dans les champs en été et en automne ; mais aussi pour évacuer vers des réservoirs le trop-plein de la crue de printemps qui risque de noyer la végétation ; et enfin, en toute saison, pour éviter que l'eau d'irrigation ne stagne et ne dépose alors ses sels. Ce travail pénible renouvelé au cours des siècles permet toutefois au moins deux récoltes par an et des rendements élevés.

Les excédents de grains, de dattes et d'huile permettent alors de faire venir de la haute Mésopotamie et des montagnes les pierres dures, absentes de ces immenses plaines argileuses et marécageuses ; le bois et les minerais.

Vers 3900 avant J.C., les « Sémites » s'implantent désormais dans le Nord jusqu'aux environs de l'actuelle Bagdad. Ils sont appelés « Akkadiens », du nom de la partie septentrionale de la basse Mésopotamie : Akkad. Ceux d'Asie centrale, du Caucase et d'Arménie, eux, descendent le long du Tigre et de l'Euphrate pour occuper le sud du pays. Ce sont les « Sumériens ». Enfin, d'autres prennent pied dans la région en abordant par la mer. Venus du Sud de l'Egypte, ils s'établissent dans la région d'Assur. Ce sont les « Assyriens ».

Le pays est rapidement morcelé en une trentaine de Cités-Etats Assyriennes et Sumériennes dirigées par des souverains, vicaires du dieu de la cité, se battant continuellement les unes contre les autres. Leurs Prêtres sont les véritables maîtres de la population et de ses biens. Ils gèrent les possessions de la divinité. En outre, ils ont pour mission d'assurer la prospérité de leurs territoires. Car grâce aux extraordinaires richesses de l'agriculture et de l'artisanat, leur activité commerciale est en effet intense. Les fleuves transportent les lourdes cargaisons de bois et de pierres en direction du Golfe Persique et de la mer Arabique jusqu'à Oman et la vallée de l'Indus. Des caravanes traversent le désert de Syrie vers l'Est jusque dans les terres des tribus élamites et les cols de la chaîne de Zagros. Malgré tour, leur ambition est d'imposer leur suzeraineté aux cités avoisinantes, sinon à toutes celles du monde mésopotamien.

Or, c'est bientôt les ecclésiastiques de Sumer – affiliés à la dynastie royale de Kish et à ses souverains Emmerkar, Urbagas et Lugalbanda – qui étendent le plus leur influence au-delà de leur territoire d'origine. Ce sont également eux qui s'interrogent les premiers sur l'existence même d'une divinité supérieure qui aurait régné avec ses Fils, sur la Mésopotamie pendant 24 150 ans. Ceux-ci sont d'ailleurs convaincus que c'est elle qui a créée l'Humanité en la modelant avec de l'argile, après avoir retiré les eaux du Déluge. Ils la symbolisent de ce fait par une étoile de mer à huit branches – quatre rectilignes et quatre ondulées -. Et ils font édifier deux cités religieuses pour la vénérer à la périphérie du pays de Sumer ; en nommant l'une Eridu – représentée par le chiffre 60 ; et l'autre Uruk, désignée par le nombre 50.

Ces deux nouvelles métropoles deviennent rapidement des centres administratifs importants. Deux Temples – un « Temple Rouge » et un « Temple Gris » à étages à l'intérieur desquels seuls les pontifes peuvent pénétrer – cachent les archives de chaque ville. Ils les inscrivent sur des tablettes d'argile décomposées en cinq cases ; la case centrale – qui indique le chiffre 1 – exprimant la présence du Dieu Créateur au cœur du Grand Tout. Ils les rangent ensuite au dernier étage de leur lieu de culte. Mais ils construisent également d'autres Sanctuaires ayant une destination sacramentale ; des endroits où beaucoup d'autres Dieux sont régulièrement honorés.

