Éclats rouge verre
[Nero] Black Word
S'extirpant de sa torpeur à cause d'un mal de tête et d'un frisson glacial parsemant sa peau, elle se réveille étendue sur un plancher sale en remarquant ses poignets retenus par une chaîne dans son dos. Ainsi qu'un petit objet froid entre ses mains. Ses pieds sont nus, elle ne porte qu'un débardeur blanc et un jean un peu trop grand.
Etirant ses jambes ankylosées, redonnant de l'ordre à ses longs cheveux blonds d'un mouvement de tête, elle se retourne et se contorsionne pour se relever péniblement sur ses genoux. Levant ainsi les yeux sur un monde en forme d'hexagone, d'où elle se sent immédiatement écrasée.
Huit grands murs peints en rouge, l'encerclant sous la lumière d'une ampoule grésillante suspendue sept mètres plus haut, sept murs ornés de fenêtres soigneusement barricadées de planches, le dernier offrait l'accès à une porte en bois marron avec une poignée toute ronde.
Regardant autour d'elle avec espoir, elle ne trouve qu'un grand saladier de verre posé au sol, dans lequel attendaient des morceaux de verres accompagnés de quelques petites clés grises.
S'approchant de la porte qu'elle martèle immédiatement de coups de pied, appelant à l'aide les âmes charitables et insultant allègrement les responsables, elle tente de l'ouvrir de force en s'y jetant dessus et en y écrasant ses épaules, mais rien n'y fait. La surface de bois ne cède pas.
Continuant à crier à une hasardeuse oreille tendue, regardant son épaule égratignée, elle vocifère et déambule dans sa prison isolée jusqu'à finalement faire face au saladier. Tirant sur ses chaînes, serrant le cadenas entre ses doigts, elle observe son contenu. Plus particulièrement la dizaine de clés enterrées sous les éclats de verre.
Priant intérieurement pour qu'un miracle l'en empêche, avec toute la lenteur dont-elle est possible, serrant les dents en imaginant ce qui était sur le point d'arriver, elle se résigne. Elle se retourne et s'accroupie au dessus du saladier, avant de tendre les doigts vers son contenu en appréhendant le contact et la douleur qu'elle ne pourra pas éviter.
Se piquant une première fois, elle se retire en prenant une grande inspiration entre ses dents serrées. Jurant à plein poumon, fermant les yeux en espérant encore un miracle, elle retente une approche. Ses doigts tremblent, elle appréhende mais se prépare à une nouvelle coupure.
Au second contact, elle résiste à son envie de se retirer et écarte au mieux l'élément gênant, avant de s'engouffrer minutieusement dans la gueule du monstre, repoussant avec ses ongles les objets indésirables. Avant de commencer à se couper.
Sentant les bords coupant s'attaquant à sa chair, ses doigts progressant péniblement entre les éclats, elle ne voit rien mais ressent tout. Particulièrement le fait qu'elle avait du mal à différencier un morceau de verre d'une clé dans ce bal de douleur.
Respirant nerveusement, tâtonnant au mieux pour trouver un objet lui convenant, sentant son liquide couler sur sa peau, elle finit par attraper ce qui lui semble être une clé. S'écartant du saladier, elle tente et s'acharne à la faire entrer dans la petite serrure de sa captivité, mais rien n'y fait. Elle le lâche au sol, se retourne et constate que c'est bien une clé, mais ce n'est pas la bonne.
Elle se tourne à nouveau vers le saladier, soupire de chagrin, de colère, et retourne tenter sa chance. Sans attendre, ses mains sont assaillies alors qu'elle essaie d'écarter la voie vers son objectif.
Sa respiration et son rythme cardiaque s'accélèrent pendant qu'elle force sur ses paupières et sa mâchoire fermées. La douleur ronge ses articulations, elle avance et hurle une nouvelle fois. Ses doigts enfoncés entre les dents de son cauchemar, elle soulève ce qu'elle peut attraper et laisse tout cela tomber hors du saladier. Elle se retourne et voit dans les débris une petite clé.
