The one billion $ coaching app

moiamy

inspiré de la chaîne Youtube d'un célèbre Youtubeur, qui est au développement personnel ce que Facebook est à l'amitié, ce qui n'enlève rien à son utilité digitale.

Tout commence par une annonce. Le genre d'annonce qui commence par "Trop de personnes finissent leur vie avec des regrets, c'est pourquoi…"  s'ensuit un discours qui mélange industrie de la connaissance et pseudo théorie sociale, un discours qui est sensé convaincre que le système de coaching de la société est aussi attractif que regarder une série Netflix, et comme on dit chez moi, comparer des patates avec des tomates, ça augure mal du marché qui va suivre.

Arrive l'argumentaire de poids. La preuve que ça fonctionne : le million de followers qui gravitent autour de notre homme providentiel : David Laroche.

Il fait partie de ces jeunes trentenaires "successfull" qui ont prit le train Youtube à la bonne station, et qui depuis qu'ils ont gagné avec mérite ce ticket en première classe, ils surfent sur le sentiment d'être devenu de facto une marque de référence.

Comment lui donner tord ? Il aurait pu aussi bien devenir comique ou animer une chaîne de poker.

C'est une version miniature de Tony Robbins. Vous n'avez pas encore vu "I am not your guru" sur Netflix ? Regardez, ça va vous faire du bien pendant quelques heures. Il a un programme qui s'appelle "rendez-vous avec le destin". Cinq mille dollars pour quatre jours. Ou quatre mille dollars pour cinq jours. Bon je viens de vérifier, c'est six jours. Une salle remplie, peut être deux cent personnes. Et comme dirait le maître absolu de la statistiques, Didier Raoult : que deviennent tous ces gens dans un an ?

Mais revenons à David junior Robbins, qui essaye de faire pareil, en version française.

Le principe reste assez simple : motiver les autres en leur répétant qu'ils peuvent y arriver, qu'ils doivent écouter leur rêve de petit enfant, qu'il faut tenir bon. Continuer et continuer. Tomber et se relever. Qu'un bébé chute des centaines de fois avant de commencer à marcher.

J'imagine les cyniques :

Et la première fois que ton sexe était face à un vagin, il t'a fallu combien d'essais pour y arriver ?

Mais David est au delà des métaphores faciles car il pense que le mérite vient avec le labeur. Il n'est donc pas un héritier du système, ou alors pour le coup son storytelling est vraiment cynique.

Donc il faut persévérer. Comme le bébé. Parce que ton rêve de petit enfant, c'est ce qu'il y a de plus important. Si j'étais taquin, je ramènerai Saint Paul et sa lettre aux Corinthiens. "Quand j'étais petit enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant. Maintenant que je suis un homme, j'ai dépassé ce qui était propre à l'enfant". Mais bon, les réseaux sociaux ont été fabriqué par des adulescents qui avaient quatorze ans d'âge mental en termes de capacité à nouer des relations sociales, donc soyons tous des enfants et vivons tous notre rêve d'enfant.

Et le dire ne suffit pas, il faut être moderne, ajouter un drone qui filme notre coach dans le désert accompagné d'une musique à la Rocky, puis que le guerrier puisse se reposer près d'un feu de camp, et le miracle opère. Enfin, il doit fonctionner pour quelques uns, sinon à quoi toute cette communication servirait ? Tant mieux et tant pis si les coachs Youtube sont condamnés à répéter le même truc sous des formats différents, Sisyphe n'a pas le copyright du mouvement perpétuel.

La société s'appelle Paradox Group. De toute évidence c'est une culture d'entreprise qui ne recrute que des A players. On veut bien des clients à qui on va apprendre à gagner, mais on n'en veut pas chez nous, d'où le Paradox sans doute.

Les A players, ça me fait penser aux mâles Alpha et à cette scène avec Tom Cruise dans le film Magnolia qui interprète un coach devant une assemblée d'hommes blancs déclassés et probablement en difficulté relationnelle quand il s'agit d'aborder l'autre sexe. Tom ouvre la scène avec "Respect the Cock ! And tame the cunt" (Pour les ignares, "to tame" ça veut dire "Apprivoiser"). Tu ressens presque la vibration dans ta colonne vertébrale, alors qu'avec David... ben il faut ajouter la musique... ou bien je ne suis pas le bon client et là réside le secret du coaching. Qu'il faut juste y croire. Qu'on soit gagnant ou perdant, naïf ou cynique, il existe forcément quelque part dans ce monde un David Laroche qui va te motiver avec ses mots.

Où est le mien ? Comment puis-je le trouver dans ce désert digital ? Voila l'app miracle qu'il faut créer : The one billion $ coaching app.


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