Exes Elbiaf - Chapitre 1 -

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Exes elbiaf

 Prologue :
   Imaginez un monde où les conventions sont totalement changé. Où la femme est devenue maitresse du monde et où l’homme est réduit à un simple jouet entre leurs mains habiles. Cent ans après la commémoration du vingt-et-unième siècle, le sexe faible a pris le pouvoir. La présidence des pays les plus puissants sont maintenant dirigé par des assemblées féministes qui réduisent l’homme en un esclave de première main. Parmi ceux-ci, Paul, un jeune garçon, qui un jour décide de se rebeller. 

Chapitre 1 : Nostalgie
     
   Un rayon de soleil pénétra dans la petite chambre où logeait le jeune Paul. Allongé sur une couchette au matelas pas plus épais qu'une simple feuille de papier, les ressorts du sommier lui entaillaient le dos, déjà meurtri par les coups qu'il recevait en travaillant dans les décharges de la ville. L'astre flamboyant embrassa la rue, colorant les trottoirs blancs immaculés d'une lumière orangée. De nombreuses personnes se rendant au travail fourmillaient dans les rues. Paul observait, avec difficulté, les allées qui grouillaient de monde à cet heure si matinale, à la recherche d'un visage masculin parmi cette assemblée en petit tailleur sombre. Sa vue n'était pas très bonne et il ne parvenait pas à distinguer correctement les traits de chaque individu. Il s'imaginait des figures austères, des yeux perdus dans des réflexions compliquées visant à améliorer ce monde qui approchait, selon le nouveau gouvernement, de la perfection. Il ferma la fenêtre, tira le rideau et s'assit sur le fauteuil vieilli par les années. Il réfléchissait souvent aux règles de cette société radicalement changée. Il était né homme, vivrait esclave et mourrait homme. Le jeune garçon n'avait pas connu la période que son grand-père lui contait, où hommes et femmes étaient égaux et où l'on pouvait goûter aux joies de la liberté. Lorsque le vieil homme se perdait dans ses pensées, un sourire béat venait illuminer son visage, effaçant les blessures que les années de dur labeur avaient gravées sur sa peau. Paul admirait cet homme qui l'avait élevé après le décès de son père, survenu quelques mois après sa naissance. Alors qu'il s'égarait dans les méandres de ses quelques souvenirs, une larme roula sur sa joue noircie.

A l'opposé de là, Cassandra s'observait dans son miroir. Elle était semblable à la plupart des femmes qui l'entouraient : des cheveux châtains ne brillant que rarement, des yeux d'un marron foncé qui ne pétillaient jamais. Elle décida d'habiller son regard d'une épaisse couche de mascara et appliqua un gloss transparent sur ses lèvres légèrement charnues. Elle soupira. Elle ne comprenait pas pourquoi elle se donnait autant de peine à vouloir être belle. Elle vivait dans un monde où elle ne côtoyait que des femmes. Elle regrettait souvent de n'avoir jamais pu rencontrer d'homme. Croiser cette créature des bas-fonds lui était impossible et elle savait qu'elle ne les fréquenterait que lorsque viendrait le temps, pour elle, d'enfanter. Sa vie était triste, trop monotone à son goût. En effet, la jeune fille rêvait de belles histoires d'amour, de cœur qui bat, de sentiments forts. Elle ne les connaissait que par le biais des romans qu'elle lisait en cachette de sa mère. Celle-ci lui avait formellement interdit d'accéder aux livres de « l'avant ». De nouveau, elle jeta un coup d'œil à son reflet. Satisfaite, elle quitta la salle de bain, attrapa son sac qui était étalé sur le sol et sortit de la maison. Elle se mêla à la foule et partit en direction du lycée Notre-Dame, situé dans le dix-huitième arrondissement.

