De Deiteus Mythica, le Mythe des Demi-Dieux, pages 181 à 183 / 1803
Dominique Capo
Quinze ans plus tard, le Pharaon finit par décéder. Après la mort de Thoÿt, Ménès et Narmër enterrent leur Père dans les cryptes du Temple de la cité d'Onou. Avec l'aide d'Erkätêp et de ses Frères Initiés, ils le momifient et le purifient. Ils entourent son sarcophage de rites destinés à le protéger de profanations éventuelles.
Grâce à un certain nombre de glyphes, ils enchaînent aux salles alentours des Gardyens terrifiants. Ils referment les ouvertures menant à l'intérieur des souterrains en y rattachant des Ombres issues des Abysses les plus profondes. Puis, ils laissent le miracle de la Magye des Dieux Anciens s'accomplir. Ils savent que le Seuil Obscur va s'ouvrir et que l'Ame Immortelle de Thoÿt, assistée de son armure Puissante, va sous peu entamer son Long Voyage. Elle va parcourir l'Autre Monde et affronter les Démons et les pièges qui s'y cachent. Puis, victorieuse, elle va rejoindre les Dieux et les Demi-Dieux qui l'ont précédé de ce coté-ci de la Réalité.
Peu après la mort de Thoÿt – vers 3300 avant J.C. -, Narmër entreprend de bâtir sa capitale au centre de la province dont il a la charge ; il la nomme Thèbes. Ménès, de son coté, érige la sienne – Memphis, « le Mur Blanc » – sur le Delta du Nil, puis s'y établit.
Bientôt, Erkätêp est considéré comme un des derniers véritables « Serviteurs de Thoÿt ». Comme son Frère Ektäris ou d'autres de la cité d'Onou, il passe une partie de sa longue existence à contribuer à la reconstruction du pays aux cotés de Ménès, son Pharaon. Par contre, contrairement aux autres, il devient aussi, rapidement, son Emissaire personnel auprès des différentes castes de prêtres se consacrant à perpétuer la gloire des Anciens Dieux.
Un jour, pourtant, un grand nombre d'ecclésiastiques se plaignent à Pharaon qu'Erkätêp, Ektäris et leurs Compagnons soient toujours les seuls à détenir les Secrets et les Mystères issus des Ages précédents. Ils s'en indignent, refusent de leur obéir aveuglément plus longtemps si la situation ne change pas, et finissent par contester leur autorité Spirituelle et Matérielle. Ils menacent même de ne plus laisser entrer les fidèles – quels qu'ils soient – à l'intérieur de leurs Temples, si ils ne sont pas instruits par Erkätêp et les siens de leurs Connaissances Ancestrales. Ils s'exécutent bientôt.
Evidemment, aussitôt, le peuple de Memphis se met à gronder de colère. La tension monte entre les sujets de Ménès et le roi. Certains Mages mécontents de la popularité d'Erkätêp auprès du roi, profitent de l'occasion pour ranimer de vieilles querelles.
Alors, celui-ci est obligé de céder si il ne veut pas être emporté dans la tourmente d'une révolution de palais qu'exploiteraient les amis de Narmër. Il ordonne donc à Erkätêp, à Ektäris et aux autres Mages proches de son trône, d'instruire les prêtres des Savoirs que Thoÿt et ses Frères leur ont transmis avant de s'éteindre. Contraints et forcés, inquiets de l'utilisation que ces derniers vont bien pouvoir en faire, les Mages s'exécutent ; bien que les recommandations de leurs Maîtres les hantent encore à propos des dangers qu'ils recèlent.
Erkätêp, de son coté, s'emploie à Initier des clercs consacrés à Osyrith aux Mystères auxquels il a eu accès dans le passé. Il leur Enseigne les quelques Mots Divins dont il se souvient toujours parce qu'ils sont encore à peu près efficaces au cours de cet Age. Il leur explique leur fonctionnement, ainsi que les lieux spécifiques où il se rappelle les avoir déjà utilisés ; c'est à dire sur les rares sites de Nœuds Telluriques Egyptiens assez vivaces pour user aujourd'hui encore de cette Magye issue du Verbe Initial.
Il leur montre également les Symboles cachés dans les étoiles et au cœur de la terre. Il leur décrit le moyen d'interpréter eux mêmes les manifestations les plus étranges de la Nature qui les entoure. Il leur annonce aussi que ce sont là les Caractères d'une Ecriture et d'un Langage très anciens, que les Dieux de jadis utilisaient pour entrer en relation avec d'autres Réalités, qu'ils manipulaient pour pouvoir voyager à l'intérieur d'autres espaces de Conscience.
Erkätêp retourne dans le tombeau de Thoÿt, Grâce à ses Connaissances et à ses Pouvoirs, il réussit tant bien que mal à repousser les Ombres et les Gardyens censés protéger les lieux. Erkätêp sait pourtant que le temps lui est compté. Sa puissance, seule, ne peut les bannir des salles et des souterrains que momentanément.
