Ephialtès, une vie pour le péché.

guegueette

Introduction.

"
Sept péchés mortels,
Sept manières de gagner,
Sept chemins saints pour l'Enfer,
Et ton voyage commence.

Sept pentes descendantes,
Sept espoir ensanglantés,
Sept sont tes feux brûlants,
Sept de tes désirs.* (Iron Maiden – Moonchild) "



Qui suis-je? Mon vrai prénom est inconnu au bataillon, du moins je ne me souviens pas de celui qu'on avait choisit pour ma naissance, et je ne veux pas le connaître. Je me fais donc appeler Ephialtès, comme l'a choisit la femme qui m'a élevé. Cette femme m'a tout appris pour survivre, à lire et à écrire, à dérober et à revendre, à mentir, à faire preuve de ruse, à faire des sales coups, à faire accuser des innocents à ma place, et à observer ce qui se passe autour de moi et j'en passe. Savez-vous que même lorsque un silence paisible repose, il y a toujours une perturbation à percevoir ou à créer? Cette femme était par ailleurs une inspiration et un puis de connaissance pour moi. Alors même qu'elle vivait quasiment recluse aux abord d'une grande forêt près du Saint Empire, je suis toujours rentré à la demeure quand il le fallait, je n'étais jamais bien loin, même si en grandissant ça finissait par m'emmerder quand j'allais à la brune.

Tout ce que je connais je lui dois à elle, et je l'ai appelé mère pour cette raison, bien que ce ne soit pas elle qui m'ait sortie de ces entrailles puantes. Par ailleurs les souffrances furent atroces pour l'ambulaye qui m'a extirpé de son entrecuisses, d'après ce que ma mère m'en a raconté, c'était un vrai bain de sang avant qu'elle ne lâche son dernier soupir. Oui, je suis l'ignoble fruit d'un péché de luxure. Le rejeton d'un nobliau ou d'un gueux, ou allez savoir, qui a trempé son vît entre les cuisses dégoulinantes et suintantes de crasse de ma génitrice, ou allez savoir où, une fois encore. Le miracle dans l'affaire, divin à ne pas en douter, est que le porteur de la semence féconde ne devait pas avoir une sale tronche, comme celle de ma génitrice je n'ai nul doutes, puisque je ne suis pas désagréable à la vue. Du haut de ma vingtaine, j'ai une bonne gueule qui le plus souvent semble inspirer confiance, d'ailleurs ça m'a toujours servit auprès de ses dames, damoiselles, donzelles, pucelles et jouvencelles pour obtenir leurs faveurs, entre autre de les soustraire de leurs bourses et de leurs souffles, afin de subvenir à mes besoins. Pratique, j'aime faire les choses d'une pierre de coups.

Mais si mes traits sont avenants et à la veuve et à l'orphelin et parfois même au damelot, après tout il faut prendre là où il y a à prendre et je ne m'en gêne pas, ce qui se cache derrière mon regard déterminé d'un bleu profond n'est que le reflet d'une sagesse des plus obscure, de ce que certains ignorants en disent. La sagesse de la lune. Oui, celle qui alors que je soulageait ma vessie à condamnée ma mère aux flammes. Qu'elle ironie, et pourtant cette nuit là, la tristesse m'avait envahie. Torches en mains et croix aux cou elle était arrivée, la mauvaise parole et ses sbires, pour me prendre mon inspiration et me l'enlever, non, me l'arracher. J'offrais aux étoiles la nudité de mon corps musclé dignement, et ma pisse acide à l'herbe du fond du jardin lorsque j'ai entendu des cris d'enragés. Il étaient trop nombreux, ces méprisables, avec leur fourches et leurs regards remplis de haine, de peur aussi. Si j'y allait moi aussi j'aurais frit, et j'aurai tout compris. Compris ce qu'il était que de ne pas suivre le troupeau et d'être la brebis égarée. Je savais que ce moment pouvait finir par arriver un jour, mais je ne l'espérait pas. Il n'y avait que la noirceur de la nuit pour m'envelopper, et je n'avais que mes yeux pour crier la profonde haine qui s'emparait de moi à la vue de cette scène désespérante d'injustice et de bêtise. Non je n'ai pas été lâche, j'ai été sensé, et vicieux malgré tout à rester là à observer au lieu de courir. Une qualité, bien sûr.

