Joker

Alexia Arnault

Joker est un chat de la forêt comme les autres, ou presque... (cf La Guerre des Clans (forums, saga))

Dans une contrée lointaine, très lointaine...Non en fait, ce n'était pas si loin que ça, juste à une centaine de kilomètres de la Forêt de Cerfblanc. À cet endroit se trouvait une autre forêt, plus étendue celle-ci, avec des arbres, des sapins gigantesques, et au milieu de la forêt, une clairière à l'herbe rase sans qu'aucun humain n'y touche, et en son centre un chêne immense, probablement centenaire. Cette zone était évité des animaux, comme des plantes et des hommes, eux pourtant si téméraires : en effet, il se dégageait un on-ne-sait-quoi de pas très rassurant, une sorte d'énergie étrange s'en échappait.


C'est dans cette forêt que tout va se dérouler, jusqu'à Son exil.


Commençons par le début.


Ce jour où Il naquit était, à priori, un jour d'été tout à fait banal. Au matin de cette journée se promenait une chatte qui attendait des petits. Elle était de sang pur des chats de race (ou pas). Elle était d'un gris clair éclatant avec des yeux bleus tels des saphirs. Cette douce chatte avait son caractère bien à elle : hautain, sûre d'elle à tout instant, un peu une Cléopâtre quoi ! Elle répondait non pas du nom de Cléopâtre, mais à celui de Sabbat. Elle se promenait donc dans cette superbe forêt entre les touffes d'herbes, de buissons et de fleurs, en prenant soin de ne pas s'approcher de ce qu'elle appelle la "Zone Interdite". Voyant le soleil décliner à travers les branches, elle se dirigea vers une vieille cabane à l'aspect banal. Banale de l'extérieur, mais pas à l'intérieur. Dès qu'elle franchit le seuil de la porte celle-ci claqua et la clef fut tournée. Les odeurs la happait et lui fit faire des grimaces de dégoût. Les miaulements déchirants lui firent mettre les oreilles en arrière :


-"Sortez-moi de là !"
-"J'ai mal, laissez-moi partir !"
-"Pourquoi vous nous faites ça ?"


Sabbat fut soulevée du sol et placée dans une cage légèrement plus grande que les autres, la spéciale attente de petits. Elle soupira et ne se joignit pas aux autres, cela ne servait à rien car personne ne passait, la cabane était trop proche de la zone pour que quelqu'un y passe. Fatiguée, elle s'endormit, dans le bruit comme d'habitude, et en se demandant quel sort aurait les futurs petits.
C'est au beau milieu de la nuit, une nuit orageuse avec une pluie torrentielle et des éclairs qui fusaient de partout, qu'elle fut réveillée par des spasmes. Les autres chats se réveillèrent et comprirent qu'ils devaient faire ramener ces tueurs en blanc pour Sabbat. Bon ce ne fut pas bien utile pour elle, elle s'en sortait mieux sans eux : quand ils arrivèrent, ils virent à la lueur des lampes à gaz une portée de cinq chatons près de numéro 54. Bien qu'ils n'aient pas de cœur, ils étaient néanmoins attendris et nettoyèrent la cage en prenant soin de ne faire aucun mal aux numéros 123, 124, 125, 126 et 127 et les placèrent avec Sabbat dans une cage encore un peu plus grande. Ils partirent, le calme, mis à part à l'extérieur, revint, tout le monde se rendormit.


Environ trois semaines plus tard, les petits ouvrirent les yeux, ils auraient préféré ne jamais les ouvrir, dans leur tête rien que ces trois semaines de lamentations, de cris, d'odeurs de sang, toute cette torture non visuelle leur avait suffi pour le restant de leurs jours. Ils découvrirent leur mère pour la première fois, dont le caractère avait changé depuis leur naissance : surprotectrice, agressive. Elle ne voulait pas qu'ils subissent le même sort que les autres, ni qu'ils restent ici pour toujours avec un simple numéro donné par ces tueurs de chats.


-"Ecoutez-moi bien vous cinq. Ne retenez jamais ces numéros mais le nom que je vais vous donner, ne soyez jamais séparés non plus. Toi, ma petite grise, tu devras retenir que tu t'appelles Topaze. *acquiescement de tête* Mon cher gris aux yeux d'ambres ton nouveau nom sera Astre. *d'un air grave il approuva* Mon cher petit *elle lui lèche le haut de la tête* qui me rappelle ton père, tu te nommeras Xenon *le blanc aux yeux vairons sourit* Toi, ton nom sera Gamma *un autre chaton gris approuva* Enfin, ma petite qui a pris nos deux couleurs, retiens le nom de Colombe *elle ronronna pour acquisser*."


Les premières heures, une fois leurs yeux ouverts, furent terribles. Astre cachait les yeux de Colombe, Topaze se cachait derrière Gamma, Xenon fermait les yeux, tous se tenaient derrière Sabbat. Plusieurs fois ils virent ces hommes devant eux qui les regardaient, l'un d'eux plus particulièrement, on eût dit qu'il était triste parfois dans son regard, l'autre était excité et ne voyait en ces chatons numérotés que des fourrures, des futurs cobayes, et les trois autres se fichaient des bébés.

Chaque jour, ou plutôt chaque seconde passée au sein de cet endroit qui sentait la mort était un supplice pour chacun des chats présents, plus particulièrement pour les petits. Chaque jour au moins un chat ne retournait jamais dans sa cage, tout était nettoyé à fond, et il était remplacé dans la même journée ou une semaine après. Souvent quand un homme sortait fumer, on pouvait entrevoir le salut : la forêt. Mais comment y accéder derrière ces barreaux ? Seule les chattes attendant des petits avaient droit de sortir une fois par jour, mais devaient revenir : un collier traceur/émetteur leur était mis à chaque sortie et enlevé à leur rentré. Un jour une des chattes n'était pas revenue : deux hommes l'ont ramenée morte, et pas très naturellement au vue de son état. Toute fuite était donc inutile. Il fallait se résoudre au sort qui les attendait, mais se manifestaient la journée au cas-où quelqu'un d'autre que ces hommes passaient dans les environs.


