Gilets jaunes : algarade et espérance d’une société vs galéjades et incohérence de « l’autorité ».
franky60
Quatre actes. Quatre actes d'une pièce intitulée le ras-le-bol. Certes des débordements malheureux que nos politiques, à force de prétéritions sournoises (« je n'ai pas dit que les gilets jaunes étaient des casseurs…. »), tentent de mettre sur le dos du mouvement. Mais la population n'est pas dupe. Ce mouvement sera salvateur car, même encore déstructuré, il est appelé à faire bouger profondément les lignes dans un pays que les gouvernements, depuis plusieurs décennies, se sont évertués à mépriser.
Une « vulgaire » taxe aura suffi à mettre le pays sens dessus dessous. Cela aurait du interpeller un exécutif longtemps autiste. Comment être aveugle au point de croire que son retrait allait suffire !? De croire qu'il s'agissait d'un épiphénomène !? L'échec de l'octroi de la prime ridicule pour le carburant, sans effet sur la grogne, aurait du être un signal. La « taxe carbone », c'est un symbole, une bannière. Et si le symbole meurt, le sentiment reste.
Et pour cause !
Les saupoudrages sont à mille lieues des attentes. Prime et charité. Autant de cautères sur jambe de bois. Les Français ne veulent pas l'aumône pour aller travailler, acheter des cadeaux, compléter le cartable des enfants, faire les courses, voire procréer. Ce qu'ils veulent, c'est l'autonomie : faire tout cela sur leurs seuls revenus. Et échapper ainsi à un Etat avide qui assujettit et soumet. Les primes, c'est autant d'épées de Damoclès. Dans un pays dont la devise commence par Liberté, c'est insupportable.
Un salaire décent, c'est d'abord un problème d'employeur. Avec des salaires trop couteux, on comprend pourquoi ils sont en berne. La piste de la réduction des charges a toujours été suivie….n'a jamais vraiment abouti. Ce n'est pourtant pas faute de nous rebattre les oreilles de réformes. De nouveaux modèles mathématiques sont à élaborer. Une simplification drastique du système, qui rend la fiche de paye illisible et les patrons migraineux, est à engager.
Les revendications sont jetées pêle-mêle mais le fil rouge est toujours le même : pouvoir d'achat. Qui a progressé selon nos gouvernants ! Pourtant l'INSEE et certaines banques démontrent que les hausses salariales sont balayées par les charges fiscales. Le sentiment de fin de mois difficile n'est pas une illusion. Nos dirigeants oublient le carburant, l'électricité, le gaz, les assurances… Des dépenses incompressibles, qui font du citoyen un marché captif otage de Bercy.
La taxe « carbone » illustre aussi toute l'incohérence de la politique pseudo-écologique. Comme contraindre la population à changer de voiture pour laquelle elle n'a pas le premier sous. En imposant des vignettes colorées qui n'éviteront pas l'expulsion des villes. En l'assommant d'un contrôle technique qu'une voiture neuve raterait. En le noyant sous des carburants surtaxés.
Le summum de la transition écolo automobile ? L'électrique !!! Quelle ineptie. Au-delà du bilan carbone de sa production et de l'élimination des batteries, se pose la question de son alimentation. Car ces solutions miracle s'accompagnent de l'autosatisfaction de la fermeture de Fessenheim, avant d'autres sites. Pourtant, le nucléaire est encore la meilleure énergie. Quand nous devrons « faire le plein » d'un parc automobile électrique, quelle manche tirerons-nous pour avoir du jus ? Voyons voire…l'Allemagne ! Avec une production d'électricité encore à plus de 50% fossile….Mais peut-être que d'ici là les architectes des bâtiments de France agréeront l'installation du photovoltaïque et d'huisseries modernes près des sites classées. Que les écolo accepteront des éoliennes prétendument laides, bruyantes et tueuses d'oiseaux, et des usines marée-motrices soit-disant néfastes aux poissons. En attendant, « l'écologie » meurt sur l'autel du tourisme, de l'esthétique, de l'ornithologie et des ressources halieutiques. Cohérence ?
Aussi, cette taxe carbone est révélatrice de l'oppression qui pèse sur les automobilistes, ces assassins-portefeuilles en puissance. La route est devenue un espace de racket : radars aux endroits juteux plus que dangereux, limitations de vitesse farfelues. Le tout automatisé : surtout pas d'intelligence humaine non-lucrative !
Deux problèmes pour illustrer le système.
Vous êtes à 80 km/h, et doublez une voiture roulant à 78. Les radars peuvent flasher les deux voies dans votre sens de circulation. Combien de temps pour votre manœuvre ? Quelle distance? Le dépassement est une manœuvre dangereuse à effectuer le plus rapidement possible, considérez-vous la limitation et les radars pertinents ? Maintenant vous effectuez le trajet Tours – Paris par Nationale, limitée à 80. Combien de fois la limitation change-t-elle? Combien de fois contrôlez-vous votre compteur ? Combien de temps durent ces contrôles ? Combien de temps quittez-vous la route des yeux ? Exit le permis ? Vous pourrez toujours rouler avec une voiture….sans permis !! Cohérence.
La question porte aussi sur l'utilisation des deniers publics. Les Français ne s'opposent pas à impôt, ils veulent savoir ce qui est fait de leur argent. Les prélèvements grimpent, les prestations et services baissent : remboursement de santé, état des routes, déserts médicaux et administratifs…Et encore des économies : éviction des fonctionnaires, gel des traitements, taxes. Et les autres leviers ? Combien coûtent 577 parlementaires, aréopages et avantages en nature ? Quel train de vie de l'Elysée, de Matignon, des élus locaux ? Démagogie? « Il n'y a pas de petit geste quand nous sommes 60 millions à le faire ». Surtout lorsque l'on donne des leçons…
Le président s'est exprimé. Un « je vous ai compris » et un mea culpa qui ne calmeront pas cette rancœur populaire légitime et profonde. Des annonces, mais gare aux contreparties supportées par les oubliés des offrandes. L'avenir dira si le discours était un baiser de Judas. Depuis 40 ans la « parole » prime sur le geste, parce que nos dirigeants ont travaillé Schopenhauer mais oublié de lire Hugo. Changer de paradigme n'est pas gagné.
Il faut un acte V. Mais différent. Les GJ doivent se structurer, se politiser. Il faut identifier des leaders, clarifier les revendications, proposer et évaluer des solutions. Il faut réduire les risques de débordement : service d'ordre, sit-in pour se désunir des casseurs. Il faut changer d'objectifs : commerçants, automobilistes, etc… ne sont l'« ennemi ». L'ennemi, c'est l'érosion du groupe que l'inertie économique induite peut entraîner. Il faut fédérer, attirer, convaincre les « passagers clandestins ». C'est la défense d'aujourd'hui. De demain. C'est surtout le moment de dire ça suffit.