Journal de Cross, Chapitre 6
[Nero] Black Word
Aidé d'un chiffon pour ne pas laisser d'empreintes, j'avais pris soin de cacher l'objet au milieu d'autres verres avant de retourner à la maison familiale. Mais le sommeil, confronté à mon excitation, eût du mal à m'emporter.
Le lendemain, j'avais préparé une réserve de nourriture ainsi que de quoi prendre des notes, sans oublier mes gants pour ne pas laisser de traces. Il n'était même pas midi que je m'étais déjà crée un bivouac dans les appartements de l'ex-propriétaire. Il fut d'ailleurs difficile de se débarrasser de son cadavre qui polluait d'odeur, de rats et de mouches la cave, mais l'énorme congélateur fut une cachette et un débarras tout trouvé. Au cours de mon installation, je fus surprit de constater que l'eau courante et l'électricité étaient toujours accessibles, mais je ne pris pas le temps de me demander pourquoi.
Le lieu fut dégagé, nettoyé, il ne me restait plus qu'à mener mes tests et confirmer que ce verre, posé sur le sol au milieu de la cave, était à la hauteur de mes espérances. Je devais avoir un cobaye. Fort heureusement pour moi, j'avais pu capturer quelques rats.
Ma première expérience fut de verser un peu du contenu de ce verre dans un couvercle et d'en faire boire un des rongeurs. Mais le liquide refusait de glisser hors de son réceptacle, se figeant comme de la glace en son fond. C'est une fois un rongeur placé à l'extrémité du verre, qu'un peu de cette boisson coula jusqu'à lui et, malgré une certaine réticence au début, il consentit enfin à en boire.
Mis dans une boite en plastique à part, le verre posé juste à côté, il me fallut attendre un bon quart d'heure avant d'observer un résultat. L'animal, qui jusque-là n'avait rien démontré d'intéressant, semblait comme plus qu'intéressé par l'étrange eau. Tout d'abord se collant à la paroi, puis entamant une tentative pour creuser la surface de plastique, avant qu'il ne finisse par mourir de déshydratation.
C'était tout bonnement fascinant. Ce liquide ne se renversait donc qu'en la présence d'un être vivant pour le boire à l'extrémité du verre et il créait une dépendance vitale. Une fois bu, le liquide déshydratait le corps et poussait les instincts de ce dernier à boire davantage.
Ma deuxième expérience fut identique, à la différence que le rongeur avait droit à une capsule rempli d'eau plate dans la boite. La petite bête fut prit de la même soif et vida rapidement sa réserve d'eau avant de tenter sa chance à travers le mur de plastique. Elle resta en vie une minute de plus que la précédente.
La troisième fut elle aussi identique, mi à part sa réserve d'eau qui était cette fois une petite bouteille de 50cl posée du même côté de que verre. Le rat avait percé le fond de la bouteille et bu jusqu'à la dernière goûte d'eau qui s'était répandue dans la boite, avant de s'en prendre elle aussi à la paroi. Elle vécut entre dix et quinze minutes de plus.
Mes notes furent prisent et la journée approchait de sa fin. L'objet pouvant s'avérer dangereux, je choisis de le laisser dans sa cachette et de revenir au lendemain.
C'était si excitant. Si fascinant. Cet objet était unique, et il m'appartenait. C'était mes recherches, mes notes, mes découvertes. Mais quels pouvaient être ces dangers sur l'être humain ? Les effets étaient-ils les mêmes ? L'humain pouvait-il y survivre ? Et si ce n'était pas le cas, combien de temps tiendrait-il ? Les effets étaient-ils différent selon la personnalité ? Le physique ? Les circonstances ? Les antécédents ?
Toutes ces questions me hantaient sur le trajet. Je voulais savoir, et pour cela j'allais avoir besoin de cobayes humains.