INSOMNIA

Aux trois heure trente, et nocturnes folies. Et quatre, en exhalaisons-maladies. J'entrevois d'une fenêtre bardée de lames de métal gris, en une froide nuit, le monde inactif. Ça dort, dans les foyers des accomplis. Le marchand de sable modernisé ne sème plus les graines rouges des torpeurs alanguies. Il est dealer, aujourd'hui. Il annihile, en cachets blancs, les insomnies. Ça vit, pourtant, chez les tordus, les hommes encore, les incompris. En chiens sauvages du nord, les marginaux réfutent, refusent un sommeil qui se fait lien entre deux soumissions cruelles. Comme ils ont les traits tirés, ces malades irréels, comme leur peau est grise, leurs crocs ternis...Pour mieux se dévorer, ma belle! Ils lèchent les minutes de nuit, pesant en tabac crépitant, en gouttes d'ambres et étincelles, le prix d'un suicide immédiat, choisi, puisque le soleil ne se lève que pour ceux qui l'observent...La rage en bulles d'étoiles, au carrefour de chaque articulation noire, les fureurs blanches fulminent, s'engoncent aux supplices, en diamétralgies douces. Dormir pour vivre encore...C'est cela ? Soit la bêtise, pour paraître plus homme ! L'alanguissement, en vérité, est un combat, pièce au double-tranchant, qui vous assomme autant qu'elle vous sauve. Bercé d'illusions tendres, au contact de bras qui ne vous enlaceront plus jamais. Apaisé d'une vie que vous auriez souhaité...Convenez, au lever du jour, combien dépit et nostalgie vous font haïr votre capacité à rêver. Ou...forcé de courir, de fuir et de pleurer, ballotté dans l'obscur, l'horreur, et le cerveau vrillé, malheureux mûri des cauchemars, vomit plus le matin, qu'une femme engrossée... Au marginal de la vie dite vraie, effrayé par le jour, et mange-mort au coucher, au funambule d'un éther morne, qui refuse d'en finir, pour simplement, ne pas blesser. À toi, visage creux, crinière de paille enténébrée, oui, toi, qui bouge dans le miroir quand je veux t'échapper. Toi. Sais-tu ce que je crie, aux dernières heures du noir? Il ne faut pas dormir. Jamais.