Poings serrés contre ma mâchoire et yeux fixés sur la lune, j'ai laissé s'écouler le long de mes joues de nouvel homme acerbe, des larmes de colère. La brume qui floutait mes pupilles fixait ma nouvelle muse qui brillait dans ce ciel si sombre. Oui, elle brillait bien plus que la demeure enflammée qui faisait office de bûcher improvisé. Quoi que, si je réussissait à omettre que ma mère crépitait à l'intérieur, ou plutôt ce qu'il devait rester de sa chair, j'aurai pu sentir mes larmes se sécher au contact de la chaleur provoquée par le feu. Ma mère avait ainsi été rendue à mon à présent unique muse. Nous nous retrouverons, mère, dans sa dignité, un jour. La corde de chair ensanglantée qui me reliait à ma génitrice m'aurait ôtée la vie si tu n'avais pas été à Antwerpen ce jour de quatre juin mille quatre cent quarante quatre. Que faisait-tu là? Mais je t'en remercie.

A présent je me retrouve avec ma solitude. Oui, je suis seul, et il n'y a plus que moi qui compte puisque je n'ai plus personne à qui préparer le bain et faire la lecture de ses nombreux ouvrages. Tu a été dure avec moi et bien que je n'ai jamais su pourquoi le jour de mon extraction tu m'a pris sous ton sein flétrit plutôt que de laisser pourrir sur place ce fruit - sûrement y avait-tu trouvé ton intérêt - tes mots n'ont pas toujours étés acides. "Un jour tu comprendra qu'il faut vivre." m'avait-tu dis, et alors qu'à pieds nus et valseuses ballantes je m'éloignais discrètement du feu de joie, j'en venais à comprendre qu'il allait me falloir appliquer tout ce que tu m'a enseigné et a essayé de m'apprendre pour faire honneur à ta parole, me montrer digne de toi et de la Créature Sans Nom que tu a toujours vénérée. Si tu avait été mes yeux, tu aurait vu que les fous t'ont réservé le même châtiment qu'aux autres inaudiendis, ceux qui incarnent à eux seuls tous les pêchés, mais évidemment je n'ai nul doute que sur le fait que tu l'ai senti quand tes draps se sont enflammés.

Je te créant, mère, que tu sera vengée de ton injuste déclin et que je vais vivre comme il se doit avant d'exulter dans les bras de ma muse. Tu sera là, et ton regard sera fier comme celui que tu a porté sur mon azur lorsque tes mains on coupé le souffle à ce prêcheur de paroles malsaines et qu'un sourire de satisfaction c'est étiré sur mes joues. Je devais être si beau que tu l'avait ressenti au delà du rideau du confessionnal. Non je n'ai pas été lâche à observer dans l'ombre l'action, j'ai été rusé, et c'est d'ailleurs ce qui m'a sauvé des flammes dans lesquelles tu à crié la douleur, mère, car la personne qui t'a vue et dénoncée ne m'a pas aperçue. Ainsi les fous ne se sont pas inquiétés de me chercher lorsque à eu lieu le barbecue cette nuit du vingt neuf janvier mille quatre cent soixante quatre. Tu m'a bien appris, le vice me sauve de bien de choses. Heureusement que je ne dors que d'un œil, auquel cas j'aurai macéré dans ma couche et ces imbéciles auraient étés capable de me faire acteur de leur spectacle, et je n'avais pas vraiment envie de grillade.

Et maintenant, alors que je laisse derrière moi le vide matériel, alors que je vais là où j'ai poussé mon premier cris pour me refaire, je n'ai que pour seul précieux bagage ce que tu m'a enseigné, je prend les sept princes pour frères et sœurs sur ma route. Me voilà donc accompagné de ma famille. L'avarice, la gourmandise, l'orgueil, la colère, l'envie, l'acédie et la luxure seront alors les guides que tu m'a toujours conduits à suivre. Et la Créature Sans Nom sera le père que je n'ai jamais eu.

Qui suis-je? Je suis Ephialtès, et je vais vivre.


Savez-vous qu'il faut toujours garder les yeux ouverts? Fermez-les et dormez donc, les miens le sont et veillent sur vous.


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