Parmi ces Divinités s'en discernent un certain nombre particulièrement vénérés : Adad, le Maitre des Eaux et de l'Orage – primordial aux yeux des habitants de la contrée – incarné par le nombre 10 ; Zuen, la déesse de la Lune et de la Connaissance, qui est représentée par le chiffre 30 ; Sin, déifié par le nombre 30 ; la déesse Lionne Atlante montrée en train de soutenir des montagnes ; le dieu atmosphérique Illum ; le Seigneur du Ciel Ud ; le Grand Justicier Zimbi ; le Taureau d'Anu Alu ; le Démon de l'Ouragan Gallu ; ou le Démon du Feu Utukku.

Dès lors, les Sanctuaires acquièrent une grande importance au sein de la cité car ce ne sont pas seulement des lieux de culte, mais aussi son cœur polyvalent. Et enfin, c'est là que se trouvent les somptueuses tombes des monarques ; c'est là que se perpétuent des sacrifices humains afin d'honorer les Dieux et les Rois vivant dans l'Au-delà.

Parce que, pour les sumériens, il existe plusieurs Mondes cohabitant avec le leur : le Monde des Monstres, le Monde des Héros, etc. Ils les identifient comme des pays peuplés de Forces Surnaturelles et Magiques, les centres d'un Pouvoir Supérieur, Mystérieux et Terrifiant. Ils conçoivent autour d'eux nombre de Mythes et de Légendes ; tel celui de Zu, le Dragon qui déroba à Enki les Tablettes contenant les Lois de l'Univers. Ou un autre évoquant ces énigmatiques Géants à la tète noire, et dont la tète se tourne sans cesse vers l'Orient. Ou encore, celui expliquant comment les Initiateurs de la Civilisation sont descendus dans la plaine où logent les mortels afin de la conquérir et de la transformer en Paradis ; ou « Dilmon ».

Un de ces Mythes oral parle plus particulièrement d'Uan, cette créature amphibie qui a apporté les bienfaits de la Civilisation en Mésopotamie : « Uan vivait sous la mer ; il surgissait des eaux chaque matin pour civiliser et instruire l'Humanité. ».

Enfin, pour les sumériens, ces multiples Mondes coexistant avec celui des Hommes symbolisent la lutte des Dieux du Bien contre les Dieux du Mal. Ils illustrent d'ailleurs ce combat acharné par les éclipses qu'ils voient parfois dans le Ciel. Ils les présentent comme l'attaque des sept Démons Maskin – qui gouvernent les sept Sphères Sacrées et sont nés de la déesse Mani – contre les Seigneurs de la Connaissance. Et ils ont conscience que ces affrontements reviennent périodiquement. Pour eux, cette lutte entre les deux concepts est en effet éternelle. Elle se situe au-dessus de leur destinée ; et les mainteneurs de la bonne marche du Monde doivent sans cesse la défendre contre les poussées dévastatrices des Hordes du Chaos.


Vers 3750 avant J.C., un fléau s'abat soudain sur l'ensemble de la Mésopotamie : des tremblements de terre et plusieurs raz de marées ravagent son territoire, et entraînent de nombreuses destructions.


Vers 3600 avant J.C., l'Anatolie établit des relations commerciales durables avec la Syrie et la Mésopotamie sumérienne. Grâce à la richesse minière de ses plateaux – cuivre, or et argent -, de nouvelles agglomérations – comme Troie – sont fondées. Et celles-ci vivent alors dans un relatif équilibre économique et politique.

Malheureusement, leur tranquillité ne dure que quelques décennies. En effet, moins d'une cinquantaine d'années plus tard, elles sont saccagées par des hordes sauvages qui ne laissent que ruines et cendres sur leur passage.


Vers 3500 avant J.C., un dénommé Gilgamesh règne sur les cités de Kish et d'Unug. On y vénère Dumuzi, Danaos, ainsi que le protecteur des villes : le dieu-serpent maître des Ouragans, Gish-Zi-Des. C'est au cours du règne de Gilgamesh, rapportent les Prêtres, que le souverain détruit le Temple de certaines de ces divinités, qu'il va combattre le Démon de la Montagne Khombaba, qu'il abat le Monstre du Vent – qui est la dernière incarnation du dieu de l'Ouragan – et qu'il coiffe la couronne de ce dernier.


A suivre...

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