Insaisissable Muriel

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Des retrouvailles très particulières.

Elle a beau avoir noué des foulards de soie à mes poignets, je n’en suis pas moins entravé. Elle, c’est Muriel, la dernière collègue en date à rejoindre notre équipe de chefs de projets. Mais surtout, c’est un bout de mon passé miraculeusement ramené au présent...

Lorsqu’on nous a présenté l’un à l’autre au café de la boite, ça a aussitôt confirmé la folle idée qui m’avait traversée l’esprit en lisant ce nom sur un bureau, trois portes avant le mien. Même après vingts ans, il m’était impossible de ne pas reconnaître ce visage. Impossible d’oublier la toute première fille à qui j’avais fait l’amour.

Et me voilà allongé dans cette chambre anonyme, nu sur un lit d’hôtel, les yeux bandés, les bras en croix, les mains liées, attendant que Muriel sorte de la douche. Elle m’a d’abord aveuglé avec un masque de sommeil, le genre distribué dans les avions, puis, le souffle court et haché, elle m’a déshabillé. Enfin, elle m’a enjoint de m’étendre au centre du lit et d’écarter les bras, ramenés avec douceur contre les montants métalliques auxquels elle m’a ligoté.

Le soir de notre rencontre, je l’avais invitée à prendre un verre dans un bar à vin non loin du boulot. Muriel avait hésité, avant de répondre « Chiche ! ». Pendant un moment, nous avions échangé des banalités devant nos verres de pinot, intimidés, avant de retracer nos parcours respectifs durant les deux décennies où nos vies avaient bifurquées. Tout en l’écoutant, je détaillais ce qui avait changé en elle. Un soupçon de pattes d’oie, qui fronçait son regard vert où des paillettes d’or pétillaient toujours. Quelques fils d’argent dans sa chevelure sombre. Mais surtout cet air affirmé, qui la rendait fort différente de la discrète étudiante de mes souvenirs.

La porte s’ouvre, le lit grince légèrement du côté où elle s’assoit. Je me sens fébrile. Après toutes les conquêtes qui ont glissé dans ma vie de célibataire épanoui, c’est à mon tour d’être la proie, le corps que l’on convoite et que l’on mate sans scrupule, avant de s’en repaître. Ce sont d’abord ses cheveux qui me caressent, balayant mon torse dans un lent mouvement latéral. J’inspire profondément ; le parfum du Muriel ramène à la surface des images lointaines, qui se substituent à ma vision occultée.

Elle m'avait fait la remarque de mon absence d’alliance, j’avais répondu que ça ne s’était pas fait, n’ayant pas trouvé « la bonne ». À mon tour, je l’avais interrogée. Avait-elle un mari, des enfants… des animaux ? Elle avait eu, avant de divorcer il y a quelques années. Depuis, même si ça lui manquait parfois, elle vivait sans mec, se déplaçant de villes en villes au grès des missions confiées par la boite. Une ombre avait voilé son regard, terni son sourire. Sujet sensible, part sombre à éviter…

Ses doigts me pétrissent, me cajolent, je la sens affamée de ce pouvoir nouveau qu’elle détient sur moi. Muriel peut tout exiger, tout contrôler et visiblement elle se délecte de ce qu’elle va me faire subir. Elle palpe mes biceps, griffe légèrement mes pectoraux, glisse le long de mes côtes. Le moindre geste m’étant interdit, je ne peux pas me dérober. Alors, mordant mes lèvres, je la laisse agacer ma chair, retracer mes formes du bout des doigts dans la nuit qui est la mienne. Je me retiens de frissonner, d’exhaler le moindre soupir, la moindre supplique, même au moment où elle se saisit enfin de mon sexe.

