Formée (II)
la-musique-de-l-ame
[Jour 3] Je suis encore toute chamboulée des événements de la veille. Un besoin irrépressible de les revivre au soir m'avait poussée à me masturber longuement en pensant à elle, à nous, mais force était de constater que rien ne pouvait la remplacer. J'avais en revanche pris un certain plaisir à lécher mon sperme sur la faïence des toilettes, comme un acte de soumission dont elle serait fière et dont je serai peut-être récompensée. Aujourd'hui mes pensées sont plus que jamais tournées vers elle, mais elle est absente. Une autre employée la remplace et ne me laisse étonnamment pas indifférente. Blonde aux cheveux longs et soyeux, vêtue d'une robe noire courte surmontant des bottes en daim gris et une paire de bas d'un gris plus sombre, elle en impose non pas par sa taille mais par sa démarche, plus chaloupée, plus lourde. Ses pas francs font virevolter la partie inférieure de sa robe avec autant de légèreté que ses cheveux lorsqu'elle tourne la tête. Ne lui manque plus qu'un chapeau pour achever le parfait portrait d'une cowgirl. Sa voix porte et donne à ses rires un charme fou auquel j'imagine mal quiconque pouvoir résister, homme comme femme. Sa silhouette en sablier est différente, voluptueuse, débordante de féminité, et je me surprends à l'aimer tout autant. Mon expérience d'hier avait-elle fait naître bien davantage qu'une attirance envers une seule femme ? Elle m'avait donc imprégnée, ensorcelée au point que je développais maintenant un désir envers les femmes en général... Une journée de questionnement et de frustration intense néanmoins durant laquelle le délicieux spectacle qui m'est offert ne suffit pas à l'oublier, elle, maîtresse de mes pensées.
[Jour 4] La quatrième journée ressemble tristement à la précédente. Elle est absente, de nouveau. Je noie mon chagrin dans l'humeur toujours aussi enjouée de sa remplaçante, me perds dans ses intonations envoûtantes et élancées, sur ses courbes généreuses où j'imagine mes mains courir, puis s'attarder. Je pense à elles deux. Le plaisir des yeux et des oreilles se mêle rapidement à la privation des autres sens, un sentiment étrange, puissant, atroce. Les heures passent à une vitesse lente. A 18 heures le calvaire touche à sa fin. Un passage obligé par les toilettes achève de me broyer le cœur tant les souvenirs nés entre ces quatre murs sont encore présents, vivants. Jusqu'au dernier moment je crois mourir tant elle me manque, quand elle apparaît dans l'encadrement de la porte, enfin ! Un réflexe conditionné par l'avant-veille me pousse à reculer d'un pas pour éviter la bousculade tandis qu'elle appuie une épaule contre le chambranle, bras croisés. Elle est superbe, comme aux premiers jours. Je réprime difficilement l'envie de lui sauter au cou lorsque sa remplaçante la contourne et entre. Le franc tombe. Je comprends pourquoi elles sont là, toutes les deux. Un désir brûlant s'empare de moi, prête à être leur objet, leur jouet, l'appréhension de ce que je représente envolée. Mon unique porte de sortie se referme devant moi mais je ne ressens aucune peur, seulement de l'excitation.
La blonde me plaque sans attendre contre le mur, m'obligeant à m'asseoir sur le réservoir des toilettes, et m'embrasse sous les yeux satisfaits de mon initiatrice. Sous son regard inquisiteur ma curiosité réagit, se durcit et attire rapidement l'attention de ma geôlière qui sourit en m'embrassant encore et encore, ma tête enfermée entre ses deux avant-bras, ses mains dans mes cheveux. Elle achève de goûter mes lèvres comme un délice sucré, libère ma langue de la sienne quand mon jeans s'ouvre en un éclair et glisse le long de mes hanches avec mon sous-vêtement, tous deux tirés vers mes genoux avec force. Le froid du réservoir contre mes fesses accentue l'érection de mon pénis découvert et aussitôt pris d'assaut par une main avide dispensant des mouvements rudes. Enterrées la prévenance, la douceur et la sensualité du deuxième jour ! Cette fois ma partenaire le dévore, le maltraite sans répit, l'affole comme un piston animé par une bielle puissante et effrénée. Assise à califourchon sur l'abattant elle gobe mes testicules toutes entières et me livre sans gêne à Sa vue, à Son jugement. Écrasée par le poids de Sa présence et esclave des attentions impérieuses qui grondent entre mes cuisses, je ressens à quel point une femme peut soumettre un homme bien qu'elle soit à ses pieds. Ma tige se gorge d'un désir fou, implacable, mes yeux rivés sur Elle, mes autres sens tournés vers sa seconde. Mes contractions de plus en plus rapprochées trahissent une éjaculation imminente lorsqu'une main féroce vient serrer mon membre à sa base. J'exprime un hoquet de surprise tandis qu'une autre main me masse les bourses, le gland avalé par une bouche gourmande dissimulant une langue habile. Mon sperme s'accumule avec douleur dans le méat. Je voudrais que cette torture cesse mais croiser Son regard suffit à sceller les mots dans ma gorge. Soudain l'étreinte cède, l'anneau digital se brise et la prison buccale disparaît. La sève gicle, abondante, et vient se heurter par jets à mon visage maintenu de force au-dessus d'eux. Mon sentiment de libération est total et je me sens à peine souillée par les serpents d'argent qui glissent sur ma peau ou retombent tels des stalactites.
