Jour 1

Oriane

Il y a des jours avec et des jours sans. Pas toujours facile de gérer ses hormones quand on est une femme...

Certains matins je me lève et je sais que ce jour ne se déroulera pas comme une entrée explosive de Beyoncé au Superbowl. Premier regard dans la glace, constatation des dégâts : deux traces violacées entourent mes yeux, un peu de démaquillant au cas où mon mascara de la veille aurait coulé (et oui les 5h30 de sommeil de la nuit passée me rendent quelque peu irrationnelle), pas de chance ce sont de vraies cernes. Reste encore l’espoir de la douche. Un peu d’eau tiède, presque fraîche, sur le visage et hop je crois pouvoir me transformer en égérie L’Oréal. Malheureusement l’option « Photoshop » n’a pas été installée sur mon miroir. Grosse déception. Recours ultime : le maquillage. Petit problème le résultat n’est pas très concluant, les cercles violacés prennent un aspect blanchâtre, un peu pâteux loin des slogans publicitaires « vous venez de vous taper une nuit blanche ? Nous avons LA solution : utilisez revitalise-ta-faceet voilà vous êtes rayonnante ! ». A croire que les publicitaires devraient se reconvertir dans la comédie. Et en plus on sait TOUTES que les cernes ne sont qu’un désagrément parmi d’autres : teint jaunâtre, haleine âcre, boutons, etc. Autant de problèmes qui me découragent et me poussent à ne rien faire si ce n’est de limiter les dégâts. Un peu d’anticernes, un bon petit déjeuner, un brossage de dent intensif (et des tic tac dans le fond du sac, soyons réalistes ce n’est pas le dentifrice Carrefour qui fera effet jusqu’au déjeuner) et surtout une inspection méticuleuse de mon miroir qui est forcément déformant –seule explication plausible pour que mon apparence soit à ce point différente d’un jour à l’autre-. Ma seule obstination : les cheveux. Ces matins là je sais d’avance que passer trois ou trente minutes à me coiffer ne feront aucune différence, voire j’aggraverai mon cas quitte à être, en plus, en retard au travail. Mais mon naturel utopiste me pousse à me lancer dans une aventure gargantuesque. Quinze minutes plus tard et un désastre capillaire sur la tête, les larmes commencent à me monter aux yeux et j’ai envie de shooter dans tout ce qui se trouve à proximité de mon pied et peu importe s’il est 7h30 du mat’ et que je risque de réveiller l’immeuble entier. Une réflexion de la part de mes voisins et leur vie risque d’être en péril ! Je prends une minute pour inspirer profondément, ferme les yeux, les rouvre et par le plus curieux des hasards il est 7h50 : je suis en retard ! Toujours en sous-vêtements à observer mon corps qui a très certainement gagné cinq kilos en une nuit, comme cela se produit assez fréquemment dans le cerveau des filles en manque de sommeil. Il faut maintenant choisir des vêtements mais à ce stade peu importe, même la plus mignonne des robes fleuries paraîtra difforme. Enfin prête, je sors en quatrième vitesse de mon appartement et me rend compte, une fois arrivée dans le hall d’entrée (soit quatre étages plus bas) que j’ai oublié une chose vitale (oui tout objet oublié ce jour-là est indispensable !). Hop hop remontée des escaliers, évidemment mes clés sont tombées au fond de mon sac. J’attrape « l’objet », je dévale les escaliers, me précipite dans la rue, saute dans le bus, paie, trouve éventuellement un siège, respire et me rend compte que tout le monde m’observe comme si j’étais une bête curieuse. En effet, je dois avoir perdu au moins trois litres d’eau autant vous dire qu’à ce stade le déodorant « tenue 48h » ne fait déjà plus effet. Essoufflée comme si je venais de faire le marathon de New York, j’essaie de reprendre mes esprits et ai la mauvaise idée de me regarder dans la vitre. Même flou mon reflet ne présage rien qui vaille. Direction les bureaux, moment fatidique : le regard de mes collègues. 1, 2, 3…et là ça ne rate pas, une collègue (oui souvent c’est une femme) fait LA remarque : « tu as l’air fatiguée aujourd’hui ». Mon air aimable et ma gentillesse prennent le dessus et là je lui fais un tel sourire, un sourire qui envoie un seul message : « TA GUEULE ! ». La journée de boulot peut enfin commencer et se résume assez simplement : j’envoie tout le monde balader –je fais quand même un petit effort avec mon boss– je ne pense qu’à trois choses : partir me terrer sous ma couette, prendre un bain chaud, me retirer de la civilisation.

Retour à la maison difficile, les vingt minutes de bus me donnent l’impression d’avoir effectué un road-trip aux USA. Et comme-ci cela ne suffisait pas, une fois arrivée à la maison, prête à manger la moitié de mon frigo, je m’aperçois que je risque vite de perdre les cinq kilos que j’avais cru gagné pendant la nuit : je n’ai plus rien à me mettre sous la dent ! En général ce moment provoque des réactions bizarres, mon corps se met à faire des choses que je ne serais pas en mesure de reproduire en temps normal. Le supermarché le plus proche est à vingt minutes de marche, je dis stop. Seule solution : prendre un bon bain, y verser ce produit rose bonbon censé parfumer l’eau et offert par une amie dont le message est assez clair. Allumer l’iPod et choisir la playlist « à n’utiliser qu’en cas de dépression intense ». Se détendre. Une fois que l’eau commence à tiédir, je sors de mon bain et enfile le peignoir le plus confortable et girly qui existe, tellement d’ailleurs que je me prendrais presque pour un Ange de Victoria’s Secret. Autant prolonger le délire en enfilant ce nouveau shorty qu’il m’avait semblé vital d’acheter quelques jours auparavant parce qu’ils faisaient 25% dessus, sur 100€ ça fait quand même une culotte à 75€ autant dire qu’à ce prix elle ne peut que me faire sentir sexy. J’allume mon ordinateur et matte plusieurs épisodes de New Girl (avec Jess on se comprend), je mange ce que j’arrive à trouver dans mon frigo presque vide. Je prends soin de moi : un peu de vernis (c’est prouvé la couleur de vos ongles influe sur votre humeur), je me fais un masque et autres trucs que je ne prends jamais le temps de faire d’ordinaire. J’attrape un nouveau pyjama hyper confortable, je l’enfile, il est 22h30 et me voilà fin prête à dormir et à me transformer en déesse le lendemain matin.

[A suivre…]

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