Grand-mère

camilleg

Lettre à l'au-delà

Grand-mère.

Je ne sais pas pourquoi je t'écris ça car tu ne le verras jamais, pourtant je sens que j'en ai besoin.

Je ne t'ai connu vraiment pas longtemps, et pour être totalement honnête je n'ai aucun souvenir de toi. Mais, malgré ça, j'ai l'impression d'être rattachée à toi, d'un lien extrêmement puissant.

Je ne connais pas ton visage, ni ta voix. Cependant il m'arrive d'avoir des flashs dans ma tête, des espèces d'images totalement floues où je crois te deviner. C'est comme si mon inconscient se souvenait de toi.

Grand-mère, je ressens un mal être si profond en moi, depuis des années, et je n'arrive pas à savoir d'où il vient. Je n'arrive pas à en parler non plus, que ce soit à mes proches ou bien aux multiples psys que j'ai consulté.

Ce n'est pas un simple chagrin, c'est un sentiment de tristesse constant. Alors je fais tout pour l'oublier, ne pas l'affronter et penser à autre chose.

Mais grand-mère, quand l'obscurité se lève et que je suis seule face à moi-même, la noirceur qui réside dans mon âme se réveille. C'est sûrement pour cela que je fuis la solitude comme la peste. Lorsque je suis seule je réfléchis à tout : « Est-ce-que mes choix sont les bons ? », « Suis-je quelqu'un qui mérite d'être aimée ? », « Pourquoi je n'arrive pas à être heureuse alors que je ne manque de rien ? »,… Mon cerveau mouline et je ne parviens pas à l'arrêter. Alors j'écris, comme je le fais en ce moment même. Ça me permet de poser des mots sur les maux que je ressens. Et bordel, qu'est ce que ça fait du bien !

Grand-mère, je ne sais pas pourquoi mais j'ai l'impression que ton décès est la cause de mes souffrances. Comme si une part de moi n'avait jamais fait le deuil de cette femme dont je n'ai plus aucun souvenir. Comme si on m'avait arraché une personne qui aurait pu changer le cours de mon existence.

Tu sais, grand-mère, je suis en perpétuelle quête d'approbation des autres. Dans tout ce que je fais j'ai le besoin immense qu'on me dise que c'est bien, que j'ai quelque chose de spécial. Mais lorsque ce sont mes parents, mes amis ou encore mes chefs qui me le disent ce n'est pas suffisant. J'ai l'impression que je recherche l'approbation de quelqu'un qui n'est plus de ce monde ; ton approbation grand-mère.

Lorsque je pense à toi, je me sens toute petite. C'est comme si le temps s'était arrêté et que j'étais restée le bambin que tu as connu. Ce sont les seuls moments où j'arrive à pleurer toutes les larmes enfouies dans mon corps.

Grand-mère, il faut que j'avance, que je chasse dès aujourd'hui mes démons.

J'espère que, d'en haut, tu es fière de moi.

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