Ma tortionnaire se relève et m'attire à mon tour sur l'abattant. Elle soulève la partie inférieure de sa robe et dévoile une toison humide à nu sous un collant ouvert. Mon regard cherche le sien lorsqu'elle plaque mon visage contre son pubis, sommée physiquement de lécher le fruit défendu, d'offrir ce plaisir que je ne recevrai plus jamais. Je ne peux plus La voir mais entend Son ordre et m'exécute sans sourciller, avec zèle, comme si Elle-même se trouvait au bout de ma langue. Durant l'exercice, un préservatif se déroule lentement et avec soin sur ma vigueur, encouragée par le simple fait qu'Elle me touche, enfin ! J'expulse un soupir d'exaltation et redouble d'application, aux anges. Soudain la conque dont je commence à apprécier le goût m'échappe et s'empale sur mon pénis recouvert de latex. Sa propriétaire me chevauche comme un cheval au galop, une main fermement agrippée aux cheveux qui recouvrent ma nuque tels une crinière. Ce qu'elle dégage depuis hier n'est donc pas qu'une impression. La puissance de ses coups de reins n'a rien à envier aux coups de boutoir des hommes et je me sens de plus en plus l'âme d'un taureau en plein rodéo. La rondelle de mon anus posée sur la parcelle encore fraîche de l'abattant accroît mon érection et me donne envie qu'on y pénètre, qu'on le lèche. Le fourreau étroit de ma chevaucheuse accentue mes sensations au plus haut point, de même que la gamme de mouvements variés qu'elle compose. Je suis noyée dans un flot d'ivresse comme si je menais la danse alors que je ne suis plus qu'une poupée de chiffon, une bête de foire. La sève monte pour la deuxième fois. Ma maîtresse quitte enfin son poste d'observation et s'avance jusqu'à mon côté, le regard et le sourire emplis de fierté à mon égard. Elle me caresse la joue puis m'embrasse sans toucher le moindre serpent d'argent tandis que mon corps est toujours secoué de vagues provoquées par une danse de bassin endiablée. Sa délicatesse impromptue, non souillée, me submerge comme au second jour lorsque la blonde m'étrangle de son périnée. Quelques secondes plus tard, elle me libère et tout m'échappe : mon sperme qui jaillit dans un geyser aussi fourni que le précédent, mes battements cardiaques qui semblent s'arrêter dans une douleur intense, mon souffle qui quitte sa cage en oubliant d'y retourner. Des gémissements incontrôlés et tremblants viennent mourir dans l'ouverture de ma bouche rapidement muette. Le monde n'existe plus. Seuls les mots de ma maîtresse parviennent encore à mon oreille, un rendez-vous : "20 heures dans la salle de réunion, demain." Elle m'abandonne sur un regard incendiaire que je distingue à peine tant les larmes de béatitude me brouillent la vue. Ma cavalière se désengage à son tour, lèche une souillure à la commissure de mes lèvres et poursuit : "J'ai pris un pied d'enfer..." Mon ventre s'embrase instantanément. "Demain c'est ton tour !" Mon tour ? Je reste pantoise, presque effrayée pendant qu'elle s'éloigne dans un déhanché à se damner. Je viens moi aussi de jouir comme jamais et ne suis déjà plus qu'à demi consciente tant les deux orgasmes successifs ont submergé, ravagé, oblitéré mon corps et mon esprit. Demain je mourrai de plaisir, littéralement, car elles ne reculeront devant rien, c'est maintenant une certitude absolue tout comme le fait que j'irai me jeter tête baissée dans la gueule de ces louves, liée, soumise et volontaire.