Erkätêp profite donc de cette période de répit pour étudier attentivement les textes anciens, tels que le Livre des Morts, qui sont inscrits sur les parois de la tombe. Il découvre que plusieurs font référence à une cité mystérieuse « aux Mille Piliers », nommée Yrëm. Ceux-ci indiquent son itinéraire et les dangers mortels encourus par quiconque oserait les braver. Il discerne aussi plusieurs phrases énigmatiques concernant des « Fidèles d'Osyrith endormis sous la terre ».
Erkätêp entame un long voyage : il parcours tout d'abord le désert marquant la frontière Sud du pays d'Egypte. Il les dépasse, s'enfonce à l'intérieur de la steppe stérile. Il y erre pendant plusieurs semaines. Il s'y perd un certain nombre de fois. Puis, un jour, une tempête de sable surgie de nulle part se lève ; il est pris dedans. Il a juste le temps de se réfugier derrière un rocher, et attend près d'une semaine que celle-ci se calme.
Finalement, elle disparaît aussi mystérieusement qu'elle est apparue ; tandis qu'il se retrouve inexplicablement au pied des Pics de la Lune. Devant lui, se distinguent alors quelques ruines à moitié ensevelies d'une ville antique. Erkätêp est persuadé qu'il s'agit des vestiges d'Yrëm, la Cité aux Mille Piliers. Il a donc un instant d'hésitation. De la sueur lui dégouline du front tellement la frayeur et l'impatience le submergent. Puis, au bout de quelques instants, il s'y engage. Il commence à parcourir ses rues dévastées, ses bâtiments délabrés, en se demandant ce qu'il va bien pouvoir y découvrir
En quittant Yrëm, la Cité aux Mille Piliers, Erkätêp est confiant : il connaît la route qu'il doit prendre pour atteindre le lieu où sont cachés tous les Secrets du Monde d'Avant. Il se dirige vers l'Est car il faut qu'il pénètre tout d'abord dans le désert de Gobi ; puis, dans un deuxième temps, en Inde.
Erkätêp ayant subitement disparu de Memphis, ses Initiés du Temple d'Osyrith à Abydos, le cherchent dans le Sanctuaire de Thoÿt, puis dans des lieux sacrés de la capitale. Ils ne le retrouvent pas ; ils sont à ce point inquiet que quelques uns d'entre eux se rendent même dans des cités alentours pour se renseigner auprès d'autres Mages qu'il rencontre fréquemment au cours d'assemblées nocturnes et mystérieuses. Mais ceux-ci n'en savent pas plus qu'eux : ils ne sont pas entrés en contact avec Erkätêp depuis de longues semaines, voire depuis des mois. Plusieurs de ces Mages – dont Ektäris, son propre Frère - se montrent d'ailleurs intrigués de cette absence soudaine. Mais ils ne veulent pas en dire davantage à des étrangers à leur Cercle.
Les Initiés du Temple d'Osyrith reprennent donc leur route. Ils s'enfoncent de plus en plus loin au sud du royaume de Ménès, s'arrêtant dans chaque ville ou chaque bourg qu'ils croisent sur leur chemin. Ils interrogent tous ceux qui leur semblent susceptibles de détenir une information pouvant les aider dans leur recherche. Et, en premier lieu, ils visitent chaque Sanctuaire d'Osyrith ou de Thoÿt. Mais, tous, ecclésiastiques comme simples paysans, ne savent pas qui est cet Erkätêp ; ou, quand ils le connaissent, ne l'ont pas vu depuis longtemps.
Finalement, le groupe d'Initiés décide de se séparer : la plupart de ceux-ci vont retourner dans la capitale pour agir en conséquence au sein de la hiérarchie religieuse, mais aussi pour prévenir le Pharaon de la fugue de l'un de ses Mages attitrés ; les autres vont poursuivre leurs investigations en direction des grandes cités méridionales de l'Egypte ; c'est à dire au sein du territoire contrôlé par Narmër et sa propre administration.
Hélas, bien vite, la rivalité se déchaîne entre les deux Fils de Thoÿt et une guerre sanglante se fait jour entre les Provinces qu'ils gouvernent. Pourtant, finalement, après de nombreuses batailles, Ménès sort vainqueur de l'affrontement. Il évince Narmër de sa fonction de Pharaon, l'assassine. Il désacralise la capitale que celui-ci a fait construire pendant son règne. Il réunit les deux territoires sous sa seule autorité, puis prend le titre de « Pharaon » pour lui seul. Portant le « pschent » - la double couronne rouge et blanche de l'Egypte du Nord et de l'Egypte du Sud - il établit ensuite l'unique capitale du royaume à Memphis et succède de ce fait au dernier des « Serviteurs des Fils d'Elaüs ».
Ses insignes royaux ainsi que la cité symbolisent la réunification. Une armée de fonctionnaires, véritable pyramide bureaucratique où circulent ordres et renseignements, veille à la bonne marche du pays. Tandis que des milliers de paysans s'activent du lever au coucher du soleil, des employés délégués par le roi, surveillent et notent tout. Le Pharaon est propriétaire en droit de tout ce qui existe dans son royaume. Depuis son palais de Memphis, il s'appuie en effet sur son « vizir », responsable du trésor, c'est à dire de l'économie ; ainsi que de la justice et de l'organisation des archives royales.
A suivre...