Dieu et le Big Bang

Dominique Capo

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Encore une fois, je suis sur le point de m'attaquer à un sujet éminemment complexe et extrêmement polémique. Encore une fois, certains ou certaines vont estimer que mon texte est trop long, trop lourd, trop rébarbatif. Qu'il ne s'agit pas d'un thème – comme les quelques autres du même genre auxquels j'ai réfléchi – qui est publiable sur Facebook. Certains me souligneront que les réseaux sociaux ne conviennent pas à ce style de texte. Il est vrai que ceux-ci ne partagent que de l'instantané. Tout y est vite vu, vite lu, vite écrit ; avant de disparaître dans les limbes de l'Internet, et d'y être oublié.

Je ne suis pas d'accord. Internet, ainsi que Facebook ou les autres réseaux sociaux qui lui sont plus ou moins attachés, sont de formidables outils de communication et de transmission. Ce n'est pas parce qu'ils sont considérés par la grande majorité d'entre nous comme des accessoires de distraction, que ce n'est que leur unique but, leur seule fonction. Ils sont aussi un moyen – parmi d'autres – de propager des idées, des pensées, des réflexions. Ils permettent de répandre des hypothèses, des perspectives, des théories, des notions philosophiques ou scientifiques.

J'avoue que je suis régulièrement triste et malheureux lorsque je m'aperçois de la pauvreté de la très grande majorité des échanges qui y sont proposés : fragments de vie quotidienne dont on connaît par cœur la teneur ; lamentations sur ses déboires personnels, administratifs, de bureau ; photos ou vidéos reprises d'autres sites pour illustrer ce que l'on apprécie comme film ou comme musique ; poèmes évoquant ses désillusions amoureuses, ses problèmes existentiels. En ce qui concerne ces derniers d'ailleurs, comme j'en écris moi-même, et je ne m'aventurerais pas trop à les critiquer. Non, à leur propos, comme pour beaucoup d'autres textes, ce qui m'exaspère et m'attriste véritablement, c'est la faiblesse du vocabulaire employé. C'est la multitude de fautes de français, de conjugaison, de langage, qui les parsèment. Moi qui suis un passionné d'écriture, de lecture, et de phraséologie, moi qui, à chaque fois que je rédige un texte, jongle avec les mots, les verbes, afin de donner corps à ce que mon imaginaire déploie, je suis affligé de voir notre lexique à ce point malmené.

Non seulement ce que j'aperçois est, le plus souvent, d'une banalité affligeante, mais en plus, c'est mal écrit. Un des effets pervers de la précipitation avec laquelle on use et abuse des nombreuses fonctionnalités de ce média. A force de concentrer en un minimum d'espace et de temps les paragraphes que l'on y publie, on en arrive à se contenter du vite rédigé, du vite partagé, du vite lu, et du vite zappé. Les récits beaucoup plus travaillés, beaucoup plus recherchés linguistiquement, beaucoup plus développés au niveau des idées, des concepts, des pensées ou des réflexions élaborés, sont délibérément mis de coté. « Trop long, trop développé, pas assez de temps à y consacrer, etc. ». Combien de fois ai-je lu ce genre de commentaire au bas de chacun de mes exposés d'une demi-douzaine à une quinzaine de pages ? Des centaines de fois sans doute ! Comme si se plonger dans des thèmes tels que ceux que j'explore périodiquement en profondeur, était, sur Facebook notamment, une aberration ! Comme si en naviguant de page en page sur ce réseau social – sur chez l'un de ses concurrent – condamnait le cerveau de son utilisateur à se mettre sur pause. Comme si c'était rédhibitoire, comme si celui qui essayait d'y offrir autre chose que des platitudes ou de la médiocrité était une tare à proscrire ou à moquer.

