JOURNEE NATIONALE DE DEUIL...

rocco-souffraulit

C'est à moi que revient cette douloureuse tache, en ce triste jour, de venir à toi pour te dire au revoir, au nom de nous tous qui t'aimions tant, comme toi tu pouvais nous aimer. Cet amour, c'est le même que nous éprouvions pour notre pays, qu’on le veuille ou non, au regard du combat qu’était le tiens, en toute humilité mais aujourd'hui, les larmes sont dans nos yeux, parce que pour te dire au revoir, il nous était juste impossible de le faire autrement. Comment pourrions-nous fêter une telle tragédie ? Tu aurais peut-être aimée nous voir souriant, je le suppose parce que je me dis la même chose quand mon heure viendra, mais je ne peux pas, nous ne le pouvons pas. Quand reviendra t-il ce sourire? Demain, la semaine prochaine ou dans un mois peut-être ? Il faudra la chercher cette lueur, c'est certainement pas la mienne qui sera le porte parole d'un peuple en deuil, à l'instant précis où je te parle, parce que je n'en ai pas le courage, surtout dans un instant aussi critique.

Toi, juste, reniant la religion tout en respectant toutes les croyances, cette force que tu avais pour mettre en majuscule des mots anodins comme le respect, l'éducation, tu était entière, porte parole de la déclaration universelle des droits de l'homme. Que dire, quels mots inventer pour t'exprimer les sentiments que nous avions à ton égard, quel discours d'adieu qui puisse être à la hauteur de ce morbide évènement? Si tu es partie, sache que tu nous laisse orphelin en emmenant avec toi la liberté, l'égalité, la fraternité, tant de choses qui étaient encrées dans mes convictions, sans même trop savoir pourquoi, comme si c'était imprimé dans mes gènes, tant de choses pour lesquels un peuple entier s'est battu. Nous disons donc au revoir à de tels principes idéologiques avec écœurement, c'est sans doute ce qui nous fait le plus mal.

Toi, cause de mon amour pour la vie, je m'octroies le bénéfice d'être ici, à la plus mauvaise place qui soit au monde pour te dire que ton absence va m'être insupportable, mais sans avoir fait de prévision au préalable, je peux t'affirmer que nous partageons tous dans cet hémicycle, le même besoin, celui de te dire que nous t'aimions et que plus rien ne pourra changer, ni même ce désir imputrescible de pleurer ton injuste disparition. En partant, pense a bien fermer la porte derrière toi, ce qui nous attend n'est autre qu'un glacier désertique d'humanité. Tu l'as gagné ton ticket d’entrée pour reposer en paix, avec toutes les souffrances que tu as traversée, ce serait impossible autrement. Tu as gagné cette place à la con au soit disant paradis, même si tu n’y croyais pas plus que moi. Je sais que tu n’étais pas parfaite tout comme moi je le suis, tout comme le moindre individu que nous pouvons croiser au détour des chemins. Je ne suis pas innocent mais les petites trahisons, je te les pardonne. J'admets que la corruption des soit disant grands politiciens, notables et autres, tel un grand un mur qui nous cloisonnerait, nous étouffant pour nous laisser nous débattre dans cette débâcle, nous fusillant à la moindre tentative de passer entre les barbelés, qui nous gouvernent mains et poings liées dans notre quotidien, à coup de lois autant inutiles que liberticides, je ne pense pas que tu en soit la principale responsable. Tu es pour moi cette femme, celle que je n’ai pas eu le temps de connaître à la perfection, celle qui vient d’être foudroyée par l’appel de la mort, par la victoire de l'extrême droite. Me voilà entre deux fronts, fuir ce pays par lâcheté ou rester et battre la gangrène.

Amour de ma vie, si tu m’entends, je te dois beaucoup de choses. Je t’ai vu partir à petit feu pendant toutes ces dernières années, avec les incontrôlables facéties d'un nain au pouvoir, aux stratagèmes pour le moins étonnants, qui t'a juste démantelé durant de biens nombreuses années, mais tu étais quand même là, même sous un gouvernement de droite qui t'a écorché, essayant de te faire perdre pieds, sans personne pour te défendre avec la rage comme il se devait d'être. Je te garderais en mémoire comme quand j'étais petit, élevé entre toi et la religion. J'ai batifolé avec la sainte croix mais non pas par adoration, juste par obligation. Pourra tu me le pardonner? Tu vois, personne n'est parfait, même pas moi.

Si c'est à moi que revient cette douloureuse tache, en ce triste jour, de venir à toi pour te dire au revoir, alors je le fais. Je me sens tout petit face à la vie et ça fait aussi du bien d’être en face de la réalité. Je te dit au revoir ma belle démocratie. Je ne t'ai pourtant pas défendu et je le regrette. C'est déjà trop tard mais, à défaut d'avoir juste le droit de respirer dans un Etat fasciste, sache que dans ma tête règne un bout de toi qui, sans doute, me permettra de continuer vers l'insolente vérité, vers ce même désastre qui nous attend tous si nous continuons ainsi.

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