En immersion dans une école de journalisme hongroise

Lénou

La micro-nouvelle encore plus horrible que la réalité.

– Bien, tout le monde s'arrête, on passe en classe pour le débriefing.
Les 22 élèves se dirigèrent, riant et se bousculant, vers le bâtiment de brique. Arrivés dans l'amphithéâtre, chacun prit sa place pendant que le professeur mettait en route la télé.
La première scène apparût à l'écran, filmée sous 3 angles simultanés. La classe avait été séparée en 2, moitié migrants, moitié police. 2 d'entre eux avaient pour tâche de couvrir l'événement comme de véritables journalistes. Le jeune homme restait impassible face à la caméra commentant la rafle policière qui se déroulait dans son dos.

La scène se clôturait sur le gros plan d'un « migrant » qui chutait aux pieds de l'apprenti journaliste.
Mr Rugas mit sur pause et se tourna vers son auditoire :
– Je n'ai rien à dire. L'expression du visage est neutre, l'angle choisi est le bon, la voix est posée. Tout ce qui passe à l'écran est maîtrisé c'est parfait !
Il appuya sur lecture et passa au binôme suivant. La scène était en tout point identique à la précédente. Le reportage allait s'achever quand chacun pu voir la caméraman se décaler et envoyer un énorme coup de pied dans le ventre d'un « migrant » tombé à terre.
Des rires fusèrent alors que l'une des caméras capturait le sourire sardonique qu'affichait le jeune visage encore poupin de l'étudiante.
– Silence ! Est-ce que tu te fous de nous ? C'est inadmissible ! Vous devez d'abord observer ! Aujourd'hui tout le monde filme. Tu t'es faite avoir par le téléphone d'un gamin de 10 ans. Et en plus on voit que tu es contente. C'est pourtant pas compliqué. Vous arrivez sur place. Vous repérez les collègues, les smartphones, les caméras amateurs. Vous identifiez l'angle mort et LÀ vous frappez, LÀ vous humiliez, LÀ vous insultez. Tout en restant professionnel évidemment. C'est comme ça qu'on garde son job en servant la patrie. Allez déguerpissez la semaine prochaine je vous apprends comment mettre le feu à un camp de roumain sans se faire prendre et en diffusant les images en temps réel.

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