Eh bien, je ne sais pas ce que vous en pensez ? Mais, personnellement, je ne me suis jamais soumis, je ne me soumets pas, et je ne me soumettrai jamais à ce diktat intolérable ; insupportable. Ce serait niveler la culture ou l'intelligence dont je suis doté vers le bas. Ce serait donner raison à ceux et celles qui se croient supérieurs aux « gens du commun », lorsqu'ils affirment que ces derniers ne sont que des moutons qu'ils se doivent de domestiquer : « Laissons-les végéter devant Secret Story ou les Douze coups de Midi, ils ne sont bons qu'à ça. Et nous, profitons de leur léthargie, de leurs insignifiantes préoccupations pour conduire les affaires du monde à notre convenance. Laissons-les à leur « métro-boulot-dodo » pour nous enrichir à leurs dépends, pour les rendre esclaves des produits que nous leur fourguons à grand renfort de publicité. ».

En ce qui me concerne, ce serait renoncer à ce que je suis, à ce que j'ai tout au fond de moi. Ce serait sacrifier ce pourquoi je me suis tant battu durant toutes ces années. Ce serait renier tout ce que j'ai appris, approfondi, étudié, tout ce à quoi j'ai réfléchi. Ce serait mutiler mon intellect, mon intégrité, ma curiosité, et mon imaginaire. Ce serait régresser pour laisser mes instincts les plus triviaux, les plus primitifs. Ce serait être enchaîné à l'idée que cette noblesse politique ou financière se fait de moi. Et en aucun cas, je ne leur procurerai ce plaisir ; en aucune façon, je ne leur ferait ce cadeau.

Alors, pour ceux et celles qui souhaitent me suivre au gré de mes circonvolutions philosophiques, historiques, théologiques ou existentielles, sachez que vous êtes les bienvenus. Quant aux autres, il est préférable que vous vous arrêtiez-là et que vous retourniez à ce pourquoi vous êtes sur Facebook.


Ce bref préambule terminé, je peux désormais entamer en toute sérénité l'essentiel de mon exposé.

Comme vous le savez peut-être si vous lisez plus ou moins régulièrement ce que je publie ici ou ailleurs, je suis doté d'une curiosité phénoménale. Je me passionne pour des sujets aussi variés que l'Histoire, la Philosophie, la Mythologie, l'Occultisme, l'Ésotérisme, l'Économie, la Géopolitique, la Religion, les Autoroutes de l'Information, l'Anthropologie, la Littérature, l'Astrophysique, j'en passe. Comme vous le savez peut-être aussi, j'ai déjà publié, ici et ailleurs, des textes traitant des nombreux Cultes Panthéistes de notre Civilisation ; qu'ils soient passés ou présents. Je me suis parfois concentré sur les trois grands Principes dogmatiques actuels que sont le Christianisme, l'Islam, et le Judaïsme. Il faut dire que je les ai étudiés durant des années au cours de mes recherches dans tous les domaines que j'ai cité précédemment. C'était à l'époque où je travaillais à la Bibliothèque Nationale, et où j'ai recueilli près de 2000 pages de notes concernant les origines de la Civilisation. C'était également l'époque où je me suis penché sur les liens existant entre ses racines les plus profondément enfouies et les Traditions, les Mythes, les Croyances qui ont germé dans l'esprit de ceux ayant vécu entre la fin de la Préhistoire et la naissance des premières Sociétés humaines organisées.

J'avoue que les informations que j'en ai tirées, que les enseignements et les connaissances que j'en ai extirpé, m'ont envoûté. Plus j'en apprenais, plus j'avais le désir de creuser les différentes facettes des thèmes que j'abordais. En plus, avec les millions d'ouvrages que je côtoyais quotidiennement, je n'avais qu'à tendre le bras pour avoir accès à des Savoirs que la plupart des gens n'avaient pas le droit de consulter.

En effet, la Bibliothèque Nationale a ceci de particulier que, seuls les Universitaires, les Chercheurs, les Étudiants, les Thésards, etc. ont le droit d'y pénétrer. Il est nécessaire d'avoir des raisons bien précises pour y commander un livre de ses travées, de ses salles, et de ses couloirs. Or, comme j'y étais employé, je n'étais pas soumis aux mêmes règles que tout un chacun. J'avais un emplacement qui m'était entièrement dédié. Une table et une chaise situés dans un renfoncement. Ils apparaissaient à proximité des rayonnages consacrés au référencement de l'ensemble des textes qui s'y trouvaient. Sur cette table, il y avait mes pages de notes manuscrites. Il y avait en permanence une demi-douzaine de manuscrits - soit empilés, soit ouverts à un chapitre en particulier. Il y avait une liste de centaines de traités que j'avais aperçu lors de mes déambulations dans les corridors et les halls de cette institution plusieurs fois centenaire. Y était inscrits les titres et les apostilles qui me permettraient de les y récupérer ultérieurement.