Sans attendre, elle écarte le verre et l'attrape entre ses mains, excitée de se libérer de cet enfer. Mais encore une fois, rien n'y fait. Dans un long râle de colère, elle laisse tomber la clé et retourne forcer la porte.
La violentant comme une démente, y écrasant ses genoux, ses pieds, ses épaules et sa tête. A bout de souffle, elle hurle et soupire des "Non !" au monde. Respirant profondément et nerveusement, s'acharnant à se le refuser, elle laisse le temps filer avant de se résigner.
Elle se retourne, regardant les gouttelettes de sang sur son chemin, elle regarde le récipient transparent taché de rouge. Elle se retourne, s'accroupie et tend les doigts.
Commençant doucement, la douleur lui devient rapidement insupportable. Se retenant de trembler à cause de la colère, elle écarte avec plus de force les éclats, ces derniers ne manquent pas de la couper.
Dans sa lancée, elle s'acharne et finit par pousser un nouveau hurlement. Un long morceau de verre venait de s'enfoncer sous son ongle. Bondissant loin du réceptacle de son malheur, se collant au mur opposé, elle retire de ses doigts tremblant le dard l'ayant pénétré. Pleurant de douleur et de rage, elle jure à plein poumon et tabasse la surface de sa cage.
Un temps interminable plus tard, reprenant contrôle de ses esprits et de son corps, elle retourne au près du bol de verre ensanglanté. Ce dernier semblant l'accueillir avec un sourire acéré.
De nouveau retournée, elle reprend ses fouilles avec ses mains noyées de son hémoglobine. Oubliant la douleur, écartant au mieux les dents du monstre, tremblant sur ses genoux épuisés, elle fini après ce qui lui semble une éternité par trouver l'un des objets tant convoité.
Elle se relève et l'essai immédiatement de ses phalanges meurtries, mais pour souffrir d'un nouvelle échec. Persévérant malgré l'impossible, refusant de continuer, elle fini par relâcher la clé et hurler à s'en briser la voix. Frappant du pied, s'agitant comme une possédée, avant de s'écrouler sur les genoux, les yeux fermés, en pleur et fatiguée.
Une nouvelle fois résolue, elle se retourne vers son enfer, qu'elle découvre renversé. Promenant en suite son regard embué sur les clés enfin libérées, mais plongées dans un océan de verres brisés.
Malgré son chagrin et son appréhension, elle soupire d'un ton las et retourne à son ouvrage. Observant les clés les plus proches pour éviter de se couper. Elle tend son pied de tout son équilibre pour l'attraper.
Tentant de le traîner à l'aide de son gros orteil, de l'attraper entre ces derniers, son appui est chancelant et tremblant. La fatigue finit par l'emporter et sa force se dérobe, lui faisant poser pied.
La plante de son pied se fait lacérer alors qu'elle hurle de plus belle, mais elle se retire cette fois en emportant la clé avec elle.
S'écroulant plus loin au sol, tournant immédiatement le dos à son potentiel libérateur, elle le récupère entre ses extrémités demandant grâce et tente d'ouvrir la serrure, priant tous les divins du monde pour que sa chance soit la bonne.
La clé pénètre le cadenas et, dans le silence de son souffle retenu, elle entend le déclic de l'ouverture. Un sourire l'anime, accompagné d'un petit rictus, et ses chaînes finissent par s'abandonner au sol.
Elle étire ses bras, tournant ses poignets avec plaisir, puis regarde ses mains lacérées et coulant de rouge. Elle les serre dans son T-shirt de toutes ses forces restantes, espérant que la douleur s'estompe.
Emplie d'une nouvelle joie, elle se tourne en boitant d'un pied vers la porte, s'aide de ce qui lui reste de ses doigts blessés pour l'ouvrir, échoue en glissant dans son sang mais ne cesse de s'acharner, elle finit par ouvrir la porte de sa liberté.