JENNIFER

Jacques Daillie

Jennifer était une grande belle femme... Je l'ai repérée dans les allées des tuileries. J’ai décidé de l’aborder…

Perchée sur une paire de ces godasses à semelles épaisses et talons de 10 cm, elle paraissait encore plus grande. Elle se déplaçait pourtant avec élégance. Et nonchalance ! Elle se dandinait devant moi et tout d'abord, je ne vis que ses longues jambes. Gainées de noir, elles s'échappaient de sous une jupe, également de couleur noire, courte mais très " classe ". Le haut, très sage, était une chemise flottante, écarlate. Sa chevelure, ramenée en arrière par une pince en simili-écaille était châtain sombre avec des reflets fauves foncés.

 

Je la dépassai pour pouvoir l'examiner, tandis qu'elle ondulait à me donner le frisson. J'avançai rapidement, puis je me retournai.

 

 

C'était une femme d'une  quarantaine d'années, au physique agréable. J'aime les femmes avenantes et plus âgées que moi. Quand elles ne sont pas godiches, elles ont de l'expérience et je suis rarement déçu.

Celle-ci  semblait avoir  le corsage plutôt plat. Ça ne me découragea pas ! Souvent ces dames-là sont furieusement sensuelles. Pour tout dire, cette nana aux allures de grande bourgeoise apparemment pas coincée, me semblait fort séduisante. C'est bien cette Dame que j'avais l'intention d'inviter ce soir-là. 


Quand je repassai, après m'être à nouveau retourné, la belle s'était assise sur un banc. Elle me fit un sourire entendu. Je lui souris à mon tour en la saluant d'un signe de tête. C'est elle qui prit l'initiative, preuve que la bourgeoise était bien libérée.

" Ai-je subi l'examen avec succès ? 
- Pardon ? 
- Oui, j'ai bien vu que vous m'avez évaluée, en vous retournant après m'avoir dépassée... 
- En effet, je dois reconnaître que j'ai voulu voir la Dame qui évoluait devant moi avec autant de grâce et... 
- Et vous n'avez pas été déçue par mon âge qui doit être près du double du votre ? 
- Là, vous exagérez ! Pour me flatter! J'ai tout de même près de trente ans et... 
- Et moi, bientôt quarante-cinq ! 
- De nos jours, c'est le bel âge pour les dames ! Je vais vous faire une confidence : je trouve les dames de votre âge très intéressantes ! 
- De quel point de vue ? 
- Mais de tous ! L'expérience est une qualité irremplaçable...Et, souvent, les dames de votre âge sont à l'apogée de leur sensualité ! 
- Nous y voilà ! C'est bien cela qui vous intéresse, n'est-ce pas ? 
- Franchement, oui ! Et si vous y consentiez, je vous draguerais volontiers. 
- Voilà qui est direct... 
- Puis-je me permettre, si vous êtes libre, de vous inviter à dîner. Il sera bientôt 21 heures. Si cela vous convient, nous pourrions aller à la Closerie. 
- Cela me convient tout à fait, j'habite justement Montparnasse, mais je doute que nous puissions y trouver une table... 
- Pas de souci, j'ai déjà retenu ! 
- Vous saviez que vous alliez me rencontrer ? 
- Bien sûr ! Il n'y a pas de hasard, seulement des rendez-vous, disait le poète. "


Après le repas, elle m'invita à prendre un dernier verre.

"J'habite tout près, rue de Rennes. "


                                                                                                                  Ce fut parfait... La Dame savait merveilleusement gouverner ses effets. Et donner du temps au temps.




Lorsque je la quittai, elle me dit : " Sans le savoir, tu as bénéficié du savoir faire d'une pro. Des mecs qui me désirent, je n'en manque pas. Et ils me font vivre royalement. Alors, de temps en temps, je m'offre un extra, comme ce soir. J'adore me faire plaisir avec un jeune et beau mec… Tu auras passé une soirée d'exception qui ne t'aura coûté qu'un repas à la Closerie. Mais si tu veux me revoir, voici ma carte ; ce sera avec plaisir, mais au prix fort. "

Le lendemain, j'ai retrouvé sa carte. Elle disait, sobrement : « Avec Jennifer, vous connaitrez tout ce que vous n'imaginez même pas.  Sur rendez-vous uniquement. Par téléphone 06 57 xx yy zz »

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