De fait, aujourd'hui, je ne me souviens pas exactement du nombre de livres abordant ces champs d'investigation que j'ai décortiqué. Au minimum plusieurs milliers, je pense. Mais, plus je m'instruisais à leur propos, plus j'avais l'impression que de nouvelles portes, que de nouvelles routes, s'offraient à mon âme en constante ébullition. Des notions, des idées, des réflexions, des pensées auxquelles je n'avais jamais songé auparavant, se sont imposés à moi comme une évidence. Il y a quelque chose de merveilleux, de grisant, d'être au contact de ces Connaissances. Elles ont exacerbé mon envie d'aller toujours plus loin sur le chemin de l'érudition. Leurs lumières, leurs sciences, leurs sagesses, ont remis en cause nombre de mes certitudes, de mes à-priori, de mes convictions. Elles m'ont donné l'occasion de regarder, d'appréhender le monde, les hommes et les femmes qui le peuplent, d'une autre façon. Elles m'ont surtout amené à m'interroger sur un certains nombre de notions.

Dans plusieurs de mes textes précédents, j'en ai brièvement abordé quelques uns. Parmi eux « Non, Dieu n'a pas voulu cela », « la Croisée des chemins », « Mille ans », « l'Occident et ses contradictions », « Au nom d'Allah », « Qu'est-ce-que la Vérité ? » ou « Migrants, ce que nous leur devons » ne sont que des exemples parmi d'autres. Vous les avez éventuellement lu ou survolés !

Vous remarquerez que la notion de « Dieu » et du « devenir de l'Humanité » revient régulièrement dans ces textes. Il est vrai que, au cours des années où j'ai mené mes investigations à la Bibliothèque Nationale, ce sont des thèmes que j'ai particulièrement exploré. Lorsque je me suis penché sur le lien entre l'émergence de la Civilisation – il y a de cela plus de 5000 ans – et les dogmes, les traditions, les mythes et les légendes qui se sont développés au même moment, j'ai constaté un certain nombre de faits récurrents. Et plus j'ai étudié ce syncrétisme, plus je me suis rendu compte que celui-ci était puissant, déterminant, central dans toutes les formes de Sociétés qui se sont succédé sur l'ensemble des continents de la planète. De la plus lointaine Antiquité – Ur et Ougarit – à nos jours – avènement du néo-capitalisme et du tout-technologique triomphants -, les religions y ont une place de choix. Même auparavant, dès la Préhistoire, à partir du moment à l'Hominidé a commencer à user de son intelligence pour s'interroger sur son environnement et sa place au sein d'un univers qui le dépassait, il s'est mis à supposer que des forces supérieures existaient. Ainsi, très tôt, il a dessiné des représentations de déités – animales, végétales ou élémentaires sur les parois des grottes qu'il habitait. Lorsqu'il y avait des composants de la Nature qui l'impressionnaient ou qu'il ne s'expliquait pas – vent, éclairs, orages, feu, tempêtes, etc. -, il les divinisait. Dieux de l'eau, de la terre, des forêts, des montagnes, etc. Un peu plus tard, quand il a eu conscience de l'inéluctabilité de la vie et de la mort, il leur a adjoint des entités surnaturelles qui les symbolisaient, des créatures plus ou moins animales qui les représentaient.

La notion de religion est née à cette époque-là. Puis, au fur et à mesure de ses observations du monde dans lequel il évoluait, il s'est mis à croire que ces dieux et ces déesses intervenaient d'une manière ou d'une autre. Il a commencé à tenter de communiquer avec eux. Il les a prié afin qu'ils interviennent en sa faveur – afin que les chasseurs reviennent avec un gibier abondant, afin de guérir au plus vite d'une vilaine blessure ou d'une maladie invalidante, afin que le voyage vers l'Au-delà se déroule dans les meilleures conditions possibles. Car, bien entendu, avec ses questionnements sur la mort, s'y sont greffé des avis sur ce qu'il y avait après celle-ci. Dès lors, de la Déesse-Mère aux balbutiements des religions polythéistes nées au Moyen-Orient dans la foulée des civilisations qui s'y sont modelées, ces dernières se sont complexifié, se sont enrichies, se sont diversifiées.

