Fable: Le Canard et la Cour

Anaël Petit

On eût dit le vilain petit canard, vêtu d’une chemise verte assortie d’une queue de pie, au milieu de la noblesse gloussant à loisir. Pauvre et sans le sou, il courait après les plus grosses dindes, poursuivant la palme d'or dans un festival de canes…

Attiré par une belle oie grasse qui cancanait au jeu de cartes, le vieux pigeon misa son crouton sur le tapis rouge…

Le roi tomba, mais sans dame ni valet, c’était un mauvais cygne… Le paon, en face, qui lui était un as, abattit sa suite et fit la roue devant ces dames.

Ainsi, aussi vert que son col, le colvert se fit plumer et – n’ayant guère plus que sa verve pour vertu – grimpa sur ses grands ergots, et lui piailla des noms d’oiseaux.

S’en suivit une prise de bec ! Et Le fier paon pédant, prospère et prétentieux, plaça son poing dans l’appendice du perdant, qui se plia en prenant ses parties, pantois, parmi la populace…

Ne pouvant souffrir cet affront, l’infortuné appela les poulets. Mais au milieu des cols blancs, les poulets font les autruches… La justice ne casse pas trois pattes à un canard. Ils brisèrent donc les deux du colvert  et s’enfuirent sans plus de manières en l’emportant dans leur tanière.

Si cette histoire en bouche un coin, elle lui avait cloué le bec ! Notre canard sacqué, résigné,  se dit qu’au lieu de caracoler à la queue de la haute, il aurait du rester basse cour.

Il se jura voler de ses propres ailes et que jamais plus, pour aucune volaille, il ne serait le dindon de la farce.

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