Non loin de là, Claudia observait la scène qui se déroulait sous sa fenêtre. Le monde tournait rond. La ville était propre, agréable, personne n'échangeait de paroles violentes et la paix semblait régner dans les rues. Soulagée, elle rejoignit sa place et fit face à l'assemblée de femmes qui se tenait devant elle. Elles étaient huit, toutes les cheveux relevés, le visage très peu expressif. L'une d'entre elles se leva et frappa des mains sur la grande table en bois. Ses yeux étaient sévères et les traits de sa figure semblaient figés dans une éternelle lassitude. Elle était petite et mince, rien de très impressionnant, mais elle inspirait le respect par son allure. Elle s'éclaircit la gorge puis démarra son discours :
« Le bilan de ce mois-ci est inacceptable. Le nombre d'arrestations pour révolte a presque doublé en l'espace de seulement quelques semaines. Les hommes deviennent violents et tentent de reprendre l'autorité. Nous devons agir et vite, nous ne pouvons pas faire face à une révolution. Notre gouvernement étant basé sur la paix nous avons dissous les armées il y a de nombreuses années. De plus, aucun homme n'acceptera de combattre les individus de son sexe qui se sentent opprimés. Nous devons les empêcher de reprendre le pouvoir et cela par n'importe quel moyen. Les femmes du monde refuseront d'être de nouveau abaissées au rang de Sexe Faible. »
Elle acheva sa tirade et lança un regard à l'assemblée qui l'avait écoutée attentivement. D'un simple coup d'œil, elle invita ses collègues à donner leur avis sur la question. Une femme aux cheveux noirs et aux yeux couleur de jais prit la parole :
« Je pense que la non-violence n'est pas la solution. Nous devons leur faire comprendre qu'aucune révolte ne sera acceptée. Les hommes, les mâles, se comportent comme des animaux : ils essayent de récupérer leur territoire et n'hésiteront pas à employer la force. La meilleure solution est une répression sévère et exemplaire, coupant la chique à tous ceux qui voudraient suivre les opposants au régime. »
Quand l'oratrice eut fini d'exposer ses idées, tous les chignons acquiescèrent à sa proposition. Claudia avait, elle aussi, hoché de la tête mais elle restait sceptique. Fatiguée, elle congédia les membres du conseil et s'affala dans son fauteuil.

Paul était épuisé mais il devait se lever et rejoindre son lieu de travail. Il enfila son uniforme, un pantalon et une chemise bouffante d'un bleu électrique, intense et vulgaire. Il détestait ces vêtements. Il sortit de sa petite chambre et mit un pied dans le lugubre couloir de l'immeuble. La tapisserie s'effritait, dévoilant de longs pans de mur ternes et salis par les années. Au fond du corridor, sur une porte à la peinture blanche écaillée, se dressait un miroir en pied. Ainsi, il était forcé d'apercevoir son allure négligée avant de traverser la ville pour rejoindre la décharge. Lorsqu'il passa devant la glace, son reflet était éteint : comme les parois de l'immeuble, il n'était plus qu'un élément du décor. Ses cheveux étaient décolorés et de la même texture que la paille. Le fond de ses yeux aussi était blême, regardant vers un futur tracé et vide de sens, n'ayant pour seul but que la survie de son âme desséchée. Ce qu'il vit l'effraya. Il avait l'impression d'avoir décrépi avec les années, de n'être plus qu'un vieillard qui attendait que la mort vienne le chercher. Et puis, l'espace d'un instant, l'image changea. Les traits de son visage devinrent plus clairs, plus beaux. La jeunesse avait repris possession de son corps, il avait enfin vingt ans, et un sourire radieux naissait sur ses lèvres. Puis dans un soupir l'image s'évapora, ne laissant que la promesse futile d'un futur impossible et d'un présent irréel.

Les talons de Cassandra claquaient sur les pavés à la blancheur éclatante. Elle s'approchait rapidement de la bâtisse en grès rose qui avait pour rôle d'éduquer la nouvelle génération de femmes. Une petite bande de filles s'attardait devant les grilles, elles jacassaient sur la nouvelle paire de chaussures qui brillait dans les vitrines des grands magasins. Agacée par autant de superficialité, Cassandra passa son chemin et se rendit immédiatement devant sa salle de cours. Elle était seule, vu que toutes ses camarades profitaient des dernières chaleurs de l'été dans la grande cour dallée. Elle s'assit sur le carrelage froid, appuya sa tête sur le mur et se laissa glisser, les yeux fermés, dans un rêve éveillé, film en noir et blanc défilant derrière ses paupières ; elle voyait des filles et des garçons courir dans les couloirs pour rejoindre leur salle de classe. Un sourire furtif traversa le visage d'un jeune homme lorsqu'il croisa le regard doux et sensible de sa petite amie. Une étincelle passa et sembla, l'espace d'une seconde, effacer le monde qui les entourait. La sonnerie retentit et balaya les images qui avaient illuminé le sourire de Cassandra. Doucement les élèves rejoignaient leur salle de cours dans un bruissement de tissus. Elle se releva, effaça de son esprit l'instant précédent et pénétra dans la pièce où s'alignaient une quinzaine de table. Cassandra observa par la fenêtre et vit un camion qui, elle le savait, menait à la décharge. Elle oublia le fourgon, ainsi que ses passagers et retourna à son cours d'histoire.
Cassandra, Paul et Claudia pensèrent à la même chose exactement en même temps.
« - J'aimerais tellement que ce soit comme avant. »

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