Pour autant, que ce soit au Moyen-Orient, en Extrême-Orient, en Occident, dans les Amériques, ou ailleurs, les mêmes thèmes centraux ont de tous temps été abordés : la mort, la résurrection, l'au-delà, d'où vient l'homme, où va-t-il, le but de son existence personnelle ou collective, que se dissimule-t-il derrière l'horizon, parmi les étoiles du ciel ? Autant d'interrogations que seuls les dieux et les déesses symbolisaient ou personnifiaient. Autant d'interrogations qu'ils pouvaient éventuellement énumérer. Autant d'interpellations que les mythes et les légendes qui dépeignaient les péripéties auxquelles ils étaient confrontés répondaient.

C'est fascinant de constater combien ces mythes et ces légendes se ressemblent malgré les distances parfois phénoménales qui séparent ces peuples entre eux. Que ce soit en Chine, en Mésopotamie, en Europe de l'Age du Bronze, ou en Amérique Précolombienne, ils abordent souvent les mêmes sujets : le Déluge Universel, l'Apocalypse, la venue d'un Sauveur destiné à expier les péchés d'une Humanité en perdition, l'Enfer, le Paradis, les Mystères de la Foi, la Vérité prônée par les Textes racontant la vie incroyable, les miracles, de la, ou des, divinité concernée. Du Popol Vuh au Ramayana, du Livre des Morts aux Tuatha Dé Dannan, à peu de choses près, ils évoquent les grands questionnements de l'Humanité de manière plus ou moins équivalente. En voici un que j'ai pioché dans mes notes issues des livres que j'ai jadis consultés à la Bibliothèque Nationale :


Pour les Chinois du début du 3ème millénaire avant J.C., la Création se matérialise ainsi : « A l'Aube des Ages, le Roi des Dieux organisa l'Univers comme ceci : avec sa tête, il fit les montagnes. En respirant fortement, il donna naissance aux vents et aux nuages. En émettant un grondement sonore, il engendra le tonnerre. Il métamorphosa son œil gauche en soleil, et son œil droit en lune. Il transforma sa barbe en étoiles, ses quatre membres et leurs extrémités en continents. Il donna vie aux strates de la Terre en utilisant ses veines et ses muscles. Il changea sa chair en sol, sa peau et ses cheveux en plantes et en arbres. Il convertit ses dents et ses os en minéraux, sa moelle en perles et en pierres précieuses. Il travestit sa sueur pour lui faire prendre la forme d'une pluie fine. Et il modela les parasites dont son corps était infesté afin de féconder la Race Humaine.

Progressivement, l'Ordre se substitua au Chaos Primordial. La Terre put accueillir l'espèce humaine. Les empereurs Divins, les empereurs Sages, et les cinq empereurs Mortels se succédèrent chacun 168 ans à sa tête. Ils lui enseignèrent les arts de la Survie, de la Chasse, de l'Agriculture, de la Construction, du Tissage, de la Couture, et de la Cuisson. Puis, ils définirent nombre d'institutions civiques telles que le Mariage. ».


Évidemment, ce fragment de Mythes n'est qu'un exemples parmi d'autres. Ils est issu d'une Civilisation éloignée dans l'espace et dans le temps.

Pourtant, au cours de mes investigations, de mes lectures, de mes prises de notes, j'ai progressivement été amené à vérifier à maintes reprises ces indubitables faits : Malgré leurs différences, leurs traditions, leurs modes de sociétés, partout sur la planète, les peuples qui ont élaborés leurs Mythes se sont tous posés les mêmes interrogations : « Comment le Monde ou l'Univers ont-ils été créés ? Y a t-il un Au-delà ? Le Déluge ? L'Apocalypse Quelle est la place ou la Destinée de l'Homme au sein de cette immensité ?.. Autant d'interrogations qui demeurent depuis l'Aube de l'Humanité, et à laquelle chacune a tenté de répondre à sa façon.

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