On s’était revus plusieurs fois. Dans des bars, des restaus, puis enfin au ciné, occasion rêvée de la raccompagner chez elle. Elle ne m’avait pas proposé de monter, mais ne faisait pas non plus mine de sortir de la voiture. Certain que le moment était venu, j’avais approché mes lèvres. Elle m’avait gentiment repoussé avant de m’expliquer ses déconvenues répétées, la perte de confiance envers les mecs autant qu’en elle-même... Bien sûr, le sexe représentait un manque criant, mais la peur de laisser un homme la blesser encore était plus forte. Alors, petit à petit, j’en étais venu à lui proposer cet étrange marché qui répondait à chacune de ses objections…

Pleinement consciente de sa toute puissance, Muriel me branle lentement, caressant mes bourses, titillant le frein de mon sexe décalotté. Elle approche son visage, hume l’odeur de ma bite, cette odeur qui la fait sûrement chavirer. Si comme elle l'a dit elle n’a pas baisé depuis le 1er janvier, ça doit la travailler. Une langue impertinente vient soudain effleurer mon gland, éprouver la délicatesse de sa peau tendue à rompre, avant de sillonner ma hampe avec une lenteur d’escargot. Je m’abstiens de cambrer les reins ; lui imposer ma verge est impossible, elle ne la sucera que si elle le décide.

Lui vantant la thérapie du sexe pour le sexe, je lui avais juré qu’elle pourrait s’arrêter à tout moment, que nous n’irions pas au-delà de ses désirs. Je mettais mon corps à sa disposition pour qu’elle assouvisse en toute tranquillité ses manques. Je lui promettais de ne pas broncher, de ne pas la brusquer, de ne pas même lui parler, si c’est ce qu’elle souhaitait. Elle complexait sur ses hanches trop larges, ses seins trop petits ? Je ne la regarderais pas. Bien sûr, c’était possible ! Il lui suffisait de me bander les yeux…

Elle se redresse, m’enfourche en tendant sa poitrine vers ma bouche. La pointe érigée d’un mamelon s’écrase sur mes lèvres, les force à s’entrouvrir. Je sais ce qu’elle attend de moi : gobant ce téton bandé, je le suce avec tendresse jusqu’à la faire geindre. Un fluide chaud et visqueux goutte sur mon ventre ; Muriel, qui mouille sur moi… Elle descend souplement ses hanches jusqu’à poser sa fente sur la colonne qui se tend un peu plus bas. Tout en glissant avec délice sur ma tige fébrile, dans un clapotis éloquent, elle m’embrasse à pleine bouche. Vissant sa langue à la mienne, elle positionne son sexe de façon à englober mon gland, s’immobilisant pour savourer l’intromission.

Stoppé net à l’orée de sa chatte, je me retrouve prisonnier d’une insoutenable douceur… L’instant qui s’éternise me conduit au comble de la frustration. Que cherche-t-elle à prouver ? Son pouvoir sur moi ? Les limites de ma soumission volontaire, en espérant que je vais faillir afin de continuer de voir les mecs comme des traitres et des menteurs ?

Fidèle au rôle de gode vivant auquel je me suis astreint, je bande ma volonté pour conserver mon immobilité de statue, repoussant la ténacité à ses limites extrêmes. J’ai l’impression de sentir vibrer ma bite, en équilibre instable au bord de son gouffre...

Soudain Muriel s’enfonce sur mon pieu. Pas le temps de se poser de questions, ma partenaire me pompe à tout allure, au rythme fou de ses cuisses d’acier. Avec un pareil traitement, je ne vais pas tenir ! Contre toute attente, elle jouit avant moi, dans un orgasme puissant qui masse de façon exquise ma bite contre les parois de son vagin.

Puis elle se retire dans une glissade gluante, me laissant une sensation amère de faim inassouvie. Mon sexe pulse à vide, au bord de l’implosion… Des froissements de vêtements qu’on enfile à la va-vite, puis une bouche me susurre à l’oreille :

- Je vais te détacher une main, mais n’en profite pas. C’est pour que tu puisses te finir pendant que je regarde.

Toute honte bue, je me branle pour elle, et finit par gicler longuement sur mon ventre, entre mes doigts crispés.

Plus un bruit dans la pièce. Hagard, je retire mon bandeau. Je suis seul. Muriel a filé, avec au creux des cuisses le bonheur du plaisir volé…

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