Un an plus tard, ils furent séparés tous les six dans des cages minuscules. Mais heureusement ils étaient les uns à côté des autres à l'exception de leur mère. Six mois plus tard, précipitamment, les hommes descendirent toutes les cages (environ 300, puisque chaque chat était remplacé par un autre, seul le numéro change) par un escalier en colimaçon et les chats furent enfermés dans une pièce sombre et sans odeur particulière. Ils étaient en vrac comme des sacs à patate, et la fratrie était séparée par des dizaines de cages. Aussi pour passer le temps ils parlèrent avec leur voisin, leur demandaient combien de temps ils étaient enfermés, d'où ils venaient avant, etc.. Soudain la porte s'ouvrit, et ils furent remontés là-haut : une odeur inconnue flottait dans l'air, une sorte de parfum fleurie. Et au milieu d'une table, un chat. Ou plutôt, une chatte, au pelage brun tigré de noir, enfermée elle aussi, avec un désespoir dans son regard bleuté. Xenon eut ce qu'on appelle "le coup de foudre" directement. Elle avait l'air tellement douce, tellement fragile. Les cages furent réalignées, la fratrie n'était donc plus réunie. Mais avec joie, Xenon senti que la nouvelle avait été mise à ses côtés.


-"Hey comment tu t'appelles ?", lui demanda-t-il.
-"Qu'importe comment je m'appelais, mon nom ne veut plus rien dire à présent que mon maître s'est fait entourloupé de cette manière. Si les hommes avaient notre odorat, jamais il n'aurait mis les pattes dans cette cabane.", répondit-elle d'un ton las.
-"Si tu veux, je peux te donner un nouveau nom, un nouveau départ mérite un nouveau nom."
-"J'aurais bien voulu éviter ce nouveau départ qui ne sent que la mort et la souffrance. Tu es bizarre.", lui reprocha-t-elle.
-"Je te promets qu'on sortira de là, vivants. Je te le promets. Mais avant, laisses-moi te donner un nom s'il te plaît."
-"Si cela t'amuses tant, vas-y, donnes-moi mon nom de morte."
-"Mélopée. Tu t'appelleras Mélopée, si jolie et triste à la fois.", annonça-t-il après quelques instants, les yeux remplis de tendresse et d'amour.
-"C'est joli... Merci... Tu as un nom ?"
-"Xenon, je m'appelle Xenon."
-"Eh bien, merci Xenon, c'est gentil d'essayer de donner de l'espoir dans cette cabane sombre.", lui dit-elle en souriant.


Ils s'échangèrent encore quelques mots, et elle s'endormie, roulée sur elle-même, sous le regard amoureux de son nouvel ami. Malheureusement, cette scène n'avait pas échappée à quatre des cinq hommes qui retenaient les cobayes et futures fourrures. Ils voyaient déjà encore que grâce à cela ils pourraient avoir des petits qui grandiraient et qui deviendraient eux aussi de belles fourrures pour les dames riches qui se battraient pour les avoir. Tel était le projet dans cette cabane.
Xenon n'était pas fou. En effet il souhaitait que ses futures petites boules de poils soient portées par la douce Mélopée, mais pas dans la situation actuelle. Il fallait qu'ils sortent d'ici.


ELLIPSE TEMPOREL DE QUATRE ANS ENVIRON


Après des jours de marche, il sût qu'il était enfin arrivé au bon endroit. Jamais il ne s'était retourné, cela aurait été trop douloureux. Face à lui, une immense forêt, il sentait la nature, les animaux, les plantes, la brise de vent, il entendait cette même brise dans les branches qui venait lui chatouiller les moustaches, des souris, des murmures lointains : on parlait quelque part. Oui, il avait vraiment trouvé, encore, le bon endroit pour s'installer et vivre comme un roi. Il souhaitait qu'une chose, qu'ils paient tous le fait qu'ils soient en vie, et pas EUX !


Depuis sa rencontre avec Mélopée, et la mort de ses sœurs, sa mère et SA Mélopée, il n'était plus le même. Il avait perdu la raison. Il voulait savoir ce qu'il avait fait pour mériter une douleur si aiguë. Suite à ces événements, il était parti de cette cabane sans se préoccuper des autres, de ses frères, des hommes en blancs. Il était parti de cette forêt mystérieuse chargée d'énergie de tous ces morts. Parti sans jamais se retourner, sinon il aurait craqué : il ne devait pas craquer, ce n'est pas ce qu'aurait voulu Mélopée.  Mais elle n'était plus là, ils la lui ont enlevé sauvagement.

Son esprit avait déraillé. Ceux qui ont croisé son chemin l'ont bien vu, mais certains ne sont plus là pour en témoigner. Avec cette nouvelle forêt, il voulait accomplir de grandes choses, une ère d'effroi, de peur, mais aussi de justice, sa justice bien sûr. Il voulait faire son propre petit groupe de la terreur. Mais pour l'instant, il devait patienter, attendre dans l'ombre, rencontrer les êtres qu'il pouvait comprendre à la parole. Avec un sourire charmeur et terrifiant à la fois, il se parla à lui même, du haut de cette colline enneigée sous un vent glacé.


-"Le Joker arrive. Patience."

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