Journal du dehors

gossipgirl

Mardi matin, dix heures 15, dans le block 5 du camp d'Auschwitz.

 

Un vieux couple se tient la main. Silencieux, ils parcourent l'exposition d'un pas tranquille, mais grave. Je me souviens alors les avoir vu dans le block 4 tout à l'heure. Ils s'arrêtent devant une vitrine. Le visage de la vieille dame semble s'altérer. J'ose m'avancer de quelques pas. Ce sont des cheveux. Dans la vitrine. Des larmes coulent le long de ses joues. Le vieux monsieur s'approche d'elle et la prend dans ses bras. Il tente de la réconforter de sa voix caverneuse. Je l’entends lui murmurer des mots que je ne comprends pas. Ils doivent habiter ce pays. La langue qu'ils parlent a des accents d'Europe centrale. Maintenant, le couple s'éloigne. Ils rejoignent la sortie. La vitrine aux cheveux est toujours là. Un reflet s'y introduit, puis un autre, et encore un autre. Ce sont des enfants. Je les entends rire, chahuter. Un homme d'une cinquantaine d'années s'approche d'eux. Il les gronde. Leur langue ne m'est pas inconnue. Ils sont français. Les enfants se sont calmés, le silence est revenu. Ils se séparent en plusieurs groupes. Certains passent et me dévisagent. D'autres semblent ignorer quant à mon existence. Dans cette salle, les vitrines se suivent rappelant inlassablement les horreurs du passé. De la vaisselle, des lunettes, des chaussures. Entre deux vitrines se tient une petite fille, qui à mon passage, sursaute. Elle a l'air triste. Elle n'est pas avec les autres. Elle porte une robe verte, et ses cheveux blonds tombent en cascade sur ses épaules. Je lui tends la main. Elle la prend. Comme j'avais pris celle d'un soldat qui me l'avait tendu lui aussi un jour d'espoir.

 

 

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